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Billet de blog 2 janvier 2022

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Concert du nouvel an à Vienne: attention au conformisme!

Comme tous les ans, le concert du nouvel an, à Vienne, n'a pas échappé à la tradition. L'occasion d'établir un bilan critique de l'esprit viennois de ces dernières décennies, dans le domaine artistique, politique, esthétique, pour promouvoir, loin du conservatisme, des valeurs d'émancipation.

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Le concert du nouvel an, à Vienne, en Autriche, est donné, tous les ans, depuis 1939, et en Eurovision depuis 1959, dans la salle dorée du Musikverein: il est ainsi diffusé, par retransmission télévisée dans 90 pays, à travers le monde. Il y célèbre l'élégance de la valse viennoise, dans la pure tradition de la capitale autrichienne: entièrement consacré à la famille Strauss (Johan, Johann II, Joseph, Eduard), ce concert est l'occasion, dans un programme élaboré par les musiciens eux mêmes de l'orchestre philharmonique de vienne, de célébrer, notamment, "le Beau Danube bleu", ou encore "la Marche de Radetzky", avec en arrière fond les images du château de Schönbrunn, "le Versailles autrichien", et une mise en scène du ballet d'État de Vienne ou de l'opéra de Bavière. Dans cet hommage à la tradition artistique et musicale viennoise, on ne peut s'empêcher de regretter le manque d'invention et d'originalité du programme proposé, qui retrace continuellement l'atmosphère de "Sissi impératrice", le film de jeunesse de Romy Schneider.

  L'écrivain Thomas Bernhardt n'avait de cesse de critiquer l'hypocrisie et la bonne conscience des milieux intellectuels viennois, source de politique réactionnaire et conservatrice. Après avoir vécu une enfance malheureuse dans un centre d'éducation nazi pendant la guerre, puis dans un lycée catholique après celle-ci, épisodes qu'il décrit dans un récit autobiographique de 1975, ( "l'origine"), au cours duquel il dénonce les humiliations qu'il a subies, Thomas Berdhardt, dans les années 50, a étudié au conservatoire d'art musical et dramatique de Salzbourg. Il s'est ainsi forgé une solide inimitié auprès des milieux conservateurs viennois, dont il ne cesse de dénoncer l'esprit étroit et conformiste. Dans "place des héros", pièce de théâtre publiée en 1988, et représentée au Burgtheater, Thomas Bernhardt n'a de cesse de critiquer l'antisémitisme latent de la société viennoise contemporaine, 50 ans seulement après l'invasion de l'Autriche par l'Allemagne de Hitler (Anschluss). Dans toute son oeuvre, Thomas Bernhardt n'aura de cesse de brocarder les milieux catholiques conservateurs de la société viennoise de son temps, peu ouverts aux nouveautés émancipatrices et aux influences étrangères. Son parti pris intransigeant occasionna, dans son pays, une série de scandales reten-tissants, qui ébranlèrent la bonne conscience viennoise.

  Josephine Baker, elle même, artiste franco-américaine, chanteuse et danseuse à la fois, qui vient d'être panthéonisée le 30 Novembre dernier, eut à souffrir du racisme de la capitale autrichienne, lorsqu'elle y donna un concert, dans les années 30, concert au cours duquel elle fut conspuée copieusement par les milieux nationalistes. Sans doute ceux-ci voyaient-ils dans les danses endiablées de Joséphine, une représentation typique de l'art "dégénéré" que les milieux les plus réactionnaires de l'époque entendaient dénoncer. Certes, le parti pris de cette danseuse et chanteuse avait de quoi surprendre, lorsqu'elle tournait en dérision, par ses tenues de scène à plumes, l'esprit colonial de l'époque, qui la réduisait à l'image d'une "sauvage" en transe. Pourtant Joséphine Baker, égérie des artistes surréalistes, dans la "revue nègre", puis militante pour les droits civiques dans les années 60 aux États Unis, et engagée comme officier dans la France Libre, dans les années 40, n'eut de cesse de combattre pour une société d'émancipation: en 1947, elle acquit le château de Milandes, en Dordogne, pour y accueillir douze enfants de toutes origines et de tous milieux, issus des 5 continents, qu'elle avait adoptés.

  C'est de cette idéal de fraternité que devrait se souvenir Daniel Baremboïm, le chef d'orchestre qui officia cette année, pour la 3e fois, aux festivités du nouvel an, à Vienne. Lui qui avait rêvé de fonder un orchestre avec des musiciens issus de toutes les nationalités, y compris issus du territoire de Gaza, en Palestine....Ou comment l'Art peut réunir des citoyens du monde entier.

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