Pour une révision du dogme écologiste contre le nucléaire civil
La défaite municipale de la droite et de la Macronie dans la grande majorité des plus grandes villes de France est un grand motif de satisfaction à gauche.
La présentation médiatique de ces défaites réactionnaires à Paris, Marseille, Bordeaux, Grenoble, Strasbourg ou Lyon (et j'en oublie) les a transformées en « vague verte ». Il est vrai que les maires élu-e-s sont souvent écolos. Poutant, c'est l'union des forces de gauche, réunies sur un programme de réformes urbaines sociales et écologiques, union pour laquelle le PCF a souvent pesé de tout son poids, qui a assuré ces victoires. Faut-il l'oublier ?
Il reste que la présentation conformiste de ces élections comme une victoire des seuls écologistes a des effets politiques : les dirigeants EE-LV parlent d'adhésions massives ; le nombre d'adhérents écolos arrive au chiffre sans précédent de ...dix mille. Ce n'est pas rien, mais je pourrais citer un parti de gauche indiscutable qui en revendique cinq fois plus. Il considère pourtant que c'est bien insuffisant pour susciter l'activité politique de masse dont la France a besoin pour enfin pouvoir respirer, après plus de trente ans de politique libérale étouffante.
Les indéniables progrès de l'influence écologiste dans la société posent en termes relativement nouveaux la question décisive des progrès sociaux et des moyens, à mettre en œuvre, de toute urgence, contre le réchauffement climatique. Développer les pistes cyclables dans les villes, assurer la maîtrise publique de l'eau, protéger les locataires de la spéculation immobilière, développer le logement social, verdir les villes, etc., tout ça figure, comme il se doit, au programme des nouveaux élus municipaux de gauche.
Mais les programmes municipaux ont leurs limites
Face à la répétition des catastrophes climatiques, l'absolue nécessité apparaît de combattre, au niveau national comme européen, les émissions de Gaz à Effet de Serre GES), gaz carbonique, méthane ou protoxyde d'azote, Les politiques municipales peuvent y contribuer, mais la question décisive, celle de la production d'énergie sans émission de GES pour tout un pays n'est pas une question municipale.
N'est-il pas temps pour la fraction écologiste des forces progressistes d'une révision déchirante de leur dogme contre le nucléaire civil ?
On sait maintenant suffisamment que l'éolien, le solaire, le photovoltaïque, la géothermie, la biomasse, doivent contribuer utilement aux besoins incontournables d'énergie pour assurer une vie humaine décente aux dix milliards de terriens des années qui viennent.
On sait aussi suffisamment que la contribution du nucléaire civil au doublement nécessaire de la production mondiale d'énergie propre avant 2050 est incontournable, sauf à capituler devant le réchauffement climatique.
Sait-on que la machine climatique est hautement non linéaire ? Une divergence, un emballement du réchauffement climatique rendant toute vie impossible sur la planète Terre est-il exclu ? Personne ne peut l'affirmer. L'effet de serre sur Vénus, dû au gaz carbonique et à la vapeur d'eau, aboutit à une température au sol de l'atmosphère vénusienne de l'ordre de 500 °C...
En France, la mise en route immédiate de 6 réacteurs EPR est un impératif social et écologique. La poursuite des recherches sur la technologie des surgénérateurs doit être encouragée, pas sabotée. Elle peut assurer à l'humanité 4000 ans de ressources énergétiques propres. La filière au Thorium est aussi à étudier et mettre en œuvre.
Le cœur serré, nous avons assisté au sabordage des avancées mondiales de la France sur la technologie des surgénérateurs. D'abord l'abandon de Super-phénix à Creys-Maleville, ensuite cette année celui d' Astrid, prototype étudié au CEA, abandonnés tous deux par un pouvoir politique médiocre, tournant le dos à l'intérêt général. Des millions de Français-es ont condamné la fermeture stupide, imbécile, ruineuse, de la centrale de Fessenheim, malgré les certificats de fiabilité de l'Autorité de Sûreté Nucléaire. Fermeture qui tourne le dos à tous les efforts de lutte contre les GES. L'exemple éloquent de la politique allemande de développement d'énergie à base d'émission de GES, gaz, lignite ou charbon, ne suffit-il pas à ces dirigeants abîmés dans leurs minables calculs politiciens ?
Certains dirigeants EELV, et d'autres, sont prêts à noyer le poisson écologiste dans une ambition personnelle et des orientations centristes. Pourtant l'objectif n'est pas inatteignable d'un accord de toutes les forces de gauche, appuyés par un mouvement populaire qu'il s'agit de catalyser, avec un contenu social et écologique. Il faut faire sauter le désaccord majeur à gauche que constitue l'orientation irrationnelle d'EELV (mais pas seulement) contre le développement du nucléaire civil. Ce dernier est partie intégrante d'un mix énergétique de combat pour le progrès social et contre les combustibles à GES.
La révision déchirante, par le mouvement écologique, de ses postures désastreuses, indéfendables contre le développement du nucléaire civil serait une avancée majeure vers les conditions d'un rassemblement populaire majoritaire.