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Billet de blog 30 juin 2025

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Le nucléaire militaire, une absurdité stratégique au service d’un pouvoir fascisant.

L’art de la guerre continue d’être l’apanage du prince dans notre république monarchique. Le peuple n’est pas sollicité pour décider des orientations stratégiques, et l’État déroule sa politique nucléariste en évitant tout débat populaire. Pourtant cette politique repose sur des pré-supposés pour le moins discutables et sur des réalités indéfendables.

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La période actuelle m’apparaît comme la renaissance d’une absurdité dont on fêtera ce mois d’août le triste anniversaire : la dissuasion nucléaire.

Vladimir Poutine menace l’Ukraine et ses alliés d’utiliser la bombe si le soutien de ces dits alliés dépasse des limites mal définies, tout en utilisant la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijjia et ce qu’il pourrait en faire comme moyen de terroriser les populations concernées, encore traumatisées par l’accident de Tchernobyl. En passant, cela ajoute un danger pour le nucléaire civil à ceux que j’évoquais dans mon précédent billet.

Benjamin Netanyahu et Donald Trump cherchent à affaiblir l’Iran en détruisant ses installations nucléaires sous le prétexte controversé de l’empêcher de vouloir se doter de la bombe. Deux apprentis dictateurs manipulent à grands coups de propagande leurs opinions publiques respectives pour interdire à une troisième dictature d’accéder aux mêmes armes dont ils la menacent. Avec, pour le moment du moins, le succès tout relatif que l’on voit : un peuple iranien ressoudé autour de la défense de son pays et un potentiel nucléaire dont les présupposés dangers ne semblent que bien peu ébranlés.

Inde et Pakistan, deux puissances nucléaires, écrivent de concert leur n-ième conflit pour le Cachemire en se menaçant mutuellement d’anéantissement atomique. Deux pays qui se sont équipés grâce au soutien technologique, financier et diplomatique d’autres nations nucléaires trop heureuses d’exporter leurs controverses en territoire étranger.

Emmanuel Macron propose aux Européens de remplacer la dissuasion américaine par le parapluie français, contre monnaie sonnante et trébuchante, car il le verrait bien se renforcer considérablement sans en avoir les moyens. Et en même temps (!), presque anecdotiquement vu la couverture médiatique de l’évènement, les citoyens français du Pacifique continuent à réclamer réparation pour les conséquences mortifères des essais nucléaires français du siècle passé réalisés sans aucune honte par la métropole dans leur petit coin de Paradis terrestre. Ils finiront probablement par obtenir gain de cause à la mort du dernier rescapé. Emmanuel Macron initie également une relance du nucléaire civil dont les centrales constituent autant de Zaporijjia potentielles en cas de conflit avec une puissance irrespectueuse du droit international (mais a-t-on déjà vu un belligérant le respecter ?). Et dont le fonctionnement paraît incompatible avec le réchauffement climatique et l’assèchement périodique des cours d’eau censés refroidir les réacteurs (mais c’est une autre histoire).

Mes premiers traumatismes d’enfants comprennent les histoires télévisées des bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki, la prolifération des armes nucléaires et la menace récurrente de leur utilisation pendant la guerre froide. Je ne comprenais pas qu’on puisse imaginer qu’un pays (les USA) qui avait déjà utilisé la bombe (deux fois) ne l’utiliserait pas de nouveau à la première occasion, et que son ennemi préféré (l’URSS) ne serait pas tenté d’en faire autant. L’Histoire que nos enseignants nous apprennent au collège et au lycée nous montre que les êtres humains n’inventent pas des armes pour ne pas s’en servir. Je ne connais pas de contre-exemple.

Imaginons que notre président arrive à ses fins (pas les nôtres, il ne nous demande pas notre avis, irresponsables que nous sommes). Imaginons que les pays Baltes et la Pologne signent avec, disons, la France et le Royaume-Uni une alliance militaire qui comprendrait une riposte nucléaire européenne contre la Russie si celle-ci se lançait dans une guerre de conquête de leurs territoires. Qui peut sérieusement parier sur la réaction du maître du Kremlin ? Cela l’empêcherait-il de tenter l’aventure alors que trois nations nucléaires (les USA, le Royaume-Uni et la France) aident l’Ukraine à résister à l’agression actuelle ? Avons-nous réellement les moyens de telles prétentions ? Ces questions se sont posées tout le long de la guerre froide, et si nous savons aujourd’hui que nous ne sommes pas passés loin de la catastrophe, nous savons également qu’elles n’ont pas empêché les grandes puissances de se faire la guerre par procuration.

Il serait raisonnable et certainement bien plus efficace de mettre fin à notre programme de dissuasion nucléaire et de nous préparer à une éventuelle invasion par la Russie d’une partie de l’Europe, en associant fortement les populations européennes à cette éventualité, comme le font actuellement les pays baltes et la Finlande. Il serait temps aussi d’assécher complètement les sources de financement de la Russie dont l’Europe continue à importer une part de son gaz et la France ironiquement une part de son combustible nucléaire.

Le climat guerrier qui s’installe de part le monde ne doit pas nous tétaniser ni nous faire oublier ses véritables motivations. Il cache mal la faillite des politiques sociales et écologiques occidentales au bénéfice de la finance mondialisée, et la fascisation de nos pseudos régimes démocratiques. Nous connaissons les vainqueurs des potentiels conflits à venir : les marchands de canons et les classes dirigeantes économiques ou politiques qui veulent préserver leurs privilèges et continuer à s’enrichir en dépit de la crise sociale et climatique. Les citoyens doivent reprendre en main leur sécurité collective et ne pas faire confiance à un chef de guerre mal élu qui ne les représentera jamais comme il représente la ploutocratie occidentale. L’armée et la défense doivent être contrôlées par les citoyens et nos politiques extérieures diplomatiques, pacifistes et internationalistes. Les états-nation ploutocrates, même « démocratiques », deviennent par essence les bouillons de culture des guerres à venir.

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