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Billet de blog 12 janvier 2011

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Vendredi 7 janvier, Marius, un Trésor d'Ajaccio

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Ajaccio, un soir de l'hiver dernier. Troisième mi-temps d'une rencontre de football (consternante) Ajaccio - Nantes à la pizzeria de nuit A Scopa. Pizzas et grillades au feu de bois. C'est simple, bon, pas cher et ouvert toute la nuit. Près de nous, un homme noir d'une soixantaine d'années mange un steak-frites. Présence discrète. Gestes mesurés, précis. Il est seul. Mon ami lui demande: - Vous êtes Marius Trésor ? - Oui. MariusTrésor. C'est lui. Le grand Marius Trésor. Oubliée la prestation médiocre de l'Athlétic Club Ajaccien, oubliée notre triste troisième mi-temps d'une nuit d'hiver ajaccienne. On est à Séville le 9 juillet 1982. En demi-finale de la Coupe du Monde face à l'Allemagne. Depuis deux heures, Platini, Giresse,Tigana, Rocheteau, Battiston, Six, Ettori, Bossis, Janvion, Amoros, Genghini et Lopez font danser le Flamenco aux étoiles andalouses. Dix minutes après l'agression du gardien allemand sur notre valeureux Patrick Battiston, Alain Giresse s'apprête à tirer un coup franc sur le côté droit de la surface de réparation allemande. Un petit corner. Sans élan. Hop, direct vers le point depenalty et là, et là, il est là, le grand, l'immense Marius Trésor, les bras grands ouverts - un aigle royal - le poids du corps en équilibre sur son pied gauche et, d'une reprise de volée inoubliable du droit, il troue les filets allemands et nous expédie aux portes du paradis. Cinq minutes plus tard, on y entre avec un troisième but signé Alain Giresse. On pleure de joie. On ne sait pas encore qu'on est à quelques minutes d'un incroyable renversement de situation et d'une chute vertigineuse dans un océan de larmes. La vie est belle. On a vingt ans. On a mille ans. Cette demi-finale, même perdue, c'est définitivement un moment d'enfance pour tout le monde. Même pour les vieillards de l'époque. Et l'un de ses héros est là, l'air un peu triste devant son steak-frites, son pichet de vin et nous. Il accepte que mon ami nous photographie ensemble. Nous le remercions. Il s'en va. On le suit, de loin. Voir Marius Trésor marcher seul dans ces rues d'Ajaccio où il a joué de 1969 à 1972. On l'appelait le libéro antillais ou le libéro des îles. Il entre dans un hôtel modeste du centre-ville et voilà, c'est fini. On regarde le ciel. Pas de lune, pas d'étoiles. Une Porsche passe. Peut-être des joueurs de l'équipe actuelle qui vont danser. Retour à Ajaccio, l'hiver.

(Raconté par mon ami Dominique Appietto).

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