Que nous disent les sagesses qui parlent de quelque chose qu'on peut nommer divinité? Qu'elle est partout et en tout. D'où l'on peut en tirer la conclusion que pour ces sagesses la divinité ou l'univers c'est tout un. Certains croient, supposent ou prétendent savoir que “Dieu est mort” et datent la chose, selon les cas et les contextes culturels et civilisationnels la date de faire-part remonte à plus d'un millénaire où à quelques lustres, la date de décès à deux millénaires ou à moins de quatre-vingt ans avec une bonne option pour un décès entre fin du XIV° siècle et début du XIX°, ce qui laisse encore de l'incertitude sur le moment de la chose. J'ai un autre moment à proposer, avec de nouveau forte incertitude: entre le début et la fin du deuxième millénaire avant l'ère commune, et une bonne option pour alentour du milieu de ce millénaire. Pour le lieu c'est moins évident, il semble être mort en plusieurs à peu près au même moment. Mais la date ne semble pas si évidente, d'après mes informations il serait mort bien plus récemment en d'autres lieux. À quoi s'ajoute qu'il aurait selon certains ressuscité depuis ou qu'il serait pas vraiment mort, mais pour ces derniers cas, pas de preuves formelles, ça ressort du on-dit, vous savez, genre l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours. Méfiez-vous des hommes qui ont vu l'homme qui a vu l'ours s'il veulent vous vendre sa peau... Celle de l'ours je précise, pas celle de l'homme! Méfiez-vous en d'autant qu'il y a beaucoup de peaux à vendre qui seraient toutes celles du même ours... Cela dit, pas sûr que Dieu ni la divinité soient jamais nées. Passons...
L'aléa, le hasard... Et bien, ça n'existe pas. Si je prends un dé classique, six faces numérotées de 1 à 6, et que je le lance, compte non tenu du cas où je le lance trop fort, qu'il dépasse l'aire de lancer, tombe dans un trou et devienne inaccessible, avec certitude il atterrira sur une face, une tranche ou une pointe, car la gravité fait que seule certaines positions sont stables. Les seuls cas qu'on retient pour déterminer qu'un dé vaut sont ceux où il tombe sur une face, et dans ces cas on peut prédire avec certitude que la valeur sera comprise entre 1 et 6. Prenant la circonstance où je ne suis pas un tricheur et où le dé n'est pas pipé, je peux aussi prédire que je ne saurai pas au départ quel sera le résultat. Bref, il n'y a aucun hasard puisque tout est prédictible. Par contre, certaines choses ne sont pas prévisibles, comme la face qui sera retenue, celle à l'opposé de la face en contact avec l'aire de jeu, ni les résultats de chaque tirage d'une série d'au moins deux lancers. Il existe des méthodes dites probabilistes, “qui prouvent”, dont la probabilités des dés. Comme l'article mis en lien le montre, le calcul de probabilité dit de manière savante la même chose que moi: on obtiendra assurément une valeur entre 1 et 6. Avec deux dés on obtiendra entre 2 et 12 avec une bonne chance que ce soit 7 mais beaucoup plus de chances que ce soit un autre résultat et toutes les chances que ce soit entre 2 et 12. Je sais que certaines personnes (ma mère et mon frère par exemple) sont vites troublées par un discours qui parle de chiffres et de nombres, raison pourquoi en usant d'un discours d'apparence rationnelle on peut “prouver” n'importe quoi qui peut donner l'impression que par exemple la «loi de distribution normale» ou en plus court la «loi normale» permet d'augmenter la prévisibilité d'un résultat. L'univers étant imprévisible – trop d'objets dans une répartition trop large et des dimensions, des mouvements et des directions trop divers pour pouvoir tenir compte de tous les paramètres – on ne peut pas sérieusement prétendre pouvoir prévoir, “voir à l'avance”, quoi que ce soit. Nombre de choses dans cet univers ont une prédictibilité plus forte donc plus réduite que le lancer de dés, ce qui les rend assez mais jamais entièrement prévisibles, la page sur la loi normale l'illustre bien, elle mentionne à plusieurs reprises qu'il y a toujours une indétermination, qu'on ne peut que prévoir un intervalle parfois très réduit mais jamais entièrement exact.
