cet article fait partie d'un ensemble sur les élections présidentielles Françaises de 2017
La position de la France Insoumise sur le vote au 2ème tour des présidentielles n’a pas réussi à franchir le barrage médiatique.
On continue donc à entendre des honnêtes gens nous reprocher d’avoir eu une position « pas claire » vis-à-vis du FN, prolongeant ainsi l’odieuse polémique illustrée par Pujadas dans une émission de France 2.
Il paraît donc nécessaire de mettre les points sur les « i ».
La construction d’un danger fantasmagorique
On le répète ici, nous affirmions qu’il n’y avait absolument aucune raison d’imaginer que Mlle Le Pen puisse gagner les élections. Les seules voix de la droite républicaine et de l'électorat Macron suffisaient à la battre, Macron n’a pas besoin de nos voix pour lcela. Dans la réalité, Le Pen est l’idiote utile, l'épouvantail agité depuis 30 ans par le PS pour déclencher le « vote utile » à son profit. La suite a largement confirmé nos prédictions.
Pour prendre un exemple, prendre un pot de fleurs sur la tête est mortel. Mais en allant voter, nous sommes nombreux à être passés sous des balcons sans frémir.
Oui, Le FN est dangereux. Mais il ne sera pas élu, donc le risque Le Pen est actuellement nul.
Préserver la cohérence de la lutte contre l’influence du FN
La France Insoumise est radicalement engagée contre le fascisme. Cela nécessite de réfléchir en profondeur au phénomène, de l’analyser dans tous ses axes, et d’en tirer les conséquences pour l’action politique. On ne fait pas de la politique pour se faire plaisir à la mode « antifa », on veut décoller l’électorat populaire de son aimant xénophobe. Même si ça nécessite d’agir un peu plus finement que de crier F comme Fasciste, N comme Nazi.
Quel est donc pour nous le moteur de l’action anti FN :
1) quand on est au pouvoir, lutter contre l’emprise de la finance et avoir une vraie politique sociale. Suivez mon regard... Certains de ceux qui hurlent à la collusion FN-FI n’avaient pas vraiment le derrière propre.
2) quand on est dans l’opposition, montrer patiemment, individu par individu, aux électeurs du FN que la cause de leurs problèmes, ce n’est pas le bougnoule, le Rom, « l’assisté », le syndicaliste, mais que la raison fondamentale des dysfonctionnements qui les affectent, c’est la finance qui se gave. Les 1 % contre les 99 %, ça fonctionne très bien.
Et ça fonctionne !
Le résultat est là. Marine était donnée en tête au premier tour avec un score de 25 à 30 %. Au final, elle a péniblement fait 20 %, et il s’en est fallu de quelque 600 000 voix d’hamonistes ou de trotskistes pour qu’elle soit éliminée au profit de la France Insoumise. Et c’est bien la FI qui en est la cause. Outre toutes les expériences de lepenistes ralliés que nous avons, personnellement, sur les marchés, à la sortie des métros, au boulot, on a bien vu que, dans les quartiers populaires, FI a taillé des croupières à un FN, qui jusqu'ici détrônait petit à petit le PC.
Mais le combat n’est pas fini
Le FN est en régression, mais à part son noyau dur de 5 % de nazilons, de pétainistes, d’OAS et de poujadistes, il reste 15 % d’égarés à convaincre.
Pour tous ces paumés, Le Pen est la solution à leurs problèmes : "Gauche et droite c’est pareil, c’est le Mal, on a déjà essayé". Et on a du mal à argumenter la dessus : dire à ces gens, "oui, mais le PS c’est pas la vraie gauche", etc, ça ne passe pas du tout !!! pour eux, c’est UMPS, droite et gauche, c’est des nuances dans un camaïeu de merde.. La pédagogie qui fait appel au raisonnement intellectuel ne fonctionne qu’avec des individus fortement politisés, mais pas dans ce contexte. Avec 30 ans de com qui nous raconte que la gauche est au pouvoir, l’image mentale est fixée, il est illusoire d’essayer de la faire bouger par la démonstration rationnelle.
Et c’est donc un discours d’immersion qu’il faut utiliser, partant du vécu des gens : la racine du problème, c’est le capitalisme financier, c’est lui le bandit, l’assassin qui cause chaque année 14 000 morts par le chômage,1000 morts par accident du travail, 20 000 morts par la pollution, etc... Le problème, ce n’est pas quelques dizaines de millions d’euros de fraudes, certes indiscutables, aux allocations de ceci ou cela, c’est plutôt les 60 milliards d’évasion fiscale, c’est le CAC 40 qui ne paie pas l’impôt sur les bénéfices alors que toutes les PME raquent leurs 35 %.
Et là arrive immédiatement le problème de la cohérence du discours !!! Comment faire passer ce discours quand on aura, même une seule fois, appelé à voter Macron ? Macron qu’on dénonce par ailleurs comme étant le représentant patenté des 1 %, le banquier qui utilise des mécanismes transnationaux (Europe, CETA, etc...) pour retirer tout pouvoir à la représentation nationale, au service des puissances d’argent.
On rembobine le film
- Un lepeniste vous raconte, je suis dans la débine, heureusement le FN me défend. On lui répond c’est Macron qui vous met dans le jus, Le Pen vous ment en prétendant le contrer pour vous défendre, mais en vrai c’est une enfoirée.
- Ensuite on change de casquette et on va à la télé dire : Le Pen est un danger public, votez Macron.
- Vous imaginez juste 10 secondes la claque qu’on va se prendre la prochaine fois qu’on ira raconter à notre lepeniste que son ennemi c’est Macron ?
Voilà pourquoi, à mon avis, la France Insoumise a très bien fait de ne pas appeler officiellement à voter Macron, qui n'avait pas besoin de nous pour gagner.
La puissance de la com de l’oligarchie
Il faut en permanence garder à l’esprit que la finance maitrise les leviers de la communication. Que ses relais vont passer leur temps à susurrer plus ou moins finement des soupçons de collusion ou souffler sur les braises de l’antifascisme pour discréditer les forces qui sont le plus à même de lui nuire. La principale d’entre elles, c’est évidemment la France Insoumise.
Quand on connait les origines, les militants de la France Insoumise, il est évidemment totalement débile (et insultant!) d’imaginer qu’il puisse y avoir une quelconque parenté entre FI et le FN. Il faudrait mieux se demander si, par hasard, FI n’aurait pas une réflexion politique un peu plus élaborée que le simple réflexe infantile et depuis toujours inefficace de l’antifascisme instinctif.