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Acteur culturel, auteur, Nicolas Roméas fait aujourd'hui partie de l'équipe de bénévoles du site L'Insatiable (www.linsatiable.org) en tant que rédacteur en chef. Il participe également à la nouvelle revue L'Insatiable papier.

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Billet de blog 30 avril 2015

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Edith Rappoport raconte l'anniversaire de Cassandre/Horschamp

Trois jours pour fêter les 20 ans de la revue Cassandre/Horschamp dans cette précieuse Maison de l’Arbre de Montreuil.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Trois jours pour fêter les 20 ans de la revue Cassandre/Horschamp dans cette précieuse Maison de l’Arbre de Montreuil.

Nous y sommes accueillis par le poète Armand Gatti, Hélène Chatelain et bien sûr l'«amiral» Jean-Jacques Hocquard, qui veillent jusqu’en 2016 aux destinées de cette maison qu'ils ont créée. Le maire de la ville, Patrice Bessac et Denis Vemclefs, chargé du développement culturel, puis notre ami le grand aventurier du théâtre Pierre Debauche, nous rejoignent.
Le bruit lugubre d’une réaffectation de ce bâtiment appartenant au Conseil Général rôde.

On n’ose pas imaginer la suite…

On peut d’abord visiter une exposition d’arts plastiques, des photogrammes d’Olivier Perrot publiés dans la revue,

des photographies de Donietta (belle couverture du n° 100) des peintures de Thierry Cauwet et de Claire Richez, les étranges oiseaux et les dessins d’Alexandra Fontaine.

La dessinatrice Chantal Montellier qui a offert à la revue de très beaux travaux graphiques, est venue nous voir, Robert Abirached notre premier président nous a rendu visite et notre cher ami Thierry Pariente aussi.

Quelques-uns des «souffleurs» du génial commando poétique  animé par Olivier Comte, étaient là (le gros de la troupe est en tournée), et André Chabin, le vaillant animateur d'Ent'revues, et Jean-Christian Grinevald qui anima avec talent le Théâtre de la Main d'Or à Paris, en d'autres temps, et Jean-Louis Sagot Duvauroux qui dirige le Théâtre de l'Arlequin de Morsang sur Orge et Jacques Miquel du Théâtre du fil, la grande militante Fabienne Pourre, Malika Kadri, aède inspirée dont les mots résonnent hors et dans les murs, Marie Vitez, talentueuse marionnettiste et fille d'Antoine, notre cher peintre dyonisien Armand-Julien Waisfisch… Laurence Vielle, en plein spectacle par ailleurs, n'a pu se rendre disponible au moment voulu pour conter, mais elle est venue. Des êtres de grande qualité. De belles retrouvailles d'années en années, de décennies en décennies et, aussi, le passage entre générations. Tous ceux de l'équipe de rédaction de la revue qui le pouvaient sont là, Nicolas Roméas et Valérie de Saint-Do bien sûr, Coline Merlo, très active, Pauline Perrenot, Madeleine Abassade, Bruno Boussagol, Thomas Hahn, Jacques Livchine, Céline Delavaux, Sylvie Clidière, Hédi Maaroufi… Sans oublier l'équipe du bureau, Sébastien, Simone, Aurore, Mandarine.

Charlie et Marc, authentiques magiciens de la lumière et du son, nous concoctent une technique de rêve…

Une première série d’interventions musicales et poétiques  démarre cette soirée d'ouverture brillamment animée par Neobled, Lyor et Rouda de 129h, avec Rodrigo Ramis, Anna Andreotti et Margherita Trefolini,  le malicieux conteur Pepito Mateo, la grande Joelle Léandre et sa contrebasse enchanteresse, ensorcelée…

(j’ai d’ailleurs pu acheter à la table de livres son ouvrage À voix basse, itinéraire d’une artiste singulière), les délicieuses fantaisies musicales de Philippe Guinet autour de poèmes de Victor Hugo, l'humour profond de Charles Piquion, le lyrisme échevelé de Claude Favre, et l'irruption inopinée de plusieurs autres poètes et slammeurs. Bien que d'un genre nouveau, c'est une vraie scène ouverte…

 Julien Blaine vocifère un peu, mais, il faut s'y faire…

Et puis aussi Michel Thion et ses poèmes de L’Enneigement, Séverine Vincent pour l’Art Éclair d’Olivier Brunhes, Jacques Livchine dans son Transsibérien de Cendrars qui fit surgir une passion amoureuse de 50 ans, Laurent Schuh, Dido Lykoudis, Laurent Grisel, qui fera le lendemain, à partir d'un texte sur les méfaits du néolibéralisme, une intervention avec Élodie, fille de notre grande amie la grande conteuse Mimi Barthélémy qui nous a quittés il y a deux ans de ça.

