Communiqué de presse de l’Association pour la liberté académique (ALIA)
Le 16 décembre 2024
Quitter « X » au nom de l’éthique de la science
La liberté académique et l'éthique professionnelle sont des valeurs cardinales de l'Université et de la recherche. Fondamentales à la construction du savoir scientifique, elles s'appuient sur deux principes : la prise en compte des faits objectivables et la dispute argumentée entre pairs. Depuis sa prise de contrôle par M. E. Musk, twitter, rebaptisé « X », est devenu une machine de guerre lancée contre ces principes.
En raison de leur nature propre, les médias dits sociaux participent d'un autre mode de discours et d'argumentation que la science. Pour autant, ces réseaux ne sont pas nécessairement en conflit frontal avec l'éthique et les buts sociaux de nos métiers. Ils peuvent favoriser une diffusion des connaissances, des discussions, voire des formes de démocratisation de la science. Mais lorsqu'un de ces réseaux se construit comme une caisse de résonance d’élucubrations, d’impostures et de mensonges assumés comme tels, dans le but de dévoyer les normes du débat public démocratique et de le fragmenter, les institutions de la communauté académique ne peuvent rester indifférentes. Le pacte qui nous lie à la société repose sur la conviction que le débat public doit respecter des normes de probité intellectuelle, de rigueur, d'écoute et d'attention aux faits vérifiés. Ce sont ces mœurs, ces règles, ces standards que piétine le réseau social « X ».
Ces derniers mois, en France et dans le monde, de nombreuses universités et de nombreux centres de recherche ont quitté cette plateforme attentatoire à tous les principes de la liberté académique et du débat scientifique. Des milliers de pairs, dans tous les pays, ont fait le même choix individuel. Ce mouvement ne fait que s'amplifier depuis que l'action de M. Musk et de son réseau a puissamment contribué à ramener au pouvoir M. Trump, dont le rapport à la vérité, à la science et à la démocratie n'a plus besoin d'être commenté.
Les institutions publiques académiques – universités, laboratoires, facultés et organismes de recherche – qui feraient le choix de rester sur cette plateforme iraient contre la volonté de leurs collègues et renieraient leurs valeurs. Plus grave, elles inciteraient leurs membres à y rester également, sachant que la « visibilité » sur les réseaux sociaux est devenue un critère d'évaluation des carrières et des stratégies de diffusion de la recherche.
C'est pourquoi nous demandons à toutes ces institutions de prendre les dispositions nécessaires pour fermer définitivement leurs comptes « X » et de repenser leurs stratégies de l'utilisation des réseaux sociaux à l’aune de leur polarisation idéologique, au plus tard avant l'entrée en fonction de M. Trump, dont le retour à la présidence des États-Unis, avec M. Musk comme porte-drapeau, symbolise le dévoiement du discours public et des normes démocratiques.
Au-delà de « X », nous observons avec préoccupation la décorrélation qui s'installe trop souvent entre les stratégies d'autopromotion des institutions académiques et les règles de patience, de partage et de prudence qui sont des gages de l'éthique et de la rigueur académiques. La science n'a rien à gagner à se compromettre dans une course à la renommée et à la médiatisation. Nous formulons le souhait que les événements liés à la plateforme « X » soient l'occasion d'une réflexion collective approfondie sur ces questions.
Association pour la liberté académique ALIA
Communiqué à retrouver ICI
contact@liberte-academique.fr
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Note de l'éditeur du billet : une belle coïncidence a voulu que Mediapart décide de quitter "X" en ce 17 décembre 2024 : https://www.mediapart.fr/journal/france/171224/contre-la-desinformation-mediapart-quitte-x