J'appelle mes amis de la gauche et de la gauche de la gauche à la plus extrême vigilance dans l'expression de notre légitime indignation devant la poursuite de l'offensive militaire israélienne à Gaza : il est maintenant très clair qu'une manipulation politique de l'extrême-droite est à l'œuvre.
Des militants d'extrême-droite sont présents dans certains médias de gauche et extrêmement actifs sur internet où ils distillent, sous couvert de prise de position pro-palestinienne dans le conflit en cours, des motifs clairement antisémites (la démission de René Balme acceptée par la direction du PG en 2012 en était déjà un indice éclatant : il est à déplorer que l'ex maire de Grigny ait pu bénéficier de l'estampille FdG aux dernières élections, avec le résultat qu'on sait : la victoire de la droite).
L'un de ces motifs est la comparaison perverse et délétère de l'Etat d'Israël au Reich nazi (et toutes déclinaisons sur ce thème) : c'est un des marqueurs de ce discours, qui seul mérite le nom de fasciste. En aucun cas, l'aventureuse politique militariste du gouvernement actuellement au pouvoir en Israël ne saurait impliquer la totalité des Israéliens, et encore moins la diaspora juive. D'autre part, cette propagande antisémite active présente sur tout le continent africain (avec circulation de ce faux historique qu'est le Protocole des Sages de Sion) sert, sous couvert de cause pro-palestinienne et/ou de nationalisme panarabe, de toutes autres fins, semblables à celles des extrême-droites européennes : détourner la légitime colère des peuples écrasés par l'oppression autoritaire des diverses oligarchies (lesquelles sont loin d'être toutes "occidentales"), en désignant un unique ennemi "étranger", Israël dans les pays arabes et africains, les musulmans (et les Juifs ou les Roms) dans les pays de l'hémisphère nord.
C'est ce piège politique, particulièrement délicat à éviter dans la situation actuelle de guerre israélo-palestinienne, et qui seul, je le répète, mérite le nom de fasciste, qu'il nous faut à tous prix combattre, en redoublant de vigilance quant au vocabulaire employé et aux cibles désignés à la vindicte. Il est clair, par exemple, que toute déclaration de guerre à mort contre Israël, quelle que soit l'opinion critique qu'on puisse par ailleurs formuler sur le rôle géopolitique du militarisme israélien, est clairement à ranger du côté de cette offensive fasciste.
De même l'assimilation du terme "sioniste" aux mouvances israéliennes d'extrême-droite n'est pas recevable : c'est ignorer ce qu'a pu être le sionisme en son origine, toujours divers (ce qu'il est resté), mais majoritairement traversé par des inspirations universalistes et démocratiques.
Enfin, il ne s'agit pas ici de justifier l'imbécile dispositif policier qui a transformé la manifestation interdite d'hier à Paris en bataille rangée, encore moins de justifier l'interdiction de manifester.
Cependant, il est clair que les militants d'extrême-droite dont je parlais plus haut étaient présents hier à cette manifestation, qu'ils ont poussé à la provocation, et qu'ils étaient disciplinés et outillés (voir l'article de Stéphane Alliès). Par ailleurs, cette manifestation d'hier permet de douter (euphémisme) que, quelle que soit la bonne volonté du NPA ou d'Ensemble, leur service d'ordre ait la possibilité pratique d'isoler ces manifestants (clairement, les SO ont été débordés hier), et cela pose un grave problème quant à la tenue d'une future manifestation.
A mon sens, elle ne peut avoir lieu qu'à se donner les moyens d'empêcher l'extrême-droite de nuire (cela est vrai pour les provocations par ailleurs orchestrées par la LDJ, comme ce fut le cas, semble-t-il, rue de la Roquette - mais ce serait une faute que de désigner la seule LDJ comme seule responsable des provocations : il y a d'autres groupes d'extrême-droite actifs du côté soi-disant "pro-palestinien" : on les a vus à l'œuvre hier). Or je ne crois pas que les conditions soient réunies pour que cela puisse être le cas. D'autant que la police, et le ministère de l'Intérieur, cherchant à justifier la politique d'interdiction, ne vont pas calmer le jeu (le "jeu" de l'affrontement favorise toujours et automatiquement les éléments les plus belliqueux, et donc, l'extrême-droite).
Attention, chers amis, à un certain angélisme coupable, qui laissant faire les manipulations, serait responsable de laisser la situation s'envenimer jusqu'à devenir politiquement irrespirable, jusqu'à ne plus pouvoir exprimer aucune position saine sous peine de prendre l'intolérable risque de se solidariser avec les groupuscules fascistes qui ont intérêt à ce qu'on en vienne là.