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Billet de blog 10 nov. 2014

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Les salaires de l’indécence : augmentation de 7,1% des rémunérations dans les cabinets ministériels de Manuel Valls

Pendant que le peuple se saigne et que le gouvernement veut faire passer l’austérité pour la seule politique possible, les cabinets ministériels de Valls ne connaissent pas les restrictions budgétaires : leurs membres ont vu leurs rémunérations mensuelles brutes moyennes progresser de 7,1% par rapport à celles du gouvernement Ayrault en 2013. La palme des augmentations revient à l’Enseignement supérieur et la Recherche avec 12 222 euros, soit une augmentation de 10%, à égalité avec les conseillers de Valls.

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Pendant que le peuple se saigne et que le gouvernement veut faire passer l’austérité pour la seule politique possible, les cabinets ministériels de Valls ne connaissent pas les restrictions budgétaires : leurs membres ont vu leurs rémunérations mensuelles brutes moyennes progresser de 7,1% par rapport à celles du gouvernement Ayrault en 2013. La palme des augmentations revient à l’Enseignement supérieur et la Recherche avec 12 222 euros, soit une augmentation de 10%, à égalité avec les conseillers de Valls.

Il n’est pas certain que les personnels de l’Enseignement supérieur et de la Recherche apprécieront d’apprendre que le coût des collaborateurs de Geneviève Fioraso et des fonctionnaires de son Secrétariat d’Etat a augmenté de 10% : de 11 140 euros en 2013 le salaire mensuel brut moyen serait passé à 12 222 euros en 2014, prime comprise. Alors que le collectif Sciences en Marche et la majorité des organisations syndicales se mobilisent contre le désengagement de l’Etat et la situation catastrophique  des laboratoires publics et des universités, alors que Bercy coupe 20% de la quatrième tranche annuelle des crédits aux universités, alors que la précarité explose partout, l’or coule à flots dans les cabinets de Manuel Valls. Ce n’est pas seulement « choquant » comme le rapporte le député René Dosière sur son blog. C’est tout simplement honteux et indécent au regard des sacrifices imposés quotidiennement à nos concitoyens.

Le député socialiste René Dosière,  auquel le PS avait retiré son investiture aux dernières législatives et qui mène depuis 15 ans un combat solitaire pour collecter des informations sur les budgets de l’Elysée et des ministères, a accompli un travail salutaire, travail qu’on aimerait voir conduit par davantage de députés. A force de questions écrites aux différents ministères (voir ici), il est parvenu à compiler un précieux document qu’il a mis en ligne sur son blog. On peut le télécharger ici. On y apprend principalement deux choses :

1. « Les cinq rémunérations les plus élevées se trouvent au ministère de la culture (13 744 euros), au ministère de l’intérieur (12 987 euros), au ministère de la décentralisation (12 680 euros), au ministère du redressement productif (12 369 euros) et au secrétariat d’Etat à l’enseignement supérieur (12 222 euros). »

2. « Il est fréquent que les collaborateurs de cabinet soient mieux payés que leur ministre, ce qui est anormal. Alors qu’un ministre perçoit une rémunération brute mensuelle de 9940 euros, on constate que dans 19 ministères (sur 31 soit dans 61% des cas), la rémunération moyenne des membres de cabinet est supérieure. En 2013 cette proportion s’élevait à 56%. »

Une annexe au Projet de Loi de Finances 2015, analysée récemment par Laurent Mauduit, vient utilement compléter le travail du député Dosière. Intitulée « Personnels affectés dans les cabinets ministériels », elle nous apprend que les indemnités pour sujétions particulières (ISP, à savoir les primes) s’élèvent pour l’ensemble des ministères à plus de 24 millions d’euros. Selon le document de Dosière ces primes vont de 522 euros par mois au Secrétariat d’Etat aux Handicapés à 5070 euros pour le Ministère de la Culture. L'annexe montre (p. 61) que Geneviève Fioraso a considérablement étoffé son secrétariat entre 2013 et 2014 : de 13 à 21 membres, les rémunérations passant de 750 000 euros à 1,5 millions. René Dosière aurait matière à une nouvelle question.

Je fais une suggestion de bon sens, dans l’intérêt de nos finances publiques et de la moralité de notre République : équilibrer et plafonner les primes afin de diviser par deux leur montant total. L’Etat montrerait l’exemple et pourrait économiser facilement 10 millions, au lieu de siphonner les réserves du Fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP), nouveau scandale à mettre au crédit de ce gouvernement de la honte.

J’observe enfin que la baisse du nombre de fonctionnaires dans les ministères n’est pas suivie d’une politique d’économie concernant les primes et rémunérations des conseillers. Dégraisser la masse salariale ne saurait constituer un prétexte pour enrichir une oligarchie alors que le pouvoir d’achat des fonctionnaires ne cesse de baisser dramatiquement depuis des années.

Ce phénomène de vases communicants bien peu vertueux me rappelle furieusement le prétexte avancé par un président d’université pour maintenir les primes de ses vice-présidents à un niveau indécent : le nombre de vice-présidents avait baissé. Le jour du vote de ces primes (11 459 euros par an), j’avais claqué la porte du Conseil d’administration pour manifester mon indignation. Le gouvernement de Manuel Valls fait tout ce qu’il faut pour que les citoyens claquent la porte de la République.

Car l’indécence n’a plus de limite. Au rythme d’un scandale par semaine, les militants du Front National peuvent dormir tranquilles : le gouvernement socialiste travaille pour eux. Et le blogueur citoyen en arrive à un point où il est presque écœuré de participer à la dénonciation. Dans l’affaire qui nous occupe, la seule consolation est qu’un député apparenté socialiste aura au moins fait son travail. Ils devraient être plus nombreux à prendre soin de la chose publique. Combien seront-ils samedi 15 novembre à rejoindre les citoyens qui se lèvent contre l'austérité?

Pascal Maillard

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