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Billet de blog 2 avril 2019

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La plainte de SUD PTT contre France Télécom Orange et ses dirigeants

Ci-dessous le texte de la plainte déposée par SUD le 15 décembre 2009 et qui sera enregistrée en mars 2010.

Patrick Ackermann

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La Société FRANCE TELECOM fait l’objet depuis un certain nombre d’années de plans de restructuration lourds visant à une réduction massive des emplois.

C’est ainsi que le plan mis en place par Thierry BRETON pour la période 2003-2006 a vu le départ d’environ 20.000 salariés, que le plan « NEXT » et son volet concernant le personnel intitulé « ACT », mis en place en 2005, prévoit le départ de 22.000 agents et salariés.

Le statut de la plus grande partie du personnel, composé d’agents publics, ne prévoit pas dans l’hypothèse de restructurations, de mise en place de plans de sauvegarde de l’emploi tels qu’ils sont prévus par l’article L 1233-61 et suivants du Code du Travail, (dans le cadre de l’accompagnement social des procédures de licenciement).

La Direction de FRANCE TELECOM a donc décidé de longue date dans le but revendiqué de dégager le maximum de dividendes en faveur des actionnaires, d’utiliser des méthodes de gestion d’une extraordinaire brutalité, pour provoquer et accélérer le départ d’un grand nombre d’agents de l’entreprise.

C’est ainsi que devant l’assemblée générale de l’ACSED (Association des Cadres Supérieurs et Dirigeants) de FRANCE TELECOM, Didier LOMBARD, Président Directeur Général du Groupe, déclarait le 20 Octobre 2006 « il nous faut un free cash flow de 7 milliards d’euros », cet objectif imposant selon lui la suppression de 22.000 emplois supplémentaires, Olivier BARBEROT, Directeur des Relations Humaines, précisant de son côté « Le Président m’a demandé de présenter dès lundi au Comité de Direction un crash program pour accélérer ACT », c’est-à-dire la déclinaison de « NEXT », concernant la gestion des effectifs.

Louis-Pierre WENES, Directeur Exécutif Délégué, illustrait cette politique de gestion du personnel dans les termes suivants : « Je mets la pression tout le temps, je ne laisse pas de marge de manœuvre » (Mai 2007 – La Tribune).

En termes de santé au travail, les résultats de cette politique forcenée de pression de toutes sortes, exercée sur le personnel de l’entreprise, s’avéra désastreuse, l’augmentation considérable de la souffrance au travail se traduisant dans l’entreprise par une « épidémie » de suicides et de tentatives de suicides explicitement liés à l’aggravation des conditions de travail.

C’est ainsi qu’en réponse à un courrier qui lui était adressé par la Fédération Sud PTT, le 2 Décembre 2009, Madame Sylvie CATALA, Inspectrice du Travail, chargée d’une enquête sur cette vague de suicides survenus à FRANCE TELECOM dans la dernière période, répondait le 7 Décembre 2009, tout en relevant que l’enquête étant en cours, il était prématuré d’indiquer les conclusions et les suites qui y seraient réservées :

« Il ressort de l’analyse de documents que j’ai étudiés que l’organisation du travail mise en œuvre durant la période 2006-2009, a été de nature à générer de la souffrance au travail et donc des risques pour la santé des travailleurs de FRANCE TELECOM.

« J’ai également constaté comme je l’ai déjà signifié à Monsieur LOMBARD par courrier en date du 2 Octobre 2009, que la Direction de FRANCE TELECOM a été alertée à de nombreuses reprises, que ce soit par les CHSCT ou le CNHSCT, par des courriers d’inspections du travail et de CRAM, par des rapports de médecins du travail, sur l’existence de risques psychosociaux au sein de l’entreprise et sur la nécessité de prendre des mesures visant à préserver la santé physique et mentale des travailleurs.

« Pour finir, il ressort de l’analyse des documents d’évaluation des risques relatifs à la période considérée qui m’ont été transmis, que les conséquences sur la santé des travailleurs des restructurations, réorganisations, fermetures, ouvertures de sites avec les mobilités tant fonctionnelles que géographiques qui les accompagnent, n’étaient soit pas abordées, soit pas évaluées, soit manifestement sous-évaluées.

« De même les méthodes de management mises en œuvre ou encore les politiques de rémunération, en particulier des vendeurs, n’ont fait l’objet d’aucune analyse en termes d’effets sur la santé mentale des travailleurs.

« Ces faits constituent des infractions aux dispositions des articles L 4121-1 3° et L 4121-2 7° du Code du Travail.