L'élection est quelque chose comme le choix par la divinité. Celle-ci étant la Cause Première, la Cause de toutes les causes, tout ce qui advient en cet univers est donc prévu, décidé depuis l'origine des temps, un élu l'est donc de toute éternité. De l'autre bord, si toutes ne le font pas presque toutes les sagesses qui en parlent, et en tout cas toutes celles les plus répandues, postulent que la Cause Première a introduit dans l'univers le Libre Arbitre, entre autres à destination des humains. Cela dit ces deux postulats ne sont pas incompatibles et rendent compte de l'écart entre prédictibilité et prévisibilité: tout en cette univers est prédictible mais rien n'est prévisible, ce qui advient ne pouvait pas ne pas advenir puisque ça advient mais de là à supposer que tout est prévu à l'avance il y a une distance. J'aime bien me servir d'un exemple que je trouve amusant, lors de son allocution du 31 décembre 1973, Georges Pompidou énonça quelque chose comme «je puis prédire à l'avance» (ici, “prédire” au sens de “prévoir”), ce qui outre la validité grammaticale douteuse, et étonnante de la part d'un agrégé de grammaire, de cette expression (prédire ou prévoir ne peut que se faire à l'avance) , se révéla inexact puisque ses prévisions pour 1974 tablaient sur la persistance de son mandat jusqu'au 31 décembre de l'année à venir au moins et qu'il mourut le 2 avril 1974. Peu de temps après, Valéry Giscard fut élu président de la République française, ce qui était imprévisible puisque l'élection aurait du avoir lieu au cours de l'année 1976, ergo son élection n'était pas prévue de toute éternité et fut... Hem! Fut aléatoire.
En fait elle fut stochastique. L'univers n'est ni prédictible ni aléatoire mais stochastique. Le Trésor de la langue française (TLF) nous donne ceci:
«Processus stochastique. ,,Processus dans lequel à une variable x (déterminée ou aléatoire) correspond au moins une variable simplement probable`` (Bouvier-George Math. 1979).
Variable stochastique. ,,Variable dont les valeurs sont les probabilités attachées à un ensemble d'éventualités complémentaires, c'est-à-dire dont l'une exclut les autres`` (Lar. encyclop.). Synon. variable aléatoire».
Dans plusieurs définitions le TLF donne “stochastique” comme synonyme de “aléatoire” ce qui n'est pas exact, le sens original est “conjectural” en grec ancien, si même on accepte la notion d'aléa ou de hasard, il est toujours prédictible – on peut toujours savoir à l'avance qu'une chose imprévisible ne se produira pas de manière prévisible, c'est une prédiction faible puisque certaine –, alors que la conjecture ménage une place à l'imprédictible, par exemple la prédiction pompidolienne est une prédiction forte puisqu'elle ne ménage pas de place à l'imprévisible, mais l'avenir est imprévisible et la distribution même “légale” et “normale” des aléas toujours incertaine. Prédiction faible ou forte non dans sa chance de réalisation mais dans la cote que lui attribuera un bookmaker: il pourra par exemple prendre un risque à 1 contre 4 ou 5 sur un lancer de dé puisque sur la durée et en acceptant beaucoup de paris sur beaucoup de parties, au pire il ne perdra rien, souvent il gagnera un peu et sur la masse, beaucoup, mais sur les prédictions / prévisions de Pompidou il prendra un risque égal ou inférieur à 1 contre 1 parce qu'elles ont autant de chances de se réaliser que de ne pas – trop d'incertitudes.
