L’éventuelle journée des Dupes en Nouvelle-Calédonie va en fait se développer sur plusieurs semaines, sinon sur plusieurs mois ; et elle n’est qu’éventuelle, car tout n’est pas encore plié[1]. Elle oppose non pas directement indépendantistes et loyalistes au sujet des institutions (indépendance ou non) mais des classes et catégories sociales sur le plan économique.
En outre, le président indépendantiste du gouvernement accepte-t-il les propositions de réforme de la Sécu du Caillou de son conseiller, soutenues fondamentalement par tous les patrons, en délaissant des propositions plus progressistes ? Apparemment, on pouvait le penser ; ou attendait-il son heure en faisant le gros dos : nouvelle version de la journée des dupes ? Mais n’allons pas trop vite…
La Nouvelle-Calédonie est politiquement fin mal barrée[2] ; qu’en est-il de son économie ? Elle n’est pas reluisante depuis une dizaine d’années et était même en récession de 2019 à 2021. Le conseiller multipartisan Olivier Sudrie[3] (économiste fort libéral peu connu en Métropole mais bien connu sur le Caillou) qui trace toujours le même sillon dans son diagnostic économique du Caillou et aux solutions qu’il conseille[4], assombrit encore le tableau et se garde bien, au milieu de 2023, d’indiquer le redressement dès 2022, grâce en particulier à celui du nickel et de l’emploi en général : même de celui du secteur construction qui fut, il y a une dizaine d’années (on y reviendra) à l’origine du ralentissement économique.
Réformes et luttes des classes
Le gouvernement (malgré sa présidence par un indépendantiste, Louis Mapou, ne prend ses dispositions que de manière collégiale) et le Congrès du Caillou tardent à lancer des réformes économiques et sociales profondes. Le principal débat qui fit et fait encore le buzz, est la réforme de la Sécu calédonienne, la CAFAT[5] ; avec deux héros ou hérauts.
Le premier est le nouveau parti L’Éveil océanien[6] (L’ÉO) qui propose maintenant une unification du taux de cotisation sociale (CS) dont ceux des travailleurs indépendants. Il propose une baisse de deux points du taux de CS globale, passant de 15,5 % à 13, 5 %[7] et surtout la fin du plafonnement de ces CS[8] qui permet aujourd’hui aux salariés les plus aisés[9] de moins cotiser en part de leur salaire ; en outre seraient rabotées les dégrèvements de CS patronales pour les bas salaires. Ce projet dont toute la presse le réduit à ce seul parti serait soutenu, plus ou moins ouvertement et peut-être avec des nuances, par tous les syndicats de salariés ; bref, c'est maintenant un projet mixte : ÉO et Intersyndicale.
Hurlement de tout le patronat (dont NC Éco, Nouvelle-Calédonie Économique, une nouvelle structure née en 2020 qui rassemble organisations patronales, chambres consulaires et autres[10]) contre le projet de l’ÉO. Et avec grandes manifestations en mars 2023 largement suivies, notamment par nombre de salariés pourtant syndiqués : on peut s’y perdre...
Le maître mot du patronat et de NC Éco est « Le travail est trop cher ! ». Mais le buzz met surtout en avant la réforme concernant les patentés, les petits entrepreneurs dont les taux de cotisation sociale sont actuellement certes inférieurs à ceux des salariés ; mais les prestations sociales également[11].
Le second héraut est Olivier Sudrie. Le patronat propose la baisse des CS, soutenu par Sudrie, le conseiller économique inamovible du gouvernement (depuis plus de dix ans !) qui propose tout de go la « réfaction » (en plus clair : la réduction) des CS pour les remplacer par l’impôt. Voilà un aspect très concret de la lutte des classes ! Là, il n’y a pas de dupes : les positions seraient claires et marquées.
Qui va l’emporter au Congrès qui a le dernier mot en matière de loi de Pays ? Le président indépendantiste du gouvernement (dont les décisions sont donc cependant collégiales) semblait accepter la proposition de Sudrie. Notre modèle est « à bout de souffle »[12] ; c’est avec ces mots que Louis Mapou a ouvert le forum Perspectives : pour un nouveau modèle calédonien financièrement soutenable, socialement juste et économiquement performant[13], organisé le 6 juin 2023 à Nouméa : il reprenait mot pour mot, et analyses pour analyses, les conseils d’Olivier Sudrie. Exit la proposition de l’Éveil océanien ? Rien n’est moins sûr… Fine tactique ou non, début de la journée des dupes ou non, que Mapou reprenne la position de Sudrie et du patronat surprend néanmoins.
À bout de souffle, l’économie calédonienne ? Oui, au moins jusqu’en 2021 ; mais pas toujours… Et, surtout, plus du tout de crise d’asthme en 2022 !
Certes, après une forte croissance économique (sauf le creux de 2008) quasi-continue due en grande partie à la construction des deux nouvelles usines (du Nord et du Sud) de métallurgie du nickel ; l’économie est en ralentissement depuis plus d’une décennie (la construction des usines se termine en 2010-2012) puis en récession très marquée de 2019 à 2021 due à la très forte chute en volume de la production métallurgique de nickel. Mais certains autres signes annonçaient une remarquable sortie de crise en 2022, cependant moins évidente en 2023.
Quelques mots sur l’évolution de la situation économique du Caillou après un long boom ; et, donc, avec plus qu’une lueur d’espoir depuis 2022
L’évolution du PIB de 2022 n’était pas encore donnée par l’ISEE nc (l’Institut local de statistique et des études économiques) quand nous bouclions ce billet ; et aucune prévision n’est jamais établie[14]. On prenait le risque de penser que la croissance économique en volume serait positive, peut-être autour de 1 à 2 %, grâce au boom exceptionnel du secteur nickel cette année-là (grâce au bond des volumes et des prix[15]) : en rupture avec 2019-2021 où la forte amélioration des cours du nickel fut absorbée par, répétons-le, la très forte chute des volumes de la métallurgie, cause première donc de la récession pendant trois ans, aggravée par la Covid19. On estimait (lors d’une conférence à Nouméa au Congrès d’une organisation syndicale : La Fédé pour ne pas la nommer) à 14 % (mais avec grand risque de se tromper) la part du nickel dans le PIB à la veille de la publication du PIB 2022 ; d’où notre optimisme, cependant trop mesuré, concernant la croissance du PIB.
Premier miracle, au moment de boucler donc, l’ISEE nc et le CEROM (Comptes économiques rapides d’Outre-mer) publiaient enfin, milieu octobre, leur estimation de la croissance du PIB pour 2022 : + 3,5 % en volume et + 7,5 % en valeur. Un double miracle cependant prévisible (mais pas à ce niveau) grâce au boom de la métallurgie du nickel en 2022 (après, il est vrai, une dégringolade, cause principale des trois années de récession). Et le CEROM estime à 14 % la part du nickel dans le PIB cette année-là : nous eumes de la chance ; mais restions bien frileux sur le rebond du PIB) !
Sur les deux graphiques qui suivent, ce rebond du PIB en 2022 est exceptionnel ; Sudrie s’est bien gardé de l’indiquer. Petit détail (mais non sans importance) la variation annuelle du PIB en valeur (en noir sur le second graphique) est toujours supérieure aux effets prix (en rouge) sauf pendant les trois années de franche récession de 2019 à 2021 où les cours du nickel étaient en forte augmentation.

