Mardi 5 avril, Trintignant - Cantat ?

Pour écrire et jouer la musique de son prochain spectacle, Des Femmes - triptyque composé de Les Trachiniennes, Antigone, Électre, pièces où il est, entre autres, question de femmes mises à mort (ou menacées) par des hommes, un metteur en scène de théâtre, Wajdi Mouawad, embauche Bertrand Cantat (chanteur, musicien, condamné en 2003 à huit ans d'emprisonnement pour avoir tué sa compagne, Marie Trintignant, à coups de poings). Ce spectacle est programmé au prochain Festival d'Avignon où France Culture a prévu d'organiser un cycle de lectures de poésie auquel doit participer Jean-Louis Trintignant, père de Marie. À l'annonce de la présence de Cantat en Avignon l'été prochain, Trintignant se retire. Polémique. Voyons voir. Libération: dans un exposé digne d'un manuel scolaire type "La Tragédie grecque racontée aux enfants", Mouawad nous livre la réponse à une question qu'il se posait - Quelle musique pour l'appel à la danse sauvage dans Thèbes dont on parle dans le choeur d'Antigone ? "Réfléchissement", Wajdi, "réfléchissement"... Le Rock'n roll ! Pas con Wajdi ! Et qui donc va faire crier la guitare - T'as pas une idée, Bertrand ? (ils sont copains). Et Bertrand, il dit - Ben moi. Et l'autre - Ben ouais, c'est pas con. Vincent Baudriller (co-directeur d'Avignon), Jean-Louis Martinelli (directeur du Théâtre des Amandiers à Nanterre où le spectacle sera repris la saison prochaine) estiment deux choses. Primo. Que Cantat a "purgé sa peine, payé sa dette et qu'il a le droit d'exercer son métier". Secundo: Qu'il s'agit là "d'un choix artistique" et qu'il n'y a pas trop lieu d'en discuter. Tous "comprennent" néanmoins la réaction de Trintignant. La réaction de Trintignant, on est d'accord ou pas mais enfin, là, au moins, ça parle: "Ce type s'est conduit comme une merde et c'est l'homme que je déteste le plus au monde". Ouf, enfin une voix, un corps. Sur la question d'avoir "purgé sa peine", on est tous d'accord, mais on pourrait se demander aussi si lui, le père, a purgé la sienne. Au sujet du "choix artistique" qui est une sorte de caution donnée à un très grand nombre d'agissements parfois très discutables (mais sur lequel on peut, là aussi, être tous d'accord) on pourrait pafois faire un effort à l'écoute de ce qui se dit. Il ne s'agit là que de suggestions. Mais, in fine, on pourrait se dire aussi que la vie est une chose et que la mort en est une autre. Et qu'associer dans une même manifestation le nom de l'homme qui a donné la vie à Marie Trintignant et le nom de celui qui lui a donné la mort, c'est peut-être ne plus faire vraiment de distinction entre la vie et la mort.