La ferme !

Chemin du 6 février 2019

La ferme !

En ces temps de jaunisse sociale, tout le monde hurle. La fracture est nette, franche, sans bavure, et il ne s’agit pas du «mellow yellow» des années 60, le refrain doux doré du chanteur Donovan, qui accompagnait nos fusions charnelles !
Non, aujourd’hui on s’engueule vertement et l’on voit rouge facilement pour un vêtement sans manches que tout le monde a dans sa bagnole et que des citoyens moins fortunés ont choisi de porter au quotidien car ils ne peuvent s’offrir un Eric Bompard citron douillet à 250 balles l’unité. Le gilet jaune c’est un cache-misère plutôt qu’un cachemire à mémère !
Ainsi, chaque jour depuis la mi-novembre 2018, le pékin hexagonal, dont je suis un digne représentant, abboie, beugle, conspue, fulmine, gronde, invective, s’emporte, s’oublie, se répand, et se ridiculise.
«Je vous demande de vous arrêter» s’était agacé comiquement Ballamou, il y a quelques années. Personnellement je vais crier un bon coup, attention :
LA FERME BORDEL !
Et ben voilà, ça va mieux, non ?
Respirez, ouvrez vos poumons, je vous emmène au calme, au cul des vaches, au pays des cochons roses, où l’on se fait petit devant une potée, où l’on s’extasie avec poudre magique et blanc pétillant devant des taulières bien balancées, des matrones très en formes, des roturières tout à fait girondes.
Je veux parler des FERMES BORDEL !

Leur seule présence, en coeur de clairière, en lisière de forêt, en sommet de prairie, vous calme les neurones et vous adoucit le moral. Longues et charnelles, charpentées, mais charmantes, chaux naturelle et chapeau pentu, ce sont des bâtisses ancestrales qui ont pignon sur vue, façade appréciable et faciès affable, elles rassurent, font corps avec le pays naturel, c’est un enchantement, ou plutôt un enfantement permanent : 

« à voir la lourde ferme du Vercors tapie contre terre, on la devine pleine de bétail, de récoltes ...»
Celui qui écrivait cela en 1924 s’appelait Jules Blache. Géographe, et résistant, élève du grand Raoul Blanchard (pape de la géographie alpine), Blache n’avait pas tort et serait heureux de voir qu’aujourd’hui les fermes prodigues du Vercors, quand elles n’ont pas été restaurées par des particuliers, demeurent des lieux d’agriculture moderne, circuits courts offrant viande et fromages biologiques exceptionnels, habitées et entretenues par des éleveurs pionniers, branchés, briefés, brunchés, paysans au sens propre, très méritoires, et méritant d’ailleurs autre chose que le mépris urbain d’énarques haut perchés ignorant la vraie vie.
Et voilà, c’est reparti, je grogne, je suis en rogne, je fais la trogne !
LA FERME MOREL !
Bon, je sors ...
L'astre jaune m’attend , «Mellow Yellow», les amis ...