Les gens de pouvoir sont des sortes de bookmakers, ils ne prennent de gros risques que s'ils sont sûrs de ne pas perdre sinon de gagner. Mais ils ont trop souvent une fâcheuse tendance, ils trichent. Une fâcheuse tendance parce qu'on ne peut pas tricher indéfiniment avec la réalité, qui est stochastique: plus on tente de réduire les aléas, plus on augmente le nombre de variables simplement probables. “Réduire les aléas” peut aussi se dire “reporter à plus tard l'augmentation du niveau d'imprévisibilité jusqu'à ne plus rien pouvoir prédire”. On voit cela en ce moment en France et un peu partout dans le monde: la tendance générale dans la plupart des pays a été, après la fin de la deuxième guerre mondiale où, peut-on dire, beaucoup de comptes furent soldés et la plupart des paris sur l'avenir payés comptant, de tenter de réduire de nouveau les aléas pour les gens de pouvoir en “changeant les règles du jeu”, du jeu social, or on ne peut pas le faire indéfiniment, arrive toujours le moment où l'on doit de nouveau solder les comptes, terminer la partie. C'est l'éternel mouvement des sociétés, très bien représenté par cette figure:

Le taìjítú, la “figure du faîte suprême”, est le symbole de la transformation universelle, le Yin ou principe passif ou repos ou matière et le Yang ou principe actif ou mouvement ou énergie: il y a toujours du mouvement dans le repos et du repos dans le mouvement, et toujours le mouvement se transforme en repos, le repos en mouvement. C'est on ne peut plus concret et réel et part d'un fait statistique massif, tellement massif qu'on n'a pas encore, malgré bien des recherches et, de loin en loin, l'indice finalement toujours infirmé jusque-là d'une possible invalidation, le premier principe de la thermodynamique, qui se définit diversement, la plus dense définition me semble celle-ci, «l’énergie totale d’un système isolé reste constante». L'univers nous apparaît, et, pour ce qu'on en peut savoir, est un “système isolé”, donc toute apparente disparition ou apparition d'énergie est simplement l'indice d'un changement dans la forme ou le mouvement de cette énergie. Une définition plus développée est:
«Au cours d'une transformation quelconque d'un système fermé, la variation de son énergie est égale à la quantité d'énergie échangée avec le milieu extérieur, par transfert thermique (chaleur) et transfert mécanique (travail)».
Repris de l'article de Wikipédia sur ce principe, exceptionnellement j'ai conservé les liens Wikipédia de cette citation, pour les personnes de mon possible lectorat qui n'ont pas une grande familiarité avec le vocabulaire propre à la science physique, spécialement la mécanique et la thermodynamiques. Pour exemple, “chaleur” et “travail” n'y ont pas les mêmes acceptions que dans l'usage courant, ce qu'indiquent les équivalences données dans cette citation, pour un physicien il s'agit dans les deux cas de “transfert d'énergie”, la chaleur étant un transfert d'énergie vers la matière, un “gain”, le travail étant un transfert de matière vers l'énergie, une “perte”. Cela décrit du point de vue de l'observateur pour qui la part la plus importante de lui-même est sa part “matérielle”, donc toute transformation d'énergie en matière lui apparaît un gain, de matière en énergie, une perte.
Nul n'est prophète en son pays, dit-on, cette compréhension du principe symbolisé par le taìjítú tend à se perdre avec le temps dans une société, pour diverses raisons que je n'explorerai pas ici, mais pour n'en citer que deux, celle proposée il y a environ deux millénaires et demi et reprise dans les sociétés européennes il y a un peu moins de deux millénaires,
«Il y a un temps pour tout, un temps pour toute chose sous les cieux:
un temps pour naître, et un temps pour mourir;
un temps pour planter, et un temps pour arracher ce qui a été planté».
Et plus récemment cette formule attribuée à Lavoisier, un chimiste (entre autres activités) du XVIII° siècle,
«Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme».
On a toujours nécessité à redire les mêmes évidences sous une forme nouvelle, et la meilleure manière consiste à les importer d'une société vue comme radicalement autre, différente. Pour l'extrême-occident de l'Eurasie qu'est l'Europe, l'autre bout du même continent, l'Extrême-Orient et le sous-continent indien, sont depuis quelques temps déjà, plus de trois siècles, cet autre radical mais depuis moins de temps, en gros depuis soixante-dix à quatre-vingt ans, un autre acceptable, un autre qui serait un semblable autant qu'un différent, d'où l'acceptation des prophéties qui en viennent. Dont le taìjítú, une autre manière de dire la même chose: «Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme».
