Les émeutes au Xingjang (1) et la répression chinoise sur la population turcophone musulmane Ouïghours suivent de quelques jours seulement la visite du président turc Abdullah Gül.
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L'adhésion "controversée" de la Turquie à l'Union européenne n'aurait pas été évoquée par le président chinois. On prétend que les Chinois ne disent jamais non. Ne pas évoquer un sujet permet d'éviter de le dire.
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Il est surprenant que la Chine rende public la répression des Ouïghours avec autant d'images juste après une telle visite (*) dont elle n'ignore pas les relations de cette population avec la Turquie. Le Tibet n'a pas eu droit à autant de publicité, ni la place Tian An Men.
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Cette manoeuvre médiatique au moment du débat sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne n'est peut être pas fortuite. La Chine adresserait alors comme un avertissement aux Européens, désignant le risque d'un futur sujet de tension diplomatique, comme l'est déjà le Tibet. Sauf qu'à la différence du Tibet, l'adhésion de la Turquie impliquera directement l'Union européenne - et l'OTAN - dans la contestation de la répression des Ouïghours au Xingjan.
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Cette hypothèse conduit à penser que la Chine est réticente à propos de l'adhésion de la Turquie.
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Elle a avantage à y être opposée pour des raisons économiques.
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Une immixtion occidentale dans ses affaires intérieures risquerait de compromettre son développement économque. L'Europe est son client. Se fâcher avec l'Europe engendre une perte de revenus.
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Elle y a également avantage pour des raisons politiques :
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L'Europe a confié sa défense aux Américains via l'OTAN comme l'expose l'articel 42-2 du Traité de Lisbonne : "La politique de l'Union au sens de la présente section n'affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres, elle respecte les obligations découlant du traité de l'Atlantique Nord pour certains États membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre". (2)
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L'adhésion de la Turquie provoquerait l'implication européenne dans la défense des Ouïghours et entraînerait l'immixtion des Américains dans ses affaires intérieures.
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L'adhésion de la Turquie à l'Union européenne contrariera une poltique de relations privilégiée de la Chine avec la zone d'influence turque. Cette zone comporte des ressources naturelles nécessaires au développement industriel chinois.
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Ce qui précède milite pour l'affirmation de la Turquie comme puissance régionale, au côté de l'Union européenne et non dans l'Union européenne. Une telle affirmation satisfera mieux les Turcs et préservera les équilibres pour la paix. L'impartialité de l'Europe garantit sa médiation pour un éventuel recours à propos des répresssions dont souffrent les Ouïghours. L'Union est bloquée par le débat sur la Turquie dans l'Europe ou hors de l'Europe. Il n'a pas de solution. C'est pourquoi l'Union doit favoriser l'affirmation de la Turquie comme une puissance régionale et promouvoir plutôt l'idée d'une Turquie aux côtés de l'Europe, en faire un partenaire.
Notes :
(1) le Xingjan est la province où la Chine procède à ses essais nucléaires. Elles abrite des camps de concentration (LAOGAÏ). Le Xingjan a des réserves de pétrole. La Chine soutient le régime de Corée du Nord. Elle est le pays qui pratique le plus la peine de mort. Des articles dénoncent les trafics d'organes prélevés sur les condamnés (autre article).
(2) Le secrétaire général du Conseil européen et responsable de la "politique étrangère de sécurité commune", Javier Solana, était précédemment le secrétaire général de l'OTAN. C'est comme si un secrétaire général du (défunt) Pacte de Varsovie était devenu le secrétaire d'Etat de la Maison blanche. L'OTAN est-elle une vassalisation de l'Europe ? Le parcours de Javier Solana donne en tous les cas un exemple d'entrisme des USA dans les affaires européennes qui n'a pas pas dérangé qui que ce soit, même les Verts.