Une petite musique ou autres chansons…
Tout était parti comme un coup de tonnerre au milieu de novembre 2024 ; la presse titrait : « Les présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale plaident pour une "souveraineté partagée"». Ciel ! On sut rapidement qu’il s’agissait d’ une "souveraineté partagée" dans la République ». Ouf ! « "Nous vous invitons à construire une solution innovante", a lancé la présidente de l'Assemblée nationale. Mais "sans vous enfermer dans des idéologies", a ajouté son homologue de la chambre haute ». La pression retombait ainsi un peu quand Larcher précisait : « Il n’existe que des souverainetés partagées. C’est un choix qui n’est pas nécessairement binaire et qui peut passer par une construction imaginative et originale au sein de la République, si les Calédoniens le souhaitent ».
Depuis, la petite musique de cette souveraineté partagée baigne le Caillou. Et dans une actualité calédonienne peu trépidante quant à son avenir institutionnel. Bien sûr, il reste les histoires de réformes néolibérales liées aux histoires de sous que versera ou non la Métropole (Plan S2R du gouvernement collégial, Plan quinquennal du Congrès) avec la visite fin novembre d’Emmanuel Moulin, le chef de la délégation interministérielle, actuellement en visite en Nouvelle-Calédonie qui a mis les points sur les i : si pas de réformes (libérales) en Calédonie, pas de sous !
On sait que la sortie de Larcher a ravi les indépendantistes de l’UNI-Palika (qui voyaient déjà réaliser leur vieux projet d’indépendance-association) mais a fait un peu tiquer les loyalistes (cependant plutôt d’une discrétion de violette, Gil Brial mis à part). Philippe Gomès, du parti centriste Calédonie ensemble joue encore les originaux chez les loyalistes[1]. Il rappelle d’abord avec gourmandise ce que tout le monde sait, bien que ce soit plus compliqué : « L’accord de Nouméa dit : "Les compétences exercées par l’État seront transférées au fur et à mesure à la Nouvelle-Calédonie selon le calendrier ci-après, ce qui signifiera la souveraineté partagée entre la France et la Nouvelle-Calédonie". Certains viennent de redécouvrir l’œuf et la poule. Cette notion est déjà en œuvre depuis 25 ans. Calédonie ensemble a toujours porté ce concept. Quand Gérard Larcher et Yaël Braun-Pivet en parlent, ils s’intègrent tous les deux dans le cadre tracé par l’accord de Nouméa, celui de l’émancipation du pays, qui a vocation à être approfondi dans un nouvel accord. C’est une idée centrale ».
Sauf que ce que conte le préambule de l’Accord de Nouméa est fort flou ; et pour Gomès et ses amis, il s’agit en fait d’une autonomie, peut-être étendue, mais en aucun cas, d’une indépendance-association à laquelle il s’est toujours opposé[2], comme les loyalistes radicaux à la Brial ! Gomès a cependant compris, et depuis très longtemps que (la citation qui suit est longue, mais tout y est !) : « Si on ne sort pas de la logique des blocs, on aura un nouveau 13 mai. Toutes les cartes sont dans nos mains. Encore faut-il accepter de tirer les enseignements de l’histoire de part et d’autre. Ces discussions s’engagent dans un contexte très compliqué et une radicalité plus forte. Avec des données politiques nouvelles au plan local et national. Les indépendantistes qui gagnent de 10 000 voix aux dernières législatives avec un taux de participation de 71 %, c’est un fait politique nouveau. Pour nous, le concept de souveraineté partagée, c’est la clé, l’équilibre à trouver entre ceux qui aspirent à une émancipation plus aboutie intégrant des éléments de souveraineté externe, et ceux qui aspirent à rester protégés par la France avec une souveraineté provinciale interne renforcée. C’est le chemin de crête qu’il nous faut emprunter en maintenant à la fois le lien fort avec la France et l’unité du pays ». Il se garde bien de traduire plus clairement les résultats des législatives de 2024 : 53 % des suffrages exprimés pour les indépendantistes contre 47 % pour les loyalistes ! Et il précise : souveraineté partagée dans la République ; avec un soutien discret aux loyalistes radicaux (« avec une souveraineté provinciale interne renforcée »).