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Le graphique précédent précise le rôle des prix du nickel : une courbe en cloche de 2010 à aujourd’hui, avec le pic de 2022. Autrement dit, on a retrouvé, grâce au nickel, un grand bol d’air en 2022.
La fin probable de l’économie à bout de souffle apparaît aussi grâce à l’amélioration de l’emploi salarié du secteur privé qui s’était érodé pendant le ralentissement puis avait chuté pendant la récession[16].

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En 2023, la petite baisse probable en valeur des exportations de nickel due à l’érosion des cours (mais pour les 8 premiers mois, jusqu’en août, elle n’est que de - 9 % en valeur et + 1,7 % en volume) pourrait être compensée par une amélioration (certes incertaine pour 2023[17]) des autres secteurs où l’emploi continue de croître. Bref, notre estimation de croissance à + 2 % en volume pour le PIB 2023 est sans doute plausible ; dans ce cas le mensonge par omission de Sudrie prendrait tout son piquant, car on ne serait plus en 2022 et 2023 dans une économie à bout de souffle !
1 - Olivier Sudrie commence son analyse par un diagnostic original[18] ; celui-ci interroge ; pour le moins…
« Quatre faits saillants permettent de caractériser son modèle ». Le premier trait est que deux « moteurs économiques » principaux « sont exogènes » : le « moteur principal » est celui des « transferts publics métropolitains » (17 % du PIB actuellement selon lui) ; le « moteur auxiliaire » est le nickel (7 % du PIB mais, donc, en moyenne depuis 1998…). Le deuxième trait est que « l’économie calédonienne est largement administrée » (« le poids des dépenses publiques atteint 54 % du PIB »). Le troisième est que « les relais de croissance endogène sont rares. L’économie calédonienne souffre d’un fort handicap de compétitivité… ». Le quatrième et dernier trait du modèle est que « l’économie calédonienne est handicapée du fait de ses inégalités ».
Pourquoi pas ?
Les trois derniers traits sont des évidences ou presque ; le deuxième caractérise également l’économie de la Métropole[19] ; le troisième[20] (dû à des coûts élevés, dont les surcoûts de l’insularité par les coûts de transport, le coût du travail et peut-être le niveau de profits) qui font penser à une économie de comptoir (que Sudrie refuse pourtant comme caractéristique de l’économie du Caillou) ; le quatrième, les inégalités « consubstantielles du modèle économique ultramarin, … constituent, selon Sudrie, en raison de leur ampleur inédite en Calédonie, un réel frein à la croissance ». Ces inégalités n’ont pourtant pas freiné la forte croissance jusqu’au début de la décennie 2010 !
Le premier trait est probablement la principale faiblesse de l’analyse de Sudrie, car les « deux moteurs » évoluent dans le temps très différemment de ce qu’il en retient ; et il feint d’oublier des phénomènes fondamentaux…
11 - Les transferts métro : le moteur principal ?
Le premier moteur, le principal, ces fameux « transferts métro » (transferts bruts) sont en effet, en francs courants pacifiques, en excellente corrélation avec le PIB courant en valeur (coefficient de corrélation[21] de 94 % ; celui de Sudrie étant confirmée selon les données de l’ISEE de 2000 à 2017) mais il en déduit que la croissance est « subordonnée aux transferts métro », le moteur principal explique le PIB ; cependant (on l’enseigne à tout économiste ou statisticien débutant) corrélation n’est pas raison.
Avant d’aller plus avant, indiquons que j’adore cette citation (que j’utilise souvent à l’envi) de Leon Lederman (prix Nobel de physique en 1988 et mort à 96 ans ; l’intelligence doit conserver…) : « On peut observer beaucoup, simplement en regardant ! ». Elle me rappelle le proverbe chinois : « Quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt ». On peut transposer ce proverbe en remplaçant le doigt par le coefficient de corrélation et la lune par deux séries de données, par exemple (toute ressemblance avec le débat en cours serait purement fortuite…) : le PIB et les transferts de fric de la France vers le Caillou.
Selon Sudrie, et avec un graphique suggestif de sa note (G1p.4[22]) ; mais avec deux échelles très différentes, la croissance économique est censée être due surtout à celle des transferts, et la décroissance à leur chute, le moteur principal donc ; pourtant, son G4p.7 ne colle déjà pas trop avec cette affirmation : les transferts stagnant tandis que le PIB en valeur (jusqu’en 2017) continuait d’augmenter. Ensuite les transferts stagnent (en fait augmentent très peu en valeur, donc diminue même en francs pacifique constants, ce que Sudrie note d’ailleurs) quand le PIB en valeur continue de croître (après la crise de 2008-2009) jusqu’en 2014. Pas vraiment le schéma de Sudrie.

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Cependant, en reprenant les mêmes données que Sudrie sur la même période, on retrouve en effet cette excellente corrélation. Pourtant, l’observation des deux courbes (en modifiant les échelles choisies par lui ; mais en inversant les axes verticaux ; on verra pourquoi plus loin) interroge. Mieux, Sudrie élude une évidence (on cherchera en vain dans ses analyses ce fait de la plus haute importance[23]) : le ratio transferts / PIB est en forte diminution tendancielle, et depuis longtemps, déjà lors de la période de forte croissance (25 % en 2000, 15 % en 2011 ; ce n’est pas rien ; et Sudrie ne peut l’ignorer !) alors qu’il se stabilise pendant le ralentissement puis s’accroît (on y reviendra) pendant la récession (période en dehors de son analyse s’arrêtant en 2017).

