P maurel (avatar)

P maurel

téléenquéteur dans un institut de sondage: militant des droits humains

Abonné·e de Mediapart

152 Billets

1 Éditions

Billet de blog 13 août 2022

P maurel (avatar)

P maurel

téléenquéteur dans un institut de sondage: militant des droits humains

Abonné·e de Mediapart

Attentat contre Salman Rushdie: encore un méfait du régime iranien!

L'attentat criminel perpétré contre l'écrivain Salman Rushdie, à New York, souligne la dangerosité extrême de certains intégrismes et fondamentalismes religieux, notamment celle de l'Iran dont la responsabilité n'est plus à démontrer. Il existe une manière, néanmoins, d'interroger les religions, et de pro-mouvoir la tolérance et la discussion démocratique!

P maurel (avatar)

P maurel

téléenquéteur dans un institut de sondage: militant des droits humains

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1

Ce Vendredi 12 Août, Un fanatique religieux a poignardé l'écrivain américain, d'origine indienne, Salman Rushdie, alors que celui-ci donnait une conférence littéraire, à New York. Les motivations de cette tentative d'assassinat ne font guère de doute. Salman Rushdie, né en Inde d'une famille musulmane laïque, c'est-à-dire fort peu religieuse, a émigré en Grande Bretagne vers l'âge de 13 ans, et est devenu, par la suite, un écrivain de langue anglaise. En 1988, il publie Les versets sataniques, un roman de fiction à caractère autobiographique, décrivant l'émigration, d'Inde vers la Grande Bretagne, d'un personnage principal, comédien de son état, qui perd la foi musulmane, et subit, entre rêve et réalité, une forme de déracinement culturel et spirituel. Sitôt sa publication, le livre, subit la fatwa irrévocable de l'Ayatollah Khomeiny, sous forme de menace de mort, jugeant le livre, qu'il n'avait pas lu, "blasphématoire" contre l'Islam: le Guide Suprême promettait une forte récompense financière à qui tuerait, non seulement cet écrivain jugé "impie" ou apostat, mais également les libraires qui le publieraient ou traducteurs qui travailleraient sur son roman, décrié par les intégristes! Dès lors, l'écrivain traqué, vécu de nombreuses années dans la clandestinité, protégé par la police de l'État qui l'hébergeait. La fatwa de Khomeiny, elle, connut un certain succès: dans les années 90, plusieurs traducteurs des Versets sataniques furent assassinés. Salman Rushdie, contre mauvaise fortune bon coeur, dut presque faire oeuvre de contrition, pour tenter de calmer les véélités fanatiques de ses détracteurs intégristes. A la fin des années 2000, il publia un autre roman à caractère autobiographique, Joseph Anton, du nom de ces auteurs favoris, Anton Tchékov et Joseph Conrad. Salman Rushdie, interviewé au sujet de ce roman, regrettait, en tant qu'auteur persécuté et vivant dans la clandestinité, être en quelque sorte devenu "un personnage de ses romans"! En 2016, la Fatwa de Khomeiny, qui menaçait de tomber dans l'oubli, quoique toujours en vigueur, est réactivée opportunément, par le Guide Suprême actuel d'Iran, Ali Kameneï, qui promit, alors, une récompense de 3,5 millions de dollars à qui assassinerait Salman Rushdie. Depuis quelques années, celui-ci avait émigré aux États Unis, dont il avait acquis la nationalité, et vivait à New York. Il semblait que, de guerre lasse, il avait renoncé à vivre sous protection policière. C'est dans ce contexte qu'est intervenu l'attentat, lors de cette conférence, à New York.

Les intégristes religieux n'ont aucun humour, et n'apprécient ni la littérature (même sous forme de fiction) ni l'esprit critique: que ce soient les assassins du comité de rédaction de Charlie Hebdo, ne supportant pas quelques blasphèmes contre le prophète Mahomet, ou encore le meurtrier de Samuel Paty, voulant punir cet enseignant pour quelques dessins irrévérencieux contre le même Mahomet et donc contre l'Islam, tous refusent la moindre critique, le moindre questionnement, pourtant nécessaire dans un état de droit: un journal conservateur iranien, proche du pouvoir, n'avait-il pas écrit, au sujet des caricatures présentes dans Charlie Hebdo, et juste après l'attentat:"Qui sème le vent, récolte la tem-pête"?! En Iran, notamment, qui réalise, depuis près de 40 ans, une interprétation moyennageuse et strictement littérale de l'Islam, la peine de mort est requise pour 35 chefs d'accusation, dont l'apostasie, l'adultère, l'homosexualité, ou la simple consommation de drogue. La Loi du Talion, et les châtiments corporels (amputations notamment), s'appliquent pour les auteurs de vols ou de blessures corporelles graves. Le port du voile est obligatoire pour les femmes, qui sont considérées comme des mineures à vie: la parole d'une femme, dans un tribunal vaut deux fois moins que celle d'un homme. L'avocate Nasrin Sotoudeh, entre autres, a été condamnée à 38 ans de prison, et cent coups de fouets, pour avoir défendues des iraniennes non ou mal voilées, et pour avoir retiré son couvre chef, lors d'une audience au tribunal, ce qui lui valut d'être accusée "d'atteinte aux bonnes moeurs", ou de "dépravation sexuelle"!

La même critique peut être formulée contre d'autres intégrismes religieux. Ainsi, dans "le traité sur la tolérance", Voltaire critique, au 18e siècle, le supplice réservé au chevalier de la Barre, qui pour avoir blasphémé contre Dieu, se vit arraché la langue. Avant la Révolution Fran-çaise, la Justice était le fait de la monarchie de Droit Divin, qui promettait des châtiments corporels atroces à ceux qui transgressaient les règles établies. Ces châtiments corporels furent heureusement abolis, comme l'annonçait la prise de la Bastille et la destruction de celle-ci. Même si l'État français est devenu laïc, en 1906, il subsiste encore parfois des formes d'intolérance: il y a quelques années, les projectionnistes du film de martin Scorsese, La tentation du Christ avaient été menacés. De même, les metteurs en scène de deux pièces de théâtre, Golgotha Picnic,et Concept sur le visage du Christ, avaient été menacés de mort, pendant ou avant des représentations, par des intégristes. Ainsi, toutes les religions monothéistes ont eu des thuriféraires fanatiques et/ou fondamentalistes néfastes.

Pourtant, il existe une manière d'interroger judicieusement les religions: celle initiée notamment par Habib Bourguiba, en Tunisie, en 1957: le 13 Août de cette année là, le Combattant Suprême instaura le Code du Statut Personnel, qui révolutionna le statut de la femme, notamment dans un pays arabe, comme la Tunisie, qui vivait, jusqu'alors sur le règne du Dey monarchique: en quelques années, la polygamie fut interdite, le port obligatoire du voile refusé, la contraception autorisée, ainsi que l'avortement, le divorce légalisé, bien avant la France: la Constitution tunisienne de 1959 se basait sur une interprétation moderniste et séculière de "l'islam", qualifiée, malgré tout, de "religion de l'État"!! Une spécificité unanimement reconnue par les défenseurs des Droits humains, même si la tendance préconisée par le président tunisien actuel semble revenir en arrière, en se référant, dans la nouvelle constitution adoptée par référendum, à une vague et inquiétante "oumma islamyia" ou "communauté islamique", à connotation planétaire!

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.