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Billet de blog 21 juin 2024

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Le Front de la jubilation

Je suis loin, je n’arpente pas les marchés tracts en main et ne suis la campagne que sur écran. Abjection à l’extrême-droite, à l’extrême-centre et dans la quasi-totalité du camp médiatique. Jubilation à l'écoute des candidats du Front populaire.

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Des candidats divers et complémentaires qui composent bien un front, allant des milieux populaires jusqu’aux classes moyennes diplômées, chacun parlant sa langue, ne faisant pas semblant d’être l’autre, se respectant et tendant au même but.

Il y a Raphaël Arnault tenant tête, avec un courage et une clarté parfaite, aux éditorialistes fascisés de BFM pour mettre en évidence le retournement des valeurs qui fait passer les antifascistes pour les fascistes et les non-violents pour les violents.

Il y a Sandrine Rousseau, colère, juste et claire, dont la gravité fait ressortir l’insoutenable légèreté de Jean-Jacques Bourdin perdu dans ses questions de politicaille alors que la France est au bord du gouffre.

Il y a Sophie Binet, toujours calme et précise, qui rappelle ce qu’est l’extrême-droite à des éditorialistes dépravés.

Il y a Manuel Bompard face à la fine équipe de Pujadas à laquelle Mélenchon s’est confronté si souvent, et surpassant son mentor : sourire au coin des lèvres, il semble réellement amusé par la cuistrerie du seigneur Lenglet, les pantalonnades de Pierre Servent et les mauvais procès de Ruth Elkrief dont il expose si crûment l’islamophobie à la toute dernière phrase du débat que j’ai failli dire « à la fin de l’envoi, je touche ! »

Il y a, enfin, l’inénarrable Philippe Poutou dont la seule contenance suffit à ridiculiser les pantins guindés qui l’assomment de leurs questions ridicules, et dont les gros mots donnent le sourire pour la journée. Ces jours-ci, ça vaut de l’or.

Il me tarde d'entendre Amal Bentounsi et Sabrina Ali-Benali.

Magnifique Front Populaire ! Jules Vallès, racontant sa découverte de la Révolution française dans les livres, trouvait l’une des plus belles métaphores de la littérature française :

« On venait d’ouvrir devant moi un livre où il était question de la misère et de la faim, où je voyais passer des figures qui me rappelaient mon oncle Joseph ou l’oncle Chadenas, des menuisiers avec leurs compas écartés comme une arme, et des paysans dont les fourches avaient du sang au bout des dents. Il y avait des femmes qui marchaient sur Versailles, en criant que Mme Veto affamait le peuple ; et la pique à laquelle était embrochée la miche de pain noir – un drapeau – trouait les pages et me crevait les yeux. »

Quand la pique troue la page, ça crève les yeux. Les candidats du Front Populaire crèvent l’écran. Je rêve à l’effet qu’ils doivent avoir sur ceux qui se disent depuis si longtemps qu’on ne parlait pas d’eux, ni pour eux, et surtout qu’ils n’avaient pas le droit à la parole. 

Allons ! Sinon dans quinze jours, le Front Populaire balaiera bientôt les mannequins ridicules de l’éditorialisme fascisant et les masques rances de la réaction mortifère. Ce Front est beau, droit, colère, drôle et juste. Cette élection met aux prises Eros et Thanatos : le désir prévaudra.

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