En mémoire du lieutenant colonel Beltrame
Comme je crois l'immense majorité des citoyens de ce pays, j'ai éprouvé, devant le sacrifice du lieutenant colonel Beltrame pour sauver un otage, une émotion profonde, un sentiment de ce que peut être la grandeur humaine.
On pourrait ironiser devant la récupération par le président de la République de cette grandeur et de cette intégrité professionnelle héroïque.
Pourquoi n'a-t-il mobilisé la mémoire du lieutenant colonel Beltrame que pour minimiser les 50 € de diminution des APL ? N'aurait-il pas pu aussi fustiger la grève des cheminots ? Se battre pour le service public ferroviaire, n'est ce pas dérisoire devant le sacrifice de sa vie ?
Le président n'aurait-il pas pu faire appel au lieutenant colonel Beltrame pour faire honte aux salariés d'Air France ? Un gendarme se sacrifie et vous luttez misérablement pour 6% d'augmentation ?
Et les EHPAD ? Pourquoi ne pas clouer au pilori les soignant-e-s qui se battent pour mieux soigner des vieillards, alors que le lieutenant-colonel Beltrame est mort en pleine force de l'âge ?
Les fonctionnaires vont, paraît-il, manifester en masse le 22 mai pour défendre les services publics. Pourquoi le président Macron ne les appelle-t-il pas à un peu plus de dignité ? Peut-on mettre en balance cette idée mesquine et basse de service public avec la grandeur du sacrifice d'une vie ?
Et la suppression de l'ISF ? Le président ne devrait-il pas faire appel à la mémoire du lieutenant-colonel Beltrame pour égaler son héroïsme à la grandeur d'une politique courageuse visant à enrichir les plus riches ?
Non décidément, ironiser sur cet épisode de communication gouvernementale serait malvenu.
Mieux vaut dire les choses clairement : en faisant appel, pour justifier sa politique, à la mémoire d'un héros mort pour sauver un otage, le président a fait tout simplement preuve d'indignité.