La seule question qui se pose selon moi, au-delà des mots, c’est : où placer le curseur entre autonomie et Pleine souveraineté !
Cette petite musique est jouée, certes sur un ton mineur, par Emmanuel Tjibaou (député[3] de la deuxième circonscription depuis les législatives de l’été 2024) qui vient de remplacer, au dernier congrès (le 55e ) de fin novembre, Daniel Goa à la tête de l’Union calédonienne. Fut annoncé qu’au plus tard le 24 septembre 2025 (la fameuse date de la prise de possession de 1853) sera signé, après accord avec les loyalistes et l’État (et si pas d’accord ?) un « Accord de Kanaky » fixant une période de transition de cinq ans avant l’accession à la pleine souveraineté en 2030. Pleine souveraineté, mais partagée : Tjibaou fait explicitement référence à cette petite musique. Cependant on n’en discuterait qu’après l’accession à la pleine souveraineté, en 2030 donc : « On ne peut partager la souveraineté que si on y a d’abord accédé » se justifie le nouveau président de l’UC. Mais Tjibaou, pas naïf, précise sa pensées : « Parle t’on de la souveraineté de la France qui nous déleste d’une partie de ses compétences ? Ou parle t’on de la souveraineté que l’on demande, et dans laquelle nous délestons une partie de nos compétences à la France ? ». Une manière de se différencier de l’UNI-Palika qui a rompu (provisoirement ?) les ponts avec l’UC et ses copains, et qui propose d’en discuter tout de suite, de cette souveraineté partagée ! Mais Tjibaou souhaite aussi leur retour à la maison commune FLNKS.
Cette petite musique était déjà distillée depuis un moment, avec des paroles toutefois différentes[4] mais proches : la notion d’ « État associé ». On pourrait d’ailleurs arrêter là ce billet, car cette guerre des mots cache mal le trouble actuel de la situation en future Kanaky Nouvelle-Calédonie ; mais elle cache surtout les tentatives de noyer le poisson pour éviter d’appeler un chat un chat, radotons : le chat Indépendance-association et le chat Pleine souveraineté avec partenariat avec la France.
…
1 – La « souveraineté partagée » : presque un oxymore
On ne va pas remonter au XVIe siècle avec Jean Bodin ; seulement à un texte de 2012[5] qui commence très fort : « À lire nombre d’écrits, tout se passe dans l’État moderne comme si la notion de "souveraineté partagée" était partout ; alors même qu’elle est classiquement dénoncée comme un non-sens. […] En ce sens Hobbes qui voit, à l’instar de Bodin, dans les gouvernements mixtes où se mélangent la monarchie, l’aristocratie et la démocratie, une forme de souveraineté partagée non souhaitable. On la retrouve cependant dès après la naissance du fédéralisme américain avec Tocqueville considérant qu’on a affaire à une nouvelle forme d’État – différente des précédentes formes de fédéralismes – qu’il caractérise de "partage de la souveraineté" ».
Le papier continue dans la même veine, avant d’en arriver à la Calédonie : « … la souveraineté partagée est perçue par bien des analystes comme un oxymore et ne devrait, à la vérité, être nulle part. La cohorte est à cet égard longue des juristes niant que cette notion puisse avoir une quelconque effectivité, en soulignant ordinairement que la souveraineté est un superlatif et ne s’accommode d’aucun partage, et en rivalisant – à l’exemple de Bodin – d’images suggestives sur ce qui ne serait en définitive qu’une aberration juridique, comme l’on constate des aberrations dans la nature. Plus qu’une singularité, un monstre juridique donc… […] Néanmoins, force est de constater qu’elle suscite un nouvel intérêt. Évoquée dans l’accord de Nouméa du 5 mai 1998 auquel il est fait référence dans la Constitution (articles 76 et 77) depuis la réforme constitutionnelle du 20 juillet 1998 relative à la Nouvelle-Calédonie, elle a trouvé – du moins dans la doctrine française – une justification nouvelle à son examen[6] ».
