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Billet de blog 3 mai 2020

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"Douce France": un documentaire de Geoffrey Couanon

Geoffrey Couanon, dans son documentaire sur EuropaCity, filme l'enquète réalisée par trois jeunes lycéens, pour le compte de leur enseignante, auprès des acteurs économiques du triangle de Gonesse, pour valider ou non ce projet économique pharaonique: leur verdict est sans appel et confirme la nécessité d'abandonner cette chimère.

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En 2018, Amina, Sami et Jennifer sont trois lycéens étudiant dans un établissement de Gonesse, en Seine Saint Denis. Leur enseignante d'Histoire Géographie leur fait plancher sur le projet d'EuropaCity, qui risque de s'implanter dans le triangle de Gonesse, une zone de 130 hectares, réparti entre le Gonesse, l'aéroport Charles de Gaulle, l'aéroport Paris Le Bourget et bouleverser l'économie de la région. Sous la houlette du réalisateur Geoffey Couan, qui va filmer leur aventure, les trois jeunes gens vont être chargés part leur enseignante de mener une enquète de terrain, auprès des acteurs économiques du triangle de Gonesse, pour évaluer ce projet d'aménagement du territoire et s'en faire une opinion.

   Après avoir lu tout d'abord quelques articles de journaux, pour comprendre dans un premier temps les enjeux de celui-ci, soutenu à bout de bras par le maire de leur commune, les trois jeunes gens vont rencontrer, un à un, différents protagonistes qui vont leur apporter des arguments contradictoires sur la pertinence ou non de cette implantation économique dans une très grande zone agricole. Dans un premier temps les promoteurs de ce projet économique pharaonique vont leur vanter les bénéfices de ce projet: un gigantesque centre commercial va être installé, avec commerces, boutiques, et même...une piste de ski, censée permettre aux jeunes de la région, de bénéficier de ce sport de loisir. Certains arguments font mouche, dans un premier temps, auprès de ces jeunes, soucieux avant tout de réussir dans la vie, et de trouver un emploi, plus tard, digne de leur intérêt. Le miroir aux alouettes d'un centre dédié à la consommation, au "shopping", plus qu'une démarche citoyenne proprement dite défendant l'intérêt général, semble être une tentation initiale frappante chez ces jeunes. De plus le caractère, peu valorisant, a priori, d'une zone agricole, et le manque de services, ou de transports, dans la région, semble inciter les jeunes gens à refuser le statut quo, et à suivre les sirènes économiques, qui poussent au développement d'un urbanisme effrené, notamment dans ce coin d'Ile de France. Les promoteurs du projet EuropaCity, pour tenter de convaincre les lycéens, vont leur expliquer que cela va apporter beaucoup d'argent à la commune, sous la forme de taxe professionnelle, et que le prix des habitations va prendre de la valeur, et que cela va permettre l'arrivée, dans le triangle de Gonesse, d'une nouvelle population, plus aisée, qui va dynamiser cet endroit, et le sortir de la pauvreté et de la relégation sociale. Pourtant des doutes apparaissent, tout d'abord, chez ces jeunes gens, issus de milieux populaires, qui craignent de ne pouvoir trouver un emploi, à la hauteur de leurs ambitions, mais de ne pouvoir bénéficier que d'emplois temporaires, ou de "seconde main", comme caissier de supermarché, par exemple.

  En continuant leur enquète, les doutes de ces jeunes gens se renforcent: ils rencontrent, dans un deuxième temps, un directeur de centre commercial, à Gonesse, qui loue des boutiques  à des commerçants, sur place, pour que ceux-ci puissent vendre leur marchandise à des clients de la région. Il fait part, d'entrée de jeu, de ces craintes et de ses réticences, face au projet d'installation d'Europea City, et du risque de concur-rence effrenée auprès des autres commerçants qu'il risque d'entrainer, sacrifiant certains emplois, et une baisse de chiffre d'affaires auprès des acteurs économiques locaux et voisins de ce gigantesque centre commercial à venir: d'une part, le triangle de Gonesse est déjà bien pourvu en hypermarché (Carrefour, Leclerc, Auchan), d'autre part, EuropaCity, risque de tuer le petit commerce et l'artisanat local. C'est notamment ce que confirme un commerçant, dans le centre ville de Gonesse, qui n'a aucun intérêt à voir ce pôle économique gigantesque se développer à côté de lui.

   Un autre point de vue abordé est celui des agriculteurs. le réalisateur Geoffrey Couanon, explique aux trois jeunes, que l'urbanisme n'a cessé de se développer dans la région de Gonesse, depuis 50 ans, au point de ne laisser presqu'aucune zone agricole et/ou champêtre, à proximité. Les terres agricoles même lorsqu'elles sont riches, deviennent rares, et le bétonnage semble se développer sans limite, au point d'asphyxier les villes: bruit, pollutions, avec son cortège de voitures, d'échangeurs routiers, et d'artificialisation et d'assèchement des terres, qui ne peut que nuire au climat, avec notamment ce projet aberrant et absurde de piste de ski en région parisienne, qui ferait du triangle de Gonesse, une sorte de Dubai francilien! L'agriculteur vante le mérite d'une alimentation de qualité, produite localement, alimentation biologique et produite sans pesticide, et il explique que si ce projet d'EuropaCity est adoptée, cette grande zone agricole de 130 hectares va disparaître à jamais. Il semble développer les mêmes arguments que lors du débat sur le projet de notre Dame des Landes, au cours duquel les opposants à l'installation d'un nouvel aéroport, sur place, mettaient en avant le risque de destruction de riches terres agricoles, et d'une augmentation de la pollution et de perte de la biodiver-sité. Petit à petit l'opinion des jeunes bascule, et les arguments contre ce projet économique se renforcent, à leurs yeux. Jennyfer, qui veut travailler dans la finance, voit l'opportunité de favoriser le secteur économique de l'agriculture de proximité, auprès des acteurs gravitant autour de "terre de liens", qui rachète des terres, pour protéger celle-ci des appétits des promoteurs immobiliers soutiens inconditionnels d'EuropaCity, malgré les recours juridiques de mouvements citoyens locaux. Elle vante à sa mère les bénéficies de l'agriculture biologique et des AMAP, et réussit à entrainer celle-ci dans la consommation alimentaire locale et écologique. D'autre part, les trois jeunes découvrent un autre mode de consommation, moins onéreux, avec le recyclage des vêtements dans les ressourceries, qui s'adaptent mieux à des populations issues des milieux populaires, aux antipodes du projet EuropaCity.

 Enfin, c'est auprès des députés qu'il rencontrent, que cette conviction nouvelle de ces jeunes pour un projet alternatif dans le triangle de Gonesse, semble ce confirmer. Loin de ce se démonter face aux arguments économiques d'une député macroniste, ancienne employée de banque, et qui semble valoriser l'implantation d'EuropaCity, les trois lycées demeurent finalement sceptiques et peu convaincus par cette vision gigantesque d'un urbanisme qui tourne le dos à l'écologie, et qui ne permettra pas, selon eux, de réduire les fractures sociales. La fin du documentaire semble leur donner raison puisque l'on y apprend que le président de la République a donné une fin de non recevoir, en Septembre dernier, à EuopeaCity, suivant en cela le premier avis négatif de l'enquète publique qui avait retoqué ce projet, au non de son manque de garanties quand aux respect des accords de Paris sur le climat, notamment.

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