Il y a quelque chose de commun entre Alain Finkielkraut, Alexandre Benalla, Éric Zemmour et Ma Pomme: nous avons un prénom “bien de chez nous” et un patronyme franchement pas de chez nous. Enfin, ça dépend du “chez nous”, perso j'ai aussi un patronyme “bien de chez nous”, Benalla et Zemmour aussi, et probablement Finkielkraut a aussi un patronyme “bien de chez lui”, mais un autre chez lui que les trois autres. De l'autre bord, le seul de nous quatre qui a un prénom vraiment “bien de chez nous” c'est Ma Pomme. J'explique.
Alexandre est un nom macédonien, Éric un nom scandinave, Alain est un nom latin mais qui désigne à l'origine un peuple, les Alains, qui viennent d'une zone entre Biélorussie et Pologne, pour Olivier c'est un poil plus compliqué – quoique, pour les autres c'est moins simple qu'énoncé –, si l'une des étymologies relie le prénom à l'arbre ou à ses fruits, une autre le donne comme un dérivé de Alfihar, nom germanique censé signifier “hôte des Elfes”, mais comme le “chez nous” qui nous est commun serait le territoire actuel de la France, dans les deux cas ce serait en effet un prénom “bien de chez nous”. Bref, le seul de nous quatre qui aurait un nom d'état-civil pleinement “bien de chez nous” ce serait moi.
Ah! Chez nous. Quel “chez nous”? Trois d'entre nous ont donc un patronyme “de chez nous”, mais d'un “chez nous” un peu distant, de l'autre bord de la Méditerranée, d'Afrique du Nord, deux ont un patronyme berbère, amazight pour être précis, le troisième un patronyme arabe du Maghreb, reste Finkielkraut qui a pour son compte un patronyme exotique, un patronyme d'Europe Centrale. Benalla, Zemmour et Ma Pomme sommes en partie ou en totalité (pour moi c'est en partie, pour Zemmour en totalité, pour Benalla je ne sais pas) généalogiquement reliés à des ascendants nés dans un territoire qui fut français de 1830 à 1962, l'Algérie, et par sa départementalisation, intégré au territoire national dès la décennie 1840, raison pourquoi nos patronymes sont “bien de chez nous”. Certes, une large partie de l'Europe Centrale fut française entre environ 1805 et environ 1815 mais leurs populations ne furent pas intégrées à la population nationale, donc le patronyme de Finkielkraut n'est pas “de chez nous”. Or, il y a ceci de curieux, de nous quatre le seul qui ne se prétende pas “bien de chez nous” est le seul qui puisse par son nom d'état-civil se dire pleinement “bien de chez nous”, Ma Pomme. C'est toujours comme ça: les premiers sont les derniers et les derniers sont les premiers, je suis très à l'aise avec ma ”francité” donc je n'ai pas besoin de la porter en bandoulière et de me proclamer urbi et orbi “bien de chez nous” tellement je suis bien de chez moi, de France et d'Algérie, et d'Europe, et du monde, alors que les trois autres ont une biendecheznouitude peu sûre, inquiète, et se rassurent en la réduisant à un petit territoire et en la proclamant haut et fort.
Le biendecheznouisme est la plaie de l'Humanité.