Pour mes amis Dominique Appietto et Olivier Bonnefoy et pour celles et ceux (adorables et admirables) qui disent ne pas avoir le temps de me lire chaque jour.
Morrissey racontait qu’un jour se rendant à Los Angeles par les airs, il s’était embarqué dans un avion qui se trouva fort secoué par une tempête terrible à l’approche de l’Italie. Le vol, comme on se trouvait dans la zone contrôlée par la tour de l’aéroport Roma-Fiumicino, fut incité à s’y poser sans plus attendre. À bord, la plupart des gens étaient éveillés et n’avaient rien pu avaler de solide ou de liquide depuis des heures. Soudain, une voix se fit entendre qui, des rives du Tibre, appelait à grands cris The Moz. On s’étonne. Ce Moz était Morrissey himself mais peu de passagers le connaissaient par ce nom. Il s’entendit ainsi nommer deux fois sans rien dire, puis la troisième fois, il répondit à celui qui l’appelait, et celui-ci, alors, enflant la voix, lui dit : - « Quand tu seras dans Rome tout à l’heure, annonce que tu ne prendras pas le prochain vol pour Los Angeles ». En entendant cela, tous furent glacés d’effroi. Comme ils se consultaient entre eux pour savoir s’il valait mieux suivre ce conseil lancé à ce Moz ou ne pas s’en inquiéter et le négliger, Morrissey décida que quoiqu’il arrivât au ciel – accalmie ou vents fous – il s’en tiendrait, lui, à l’injonction de cette voix. Or, comme il n’y eut plus, dès le soir, ni le moindre souffle d’air, ni le moindre éclair, mais seulement une pluie fine et régulière propre à révéler l’odeur si particulière des pins et des vieilles et belles pierres de la Città Eterna, Morrissey ouvrit la fenêtre de sa chambre d’hôtel et, déclara, suivant les paroles entendues : - « Je ne reprendrai pas le prochain vol pour Los Angeles ». À peine avait-il fini qu’un grand sanglot s’éleva, poussé non pas par une, mais par beaucoup de personnes, qui durent, deux ans plus tard, se rendre à l’évidence. Les chansons composées par Le Moz en une année à Rome étaient de toute beauté. N.C. (d’après Plutarque).