Un papier très récent[7] (du 4 décembre) est dans la même veine. Et il commence aussi en majesté : « S’intéresser à l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, c’est s’exposer en permanence à « trouver sur son chemin les mêmes vieux serpents de mer. Même si ceux qui leur ont tiré la queue hors de l’eau n’ont souvent pas conscience du fait qu’ils s’y trouvaient depuis des décennies, nous pouvons quand même profiter du fait qu’ils les aient déposés en travers de notre chemin pour les réexaminer. Le dernier en date est ainsi celui de la "souveraineté partagée". […] Avant de se demander ce qu’il convient de penser des propos de M. Larcher, il faudrait d’abord commencer par comprendre ce qu’il entend par "souveraineté partagée". Or, non seulement ses propos ne l’explicitent pas, mais tout laisse à croire qu’il n’en a lui-même pas grande idée »[8].
Bref, tout ce papier est passionnant ; on vous le recommande.
2 – La « forclusion »[9] de l’Accord de Nouméa
Le papier déjà ancien[10] (2018) du Calédonien depuis trente ans, Hamid Mokaddem, L’accord de Nouméa. Pratique de discours et forclusion de la souveraineté de Kanaky, s’éclaire quand on a compris ce que signifie forclusion. Rien que son résumé suffirait : « … comment le dispositif politique met en place un transfert de souveraineté partagée conditionné à une indépendance mise entre parenthèses et une mise à l’écart de la souveraineté de Kanaky. L’accord de Nouméa est présenté de manière consensuelle comme un chef d’œuvre de décolonisation alors qu’il programme de manière ordonnée une recolonisation qui fait le jeu géopolitique et stratégique de la France en Océanie ».
Le papier est plus précis : « Le dernier accord dit "Accord de Nouméa" diffère la construction d’une nation souveraine et indépendante par une logique de procrastination. La logique politique de l’accord correspond au paradoxe de Zénon, ou à celui du détour par le détour, […] à savoir qu’avant de transférer une pleine souveraineté, la Nouvelle-Calédonie doit franchir les étapes du transfert d’une souveraineté partagée. L’accord de Nouméa s’apparente à un processus ad infinitum d’une décolonisation inachevée, perpétuelle et permanente, mais qui accompagne en fait une réelle recolonisation instituée par la France. La recolonisation – sous couvert du mot d’ordre institué de décolonisation – est rendue effective par le mécanisme du transfert de souveraineté partagée ». Ou encore, en rappelant ce que disait Jean-Marie Tjibaou en 1989 : « Aujourd’hui, pour une fois qu’ils parlent de décoloniser, c’est dans le cadre de la République française ! ». Ou encore (Mokaddem) : « Une lecture plus attentive indique que le transfert de souveraineté passe par la reconnaissance d’une souveraineté revendiquée, la Kanaky, pour l’éclipser, et la recouvrir, afin que celle-ci fasse place à une autre souveraineté "partagée dans un destin commun" ».
Et ce n’est pas fini[11]. Mais on s’en tiendra là, car le principal est dit. Et je le partage.
…
La question rapidement traitée dans ce billet peut être approfondie par les lecteurs[12]. D’autant plus qu’au moment où nous bouclons, la censure de Barnier est arrivée, ce qui ne va pas arranger les choses sur le Caillou, fin mal barré…
Mais la question de notre curseur est toujours pertinente.
Notes
[1] Voir l’article du 22 novembre 2024 :
Philippe Gomès : « Si on ne sort pas de la logique des blocs, on aura un nouveau 13 mai » – DNC.NC
[2] C’est l’une de mes litanies dans tous mes billets sur Le Club de Médiapart et dans mon livre de 2018 ; voir :
Kanaky Nouvelle-Calédonie indépendante ? - Patrick Castex
Gomès allait-il passer le Rubicon ? Allait-il penser qu’ « Il faut que tout change pour que rien ne change » avec le cynisme de La tentation du Guépard (le livre de Giuseppe Tomasi di Lampedusa) ? Allait-il admettre enfin que l’Indépendance-Association est la seule solution ? Que nenni !
[3] Il est pour beaucoup dans l’inversion du rapport de force dans ce que l’on peut considérer comme le « 4e référendum » : 53 / 47.