Les mêmes en action

Tous complices de cette revue, ils y ont écrit, y ont été interviewés, ils se mobilisent pour que cette publication précieuse puisse continuer au-delà du numéro 101 publié sur papier, seulement 50 pages au lieu de 100, le reste étant publié sur Linsatiable.org.

 
Samedi, après qu'on se soit réveillés sur les chants puissants des Caraïbes d'un café artistique avec le groupe Melt in Motherland, Anne Quesemand et Laurent Berman font revivre leur merveilleux Théâtre à bretelle, à la fois doucement nostalgique et résolument militant…

Violaine Roméas et Tamara Schmidt (marionnettes et théâtre) entraînent ceux qui le veulent dans d'autres lieux dont la petite librairie Michèle Firk, adjacente (joyau du lieu selon Stéphane Gatti), pour leur raconter de façon plus intime une étrange histoire…

Puis on a droit à une projection de films courts et rares de René Vautier, issus du coffret hommage édité par Les Mutins de Pangée, et des extraits du triptyque Ouverture pour Inventaire, réalisé par Samuel Wahl autour du travail de Brut de béton Production. Cette première journée offre ensuite plusieurs débats roboratifs organisés par l'équipe de la revue. « Autrefois il y avait des jardins à la française, aujourd’hui, l’humain est intubé à commencer par le cerveau. Y a-t-il une alternative, c’est là que le poète doit intervenir. Nous ne pouvons faire société que si nous avons un dialogue avec la nature contre la globalisation. […] Mort aux technologies, pour pouvoir rêver à nouveau, il faut supprimer les ronds-points pour y installer des places».

Patrick Le Bellec et Anne Rivollet présentent Opener Dunkerque, un travail de plusieurs années avec les habitants pour rendre à cette ville le goût d'une nature aujourd'hui disloquée, Madeleine Abassade, débattant en compagnie d'Alain Vasseur de l'association Itinéraires singuliers, de Séverine Vincent et de Bruno Boussagol, évoque le travail de toute une vie consacrée à Art et Psychiatrie à travers le journal de Nijinsky. Elle cite Beckett « Nous naissons tous fous, quelques-uns le demeurent ». Dans un autre débat animé par Valérie de Saint-Do et Nicolas Roméas, Jean-Claude Amara raconte son obstiné travail au D.A.L. pour conjuguer l’art, la création et la lutte.

Dans l'idée de faire revivre une «culture imaginaire» pour ceux qui s’en sentaient dépossédés, ils avaient créé 52 ateliers rue du Dragon avec les Tréteaux de la Colère. Paul Blanquart, philosophe et grand historien de la ville évoque les dangereuses dénaturations transhumanistes qui réduisent l'Homme à une sorte de machine dépourvue d'imaginaire.

Le chercheur et écrivain Olivier Neveux, historien du théâtre militant, qui dirige aussi «G», revue autour de l'œuvre d'Armand Gatti, rappelle que sous nos régimes actuels, tout doit fonctionner comme une entreprise, même l'individu. 

Il faudrait recommencer à faire de la politique, assumer les conflits. L’art est devenu une marchandise, il faut inventer de nouvelles solidarités, notamment avec le peuple grec !

Jack Ralite, entre autres créateur et et animateur des «États généraux de la culture»,  affirme la très grande importance de la parole de ces experts du quotidien que sont les citoyens, Julien Blaine, poète et ancien responsable de la culture de la Ville de Marseille, s'énerve contre les méfaits du monothéisme…

Régis Meyran, chercheur et auteur, replace la culture et surtout l'art, dans une très utile perspective anthropologique.

La lumineuse Marie-José Mondzain nous incite à prêter attention aux mots, à écouter une parole profonde au-delà de toute polémique, la philosophe utilise la belle métaphore des saxifrages, ces plantes qui perviennent à pousser en fracturant la pierre et le béton pour évoquer les artistes qui résistent, ceux dont le geste nous apporte la liberté. Elle a le sentiment d’une terrible trahison, elle rappelle l’évolution du Ministère de la Culture qui s’est transformé en 1983 en Ministère de la Culture et de la Communication.