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Sudrie ne mentionne donc pas les années postérieures à 2017[24], la part des transferts dans le PIB est même en hausse[25] depuis 2016 alors que le PIB bat de l’aile… En outre, en gardant la même échelle[26] pour les transferts métro et le PIB, la corrélation ne saute pas aux yeux en regardant les courbes. Certes, se méfier aussi des ratios[27], mais quand-même !
Sudrie insiste, en bon économiste libéral, sur le poids des dépenses publiques (État, collectivités locales – provinces et commune – et organismes de sécurité sociale) en partie financé par ces transferts : en 2017, 54 % du PIB en Calédonie (ratio à peine inférieur, à celui de la France avec 56,5 %). Il continue son raisonnement : avec 17 % de poids des transferts qui se transforment fondamentalement en dépenses, il reste alors des dépenses publiques internes de 37 % du PIB, dont 7 % (en moyenne ; mais n’y revenons pas…) dus au nickel et, ainsi, 30 % dus aux activités marchandes hors nickel. Ainsi, résume-t-il dans un schéma introductif (p.3) : « la dynamique[28] est presqu’intégralement déterminée par celle des dépenses publiques ». Là, cet économiste libéral (donc plutôt tourné vers les partisans de l’économie de l’offre) se fait partisan de l’économie de la demande, indique les effets multiplicateurs, insiste sur le taux d’épargne trop élevé (dû aux hauts revenus dans le cadre des inégalités, insistant sur l’indexation des salaires dans la fonction publique[29] – qu’il juge regrettable, rejoignant ainsi la plupart des indépendantistes[30] – facteur d’inflation par la demande).
Il devient ainsi éclectique et n’est pas à une contradiction près…
12 - Selon Sudrie « Au final, l’économie calédonienne ne bat pas au rythme du nickel ». Il exagère un peu…
Selon notre conseiller multi-partisan, le secteur du nickel ne serait pas dominant (vieux thème, déjà martelé en 2011) ses fluctuations n’induisent pas (sauf à la marge) l’évolution du PIB (mais il reconnaît cependant que ce secteur concerne indirectement 20 % de l’emploi (selon le CEROM, 2015) car il induit de l’activité.
L’économie du Caillou bat quand-même un peu, selon lui, au rythme du nickel (un moteur secondaire). Si l’on voulait transformer une simple corrélation (coefficient de corrélation médiocre mais pas si mauvais, avec 67 %, entre le PIB et les exportations) en relation de cause à effet (ici le PIB considéré comme le résultat d’un effet multiplicateur des exportations[31]) on tomberait évidemment dans le même travers et avec le même jeu des échelles d’axes que Sudrie.
Sudrie n’a cependant pas complètement tort quand il écrit (p.7) : « Le nickel constitue le second moteur (exogène lui-aussi) de l’économie calédonienne. Mais, sa puissance est plus faible que celle des transferts » ; Sudrie tombe ainsi dans le panneau d’exportations exogènes ! Il ajoute en note « Rappelons que la valeur ajoutée du secteur mines et métallurgie n’a représenté que 7 % du PIB en moyenne au cours de la période 1998-2017 contre 17 % pour les transferts ». Il n’a pas complètement raison ; on l’a indiqué plus haut : ces 7 % en moyenne cachent de très fortes fluctuations avec étiages à 3 % en 2013 et 2016) et pics de 2007 à 17 % et de 2022 à 14 % qu’il ignore (on pouvait l’estimer dès le début de 2023). Et il admet (p.7) « Une croissance partiellement tirée par le nickel ». Et il hésite : après avoir soufflé le chaud, il souffle le froid[32].
Et il n’aurait pas fait le moindre effort pour évaluer le rôle fondamental du nickel pour le redressement du PIB de 2022 ? Il aurait pu le faire, l’a probablement fait, mais bien gêné par sa découverte, a préféré se taire.
13 - Sudrie a-t-il compris le rôle fondamental du nickel dans la récession de 2019 à 2021 ?
L’abîme du nickel de 2019 à 2021 (voir graphique suivant) est, et de loin, la principale explication de la forte récession économique trois ans de suite ; mais sa structure n’est pas anodine : c’est bien la métallurgie qui s’écroule en volume (112 KT exportés en 2018 ; 66 en 2021 !). Et pendant ce temps, on exporte du minerai à qui mieux mieux : pour la première fois, les volumes exportés en minerai (en métal contenu) dépassent ceux en métallurgie.
En valeur, l’export de minerai rapporte beaucoup moins que celui de la métallurgie ; c’est une évidence que certains experts (il ne s’agit plus de Sudrie…) passent sous silence ou contournent par d’autres considérations critiquant la fameuse « doctrine nickel » ; on pense évidemment au dernier Rapport nickel de l’IGF et sa publicité par Macron.
L’équilibre habituel n’est rétabli, et tout juste, qu’en 2022, par le bond des volumes métallurgiques exportés, bien que le niveau d’activité de 2016 à 2018 soit loin d’être retrouvé.

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Le bond en valeur de 2022 est surtout dû à celui des prix. L’analyse des effets volume et effets prix, le total étant l’effet valeur (graphique qui suit) est riche d’enseignement : les deux effets sont, chaque année, fluctuants ; mais en cumul glissant les effets prix cumulés disparaissent souvent (sauf de 2015 à 2017, bien visibles pour les exportations métallurgiques) et ne restent que les effets volume. Pourquoi ? Car les prix sont évidemment bien plus fluctuants que les quantités, sauf l’exception de l’abîme 2019-2021 de la métallurgie. Bien sûr, et surtout à partir de 2021, réapparaissent les effets prix positifs cumulés.

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Bref, le principal problème du nickel, c’est tout simplement pour les usines (quand les prix sont corrects et les « cash costs» inférieurs à ces prix) d’atteindre leurs pleines capacités. Le reste n’est que littérature…
La SLN annonçait son Plan 75 000 tonnes ; avec les deux autres usines à 60 KT de capacité, on aurait dû dépasser les 200 KT (prévision, certes fort optimiste de 2005). Même en 2015, la capacité théorique des trois usines était évaluée à plus de 150 KT… On n’atteint pas 100 KT en 2023, à peine plus qu’en 2022 si les derniers mois de 2023 sont aussi bons que les huit premiers (base de nos estimations pour cette année).
2 - La question des transferts métro doit être mise en relation avec celle des fameux prélèvements obligatoires : les transferts métro apparaissent pour ce qu’ils sont[33] : le bouche-trou principal d’une insuffisance de financement local !
Peut-on aller plus loin que 2017 pour évaluer ces transferts métro ; et je suis péremptoire : Sudrie aurait pu le faire ! Grâce à l’IEOM qui publie la balance des paiements du Caillou et l’État qui a précisé (et avec gourmandise) dans son fameux document de 2021 Conséquences du Oui et du Non (où il insiste plus sur les inconvénients du Oui, singulièrement sur les transferts).
Dès 2021, nous avions le graphique qui suit : où l’État évalue les transferts à 2 ou 3 points de plus que l’ISEE jusqu'en 2017 puis l’IEOM.

