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Les trains de nuit : une mobilité d'avenir

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Billet de blog 29 décembre 2017

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Les trains de nuit : une mobilité d'avenir

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Voyager vers Rome à la pleine lune

Le voyage en train de nuit de Munich à Rome dure 13 heures. En avion c'est à 90 minutes. Qui voyage aujourd'hui de nuit ? Et pourquoi ? Récit d'un voyage.

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Les trains de nuit : une mobilité d'avenir

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Article "Bei Vollmond nach Rom", paru dans Moz du 22 déc. 2017, traduit de l'allemand

A une époque où tout est censé aller vite, le train de nuit peut sembler un dinosaure bien fatigué. De fait, cet art du voyage disparaît : fin 2016 les chemins de fer allemands ont arrêté l'activité train-couchette pour cause de déficit élevé. Il existe encore huit trains de nuit vers l'Allemagne, ils sont opérés par les chemins de fer autrichiens (ÖBB).

Les mécaniciens du train de nuit Munich-Rome disent qu'ils "conduisent le Romain". Le train traverse les Alpes, passe par Bologne et Florence jusqu'à la capitale italienne. Le voyage s'annonce romantique.

Le train de nuit ÖBB est bleu et il s'appelle Nightjet. On dirait le nom d'un avion, mais devant moi, il s'agit bien d'un train. Je jette un œil dans le compartiment : trois sièges, une porte sécurisée, une fenêtre qui s'ouvre. La salle de bain est à l'intérieur du compartiment. Mais pas de voiture-restaurant. Les repas sont apportés par le personnel.

Illustration 1

Sur le siège, un pack m'attend avec des bouchons d'oreille, une serviette rafraîchissante, un loup pour dormir, et des pantoufles à usage unique. Il y a aussi de l'eau, du jus et du vin mousseux. Question : où est le lit?

"Nous l'installerons plus tard", répond Francisco Schrammel. C'est le Steward du train de nuit, mais on doit l'appeller "accompagnateur de nuit". Schrammel, 33 ans, installe et désinstalle les lits, recueille les commandes de petit-déjeuner, apporte les repas et boissons. Il a trois à quatre collègues par voyage, y compris le chef de train. L'équipe peut accueillir jusqu'à 150 passagers. Pendant la nuit, Schrammel fait des rondes, le matin il réveille les voyageurs. Il ne dort pas. "Même pas une sieste."

Julia et Christina de Brême sont installées dans un compartiment de deux lits. Julia a peur de l'avion, Christina aurait bien pris un vol. "L'avion secoue exactement pareil, seulement c'est moins long." Pour sa part, Julia aime bien rouler lentement vers sa destination - le train part de Munich à 20h10 et arrive à Rome à 9h22.

La nuit nous relie - même s'il y a un système de classe dans le train. Il y a les voitures-lits, les voitures-couchettes et les places assises. Les gens ne se rencontrent que sur la plate-forme pour fumer ou dans le couloir. Il y a un couple, tous les deux avec la même coiffure passée de mode : court devant, long derrière, lui brun, elle blonde. Je me demande s'ils vont à destination de l'Italie ou des années 1980, il l'embrasse dans le cou. Pendant ce temps, en place assise on boit du schnaps.

De retour dans mon compartiment, je trouve étrange de voir des gens sur les quais alors que je suis sur le point de me coucher. Schrammel, l'accompagnateur, replie enfin les sièges et sort un lit du mur en quelques mouvements. "Bonne nuit !"

A part le son des rails, tout est calme. Quand j'éteins les lumières de la cabine, la pleine lune éclaire une vallée et ses villages. Les sapins dansent devant la fenêtre du train, on est certainement dans les Alpes. La vue est si idyllique que j'oublie l'idée de dormir pendant un instant.

Quand je me réveille, le soleil se lève sur la Toscane. Soudain, je ne comprends plus pourquoi s'entêter à monter dans un avion qu'on doit attendre des heures. Non seulement le trajet en train de nuit est plus serein, mais il est aussi plus intéressant. On voit où on va, on se rapproche du but. Tiens, le chef de train parle maintenant italien.

"Avez-vous vu le lever du soleil sur la Toscane?“ demande Schrammel en rangeant le lit dans le mur et en installant la table. Je prends mon petit déjeuner en regardant par la fenêtre. Il reste une heure pour Rome, le temps s’est envolé.

Julia et Christina sont également réveillées. "J'ai regardé dehors toute la nuit, c'était si beau", dit Julia. Sa sœur a dormi, mais elle ne se sent pas aussi bien. Elles font leurs valises, on traverse déjà la banlieue de Rome.

À Rome Termini on retrouve la foule grouillante des gares. Ça semble irréel que la nuit m'ait amené ici. Maintenant j'ai une journée ensoleillée devant moi. Francisco Schrammel retourne à Munich par le même train le soir-même. Je lui demande s'il croit que le train de nuit a un avenir. "Les trains de nuit ont un capital de sympathie.“

Tarifs: On trouve des billets Munich-Rome en place assise à partir de 39 €, en compartiments 6 couchettes à partir de 59 €, et quatre couchettes à partir de 69 €. En voiture-lit, les billets sont venus à partir de 79 € (trois lits), 99 € (deux lits) ou 139 € (un lit). Un compartiment individuel incluant salle de bain avec douche et WC, coûtera 199 €.

Restauration : Le soir des boissons, des collations et repas chauds peuvent être commandés aux accompagnateurs. Le petit déjeuner est servi le matin en couchette et voiture-lit.

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