La loi des experts et des évaluations s’est imposée, nous avons été soumis à la loi du marché, une trahison totale des objectifs de la décentralisation. Un geste artistique nous donne la liberté, tout le monde a droit au regard, il faut construire des rapports avec l’invisible, faire de l’infusion culturelle. Il faut nous inspirer des saxifrages. « Invente ou je te dévore ! ».

Le soir on a droit à un concert magique des talentueux Marseillais Nielo Gaglione, Sam Karpienia et Malik Ziad, des fameux groupes Dupain et Naïas…


Dimanche matin, miracle, il y a du monde… Lazare fait une intervention décoiffante en compagnie de Franck Williams guitariste et Bianca Iannuzzi chanteuse, avec une belle rage poétique et musicale. Michel Thion qui passait par là avec sa neige, la dépose doucement au milieu de ce savant chaos…

Claire Richez entraîne les gens, un par un, dans la salle mitoyenne et leur donne de l'encre et du papier pour qu'ils dessinent des arbres.

Le débat s'ouvre : «Combat de l’art dans la société marchande». Introduit par Bruno Boussagol qui évoque son refus de continuer à solliciter des subventions auprès des experts de la DRAC de sa région après plus de 30 ans de spectacles et d’un patient travail avec des enfants en hôpital psychiatrique. Il continue d’explorer Tchernobyl, 29 ans après la catastrophe nucléaire qui poursuit ses ravages. Michel Thion, après 30 ans d’action culturelle, mène son combat pour la poésie, contre une novlangue qui empêche de penser. Il participe au combat d’un syndicat de «poètes qui vont mourir un jour» mais peuvent être lus de leur vivant, pourquoi pas ? Thierry Cauwet n’est pas dérangé d’être récupéré par la société marchande. Il ne faut pas se figer, perdre le sens, on doit conserver la notion de résistance et d’engagement. L’avenir de la création appartient à ceux qui ne la pratiquent pas, puisqu’ils se penchent sur vous, laissez tomber. La liberté de création est ébréchée, on a trop oublié le public. Il faut se souvenir de l’avenir…


Jeanne Poitevin qui fait du théâtre en prison, aux Baumettes, et combat à Marseille pour l'art contre une société du mensonge, évoque Camus qui l’a aidée à penser. Les institutions se méfient de la liberté. Claire Richez parle du formatage, la prime au meilleur ficeleur de dossier. Elle parle aussi d'amour, de l'amour comme moteur de l'art…

 
Patrick Le Bellec et Anne Rivollet reviennent en détail, images à l'appui, sur le projet Opener Dunkerque, dans toutes ses dimensions humaines sociales et politiques… 

Et Brigitte Mounier nous offre son joyeusement délirant et très instructif Democratia participativa qui parle de théâtre, de corps et de révolution…

Parsemée d'images, Emmanuelle Rigaud raconte avec son corps les danses tsiganes des Rroms et autres habitants de Montreuil avec lesquels elle crée et vit.

Et pendant ce temps se déroulent à côté des ateliers d'écriture avec grands et petits…

Et une merveilleuse équipe qui ne cesse d'être présente pour tous

Un cuisinier de rêve et des marmitons de légende

(sans oublier les bénévoles qui ont œuvré sans relâche dans l'ombre, avec vaillance et générosité)…

Maxime Carasso improvise un poème en acte en s'appuyant sur les mots-clefs du précédent débat.

Hédi Maaroufi nous surprend, il nous fait vivre en direct la transmutation du slammeur-boxeur en poète puissant et délicat.

 La dernière journée qui rassemble bien d’autres intervenants, se clôture en beauté sur les chants sublimes et déchirants d’Angélique Ionatos acclamée, puis ceux de Delia Romanes et de ses musiciens. On danse. Les deux chanteuses amies s’étreignent et chantent ensemble.

Puis le banquet final : un délicieux mafé, parsemé de poèmes, de discours et de chants, servi par une équipe dévouée à une centaine de convives, après avoir nourri pendant 3 jours les spectateurs massés sur les gradins.

À présent il faut se battre pour la publication du n° 102 de Cassandre/Horschamp…
www.horschamp.org

http://linsatiable.org/

https://www.culture-time.com/projet/lart-principe-actif
Édith Rappoport

_______________________

Extraits vidéo des trois jours, réalisation Samuel Wahl

Angélique Ionatos

 Nielo Gaglione, Sam Karpienia, Malik Ziad

Joelle Léandre

Laurent Berman et Anne Quésemand

Charles Piquion

 Lazare, Franck Williams et Bianca Iannuzzi

Delia Romanès (chants tsiganes)

Et d'autres vidéos de ces trois jours ici

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