« Ces articles prévoient en effet que l’employeur doit mettre en place une organisation et des moyens adaptés pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs et planifier la prévention en y intégrant dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu’il est défini à l’article L 1152-1.

« C’est en respectant ces obligations que l’employeur se doit d’évaluer les risques (Article L 4121-3 du Code du Travail) et de transcrire cette évaluation dans le document d’évaluation des risques prévus à l’article R 4121-1. »

L’Inspectrice du Travail ajoutait que les obligations réglementaires visées ci-dessus avaient été rappelée à Monsieur ZYLBERBERG, Directeur des Relations Sociales du Groupe par courrier en date du 16 Novembre 2009 et ajoutait qu’elle tiendrait informée l’organisation syndicale des suites réservées à l’enquête en cours, au-delà des mises en garde d’ores et déjà effectuées.

Après avoir longtemps opposé une attitude de déni aux alertes multiples émanant des institutions de veille sanitaire dans l’entreprise et à l’extérieur de l’entreprise, un certain nombre de décisions unilatérales étaient prises dans la dernière période alors que débutaient des négociations sur le stress en Septembre 2009, ces décisions tardives conduisaient à une suspension de la mobilité du personnel et à une suspension de fait de la fermeture des sites et des restructurations.

Parallèlement, le Cabinet TECHNOLOGIA était missionné pour effectuer un rapport sur la situation au sein de FRANCE TELECOM.

L’attitude de déni qui a prévalu au sein de la Direction de l’Entreprise est dénoncée de façon explicite par le CNSHSCT dans sa réunion de Juin 2008, dans les termes suivants :

« A partir de quel chiffre la direction va-t-elle décider d’aborder le problème pour tenter de trouver des mesures ?

« Vos refus systématiques d’aborder cette question prennent un sens dans la mesure où ils confirment la peur de la Direction de voir son organisation du travail mise en cause.

« A tel point que vous combattez les enquêtes demandées dans les CHSCT ou les expertises quand de tels drames se produisent.

« Votre seul objectif : faire en sorte qu’ils ne soient pas reconnus en accidents de service.

« Ces actes sont au moins partiellement la conséquence des restructurations incessantes, des pressions incessantes et insupportables de la Direction sur le personnel... Il est urgent que la Direction de FRANCE TELECOM change d’attitude. »

L’employeur a l’obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

FRANCE TELECOM est hors des clous.

L’objectif de rentabilité financière immédiate pour satisfaire les actionnaires porte atteinte à l’homme dans son travail et le réduisant à un facteur de production, une machine qui ne saurait avoir ni besoins, ni conscience.

Face aux réorganisations, les salariés sont de plus en plus fragilisés, déstabilisés.

Il y a un an l’ensemble des organisations syndicales lançait un droit d’alerte, « nous faut-il aujourd’hui décréter l’état d’urgence ? »

LES ALERTES EN PROVENANCE DE LA MEDECINE DU TRAVAIL :

Depuis des années la non-prise en compte des risques psychosociaux, fait l’objet de rapports des médecins du travail de l’entreprise.

C’est ainsi que le Docteur Camille N’GUYEN- KHOA indique dans le rapport annuel d’activité de médecine du travail du Groupe FRANCE TELECOM :

« Les risques psychosociaux : Nous relevons une évocation constante de ces risques dans presque tous les rapports... ».

Le 2 Mai 2007, le Docteur Chantal MILLE, Médecin du Travail dans le NORD, écrit au CHSCT de sa région « Jusqu’à présent les difficultés ressenties...étaient notées épisodiquement en consultations médicales, sans conséquence chronique et étaient a priori jugulées par des améliorations avec prise en compte managériale.

« Depuis quelques semaines, je retrouve une fatigue psychologique chez certains conseillers avec une démotivation qui s’en suit...et depuis peu l’inquiétude des conseillers du service " fidélisation ", qui se verrait disparaitre.

« Les objectifs sont perçus comme trop lourds en " front " et impossibles à atteindre, avec le sentiment d’être en situation d’échec dans un état de tension permanente.

« Les moyens mis à disposition sont ressentis comme insuffisant pour faire face aux objectifs demandés...

« La problématique essentielle est le sentiment de toujours produire plus avec des objectifs perçus comme irréalisables, ce qui devient dévalorisant...

« Il faut être attentif sur le retentissement de cette situation sur la santé physique et psychologique des salariés.

« En effet des réponses d’adaptation de l’organisme humain sont présentes au début de la situation pour faire face, mais finissent par s’amenuiser jusqu’à l’épuisement.

« Il est important d’éviter cette issue en favorisant la reconnaissance du travail fourni, les phases de récupération notamment. Le surinvestissement permanent peut déboucher sur des pathologies anxio-dépressives...