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Il faut revenir sur ces transferts ; on a déjà commis quelques billets acerbes sur ce sujet dans Le Club de Médiapart[34] : c’est pour moi une fixette depuis bien longtemps. On remarquera que la proposition de l’Éveil océanien et de l’Intersyndicale cadre parfaitement (mais sans l’expliciter) avec notre analyse.
21 – Prélèvements obligatoires (PO) : la légende des pays (dont la France) battant tous les records
La question fait polémique : les PO, Impôts et Cotisations sociales (CS) obligatoires, sont importants en France relativement au PIB. Mais dans les pays avec peu ou pas de Sécurité sociale obligatoire, il faut rajouter les assurances sociales qui engraissent les sociétés financières privés ou les mutuelles[35] : avec ces prélèvements, certes non-obligatoires, on approche la réalité. En outre, le véritable salaire n’est pas le salaire net que touche effectivement le salarié, mais ladite Rémunération des salariés : le coût du travail (salaire net + CS des salariés + CS patronale). Autrement dit, si l’on supprimait, sans compensation[36], les CS, le salaire versé serait le coût du travail, inchangé pour l’employeur (ou, si l’on supprime les CS, voir la note précédente : Vive la Liberté et la Charité !).
Tout est dit : c’est une fausse question[37].
Mais ce n’est pas fini : petit problème technique ou sémantique qui n’est pas sans importance.
En France, depuis le début des années 1990 (beaucoup plus récemment en Nouvelle-Calédonie) les CS ont été en partie remplacées (par la CSG, la Contribution sociale généralisée et autres du même acabit) par ce que la jurisprudence française considère comme des impôts. Certains (dont je suis) pense qu’il s’agit de pseudo-CS, en fait de vraies CS ! Or, le choix d’une solution ou d’une autre (voir le graphique suivant) a d’importantes conséquences, car ces pseudo-CS dont le poids était faible, compte maintenant en Métropole pour plus de 10 % du PIB. Nous adoptions souvent (graphique de droite) le point de vue non orthodoxe où les impôts au sens strict tournaient toujours autour de 20 % du PIB, depuis une quarantaine d’années et les CS passaient de 16 % à 25 %.
Peu importe me direz-vous ? Non ! Car en comparant la structure des PO de Métropole à celle du Caillou où n’existaient pas encore ces pseudo-CS (la CSS, la Contribution sociale de solidarité n’a été créée qu’en 2015, et à un niveau alors très faible) on constatait que le poids des impôts sur le Caillou était, étonnamment, proche de celui de la Métropole et celui des CS bien inférieur à celui de la maison-mère. Cette analyse n’était pas idiote si l’on considérait les pseudo-CS comme des CS ; mais n’existant qu’en France et pas encore en Nouvelle-Calédonie, on surévaluait alors le poids des CS de L’Hexagone.
Nous adoptons maintenant l’analyse officiel et orthodoxe où le poids des impôts sur le Caillou était et est encore largement inférieur à celui de la France.

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22 – La faiblesse des PO en Calédonie : le ratio PO / PIB y est bien inférieur à celui de la maison-mère ; et de beaucoup (environ 10 à 11 points de PIB après 2008, beaucoup plus auparavant : un tiers des PO du Caillou !)
Ces transferts ramenés au PIB chutent donc en période de vaches grasses : exactement le contraire de l’interprétation de Sudrie qui se garde bien (voir plus haut) de le mentionner et est gêné quand on lui évoque (maladroitement) le phénomène. Notre interprétation est donc la suivante (insistons) : les transferts ne sont qu’une intervention économique et, évidemment politique, de la Métropole compensant la faiblesse structurelle des PO que les « riches » et les « patrons » (par exemple le Medef NC) adorent – la faiblesse structurelle, pas les PO... Et les loyalistes veulent rester dans la France mais sans son taux (certes élevé) de PO : avoir le beurre et l’argent du beurre…
Le taux PO / PIB du Caillou est donc bien inférieur à celui de la France[38] ; surtout par la faiblesse de la part des impôts mais, dans une moindre mesure, par celle de la part des CS.

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Ceci dit, la structure des impôts sur le Caillou est en outre nettement plus injuste qu’en Métropole : beaucoup plus d’impôts indirects et beaucoup moins d’impôts directs sur les revenus.

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Les transferts métro permettant de boucher les trous des finances publiques, sont néanmoins, par les dépenses, l’un des moteurs (Sudrie n’a pas complètement tort) de l’activité (si l’on admet que la demande est bien essentiellement à l’origine de l’offre d’activité…) ; mais un tout petit moteur. Surtout, ils ne sont pas faits pour ça ! Le contribuable résidant en France remplace ce que les classes aisées du Caillou (dont les salariés cadres, par le plafonnement des CS) ne paient pas en PO ; tout simplement. Et les deux aspects sont bien sûr étroitement liés : la France soutient sa Calédonie française et les classes sociales qui y tiennent le haut du pavé ; c’est encore aussi simple que cela ! Une chanson déjà ancienne du groupe kanak Gurejele[39] illustre bien cette situation : C’est qui qui paye ? Son refrain est : C’est la France qui paye ! Avec un contenu politique cependant un peu douteux[40].
L’aspect politique est sans doute le principal aspect de ce rôle du bouche-trou ; répétons la litanie des loyalistes relayée de plus en plus par le gouvernement français : sans l’aide de la France, la survie du Caillou serait impossible. Autre manière de dire que la Kanaky Nouvelle-Calédonie indépendante serait impossible ; sauf à se jeter dans les bras d’un nouvel impérialiste : jeter un regard vers le nord-ouest de l’Inde… Il fut un temps, c’était l’Australie !
Après 2017 (ce que Sudrie s’est bien gardé d’évoquer) les transferts métro regrimpent (en brut comme en net) tandis que le PIB chute ; si Sudrie avait évoqué cette période, il aurait été un peu gêné sur sa légende de transferts comme moteur principale de la croissance. Notre théorie du bouche-trou colle mieux à la réalité !

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Les transferts bruts ne vont cependant pas dans la poche de chaque Calédonien ; ils équilibrent les finances publiques (ils sont à peine inférieurs aux impôts en 2020, 19 % du PIB pour les premiers, 15 % pour les transferts bruts ; mais en 2007 les transferts comptaient pour 17 % et les impôts pour 19% : le bouche-trou était plus évident…). Ils financent en fait surtout les fonctions régaliennes de l’État sur le Caillou, mais aussi l’enseignement (sauf le primaire) dont la compétence est pourtant transférée ; les 50 KCFP par mois et par habitant (souvent évoqués) de transferts brut pour un PIB d’environ 6 à 7 fois supérieur et un SMG (Salaire Minimum Garanti) d’environ 160 KCFP mensuel (un peu plus de 3 fois celui des transferts bruts) n’ont en fait qu’un sens macroéconomique.
La part des transferts dans les recettes publiques était en diminution, légère mais nette pendant le boom économique : le grand bouche-trou, pas le moteur principal de la croissance !

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Et voilà ! Les transferts-bouche-trou induisent même un financement public global supérieur à celui des PO de Métropole ; ils pourraient ainsi encore baisser.
Frappant est l’effet miroir entre les PO du Caillou, en hausse puis stables et les transferts métros bruts, en baisse, sauf en toute fin de période.