Cette, que dire? Vérité? Je ne suis pas certain de savoir ce que signifie ce terme de “vérité”. Disons plutôt ce compte-rendu de la réalité observable a une valeur, et bien, universelle, en son tout et en ses parties cet univers apparaît tantôt matière et tantôt énergie, chacun de ces états se constatant par son interaction avec l'autre état. Nous aut' z'humains sommes des êtres imparfaits, comme tous les êtres, mais en tant qu'espèce nous nous évertuons à nous parfaire, comme toutes les autres espèces. L'idée générale est d'augmenter son discernement, sa capacité d'observation de la réalité. D'aussi longtemps qu'il y a de la vie sur la Terre (et je suppose qu'il en va de même dans les possibles et assez probables autres lieux où ont lieu de phénomènes du même genre que ce qu'est la vie terrestre, qu'on nommera aussi “vie” puisqu'il s'agit d'un processus plus que d'une forme) le processus est le même: une phase de “perfectionnement interne du discernement” puis une phase de “perfectionnement externe du discernement” mais dans la phase interne il y a de l'externe et dans la phase externe il y a de l'interne. Pour exemple, les cellules eucaryotes, phase interne, dérivent des formes de colonies bactériennes interspécifiques telles que certaines stromatolites, dites de la «variété botryoïde, produite par une association de diatomées et de cyanobactéries» (repris de l'article de Wikipédia) – je me demande ce que peut bien signifier “botryoïde”, c'est “de genre botryon” ou “botriè” je suppose mais comme ces formes me restent hermétiques... Passons, et restons sur la partie accessible, «association de diatomées et de cyanobactéries» –, d'individus hétérotrophes et autotrophes, d'individus “plutôt actifs” et “plutôt passifs”, une phase externe; les eucaryotes développent à leur tour un mode de perfectionnement interne, les entités pluricellulaires à individus faiblement différenciés, puis externe, les organismes proprement dits, donc constitués d'organes très différenciés, puis de nouveau externes avec les colonies d'individus, puis internes avec les formes sociales “innées” (on ne peut dire qu'une fourmi choisit d'être d'une société ni ne choisit la fonction qu'elle y a, ces formes sociales sont des sortes d'organismes où chaque individu dépend de l'ensemble pour sa survie immédiate, comme une cellule dans un organisme), puis externes avec les formes sociales “acquises” (pour ne citer que cette lignée, tous les primates sociaux ont une autonomie réelle qui leur permet le cas échéant de vivre en autonomie ou de constituer par décision propre, par choix, une autre société).
Pour des raisons que je développe plus dans d'autres billets mais surtout dans des textes assez longs sur mon site personnel l'espèce humaine a innové en inventant une manière d'alterner entre phases internes et externes de perfectionnement du discernement sans “changer d'espèce”. Factuellement l'espèce change mais ne connaît plus de solution de continuité, de rupture entre ses évolutions. En toute hypothèse, biologiquement les humains d'il y a cent mille ans sont “d'une autre espèce”, je ne le certifie pas mais c'est très probable, par contre l'élément fondamental qui en fait une espèce continue, qu'on peut décrire comme la conscience de “faire espèce”, s'est préservée et continuée depuis bien plus longtemps, au moins trois cent mille ans. Ils ont reporté les solutions de continuité sur une autre “espèce”, les sociétés humaines. Espèce entre guillemets parce que même la plus large société actuelle a une structure similaire à la plus restreinte, ou plus exactement une des deux formes, “en phase interne” ou “en phase externe”, en phases “yin” ou “yang”. Au départ une société humaine passe d'une phase à l'autre sans réel changement de sa structure générale et sans (trop de) changement quant à sa réalité effective (dans les cas de changement brutal il peut y avoir pas mal de morts et de destructions mais ça n'est pas général même si ça n'est pas si rare), ce n'est qu'avec le temps, et parfois (et souvent) un temps très long, que la structure change, prélude à l'arrivée de la phase suivante.
Cette description est assez vraie mais assez inexacte, comme il y a du mouvement dans le repos et du repos dans le mouvement, dans une société donnée on trouvera des éléments des phases immédiatement antérieure et postérieure et des traces de beaucoup de phases passées et à venir. L'évolution des sociétés ressemble beaucoup à la marche à pied: un point stable mobile dans un ensemble mobile stable, un point d'appui à l'arrière, un autre à l'avant, un point de départ, un point d'arrivée, et de nombreuses étapes – chaque foulée – d'autant moins précises qu'elles sont distantes. Il m'est arrivé d'écrire que tout le passé et tout l'avenir sont dans le présent, cela non parce que nous vivons un présent éternel (quoique, la question se discute: le temps perceptif est une conséquence des mouvements effectifs de notre planète et de son satellite naturel ainsi que de la succession irréversible des événements mais pour les physiciens le temps est une dimension et donc, en théorie on devrait pouvoir le parcourir comme toutes les autres dimensions, ce qui est en partie exacte à un niveau quantique où dans certaines conditions très limitées et très brèves il y a réversibilité du temps) mais parce que ce que nous anticipons pour nous et pour nos sociétés nous le faisons ici et maintenant à partir de ce que nous avons retenu et compris de ce qui est advenu. Bien sûr, moins la connaissance qu'a un individu ou une société du passé est distante, étendue et fiable, moins ses anticipations seront distantes, étendues et fiables.