« Si la situation de tension n’est pas maitrisée, ces mécanismes deviennent irréversibles avec des pathologies médicales installées... ».

Le Docteur J.M. LE MOT, médecin du travail à TOURS, écrit au Directeur Territorial une lettre de démission, qu’il motive ainsi :

« Après quatre mois d’activité, je suis toujours confronté à une incidence très forte de la souffrance au travail... Le système de management de santé au travail de FRANCE TELECOM me procure la pénible impression de jouer un rôle mineur comme acteur très secondaire de la démarche de prévention.

« Je continue d’éprouver un sentiment d’isolement, d’impuissance et un manque de reconnaissance que partagent apparemment beaucoup de mes confrères.

« Compte tenu de ces considérations, je ne souhaite plus continuer dans cette voie, laissée sur un sentiment d’échec et d’abandon des salariés qui se sont confiés à moi, que je suis au regret de vous présenter ce jour ma démission... ».

Le Docteur Catherine MOREL, en poste à GRENOBLE, s’adresse à sa Directrice de l’Antenne de LYON, par courrier en date du 10 Novembre 2009, dans lequel elle souligne l’absence d’écoute de la Direction :

« Durant ces deux années d’exercice, je n’ai pu faire que le constat d’une adaptation forcée de l’homme au travail, à la suite de fermeture de services, de suppression de postes de travail, de mutations fonctionnelles ou géographiques imposées.

« Les demandes de reclassement ou d’aménagement de postes de travail que j’ai du faire sont souvent restées sans réponse. »

Elle note une « absence de marges de manœuvre sur l’organisation du travail et les conditions de travail ».

Elle ajoute « Pendant ces deux années et encore plus depuis les derniers évènements dramatiques, j’ai eu le sentiment d’être cantonnée au Cabinet médical uniquement dans l’écoute de salariés en souffrance sans aucun moyen d’action pour faire évoluer ce constat négatif. »

Le 5 Juillet 2007, se fondant sur les témoignages des salariés de FRANCE TELECOM des travaux de certains CHSCT et du contenu du rapport annuel d’activités 2006 de la Médecine du Travail, le Comité National Santé Hygiène Sécurité et Conditions de Travail de FRANCE TELECOM constatait l’existence des risques psycho sociaux en termes de stress, de pression, de mal être... d’anxiété, troubles de l’humeur, insomnies dues aux modifications incessantes dans l’environnement du travail avec une perte de repères et inquiétude de l’avenir et déposait un droit d’alerte concernant la mise en danger de la santé des salariés au sein de FRANCE TELECOM.

Le CNSHSCT demandait également « que le stress reconnu comme un risque professionnel, soit analysé et évalué au même titre que tous les risques et intégré dans le document unique conformément à la réglementation en vigueur (Article L 230-2 du Code du Travail). »

LES ALERTES EMANANT DE L’INSPECTION DU TRAVAIL :

Le 7 Août 2009, l’Inspecteur du Travail Julien RIBOULET écrivait au Directeur CCOR FRANCE TELECOM à BORDEAUX « les éléments recueillis témoignent de la persistance d’un phénomène inquiétant et porté à votre connaissance de longue date, notamment par les représentants du personnel et par de multiples biais au sein du périmètre ORANGE du CCOR (interventions régulières des représentants du personnel au CHSCT ou des délégués du personnel, bilan de la médecine du travail 2007, ordonnance de référé du TGI de BORDEAUX du 22 Septembre 2008, rapport d’expertise sur la mise en œuvre du projet CONVERGENCE PLUS et son impact sur les conditions de travail, mes courriers du 22 Novembre 2007 et 1er Décembre 2008, etc... ».

Parmi les faits révélateurs de souffrance au travail, l’Inspecteur mentionne notamment les « procédures multiples et contraignantes doublées de contrôle aux modalités invasives : la saturation du travail par des normes présente le risque de provoquer chez les salariés un sentiment permanent de faute et une charge mentale accrue.

  • -  Instabilité organisationnelle, technique, commerciale, qui contraint les salariés à s’adapter en permanence ;

  • -  A titre indicatif, il signalait les propos suivants recueillis récemment « significatifs du mal être vécu par les salariés » :

o « Ils veulent nous rendre dingues » ;

o « Ici c’est Aldous Huxley, le meilleur des mondes vous voyez » ?

o « Hier une collègue a craqué, elle pleurait » ;

o « J’allais enfin résoudre le problème du client, on m’a dit de raccrocher parce que j’avais passé trop de temps » ;

o « Il ne faut surtout pas laisser entendre que vous avez un projet ailleurs, si vous mettez le doigt dans l’engrenage, après il ne vous lâche plus jusqu’à ce que vous partiez ».

o « Les conditions de travail ne sont pas si mauvaises, faut pas exagérer, mais c’est sûr que les Temps Modernes aujourd’hui, ben c’est ici ».

