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C'est donc très tôt le matin, à l'aube du 24 Février, que le président russe, Vladimir Poutine, a décidé d'une attaque militaire de grande envergure contre son voisin, l'Ukraine, pourtant État souverain, depuis l'indépendance du pays, en 1991, lors de la chute de l'union Soviétique. Après plusieurs semaines d'une partie de poker menteur, au cours de laquelle le président russe promettait "la paix" à ses interlocuteurs, tout en massant des troupes de soldats par centaines de milliers aux frontières du pays, et en menaçant ses interlocuteurs occidentaux de représailles si ceux-ci s'opposaient à ses volontés (l'engagement de ne jamais faire adhérer l'Ukraine à l'OTAN), après les alertes proférées pendant des jours entiers par les États Unis, qui annonçaient cette invasion, et après d'incessants balais diplomatiques, en Europe et à Moscou, l'autocrate russe a fini par abattre son jeu de cartes et dévoiler son vrai visage: celui d'un homme habité par le ressentiment, craignant par dessus tout la démocratie, incarnée par cette Ukraine qui souhaite se rapprocher de l'Europe, peu soucieux du droit international et des Droits de l'Homme dans son propre pays (journalistes assassinés, comme Ana Politoskaïa, par exemple, et coupables impunis, opposants politiques emprisonnés ou empoisonnés, comme Alexeï Navalny, par exemple).
Sur le plan international, la pulsion guerrière de la Russie, incarné par celui qui se prend pour le tsar en chef, n'est plus à démontrer: après la fameuse guerre de Tchéchénie, au cours de laquelle, Poutine promettait d'aller "butter" ses adversaires "jusque dans les chiottes", intervention qui a provoqué un bain de sang innommable, notamment dans sa capitale, Grosny, la Russie s'est illustrée, dans la guerre en Syrie, par son soutien indéfectible au dictateur Bachar El Assad, et sa complicité dans des crimes de guerre, que ce soit par l'utilisation d'armes conventionnelles, ou que ce soit pour permettre à la Syrie d'utiliser son stock restant d'armes chimiques contre des populations civiles: elle a toujours opposé son véto au Conseil de Sécurité de l'ONU, malgré les preuves accablantes apportées par les experts dans l'utilisation de ces armes chimiques, pourtant interdites par les conventions internationales, notamment lors des bombardements d'Alep, face à la volonté de certains pays de poursuivre le régime syrien pour "crime contre l'humanité" et "crimes de guerre". Le régime de Vladimir Poutine s'est également manifesté, de manière martiale, en 2014, en annexant, en violation du droit international, la Crimée, pourtant partie intégrante du territoire ukrainien, auparavant, et en instrumentalisant les régions de Louhansk et de Donetsk, près du Dombass, régions russophones d'Ukraine, qui avaient déclaré de manière unilatérale, leur indépendance: les accords de Minsk pourtant signés par la Russie, l'Ukraine et des pays occidentaux, promettaient d'établir un cessez le feu entre les régions en conflit, et le mémorandum de Budapest de 1994 le respect des frontières internationales et intangibles de l'Ukraine par les parties signataires. On ne mentionnera pas non plus l'intervention douteuse de la Russie, en Géorgie, il y a quelques années, où là encore, le président russe essayait de maintenir outrageusement son influence hégémonique auprès d'une ancienne république soviétique, pourtant devenue un pays souverain et indépendant.
En envahissant l'Ukraine, Vladimir poutine déchire violemment les accords de Minsk, et s'attaque ouvertement à la souveraineté des peuples, comme du temps de l'Union Soviétique, intervenant dans des pays du pacte de Varsovie, en Tchécoslovaquie, en 1968, en Hongrie, en 1956, pour réprimer dans le sang, tout sentiment de liberté et de démocratie. Mieux même: en se présentant comme "acteur de la paix", et en reconnaissant les républiques autoproclamés de Louhansk et de Donesk, juste avant d'envahir l'Ukraine dans sa totalité, il adopte la même tactique rusée que le führer allemand, peu après les accords de Munich, en 1938, et l'envahissement des Sudètes tchécoslovaques, face à la stupeur et l'incrédulité de certains responsables politiques, en France notamment. Poutine reste nostalgique de la grande Russie, celle des tsars d'avant la Révolution de 1917, mais également celle de l'influence politique de l'Union Soviétique, celle de la grande puissance, qui faisait presque jeu égal avec les États Unis, notamment militairement et économiquement, même si son régime actuel s'en différencie nettement. C'est cette nostalgie nationaliste manifeste de la grande Russie, qui l'a incité notamment à interdire et dissoudre l'association Mémorial qui enquétait sur les violations des droits Humain, en Russie actuelle, et voulait revivifier la mémoire des crimes de Staline. De même, la glorification de la lutte héroïque des soviétiques pendant la 2e guerre mondiale, notamment pendant le siège de Stalingrad, fait partie de la stratégie d'instru-mentalisation politique de Vladimir Poutine, dans l'optique d'un projet nationaliste et impérialiste, à l'est de l'Europe, qui vise notamment à remplacer le régime actuel en Ukraine par un gouvernement fantoche à sa botte.
Face aux premières dizaines de morts subis en Ukraine, on ne peut qu'éprouver une certaine compassion à l'égard de ces populations, qui vont vivre dans la peur et l'inquiétude, face aux bombardements. On ne peut que manifester de la sympathie pour les réfugiés qui ne manqueront pas de fuir l'avancée des troupes russes, et venir tenter leur chance en Europe. De même, on ne peut qu'émettre le souhait que la population russe, dans sa grande majorité, n'approuve pas les récentes décisions de son président, comme ces manifestants russes, à Saint Pétersbourg, qui s'opposent à l'intervention meurtrière de leur pays, en Ukraine, malgré l'interdiction proférée par leur président et les risques encourus à cette occasion.