Roc en stock
- 15 juin 2019
- Par Nounours du Vercors
- Blog : Chemins de traverse
Chemin du 15 juin 2019,
Roc en stock

Quand je suis en Bretagne, vient toujours un moment, après quelques jours, quelques semaines, où la montagne me manque. Et inversement, quand je crèche sous les sommets, surgissent régulièrement des envies d’océan et d’horizon liquide.
Ces frustrations de bourgeois gâté, en attendant d’être gâteux, pourraient trouver un apaisement logique en Corse par exemple, où le roc plonge dans le grand bain. Mais si vous relisez mes deux précédents délires sur l’île de brutalité vous comprendrez que ma ligne de poudre est ailleurs.
Bref, je suis le mec, le gonze, le gazier, qui ne sait pas trop ce qu’il veut, oui, oui, je vous entends bien, et vous avez raison !
En cet instant, par exemple, je martyrise mon clavier à la lumière d’une journée mouillée, sous un velux qui suinte le crachin, face à l’Iroise colérique, grise, blanche, déchaînée. Juin tout à l’ouest n’offre pas toujours la météo souhaitée.
C’est la seconde choisie par mes neurones pour déclencher le grand assaut.

Un débarquement s’opère sous mon crâne. Une gigantesque armada prend possession de mes facultés ou de ce qu’il en reste : c’est une flotte chahutée, une légion d’images superposées, une escadre de pics, d’aiguilles, de dents et de dômes, un flot de sensations alpines, un abordage sous la point du Toc ! Je suis barge, plein à ras-bord de cordes, de pitons, de piolets et de mousquetons. J’écope la peur, la sueur, la douleur. Je me lance à mi-cuisses dans le névé, casqué, botté, à fleur de paroi, sur une vire étroite, talons dans le vide, je franchis les obstacles, la crevasse, j’évite les projectiles, les cailloux, les séracs ... C’est mon jour le plus long, et si j’arrive au sommet, ce sera mon D-Day le plus beau...
L’ Overlord du pantouflard !


J’ai vraiment découvert Rochette, peintre, sculpteur, illustrateur, tout dernièrement dans un magnifique petit musée de Grenoble : le musée de l’ancien évêché, en pein centre de la vieille ville. L’exposition qui lui est consacrée dure jusqu’au 22 septembre. Si vous êtes dans le coin n’hésitez pas, c’est gratuit, et ça donne envie de respirer plus haut.
Tiens, une éclaircie... La vitre n’est plus humide, redevenue transparente, des voiles vont et viennent en bordure de vagues et de sable, les falaises émergent de la brume liquide, je redescends sur mer... Quelque part pourtant, derrière un lobe cérébral, bien planqué mais présent, un violon alpestre se fait entendre, et blesse mon coeur d’une langueur monotone

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