Ce texte est totalement inepte et il démontre une fois de plus la très grave indigence intellectuelle du législateur et sa profonde mauvaise foi - des juristes sont députés, notamment des avocats - ou son ignorance totale de la matière juridique, notamment les droits de l'Homme, dont il a pourtant l'obligation de faire progresser (5° cons. du Préambule et art. 6 de la Charte sur l'environnement) et défendre (art. 2 DDHC).
Les députés ne respectent donc pas l'ordre public constitutionnel. N'est légitime que ce qui est conforme à la loi, qui plus est à la loi fondamentale qu'est la Constitution. Ils soulèvent ainsi la question de leur légitimité. D'autant qu'ils méprisent manifestement les impératifs que répertorie le Guide de légistique (accessible et en téléchargement gratuit sur le site de la Documentation française) qui s'imposent dans la production de la loi et dont ils doivent avoir connaissance.
Leur comportement s'appelle de la forfaiture. C'était une infraction que le législateur a supprimé avec la réforme du code pénal. Cela se comprend. Ils seraient tous en infraction sinon.
Reste que le code pénal sanctionne l'échec à la loi (Articles 432-1 à 432-2) et qu'un député est un agent public.
Se pose enfin la question, au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation, si les députés qui adoptent une loi contraire à la Constitution ou à une Convention internationale ne sont pas des faussaires et ne commettent pas un faux en écriture publique, le président étant leur complice en ordonnant la publication au journal officiel.
L'exception d'inconventionnalité peut être soulevée par les avocats pour obliger le juge à écarter une loi contraire aux engagements internationaux de la France. Un nombre assez considérable de disposition du droit pénal français pose question et il est très étonnant que l'exception d'inconventionnalité soit si peu invoquée. D'autre part, les droits de l'Homme étant l'instrument constitutionnel européen (CEDH aff. Loizidou) et l'ordre public international (Charte universelle des droits de l'Homme, visée dans le préambule de la CEDH d'effet contraignant et d'application directe), le juge peut donc soulever d'office la nullité d'une procédure reposant sur un texte qui y fait grief.
Le droit souffre donc d'abord d'une certaine frilosité des juristes. Ce qui pourrait passer pour de la pusillanimité n'est peut-être que le signe d'une corporation trop majoritairement encore (très) conservatrice et plus sensible au confort d'un mol embourgeoisement qu'à la garde des principes et valeurs fondamentales de la démocratie. Cette hypothèse démontrerait une immaturité intellectuelle à assumer ce qu'impose l'affirmation d'un véritable "pouvoir judiciaire", immaturité qui converge avec celle qui frappe le "pouvoir législatif".
Cette convergence alliée à un exécutif décomplexé dans l'abus et l'arbitraire interpelle sur la nature du régime ; celui d'un fascisme mou du mépris et de l'indifférence - tant le mépris de la norme que l'indifférence aux atteintes à la dignité - expliquant, par ailleurs, la chronicité et l'accumulation des indignations inutiles, puisque c'est devenu le pays banalisant le scandale, en en faisant une chose ordinaire, consubstantielle aux affaires publiques, le dernier chassant et faisant oublier aussitôt le précédent. Le scandale ordinaire s'est affirmé jusque dans l'adoption de la loi qui viole le droit sans que cela ne suscite d'émotion à la mesure de la violation.
Le régime tant attaché à "l'ordre" prospère en fait sur le désordre (juridique).
Il est très regrettable que l'académie ne conteste pas plus vigoureusement l'ineptie fascistoïde et criminelle - un faux en écriture publique est une infraction qualifiée crime - du législateur et de l'exécutif.
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