- Un tournoi de foot ? Où ça ?
- Vous voyez le stade des Salines ? Vous avez un long bâtiment bas sur un côté du stade, le tournoi, c'est derrière le bâtiment. Au pied d'un immeuble assez long aussi mais d'une dizaine d'étages. Et puis, c'est simple, vous entendrez crier.
Hop, nous y sommes (à Ajaccio, tout se touche). Sur un terrain de hand-ball en plein air, on joue déjà une demi-finale. Quatre contre quatre. Un goal, trois joueurs de champ. Catégorie "petits". Autour, une cinquantaine d'autres enfants et adolescents déchaînés, quatre trophées gardés par un organisateur débordé, boissons au frais, mamans refaites, un futur proxénète et sa déjà protégée, trois vieilles Sardes hébétées au balcon le plus proche, chiures de mouettes sur les poteaux, au centre, un arbitre, cigarette au bec, chrono de son téléphone portable en main, on l'appelle - Et bien sûr que tu n'entends rien ! Je suis en train d'arbitrer un match ! Rappe...
- Oh monsieur, regardez la faute ! Vous avez pas vu la faute !? Y a penalty ! - Eh non, je l'ai pas vu. Tu vois pas que j'étais au téléphone. Bon, pour qui le penalty alors !? (vers moi) Vous auriez du feu ? Avec toutes ces conneries, j'ai cassé ma cigarette.
Penalty réussi au milieu de la foule en couloir (et en délire) du tireur aux cages . Hurlements...
- Non, non, vous le retirez, j'étais en train de demander du feu.
Une mère presque obèse et décolorée sur des talons sans fin, bouche en chou fleur, lunettes de star - Tire-le encore, Antony, c'est pas grave, mon chéri. Tire !
- Aoh ! Non madame, l'arbitre il avait qu'à regarder ! Il arrête pas de téléphoner.
Cris, mouvement de foule, tout s'arrange, ça repart et c'est fini. Des joueurs se tapent dans le dos comme à la télé, des bagarres éclatent ici et là. Des corps-à-corps pour rire, des coups de pieds moins drôles, des manchettes sournoises et des prises vicieuses. On tombe, on se salit et ça dégénère.
- Aoh, putain, on avait dit pour rire.
Arrêt du match suivant, tout le monde (sauf les mamans, l'arbitre et le gardien de coupes) part en courant à une cent mètres de là - C'est Yassin qui se frappe avec Paul Antoine !!! Deux trois coups mal placés, on s'arrache les joues, une gifle, retour au foot.
Catégorie grands, bons joueurs, festival de feintes (match dans le match: qui en fait le plus), sur la touche, on se cherche des poux, une fois, deux fois, un mot de travers, un geste et ça repart en sucette, les doigts dans les yeux, étranglements, tirage de cheveux, le gardien de trophées m'offre une cigarette
- Vous en organisez souvent des ...
- Non, juste pendant les vacances. Les jeunes, y faut bien les occuper.