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En cas d’indépendance et de suppression immédiate des transferts (À Dieu ne plaise !) l’augmentation des PO, singulièrement des impôts mais aussi des CS, serait une solution ; mais ce n’est pas le sujet du débat actuel, même s’il rôde.
3 – Que faire ? Sudrie a une solution[41] un peu différente de ses précédentes
31 – Une seule solution : la baisse des cotisations ! Remplacées par l’impôt direct
Ce n’est pas la seule réponse à l’économie à bout de souffle, mais la préférée de Sudrie en 2023 : « Levier n°3 : agir sur les coûts par la réfaction des cotisations sociales », car ces dernières alourdissent le coût du travail[42].
Sudrie participant en 2016 au plan Do Kamo (L’Être épanoui ; plus exactement L’homme en son authenticité) de réforme des dépenses de santé, affirmait déjà que le modèle était au bord de l’asphyxie ; plus qu’à bout de souffle donc. Il proposait une réduction des prestations sociales de santé (tickets modérateurs) et la réduction des CS remplacées par des assurance privées et fort allongement de la période d’activité avant retraite[43]. Il dut faire face en 2017, après remise de ses rapports, à une levée de bouclier des personnels de santé. Il avait cependant l’oreille du gouvernement et de son plan adopté par le Congrès en mars 2016. Ce plan avait remis en 2018 un rapport reprenant surtout certaines pistes de Sudrie, mais proposait également une augmentation des taux de CS, cependant seulement pour les tranches plafonnées, et des abattements de cotisation pour les bas salaires qui furent mises en œuvre : la RBS (Réduction sur les Bas Salaires).
En 2023, Sudrie feint de proposer plusieurs pistes, dont celle préférée des patrons qu’il a spécifiquement analysée et approuvée[44] ; mais il ne met pas ses tous ses œufs dans le même panier : il sait brosser les syndicats des salariés dans le sens du poil[45].
32 – Un système de CS favorisant très nettement, sur le Caillou, les salariés aisés, sans parler des happy few
La part des CS dans le PIB est, on l’a vu, plus faible en Nouvelle-Calédonie qu’en France ; l’une des raisons est que la plupart des taux de CS sont plafonnées[46], avantageant les salariés aisés (dès un salaire de petit cadre, vers 500 KCFP ou 4 500 € mensuels brut). Ce phénomène saute aux yeux aux graphiques suivants[47] ; surtout si l’on compare avec la situation en Métropole.

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La comparaison avec la Métropole est frappante : les taux de CS patronales sont nettement plus élevés en Fr qu’en NC pour les salaires moyens et élevés, par la quasi-absence de plafonnement en France (sauf, répétons-le pour les CS de retraite) ; à l’inverse, les réductions de CS patronales pour les bas salaires (dont 2 à 3 fois le SMIC) sont bien plus importantes en Fr qu’en NC ; d’où les écarts négatifs Fr - NC pour les bas salaires, puis de plus en plus positifs pour les hauts salaires.
L’approche de l’échelle des salaires nets mensuels en 2023[48] montre, pour la Nouvelle-Calédonie, un salaire moyen des cadres proche de 500 KCFP ; et de 600 pour le salaire médian. 14 % des salariés touchent plus que 500 KCFP, dont 32 % pour le secteur public et seulement 8 % du secteur privé : ça fait du monde aux CS plafonnées.

