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Billet de blog 15 novembre 2015

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Attentats : arrestations dans un lieu très emblématique belge

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On annonce, ce matin, l'arrestation en Belgique et plus précisément à Molenbeek, d'un homme qui aurait participé aux attentats parisiens. Pour tout belge, le nom de cette commune est très connoté. Il s'agit de Molenbeek-Saint-Jean, une des 19 communes de Bruxelles, (équivalent d'un arrondissement), mais surtout la deuxième plus pauvre du pays et où les migrants sont sur-représentés. C'est de là que Mehdi Nemmouche et le terroriste du Thalys étaient partis pour commettre leurs attentats.

A Bruxelles, point de banlieues pauvres (elles sont plutôt riches), les plus défavorisés vivent dans la ville, concentrés dans certains quartiers de toutes les misères, à quelques encablures de la richesse ostentatoire. Molenbeek en est un bon exemple.

Pendant vingt ans, elle a été dérigée par un maire social-démocrate un peu particulier. Philippe Moureaux, très grand bourgeois, y a régné parfois en coalition avec la droite. Le terme de "règne" convient parfaitement à ce personnage qui aimait voir son portrait grand format dans tous les locaux municipaux. Cet ancien ministre de l'intérieur qui avait donné son nom à une loi "contre le racisme" était à la fois un défenseur de valeurs humanistes et aussi un gestionnaire paternaliste, clientéliste. Résultat, Molenbeek affiche les pires indicateurs sociaux.

Plus d'un tiers des enfants y naissent dans une famille sans revenus. Le taux de chômage est très élevé et surtout, la durée de chômage est particulièrement longue. Un tiers des jeunes de la commune vivent d'une allocation (chômage ou équivalent RSA) et ils se concentrent majoritairement dans ces quartiers les plus pauvres de l'est la commune: le "vieux Molenbeek" (en mauve ci-dessous). Là où l'on rencontre toutes les misères. Tous les indicateurs s'y retrouvent: taux de familles nombreuses, taux de chômage. L'un d'entre eux est frappant: par rapport à l'ensemble de Bruxelles, le taux de mortalité des femmes suite à une maladie respiratoire (indicateur de pauvreté) est supérieur de 22%.

Molenbeek rassemble des anciens quartiers ouvriers, industriels, où se retrouvent coincés les populations les plus pauvres, issues parfois des migrations de travailleurs. Parmi eux, les Marocains et Belges d'origine marocaine (non arables mais souvent berbères) sont les descendants de la main d'oeuvre importée volontairement par la Belgique au cours du XXe siècle.

Maltraitées socialement, ces population ont souvent été l'objet de violences policières systématiques, de racisme, d'ostracisme, tout en vivant au coeur de la ville. Ces quartiers ont la réputation très surfaite de lieux où il ne faut pas aller. A de nombreuses reprises, des émeutes sociales ont eu lieu à Molenbeek, souvent suite à des violences policières.

Récemment, ces territoires du "vieux Molenbeek" ont intéressé les promoteurs pour la proximité immédiate avec le centre ville de Bruxelles. Une gentrification encouragée par la mairie a attiré tout d'abord des artistes et populations "branchées" qui ont sauté sur l'aubaine pour s'y installer. Du coup, c'est une véritable éviction des plus pauvres qui s'est mise en place, via l'explosion des loyers. Chaque mètre carré de cave ou de grenier a vu s'entasser celles et ceux à qui rien n'était proposé, faute d'une politique sociale de logement suffisante.

Les "Marocains" de Molenbeek (souvent des Belges aujourd'hui) ne cessent de se sentir de trop, parias, malvenus alors qu'ils vivent au coeur de la capitale européenne.

C'est donc là que l'on retrouve aujourd'hui des branches d'une filière djihadiste. Quelque chose me dit que ce n'est pas tout à fait un hasard.

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