[4] Voir notre billet de blog du 16 octobre 2024, titré, Buffet sur le « Caillou » : la solution de l’ "État associé" sera-t-elle évoquée ? et sous-titré, Faute de véritable indépendance-association, on en parle beaucoup, mais à demi-mot. Il n’y a pas qu’ « Indépendance, point » versus « Calédonie française » ; l’ "État associé" serait la solution mi-figue mi-raisin (entre « pleine souveraineté avec partenariat » et « autonomie étendue »). Ou traduction en vocabulaire politiquement plus incorrect : protectorat de l’époque coloniale ? Tout est là… :
Buffet sur le « Caillou » : la solution de l’"État associé" sera-t-elle évoquée ? | Le Club
L’auteure de cette chanson un peu différente est, rappelons-le, Léa Havard avec sa thèse de 2016, L’État associé : recherche sur une nouvelle forme de l’État dans le Pacifique Sud.
[5] Propos sur la notion de « souveraineté partagée » ou sur l’apparence de remise en cause du paradigme de la souveraineté, par Félicien Lemaire, Revue française de droit constitutionnel, n° 92, octobre 2012 ; voir :
[6] Le reste est moins percutant : exemple de la naissance de la notion de souveraineté des États avec les traités de Westphalie de 1648 ; question des condominiums et question des États fédéraux (USA, RFA) ou de l’Union européenne (hors sujet ici) ; pour la Nouvelle-Calédonie « l’équivoque vient en réalité de la confusion faite dans le préambule de l’accord de Nouméa (point 5) entre partage des compétences et partage de souveraineté en mêlant les deux expressions dans une même signification : "Le partage des compétences entre l’État et la Nouvelle-Calédonie signifiera la souveraineté partagée". etc. ».
[7] Sur Actu NC du 4 décembre, Eric Descheemaeker, « Partager la souveraineté » en Nouvelle-Calédonie ? Descheemaeker est professeur de droit à l’université de Melbourne, voir :
« Partager la souveraineté » en Nouvelle-Calédonie ? | Actu NC
[8] Et son humour (australien ?) vaut le coup d’œil : « "Souveraineté" est un mot polysémique, comme la plupart des concepts juridiques. Il est souvent considéré comme synonyme d’indépendance – comme dans la question consultative de 2018, 2020 et 2021, "Souhaitez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la (pleine) souveraineté et devienne indépendante ?" – mais parfois on distingue les deux. Malheureusement, il y a à peu près autant de manières de les distinguer que de personnes s’étant essayées à l’exercice. Globalement, comme indépendance (étymologiquement, le fait de ne pas être suspendu à), souveraineté (étymologiquement, le fait d’être au-dessus) renvoie à l’idée qu’il n’y a personne au-dessus de soi. Dans ces conditions, "souveraineté partagée" apparaît a priori comme un oxymore : cela suggère que chaque partie est à la fois au-dessus et en-dessous de l’autre. Mais, là encore, ne nous arrêtons pas aux mots et essayons de voir ce que pourrait recouvrir cette expression ». Or, nous pouvons en distinguer au moins cinq sens différents. 1°) Le premier, c’est une idée qu’on trouve déjà dans l’accord de Nouméa : car, loin d’être une construction "originale", l’idée de souveraineté partagée est en réalité fort ancienne. C’est ainsi qu’elle est définie en 1998 : "Le partage des compétences entre l’Etat et la Nouvelle-Calédonie signifiera la souveraineté partagée" (préambule, point 5). Ici, le mot "souveraineté" est simplement synonyme d’exercice des différentes compétences étatiques, ce qui est très loin de son sens normal. En métropole aussi, ces compétences sont partagées entre État central et collectivités locales, mais personne ne parlerait de "souveraineté partagée" entre la République française, la région Auvergne-Rhône-Alpes, le département du Rhône, la communauté urbaine de Lyon, la commune et ses différents arrondissements. Cela est vrai aussi dans un contexte calédonien, même quand on enrobe cette dévolution des pouvoirs de grands mots, comme "État fédéré". 