Pour reprendre le parallèle avec la marche, le “point de départ” est une fiction, le “point d'arrivée” une hypothèse, le passé et l'avenir “dans le présent” ne sont, pour le premier que la part des événements passés retenus comme significatifs et éclairés, ou assombris, par leur interprétation, pour le second que la projection d'une évolution possible basée sur l'interprétation de ce segment plus ou moins large du passé. Dans le billet «De père en fils» par exemple, la personne interviewée a pour son domaine, l'agriculture, une projection dans le passé qui ne va pas au-delà de sa propre durée ni au-delà du territoire qu'il connaît (en France même il y a des zones qui sont peu ou très peu touchées par l'agriculture mécanisée et normalisée, notamment en montagne), de ce fait son “point de départ” se situe en gros vers 1980 avec faible projection jusqu'à environ 1960, et la partie la plus remembrée des plaines du quart nord-est de la France; il constate, dans son discours, que “l"agriculture de demain ne sera pas celle d'aujourd'hui” mais précisément par le manque d'amplitude de sa projection dans le passé, il anticipe finalement une agriculture assez semblable à celle qu'il croit universelle dans le temps et l'espace, celle des soixante dernières années née et développée dans une zone assez restreinte.
Les moments de changement de phase sont toujours problématiques. Je vous propose une autre version du taìjítú, animée celle-là, qui va me permettre de mieux illustrer mon propos:

Il y a du mouvement dans le repos et du repos dans le mouvement mais l'ensemble est, comme on dit depuis environ deux ans en France, “et en même temps”© en repos et en mouvement. La part de la société qui, lors d'une phase, prépare la suivante, est “l'œil du poisson” – un autre nom du taìjítú est “poissons yin et yang” – qui entraîne avec lui une large part du présent: le présent est déjà dans l'avenir lors du changement de phase mais le changement, la transformation, n'aura réellement lieu que quand “tout le passé sera dans l'avenir”. Pour prendre notre situation actuelle, de fait nous sommes pour la plus grande part “dans l'avenir” mais tant qu'une part significative du “présent dans le passé” luttera pour empêcher la transformation elle ne pourra pas se réaliser, et initier alors le commencement de la phase suivante, parce que la plus grande part des membres de la société n'a pas conscience d'être déjà dans la phase suivante. Pour prendre la part la plus visible de cet “avenir dans le présent”, vous savez, la “révolution numérique” – révolution lente... –, la majeure partie des membres de la société globale, celle réelle, celle des humains, et non celle de la “mondialisation économique”, est “connectée” et donc, en plein dans l'avenir, mais une part significative de cette humanité, celle des pays qui ont le plus profité de la phase en cours d'achèvement, continue de vivre “dans le passé”, selon des schémas inadaptés à la situation présente. La raison en est que la partie du “vieux poisson” qui en forme la queue, et qui durant la phase précédente tirait le plus partie de la situation et en assurait la pérennité, est de plus en plus réduite et de plus en plus déphasée, mais elle détient aussi une part importante des ressources sociales primordiales, celles qui permettent de contrôler la forme et le niveau de discernement, ce que l'on nomme en notre temps “communication” et “information”.
Bon, je me demandais jusqu'où je devrais développer cette longue digression qui commence à la mention «C'est l'éternel mouvement des sociétés, très bien représenté par cette figure» tout à la fin de l'alinéa qui commence par «Les gens de pouvoir sont des sortes de bookmakers», avant de pouvoir en revenir à mon propos initial. Voilà sa fin. Je pourrais certes encore détailler, notamment sur la question de “phase interne“ et “phase externe” mais ce que dit me semble suffisant. Pour faire bref, les moments “yang” sont donc “actifs” et tendanciellement “en extension” (développement externe) , ceux “yin” étant “passifs” et “en intension” (développement interne). Comme dit, pour faire bref! L'alinéa qui suit était déjà rédigé lorsque j'ai entamé cette digression, parce que précisément il me fallait “un peu” développer ces considérations avant de poursuivre. Le passé et l'avenir sont dans le présent...