L’Inspecteur du Travail ajoutait«Alors que la souffrance de tout ou partie du personnel du Groupe ORANGE FRANCE TELECOM est notoire au niveau national et avérée au niveau de votre Etablissement, il est incontournable d’interroger certains aspects du modèle organisationnel mis en place » :

« Je vous mets à nouveau en garde au sujet de ce qui me semble être potentiellement dangereux pour la santé des salariés dans l’organisation du travail mise en place par et dans votre entreprise.

« J’insiste sur le fait qu’en termes de protection de la santé physique et mentale, vos éventuels manquements sont passibles de poursuites pénales.

« Les atteintes à la santé mentale en lien avec le travail peuvent par ailleurs être reconnues comme maladies professionnelles et sont passibles de poursuites pénales. »

L’Inspectrice du Travail Corinne PARIS adressait en Novembre 2008 au Directeur ORANGE BUSINESS SERVICE de BORDEAUX un courrier prenant acte du désaccord constaté lors de la réunion du CHSCT du 29 Octobre, faisant suite à une procédure d’alerte.

Elle indiquait que la divergence portait sur la réalité du danger grave et imminent et ajoutait : « Vous n’apportez dans votre envoi aucun élément étayant votre position consistant à nier la gravité et / ou l’imminence d’un risque pour la santé mentale et physique des salariés. Potentiellement la nature du risque dont il est question peut entraîner des atteintes à l’intégrité physique et mentale de salariés (pouvant aller jusqu’au suicide).

« Compte tenu des éléments portés à ma connaissance à ce jour, la réalité d’un danger grave et imminent ne peut donc être écartée.

« Je vous rappelle que tout particulièrement dans le cadre de la procédure d’alerte, votre responsabilité civile et pénale serait engagée en cas d’accident. C’est pourquoi je vous demande de prendre toutes les mesures conservatoires (retrait des salariés à l’exposition au risque), dans l’attente de l’issue de la procédure... »

Le 16 Décembre 2008, l’Inspecteur du Travail de TROYES écrivait au Président du CHSCT FRANCE TELECOM de la région dans les termes suivants « Suite au CHSCT exceptionnel du 23 Juillet 2008, je vous demandais de me tenir informé avant le 31 Octobre 2008 des mesures prises au sein du CCOR Nord de France pour réduire la souffrance au travail exprimée par de nombreux salariés. Or à ce jour, je n’ai reçu aucune réponse de votre part. »

Il convient de noter que ce courrier visait une alerte précise concernant la souffrance au travail laissée sans réponse au moment de la lettre de relance, depuis plus de six mois...

Le CHSCT de l’UI AUVERGNE a voté le 29 Novembre 2007 une décision concernant la mise en place d’une expertise sur un projet de mutualisation d’activités qui pouvait entraîner des risques graves pour la santé des salariés.

La position de déni manifestée une fois de plus par FRANCE TELECOM s’exprima par une procédure en contestation devant le Tribunal de Grande Instance qui débouta FRANCE TELECOM de sa demande d’annulation de la mesure d’expertise en indiquant notamment que le risque grave pour la santé, annoncé par les représentants du personnel était démontré.

Le 18 Août 2009, Madame Dominique GIRARD, Inspectrice du Travail, s’adressait à la Direction de l’Unité d’Intervention Normandie, à la suite d’une réunion de CHSCT consécutive à la tentative de suicide de Madame Catherine SENAN sur son lieu de travail, le 6 Août dernier.

Elle constatait le lien entre la tentative de suicide et « un état de mal être au travail se rattachant au service », elle déplorait le mauvais fonctionnement de la cellule de soutien et l’absence d’expertise de la Direction pour effectuer l’analyse du stress et les mesures de prévention s’y rattachant.

Elle terminait en indiquant « afin que de nouveaux accidents analogues à celui de Madame SENAN ne se reproduise plus » :

« Les évènements qui ont touché les salariés de l’Unité d’Intervention Normandie depuis 2008 à savoir trois suicides, deux tentatives de suicide, une grève de la faim, un absentéisme incontestable, alors que les institutions représentatives du personnel vous ont maintes fois alerté, me laissent penser que vous n’avez pas pris les mesures qui auraient permis de les éviter.

