Emmanuel Macron a été élu président de la République le 7 Mai dernier. Opposé à Marine le Pen, au deuxième tour, il a bénéficié d'un report de voix favorable, de tous les citoyens qui rejetaient le programme d'exclusion, de xénophobie et de repli sur soit que représentait le programme du Front National: à cela, rien d'étonnant, diront certains, puisque seul, Jean Luc Mélenchon, avait refusé de lui accorder un désistement automatique. Pourtant, on a analysé, au départ, la large victoire d'Emmanuel Macro, au deuxième tour de l'élection préésidentielle, plus comme un vote de rejet de Marine Le Pen (2 tiers des votes exprimés), que comme un vote d'adhésion plein et entier à son projet: Emmanuel Macron ne totalise au premier tour de l'élection présidentielle que 24 pour cent des votes exprimés, soit 18 pour cent seulement de l'ensemble des votants.
Pourtant, pour ces élections législatives, et à quelques jours seulement du scrutin, Emmanuel Macron semble en mesure de l'emporter largement, et d'obtenir sans problème cette majorité absolue des sièges, à l'Assemblée nationale, qu'il convoitait tant, et alors que certains observateurs, y compris des représentants de l'opposition, prédisaient une cohabitation, au sommet de l'Etat, à l'issue de ces élections législatives. On peut donner à cette situation plusieurs explications. Tout d'abord, le régime très "présidentiel" de la 5e République, qui fait de notre système électoral une sorte de "monarchie républicaine", et donne, lors des élections législatives qui font immédiatement suite à l'élection présidentielle, une prime évidente au "parti du président" pour le scrutin qui procède à l'élection des députés. Ensuite Emmanuel Macron a bénéficié de circonstances politiques très favorables: le parti "Les Républicains", tétanisé par la mise en cause judiciaire de leur candidat à l'élection présidentielle, François Fillon, semble également avoir été victime de ses divisions, entre juppéistes et fillonistes, et Emmanuel Macron a su prendre ses distances avec le projet thatchérien et ultra conservateur de François Fillon, en jouant sur ces tensions.. D'autre part, les divisions de la gauche, et plus particulièrement de "la gauche de la gauche", incapable de s'entendre, pour former une opposition de combat à un président quelle juge trop "libéral": le sectarisme d'un Jean Luc Mélenchon, notamment, permettra sans doute à Emmanuel Macron d'avoir une opposition groupée et unie, sur sa gauche, pour proposer une alternative crédible à son projet. Le même phénomène de division semble toucher le Front National, qui malgré son projet xénophobe et isolationniste semble abriter plus que des nuances entre "souverainistes" surfant sur les ambiguité d'un Jean Luc Mélenchon et "libéraux", qui souhaitent capter une bonne partie du vote ultra conservateur d'un François Fillon, décrédibilisé par les affaires.
Pourtant, même s'il divise la classe politique, le projet d'Emmanuel Macron n'a rien de révolutionnaire, mais témoigne d'une certaine habileté: certains jugeront notamment son projet beaucoup trop libéral et iconoclaste, et qui rappellent notamment les réformes initiées par Gehrardt Schrôder, en Allemagne, au début des années 2000.: comme par exemple sa volonté de libéraliser et de flexibiliser totalement le code du travail, en privilégiant les accords d'entreprise au détriment des accords de branche, aussi bien concernant le temps que les conditions de travail, qui risque de heurter les syndicats et les partis de gauche. Mais en promettant une négociation au sein de chaque entreprise, et en prévoyant une réforme par ordonnance, Macron tente de diluer la contestation, qui risque néanmoins d'être rude. Cette vision libérale se retrouve également dans sa promesse de baisse de charges patronales sur la protection sociale, et sa promesse d'augmenter la CSG, ce qui a pour effet de reporter l'effort principal de sa réforme sur les seuls retraités..gagnant un peu plus de 14000 euros par an (ce qui ne pénalise pas néanmoins les plus petites retraites). D'autres mesures témoignent également du fait que le gouvernement de Macron n'est pas vraiment de gauche, comme la volonté de se dernier d'exonérer les entrepreneurs et les actionnaires du paiement de l'impôt sur la fortune (ISF), et son projet de supprimer la mesure d'encadrement des loyers, tout cela au nom de la "libre entreprise" ou encore sa volonté de contrôler plus étroitement les chômeurs, malgré quelques droits supplémentaires offerts à ceux qui démissionnent. Reste certaines mesures symboliques qui peuvent attirer, malgré tout les plus progressistes, comme la promesse de remboursement intégrale des prothèses auditives, des lunettes ou appareillages dentaires, ou encore la dépénalisation du cannabis. De même sa volonté de supprimer la taxe d'habitation peut séduire les plus modeste, même s'il existe des doutes sur le manque à gagner des collectivités locales, et sur les compensations accordées par l'Etat Son projet de retraites par points, même s'il ne remet pas en cause le système de retraites par répartition, et s'il promet d'unifier les régimes de retraites, suscite également des interrogations, Sa volonté de "moralisation de la vie politique" vient à point nommé et peut faire consensus, même si l'on doute fortement que les troupes d'Emmanuel Macron soit plus vertueuses que les autres, et que certains membres du gouvernement sont déjà impliqués dans des affaires judiciaires!
Au total, Emmanuel Macron bénéficie de l'effet de surprise que constitue son élection, car pour la première fois, aucun des partis qui ont dominé la vie politique depuis ces trente ou quarante dernières années ne semble en mesure de contester le leadership du nouveau président, qui peut également bénéficier de la crise de confiance à l'égard des partis traditionnels générée par le poids grandissants des affaires (corruption, conflits d'intérêt, etc), au motif suivant: celui-ci est nouveau, avec son look prometteur de jeune dirigeant de start up, donc essayons le....!