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Billet de blog 14 avril 2020

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Hier une amie facebook m'a reproché de trop critiquer le gouvernement. Une autre m'a traité de "grande gueule" et m'a demandé de la fermer. Ce sera tout le contraire !

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Pause sur le chemin, 14 avril 2020

Faut-il fermer sa gueule ?

Illustration 1
© Patrice Morel (avril 2020)


Hier une amie facebook m'a reproché de trop critiquer le gouvernement. Une autre m'a traité de "grande gueule" et m'a demandé de la fermer.  Ce sera tout le contraire ! Je vais essayer de vous expliquer le truc ... J'avais comparé le discours de monsieur le président de notre république contaminée à une dose très sérieuse de vaseline.
Avais-je tort ou raison ? Là n'est pas le problème.
La question est : devons-nous la boucler,  nous taire en cette période de crise, et gober en silence le flot contradictoire des paroles venues d'en haut ?
"L'esclave dit toujours oui !", merci Malraux (discours des Glières, 1973) !
En effet, s'il faut attendre la fin de cette foire pour compter les bouses c'est accepter sans broncher d'être assujetti, grognard muet, le petit doigt sur la couture du pantalon. Or, nous ne sommes pas en guerre, c'est faux. Nous sommes au coeur d'un problème sanitaire important dont les symptômes varient d'un citoyen à l'autre. Nous devons donc en parler. Il n'y a pas d'ennemi humain à abattre. Mais des femmes et des hommes à soigner. Nous ne sommes pas des pions, ni des militaires. L'Etat major n'est pas celui de la "Grande muette", nous l'avons élu, nous pouvons le contrôler, c'est même notre rôle.
Alors je parle, j'écris, trop peut-être, mais je m'exprime et ça peut exaspérer ce qui est logique. Je crois cependant que cet exercice est salutaire. Une affaire de résistance en quelque sorte.

Illustration 2
© Patrice Morel (avril 2020)


L'argument second est sanitaire. Il touche à notre équilibre mental. Il est psychosomatique :))
En période de confinement, prendre la parole et donner son avis quand on le souhaite me semble une bonne chose. Cela permet d'ouvrir une porte sur l'extérieur, de s'oxygéner sans masque sur le museau, de ne pas garder ses opinions pour soi, de casser l'enfermement, voire de tisser quelques liens, même fragiles ou éphémères avec d'autres humains, via les réseaux sociaux.
Bien évidemment il y a des risques : on ne se fait pas que des "amis", on en énerve certains, on en perd d'autres, mais ce n'est pas grave car cela permet de respirer et de lâcher sa parole confinée.
Cela permet aussi et surtout, je crois, de mieux se connaître soi-même : est-on objectif, est-on de parti-pris, fait-on preuve de jugement ou d'inconséquence, a-t-on suffisamment d'éléments pour développer une thèse ou tombe-t-on dans le complotisme, le populisme ? Peut-on entendre sereinement les contre-arguments des autres ? Ne sommes-nous pas en train de devenir aigri ou parano, ou au contraire ne sommes-nous pas des moutons acceptant sans broncher la moindre parole officielle ?
Bref, le réseau social peut devenir un miroir à condition que l'on veuille bien se regarder dedans.
Parfois je m'observe dans ce miroir là et je me dis : putain quel emmerdeur tu fais, et je tente de me corriger. Ce n'est pas toujours facile, chacun ayant un caractère plus ou moins expansif, impulsif. Mais si les idées sont là, dans notre tête et surtout dans nos tripes il ne faut pas les confiner, elles. Il est bon de les publier en essayant de les discipliner et de les justifier correctement.

L'ennui majeur avec Facebook est que l'on converse la plupart du temps entre gens de même sensibilité. On tourne en rond, sachant déjà ce que nos "amis" vont dire et comment ils vont réagir.
Mon conseil, si je peux me permettre d'en donner un, serait d'aller visiter le plus possible les sites d'information sérieux, originaux, créatifs, quels qu'ils soient, et de débattre intelligemment au coeur des thèmes proposés avec des gens de tous bords : se faire de nouveaux amis, aux opinions diverses, et les incorporer à notre liste personnelle.
On me reproche souvent de trop réagir, de trop balancer d'opinions tranchées, et face à moi l'insulte affleure ou jaillit parfois sans que mon "opposant" développe le moindre argument censé. C'est le risque à courir, mais parler, discuter, échanger, est naturel. C'est le propre de l'existence. C'est ce que l'on fait dans la vie courante, avec de temps à autre des prises de bec à l'apéro, pendant le repas de famille ou sur le zinc d'un bistrot.
Depuis un mois, il n'y a plus de vie courante, il n'y a plus de repas de famille, il n'y a plus de bistrot !
Donc, il est normal qu'en cette période "d'emprisonnement" les réseaux sociaux tournent à plein régime. SI nous exerçons notre esprit critique et chassons de notre environnement virtuel les indésirables, racistes, intégristes, intolérants, et insulteurs publics, je pense que cette forme de divan virtuel peut se révéler salutaire. Non ?

Illustration 3
Une référence : "le vent se lève, réinventons la vie " (La Gueule Ouverte, octobre 1973) © Patrice Morel (avril 2020)

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