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33 – La luttes des classes à fleuret moucheté
Le Medef NC (on l’aura compris…) ne cache pas son soutien[49] à la proposition de Sudrie ; il écrit en effet : « Le Forum Perspectives organisé par le Gouvernement a mis en lumière que l’absence de croissance depuis 2017, alors même que les dépenses, notamment sociales, continuaient de croître, avait amené l’économie calédonienne à un état de quasi-faillite. Il a également été démontré qu’essayer de sortir de cette situation par une hausse massive des prélèvements obligatoires ne ferait qu’aggraver la situation »[50]. Et de préciser : « La seule solution viable pour notre économie réside dans un choc de compétitivité entraîné par une baisse du coût du travail via la fiscalisation des cotisations sociales ».
Ben voyons...
Astucieusement, le Medef fait en outre référence à certaines organisations syndicales représentatives qui trouveraient intéressantes les propositions de Sudrie. Il tourne autour du pot, mais un lecteur peu attentif peut se laisser berner. C’est un peu long, mais l’article de DNC (Demain en Nouvelle-Caléonie) signé Anne-Claire Pophillat vaut le coup d’œil.
Dans un autre article de DNC, la même journaliste est plus directe : elle fait de l’USOENC (l’Union des syndicats des ouvriers et employés de Nouvelle-Calédonie, liée à la CFDT) et de l’USTKE (Union syndicale des travailleurs kanak et des exploités, partenaire de la CGT) des soutiens de Sudrie [51]. Sans doute la traduction d’un désir tenace de tout le patronat mais probablement une contre-vérité. La plupart des syndicats de salariés[52] s’affirment vent debout contre les propositions de Sudrie. Étonnante est même la contestation par les cadres de la CFE-CGC, « C’est un transfert des charges de l’entreprise vers les salariés, et ce n’est pas acceptable »[53] ; moins étonnante est celle de la Fédé, la Fédération des fonctionnaires qui a perdu son nom pour garder son pseudo de Fédé (partenaire de l’UNSA en France) qui goûte mal en outre[54] la proposition de réduire l’indexation des salaires des fonctionnaires. Selon la Cogetra (sans équivalent en Métropole) « C’est le plan de l’interpatronale »[55]. Il est vrai que, l’article de presse qui cite ces réactions (toujours de DNC...) ne mentionne aucune réaction négative des deux autres grands syndicats représentatifs.
Le conseiller « économie »[56] (Laurent Chatenay) au cabinet de l’indépendantiste chargé de l’économie et du commerce extérieur (Adolphe Digoué) au gouvernement du Caillou, est un fervent partisan et compagnon de route de Sudrie. Il précise que ce « nouveau modèle … prévoit, entre autres, de redonner du pouvoir d’achat aux ménages les plus modestes et aux classes moyennes en baissant les cotisations sociales ».
Conclusion
Une sourde et dure lutte existe donc entre, d’un côté, les partisans de l’augmentation ou la stabilité des CS globales (au moins par la suppression des plafonnements, les taux de base globaux étant d'un autre côté réduit de deux points : 13,5 % contre 15,5 %) proposée par l’Éveil océanien et les syndicats de salariés, de l’autre ceux de leur « réfaction » à la Sudrie. La seconde est donc soutenue par les patrons et les loyalistes qui siègent au gouvernement.
Il est frappant de constater que le conseiller économique d’un ministre indépendantiste (Chatenay) ne cache pas qu’il milite pour la proposition de Sudrie (et donc des loyalistes et du patronat). Rappelons que le Président du Gouvernement en citant Sudrie et toute son analyse semblait la cautionner. Mais c’est la Nouvelle-Calédonie où les parties de billard à trois bandes et en 3D sont courantes… Probablement, le Président du gouvernement et Adolphe Digoué attendaient leur heure pour siffler la fin de la récréation…
La réélection, fin août, de l’indépendantiste Rock Wamytan à la présidence du Congrès[57] (grâce aux voix de l’Éveil océanien) va sans doute faire pencher la balance. Les indépendantistes évoquèrent immédiatement et avec gourmandise que le projet de réforme du RUAMM avec suppression du plafonnement et réduction de deux points des CS, allait enfin arriver au vote du Congrès ; sauf nouveau coup fourré, il devrait passer… grâce à L’ÉO.
Mais attendez : le suspense n'est pas fini !
Le projet de Sudrie est bien mal en point. Son martelage d’une économie encore à bout de souffle en 2023 alors que tout laissait penser à un rebond en 2022 grâce au nickel, ressemble fort à un mensonge par omission ; de deux choses l’une : où, aveuglé par sa théorie du nickel petit moteur, il n’a pas vu la part du nickel dans le PIB allait être de 14 % en 2022 ; ou il pouvait le voir et l’avait vu mais le cacha. Malgré tous ses défauts, il a accès, comme vieux conseiller du gouvernement, à beaucoup plus d’informations que de petits analystes comme nous ; insistons : ou il est vraiment nul, ou il est très malin. Mais après la bonne nouvelle du milieu octobre de la croissance réelle du PIB en volume à 3,5 % et à 7,5 % en valeur, il va avoir du mal à continuer à faire le malin…
D’autant plus qu’à notre grande surprise, l’examen du projet concurrent de Sudrie, celui de l’ÉO et des syndicats, va plus vite que nous le pensions : Rock Wamytan a donné un grand coup d’accélérateur en proposant au congrès, presqu’en même temps que la publication de la bonne nouvelle du PIB 2022, le vote du projet de réforme de la CAFAT le mercredi 18 octobre. Hurlements des loyalistes dès le 12 octobre : Réforme du Ruamm : « c’est une provocation totale à l’égard de milliers de Calédoniens »[58]. Les loyalistes Virginie Ruffenach et Françoise Suve avaient en effet, la veille, convié la presse au Congrès pour protester contre cette réforme du Ruamm ; et de rappeler de nouveau « les Calédoniens » à descendre dans la rue ». Le parti (plus centriste) Calédonie ensemble s’insurge également contre le projet porté par l’ÉO.
Les loyalistes affirment donc avoir été bernés (à bernés, bernés et demi…) : « C’est une provocation totale à l’égard des milliers d’hommes et de femmes qui étaient dans la rue, en mars, pour sauver leur emploi et leur dignité de vivre, tance Virginie Ruffenach, la présidente du groupe Rassemblement. Nous avons été totalement manipulés. Cette commission [celle du Congrès censé être source d’amendements, PC] n’avait qu’un objectif : nous faire perdre du temps pour, finalement, arriver à faire voter exactement le même texte qui n’a pas changé d’une virgule. Nous demandons de reporter cette séance et surtout de faire des amendements au texte proposé qui ne peut être adopté en l’état, à moins de détruire nos emplois calédoniens ». L’Éveil Océanien et l’Intersyndicale considèrent en revanche que les loyalistes et le MEDEF n’ont pas jouer le jeu durant toute la période de la commission ; les textes eux-mêmes n’ayant pas fait l’objet de propositions concrètes.
Les loyalistes et le MEDEF ne demandent plus l’aide de Sudrie-dernière version mais de celui de Do Kamo avec les économies de coûts de santé : « Notre système de santé coûte de l’argent. La première chose à faire est de chercher les pistes d’économie et de maîtriser nos dépenses, surtout les dépenses publiques », note une autre loyaliste. Exit, donc, le nouveau Sudrie… Pas si sûr, car la fin (provisoire) du feuilleton ressemble à une farce.
Nous avons, plus haut, évoqué les tentatives du patronat et de Laurent Chatenay de laisser à penser que certains syndicats de salariés avaient pour Sudrie les yeux de Chimène. Le dernier communiqué du dimanche 15 octobre, publié lundi 16[59], de tous les syndicats représentatifs (UT CFE-CGC, USTKE, USOENC, Fédé et Cogetra) ne laissent plus planer aucun doute. Ces syndicats déplorent « la politisation et l’instrumentalisation faites par certains groupes politiques du Congrès. Nous ne constatons aucune volonté de ces groupes politiques ou des syndicats patronaux d’aboutir réellement à un consensus sur ce texte, nous faisant même douter de leur volonté réelle à sauver le Ruamm ». Ils rappellent leur soutien au projet de texte « travaillé et amendé ensemble depuis plus d’un an » et constatent : « aucune volonté de ces groupes politiques ou des syndicats patronaux d’aboutir réellement à un consensus sur ce texte ».