« Je n’exclus pas la possibilité d’établir un signalement au titre de l’article 40 du Code de Procédure Pénale, adressé à Monsieur le Procureur de la République. »

Par lettre du 21 Octobre 2009, Monsieur Julien LABREUCHE, Inspecteur du Travail dans l’EURE, soulignait « Compte tenu de ce qui précède, je suis au regret de vous informer que l’évaluation des risques psycho sociaux réalisée dans le cadre de l’UI Normandie est clairement insuffisante. »

Les organisations syndicales et plus particulièrement SUD PTT, directement ou dans le cadre de l’observatoire du stress et des mobilités forcées à FRANCE TELECOM, sont intervenues à de multiples reprises pour protester contre les modifications délétères de l’organisation du travail et attirer l’attention sur l’accumulation des risques psycho- sociaux dans l’entreprise.

L’article L 4121-1 du Code du Travail prévoit que l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration de situations existantes.

L’article L 4121-2-2° prévoit l’obligation pour l’employeur d’ « évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ».

L’article L 4121-2-7° prévoit que l’employeur doit : « planifier la prévention en y intégrant dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu’il est défini à l’article L 1152-1 ».

L’article L 4121-3 du Code du Travail prévoit l’obligation pour l’employeur d’évaluer les risques qui doivent être aux termes de l’article R 4121-1 retranscrits « dans un document unique » qui énonce « les résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs ».

Or il est constant comme l’ont constaté à de nombreuses reprises des Inspecteurs du Travail, que la Direction de l’Entreprise n’a pas pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité mentale des travailleurs de FRANCE TELECOM, qu’elle a manqué à son obligation d’évaluer les risques, de les transcrire dans les documents uniques permettant leur prise en compte et la mise en place d’actions de prévention et de formation.

Notamment le risque de harcèlement moral précisément visé par le 7° de l’article L 4121-2 du Code du Travail, n’a fait l’objet d’aucune mesure de prévention efficace, alors même que le risque était dénoncé depuis des années.

L’article L 1152-1 du Code du Travail prévoit : « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ces conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique et mentale ou de compromettre son avenir professionnel. »

Or le harcèlement « stratégique ou managérial », constitue l’une des formes du harcèlement moral prévu par l’article L 1152-1 du Code du Travail.

La Cour de Cassation considère en effet que « Les méthodes de gestion dès lors qu’elles se manifestent par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entrainer une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, constituent des faits de harcèlement moral » (Cass. Soc. 10 Novembre 2009 n° 07-45.321).

Le harcèlement moral, défini dans les mêmes termes est prévu et réprimé par l’article 222-33-2 du Code Pénal qui prévoit : « Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 Euros d’amende. »

Enfin, l’article 223-1 du Code Pénal prévoit : « Le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la Loi ou le règlement est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 Euros d’amende. »

L’article R 4741-1 du Code du Travail prévoit :

« Le fait de ne pas transcrire ou de ne pas mettre à jour les résultats de l’évaluation des risques dans les conditions prévues aux articles R 4121-1 et R 4121-2, est puni de l’amende prévue pour les contraventions de 5ème classe. La récidive est réprimée conformément aux articles 132-11 et 132-15 du Code Pénal. »

Il est constant que la Direction de FRANCE TELECOM, malgré de nombreuses alertes, a persisté dans la mise en place de systèmes de gestion, gravement délétères pour la santé mentale des travailleurs, que ces agissements, réitérés malgré des avertissements émanant de sources multiples, se sont traduits par une accumulation et une aggravation des risques psycho sociaux, entrainant un certain nombre de salariés dans la détresse et le désespoir, parfois même jusqu’au suicide.

Il est constant enfin que la Direction de FRANCE TELECOM, dont l’attention avait été attirée sur ces risques, a négligé d’évaluer les dangers que ces méthodes de gestion faisaient peser sur le personnel et involontairement tardé à mettre en place des mesures de correction et de prévention efficaces.

C’est pourquoi la Fédération Sud des Activités Postales et Télécommunications, dépose plainte entre vos mains pour infractions aux articles R 4741-1 du Code du Travail (défaut de transcription des risques sur le document unique) 222-32-2 du Code Pénal (harcèlement moral), 223-1 du Code Pénal (mise en danger d’autrui), à l’encontre de

  • -  la Société FRANCE TELECOM SA sise 6, place d'Alleray 75505 PARIS ;

  • -  Monsieur Didier LOMBARD, Président Directeur Général de la Société FRANCE TELECOM, domicilié au siège de la Société ;

  • -  Monsieur Olivier BARBEROT, Directeur des Relations Humaines, domicilié au siège de la Société ;

  • -  Monsieur Louis-Pierre WENES, Directeur Exécutif Délégué, domicilié au siège de la Société.

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