Les gens de pouvoir qui trichent (lesquels ne sont pas une majorité des gens de pouvoir) jouent à un jeu idiot, le “jeu du chat et de la souris”, où ils sont le chat. Dans leur représentation de la société, “le pouvoir” est “gros” ou “haut”, “le peuple” est “petit” ou “bas”; dans la réalité effective le peuple est gros, le pouvoir petit et tous les humains sont à la même hauteur. À terme la souris finit toujours par manger le chat.
La digression me permet d'expliquer cet alinéa. Au début d'une phase, “le pouvoir est dans l'œil”, puisque ce qui provoque le changement est justement la nécessité de changer de type de discernement: dans une phase externe “la matière observe l'énergie” et bien évidemment dans une phase interne “l'énergie observe la matière”. Ce ne sont que des noms, vous pouvez dire esprit ou âme pour l'énergie, chair ou corps pour la matière, et dire que la phase externe est matérialiste ou corporelle ou charnelle, celle interne énergétique (idéaliste) ou spirituelle ou animiste.
Le chat est celui qui se satisfait de l'état des choses et en tire le plus de profit possible mais la pression qu'il exerce sur la souris oblige celle-ci à “chercher une issue”; le temps passant, le chat dépense toujours plus de ressources pour toujours moins de profits ce qui l'induit à augmenter la pression avec l'espoir de “rétablir la situation antérieure”, chose impossible, d'autant que par l'augmentation même de la pression il contribue à accélérer le changement. La souris est factuellement “de la nature du chat”, raison pourquoi elle considère que la pression qu'elle subit est “dans la norme”, est “dans la nature des choses”, d'où son incapacité à percevoir qu'elle est déjà “de l'autre côté”, celui où elle devient maîtresse du jeu. La toute fin de la phase devient dangereuse parce que la pression est maximale et la souris “ne comprend plus la réalité”, et pour cause: elle voit la réalité comme sa représentation et sa représentation comme la réalité, elle prend la carte pour le territoire et le territoire pour la carte. Dans ce moment de la phase, l'œil, qui dote l'ensemble du discernement, est dans sa position la plus faible puisque celle la plus forte est aussi le point le plus aveugle du poisson, d'où un manque de discernement de la plus grande part des membres de la société. Pour que les choses changent définitivement il faut une “conversion” (vous pouvez donner une valeur “scientifique” ou “religieuse” ou “politique” au terme, de toute manière ce ne sont que des variantes interprétatives d'un même phénomène, la transformation). Ce qui est assez délicat: la souris peut se transformer en rat et de proie devenir prédateur, ce qui induira une transformation violente – meurtrière. Pour exemple la longue période de transformation qui va de la première à la deuxième guerre mondiale, qui a bien donné lieu à un changement, mais dans la douleur...
J'ai bien quelques idées somme toute assez simple pour qu'on ait une conversion beaucoup plus paisible cette fois-ci mais bon, je suis dans l'œil du poisson donc en position faible, ce qui n'aide pas à mettre en œuvre ces idées. Comme je le raconte dans divers billets ou commentaires, quand j'expose ces idées simples à mes contemporains, au minimum neuf fois sur dix on me dit que c'est compliqué...
Bon ben voilà, si vous voulez poursuivre cette discussion, libre à vous, j'ai enregistré quelques concerts diffusés sur Arte que je n'ai pas encore regardés, rapport au fait que je n'ai pas de télé et que quand j'utilise mon ordinateur pour écrire mes bêtises je ne peux pas l'utiliser en même temps pour voir ce que j'enregistre. J'hésite, regarder Joan Baez, Pink Floyd, Calypso Rose ou Toots & The Maytals? Et oui, je suis un vieux donc j'apprécie des trucs de vieux – quoique dans leur public il y ait pas mal de jeunes. La beauté n'a pas d'âge...
Tiens ben, je crois que je vais visionner pour la n-ième fois un truc carrément antédiluvien, un concert anglais de Chuck Berry qui date de 1972...