2°) Le deuxième sens, c’est celui de l’État associé : c’est sans doute à cela que M. Larcher fait allusion quand il parle du Pacifique, où se trouvent les cinq États généralement désignés comme tels, deux associés à la Nouvelle-Zélande (Iles Cook, Niue) et trois aux États-Unis (Micronésie, Palaos, Iles Marshall). Un État associé est parfois défini comme étant souverain (il a la "compétence de sa compétence") mais pas indépendant (il a décidé souverainement de se placer sous la protection d’un autre État) ; mais là encore, les mots pouvant avoir des sens différents, on pourrait dire à l’inverse qu’il est indépendant (il n’existe personne au-dessus de lui) mais pas souverain (c’est un autre État qui assume les compétences régaliennes). La seconde approche nous paraît meilleure : c’est d’ailleurs pour cela qu’on parle souvent d’indépendance-association, la seconde ne se concevant pas sans la première. 3°) Un troisième sens aurait pu, lui aussi, être relié au Pacifique : celui d’une terre gouvernée en commun par deux États différents. Cela a été le cas aux Nouvelles-Hébrides, colonie conjointe (condominium) du Royaume-Uni et de la France jusqu’en 1980. … [hors sujet ici]. 4°) Le quatrième sens serait celui de l’exercice en commun de certaines compétences. C’est sans doute à cela que M. Larcher fait référence quand il parle de l’Union européenne. … [également hors sujet ici]. 5°) Enfin, l’accord de Nouméa fait allusion, mais sans rien définir ou préciser, à une forme de souveraineté partagée très différente du premier sens que nous avons mentionné : « il convient de faire mémoire de ces moments difficiles, de reconnaître les fautes, de restituer au peuple kanak son identité confisquée, ce qui équivaut pour lui à une reconnaissance de sa souveraineté, préalable à la fondation d’une nouvelle souveraineté, partagée dans un destin commun » (préambule, point 3). Ce à quoi il semble être fait référence ici, c’est une souveraineté du peuple kanak en tant que « peuple d’origine ».
[9] Forclusion est un gros mot. En droit, c’est « la sanction civile qui, en raison de l’échéance du délai qui lui était légalement imparti pour faire valoir ses droits en justice, éteint l’action dont disposait une personne pour le faire reconnaître ». Plus généralement c’est l’ « Impossibilité d’entrer, de participer : exclusion forcée ». En psychologie , c’est le « Mécanisme psychique qui rejette les choses insupportables avant qu'elles soient intégrées à l'inconscient du sujet ». Avec le définition précédente, cela éclaire ce qui nous occupe ici.
[10] Journal de la société des Océanistes, n° 147 | 2018, p. 319-328, La Kanaky Nouvelle-Calédonie a rendez-vous avec l'histoire ; voir :
L’accord de Nouméa. Pratique de discours et forclusion de la souveraineté de Kanaky
[11] « La souveraineté de Kanaky, soit la reconnaissance d’une identité kanak confisquée, fait de manière habile l’objet d’une forclusion dans et par l’ordre du discours. Outre le fait incroyable que l’identité de la souveraineté ne porte pas de nom puisqu’elle n’est jamais nommée, la Kanaky n’existe que dans le moment ponctuel de reconnaissance, pour aussitôt disparaître, s’éclipser, et faire place à une "souveraineté partagée". Ce préalable est en fait une forclusion. […] On doit ajouter que la forclusion, mise à l’écart et rejet, s’exerce avec la rhétorique du faux-semblant. La reconnaissance de Kanaky par la France est une feinte de reconnaissance de l’identité confisquée. L’ordre du discours feint la reconnaissance pour encore mieux forclore la souveraineté de Kanaky. Le glissement sémantique s’exerce sous la forme d’une neutralité bienveillante et apparente, qui est en fait une violence symbolique constitutive des nouvelles formes de recolonisation propres au XXIe siècle. Il y a bel et bien deux formes ou deux usages de la forclusion institués par la pratique du discours et de la gouvernementalité. Une forme institutionnelle et juridico-politique pratiquée par l’ordre du discours qui est corrélative d’une forclusion d’ordre historique, en l’occurrence la dénégation et la violence symbolique et physique d’un rejet de la civilité/civilisation et/ou identité kanak ».
[12] Par exemple, entre des dizaines, grâce à Jean-Yves Faberon et Guy Agniel (dir.), La souveraineté partagée en Nouvelle-Calédonie et en droit comparé [actes du colloque : Nouméa, 17-19 décembre 1999]
http://www.vers-les-iles.fr/livres/Nouveau/FaberonAgniel.html
Et grâce à son dernier bouquin de décembre 2023, La Nouvelle-Calédonie politique ; on attend le prochain, après le 13 mai…