Les soutiens de Sudrie et les opposants au projet de l’ÉO et des syndicats de salariés ne sont pas restés les bras croisés : les groupes Les Loyalistes et Le Rassemblement au Congrès ont déposé 36 amendements au texte de réforme. « De l’obstruction parlementaire » réagit Milakulo Tukumuli. Et les propositions de Sudrie et de ses soutiens d’être encore formellement abandonnées. Exit le remplacement des CS par la CCS, retour aux économies de soins de santé et financement par ce qu’on appelait en France « la TVA sociale » : la TGC calédonienne. Bof : pas très loin de Sudrie qui s’en accommodera.
Après une amère opposition avant la journée de mercredi, un consensus au goût de miel a ouvert celle de jeudi : par un miracle qui apparaît quelquefois sur le Caillou, des amendements consensuels élaborés le matin ont été votés à l’unanimité l’aprè-midi, ainsi que le texte final (avec une seule abstention). On est en outre revenu à Do Kamo et aux économies de coûts de la santé ; et deux aspects principaux du projet initial ont disparu dont l’examen est reporté à plus tard : la suppression des réductions de CS sur les bas salaires ; la définition des niveaux des taux de CS, dont ceux des patentés. Rien n’a été dit sur la question des plafonds ; on peut en déduire que, pour le moment, il sont toujours là...
Si un consensus (miel mais peut-être farce) a été trouvé, le suspense de la journée des dupes n’est pas encore clos : les oppositions restent évidentes ; on voit mal un accord arriver dans l’esprit du projet initial de l’ÉO. Peut-être qu’à partir de dorénavant, ce sera donc comme d’habitude...
Une autre interprétation, encore plus pessimiste et pour tout dire plus agaçante, est cependant possible : le projet de l’ÉO et de l’Intersyndicale est, au moins pour le moment, vidé de toute sa substantifique moelle. Radotons : remise à plus tard (aux calendes grecques ?) de la suppression des RBS et autres CS sur les bas salaires ; remise à plus tard de l’unification des taux de CS (avec uniformisation pour les patentés ; baisse de 2 points des CS, dont moitié-moitié pour les parts salariale et patronale) ; remise à plus tard, surtout, de la suppression des plafonnements de CS pour les salaires bruts supérieurs à 540 KCFP (4,3 K€).
Notes de bas de page
[1] C’est une répétition particulière des journées de novembre 1630 où Louis XIII réitère, contre toute attente, sa confiance à son ministre Richelieu, élimine ses adversaires politiques et exile sa reine-mère Marie de Médicis. Après ce billard à plusieurs bandes, le pouvoir français très catholique et n’aimant guère les Protestants, va cependant prendre le parti de ces derniers en Allemagne et au nord de l’Europe (entrant ainsi dans la Guerre de Trente ans) pour contrer la puissance des Habsbourg d’Espagne et du Saint-Empire ; nouveau billard à plusieurs bandes.
[2] Voir notre billet précédent sur Le Club de Médiapart : Macron en Calédonie : le retour en juillet 2023 et la persévérance dans l’erreur, sous-titré : Macron a persévéré dans l’erreur en niant que le troisième référendum était politiquement sans légitimité politique. Et ce fut, peut-être surtout, Macron en Indo-Pacifique… Guerre et paix… extérieures, mais aussi intérieures. « Si tu veux la paix, dit-on, prépare la guerre » ; cependant Macron ne se dit-il pas en même temps et peut-être inconsciemment : « Si tu veux la guerre, prépare la paix !
J’avais auparavant écrit, publié en 2018 (ça fait un bail…) Kanaky Nouvelle-Calédonie indépendante ? (Collection Écrit-Tic, L’Harmattan, Paris). Je pense remettre ça ; mais en remplaçant le point d’interrogation par un point d’exclamation… Car l’évolution de la position de l’État m’insupporte ; même si les divisions au sein du mouvement indépendantiste m’agacent.
[3] Maître de conférences en économie et son cabinet DME, Didacticiels & Modélisation Economiques.
[4] Dans notre livre de 2018, Sudrie était déjà bien habillé pour l’hiver… Ce livre a dû lui échapper, comme à bon nombre d’indépendantistes, malgré nos efforts de communication…
[5] Caisse de Compensation des Prestations Familiales, des Accidents du Travail et de Prévoyance des travailleurs de Nouvelle-Calédonie. Son principal régime est le RUAMM (Régime Unifié d'Assurance Maladie et Maternité).
[6] L’un des représentants de la communauté wallisienne-futunienne est le parti qui fait maintenant basculer toutes les majorités ; c’est lui qui a permis, en juillet 2021, après une longue crise où deux indépendantistes briguaient le poste de président du gouvernement, l’élection de Louis (Mapou de l’UNI-Palika) contre le candidat de l’UC (un Kanak qui fut président du Medef NC). Voir (pour commencer) :
L'Éveil océanien — Wikipédia (wikipedia.org)
Son président et fondateur est Milakulo Tukumuli, mathématicien d’origine futunienne mais né sur le Caillou. En général, les Wallisiens-Futuniens sont loyalistes de façon écrasante ; une faible minorité est indépendantiste ; l’ÉO est entre les deux...
Voir aussi, fin août 2023, une interview de Tukumuli (au milieu du JT) qui éclaire beaucoup de choses concernant la position de ce parti, singulièrement quant à question de l’indépendance : « Non, pas maintenant », mais partisan, à terme, d’une « souveraineté partagée entre la Calédonie et la France ». Écoutable et visible sur la Toile à :
[7] Il faut bien brosser les salariés dans le sens du poil… Cette baisse des taux de CS dans un Territoire où les taux sont déjà bien faibles me semble poser question. On espère qu’au moins le déplafonnement des CS pour les hauts salaires (ceux de la plupart des cadres, sinon de quelques techniciens et agents de maîtrise) compensera la baisse des ressources de la Sécu locale.
[8] Implicite (de par le taux unique) mais point souvent ignoré par les critiques, singulièrement par celles du Patronat et des loyalistes (critiques soutenues par Sudrie…) qui insistent surtout sur la question de la réforme des patentés (petits entrepreneurs individuels) pour cacher celle, fondamentale, de la fin des plafonnements des cotisations sociales pour les classes aisées ; voir :
On le trouve indiqué explicitement dans :
Pour les salaires bruts du secteur privé, il existe actuellement deux tranches. Jusqu’à 539 KCFP mensuels, la cotisation sociale s’élève à 15,52% (11,67 % pour l'employeur et 3,85 % pour l'employé). Pour tout salaire supérieur, s’applique alors un taux réduit de 5 % (3,75 % pour l’employeur, 1,25 % pour l’employé). Avec la réforme proposée par l’EO, les deux tranches seront supprimées pour laisser place à un taux unique de 13,5 %, comme pour les travailleurs indépendants. Le taux continuera d’être partagé entre l’employeur (10,65 %) et l’employé (2,85%). Seront alors favorisés les salaires inférieurs à 539,5 KCFP qui cotiseront un point de moins qu’avant la réforme.
[9] En gros, donc, pour un salaire brut mensuel à partir d’un peu plus de 4 500 €, celui de la plupart des cadres.
[10] Intéressante cette large union du patronat. Déjà, fin 2022, elle évoquait des points que Sudrie allait reprendre en y rajoutant sa sauce (à moins que ce ne soit le contraire) en finissant par développer le slogan sur la cherté du travail. Voir sur la Toile :
Voir, plus généralement, les réactions, souvent négatives, à la réforme de la CAFAT proposée par Milakulo Tukumuli de l’ÉO, sur le site de la télé Caledonia, le 31 mai 2023 :
Réforme du RUAMM : réactions et décryptage | CALEDONIA
[11] Voir l’interview par Élisabeth Nouar (patronne de la radio RRB, Radio Rythme Bleu, rappelons-le, fort loyaliste) de février 2023 ; beaucoup d’aspects techniques et insistance de Nouar sur l’augmentation des cotisations sociales des patentés ; Tukumuli arrive néanmoins à expliciter les deux aspects principaux de sa réforme : baisse de deux points des CS, suppression des plafonnements. Et, en passant, il évoque une embellie de l’économie en 2022 et début 2023 (ce que Sudrie se garde bien de mentionner…). Voir :
TRANPARENCE : MILAKULO TUKUMULI | Radio Rythme Bleu (rrb.nc)
Pour rester équilibré, on propose au lecteur de visionner également la réponse du patronat de NC Éco qui insiste plus, en cas de baisse ou réfaction des CS) sur le gain de pouvoir d’achat des salariés et, ainsi, la relance de la demande que sur la baisse des CS (effet théorique, selon les économistes de l’offre censé booster l’offre de travail et réduire le chômage).
LES JEUDIS DE L'ECONOMIE : 23/02/23 | Radio Rythme Bleu (rrb.nc)
[12] Voir :
[13] On trouve tout ce qu’il faut pour comprendre ce qui suit sur le site du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie :
Réfléchir au nouveau modèle économique calédonien | Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie
[14] On peut visiter son site et s’amuser à vérifier nos analyses…
ISEE - Institut de la statistique et des études économiques Nouvelle-Calédonie
Les données des dernières années sont provisoires, souvent ensuite très corrigées. On croit savoir que les services du gouvernement en savent en général nettement plus ; c’était du moins le cas il y a quelques années. Le CEROM (Comptes économiques rapides de l’Outre-mer) n’est pas plus précis ; mais il indiquait cependant les parts du nickel dans le PIB jusqu’en 2021: on la connaît désormais pour 2022. Connaissant l’évolution du secteur nickel en 2022 et pour la moitié de 2023 : on pouvait ainsi tenter des estimations pour ces deux années.
[15] Les exportations de nickel en valeur augmentent de 70 % en 2022, passant de 17 % à 27 % du PIB ; la part nickel dans la valeur ajoutée (approche de celle dans le PIB) passerait de 9 % en 2021 à environ 14 % l’année suivante : si avec ce bond, le PIB ne progressait pas en 2022 d’au moins 2 % en volume… On était encore trop frileux.
[16] On remonte sur ce point à 1995 ; le secteur de la construction explique en grande partie le boom, surtout pendant la construction des deux nouvelles usines métallurgiques de nickel (mais pas que…) ; de même, la chute de ce secteur (fin des susdites constructions, mais pas que…) explique le ralentissement qui suivit. Sans la chute de l’emploi salarié dans ce secteur, pas de chute générale de l’emploi visible. Là, les statistiques détaillées de l’ISEE sont précises jusque début 2023 : on peut les trouver sur son site, à Emploi-Revenu. Dans les mines, l’érosion de l’emploi commence en 2015 et se termine en 2019 : l’emploi repart ensuite mais serait stable en 2023. Dans l’industrie (hors construction) et l’agriculture, l’érosion ne concerne que 2016 à 2018 ; reprise ensuite, surtout en 2022-2023. La construction est la plus marquée, et de très loin, par la chute de l’emploi salarié (mais en partie substitué par des salariés licenciés devenus artisans patentés) dès 2012 : autour de 9,3 milliers en 2010 (15 % du total) mais à peine 5,9 % à l’étiage de 2021, 6,1 % en 2022 et 6,3 % en estimé 2023 (9 % du total). Dans le commerce, le creux s’étale de 2016 à 2020 ; forte reprise à partir de 2021. Dans les autres services, l’emploi est stable jusqu’en 2019, s’érode en 2020-2021 puis repart.
[17] L’IEOM nc (l’Institut d’émission) n’est pas optimiste pour 2023 (premier et deuxième trimestre) notamment en matière de prévision d’activité et d’Indicateur du climat des affaires (ICA).
[18] Dans son Rapport n°1 (Un bilan diagnostic macro, Un modèle économique à bout de souffle) ; on peut le lire sur la Toile à :
2_dme_-_forum_economique_-_rapport_1_-_bilan_diagnostic.pdf
[19] Cependant, les économistes libéraux, comme Macron et son équipe, considèrent également ce trait, lié aux prélèvements obligatoires élevés (impôts plus cotisations sociales) comme expliquant toute économie « à bout de souffle ».
[20] Ce « qui réduit sa capacité à affronter avec succès la concurrence internationale. Elle rencontre ainsi des difficultés, tant à promouvoir ses exportations (y compris parfois celles de nickel) qu’à développer des activités de substitution aux importations ».
[21] Dans une note (p.7) Sudrie indique : « L’incidence des transferts sur la croissance calédonienne a été mesurée au travers d’un ajustement exponentiel portant sur la période 2000-2017 (source des données : ISEE) … Le modèle est significatif à moins de 1 % d’erreur ».
[22] Graphique 1, p.4 de son rapport n°1.
[23] Dans son interview, à la question (mal posée : « pourtant, les transferts baissent » (il s’agit de leur part dans le PIB) il l’élude, cependant un peu gêné. Voir ou revoir ce moment dans :
[24] Les données de l’ISEE concernant ces transferts s’arrêtent en 2017 (pourtant Sudrie possède sans aucun doute les moyens de les actualiser) ; on peut tenter d’estimer ce ratio ; grâce notamment à la balance des paiements de la Nouvelle-Calédonie donnée par l’IEOM (l’institut d’émission de l’Outre-mer).
[25] Selon certaines analyses, pas toutes ; on y reviendra.
[26] Le jeu consistant à choisir les échelles des graphiques pour tenter de convaincre ce que l’on veut montrer est classique. Il reste que je comprends mal comment un tel coefficient de corrélation de 94 % peut apparaître dans ce cas de figure ; or, il apparaît bien.
[27] Continuons avec encore de l’humour ; l’un de mes profs nous faisait remarquer, il y a bien longtemps, que les ratios (des pourcentages significatifs) : « C’est comme les bikinis : ça donne des idées, mais ça cache l’essentiel ».
[28] Celle du secteur de l’activité marchande hors nickel.
[29] Selon lui (et ce n’est pas faux) : « Plusieurs facteurs se conjuguent pour expliquer le poids important des dépenses publiques. Citons notamment parmi ceux-ci : La majoration des traitements et salaires dans la fonction publique (indexation) qui renchérit considérablement (par deux environ) le coût de fourniture des services publics… ; La pluralité des acteurs publics (État, Nouvelle-Calédonie, Provinces, communes, organismes divers d’administration centrale et locale…) qui augmente mécaniquement le taux d’administration du territoire ; L’attachement des Calédoniens à leurs services publics, et singulièrement à leur dispositif de protection sociale ».
[30] C’est cela être conseiller multi-partisan.
[31] Si l’on met en avant la demande, les exportations sont souvent considérées comme exogènes du PIB (d’où un effet multiplicateur) ; ce n’est évidemment pas le cas pour la Nouvelle-Calédonie où les volumes exportés (à près 98 % des produits des usines métallurgiques nickel et du minerai) sont le plus souvent endogènes – on exporte simplement ce que l’on a produit ! – (mais pas les prix).
[32] Voir p.7 et le G5 : « Plus précisément, la contribution du nickel à la croissance économique nominale n’a été que de 5,5 % sur la période 1998-2017 (autrement dit, 94,5% de la croissance nominale du PIB sur cette période s’explique par d’autres facteurs que le nickel) » indique Sudrie. Certes (on serait moins sévère que lui concernant ce couple « 94,5 % versus 5,5 % ») mais il oublie en outre encore que le boom avant 2012 fut dû en grande partie, voir plus haut, à la construction des deux nouvelles usines métallurgiques…
[33] Plus rien à voir avec la légende du moteur principal de la croissance de Sudrie que le forum Perspectives… semblait avoir gobé…
[34] Voir en juin 2021 :
Puis en septembre de la même année, un super-gag : il y eut en effet déplafonnement, mais pour les salaires supérieurs à environ 44 000 € mensuels (une petite dizaines de happy few)…
Mais vingt fois sur le métier…
[35] À moins (Vive la Liberté !) de ne pas se couvrir socialement, de crever où de s’adresser à la charité…
[36] Sudrie en propose une, différente de celle qu’il proposait il y a quelques années. Mais gardons le suspense…
[37] Pour les plus curieux, voir quelques articles, dont celui du quotidien L’Humanité… qui ne se trouve malheureusement plus sur la Toile…
On peut se rabattre sur Le Figaro qui reste assez objectif ; voir :
La France reste vice-championne des prélèvements obligatoires en Europe (lefigaro.fr)
Voir aussi un article de la CGT (certes, ce n’est pas le Medef…) :
CGT Finances : La vérité sur les prélèvements obligatoires
[38] Ici, nous avons considéré les CS remplacées par des impôts (la vieille CSG, la Contribution sociale généralisée et autres en France, et la récente CCS, la Contribution calédonienne de solidarité sur le Caillou, comme des impôts : c’est le point de vue officiel français... mais pour certains (dont nous) il s’agit bien de CS... Ce qui change tout dans la structure des PO.
[39] On peut l’écouter facilement ; par exemple sur :
https://www.youtube.com/watch?v=RTgw71oPHbo
Le refrain ne concerne que les déplacements des élus vers la Métropole pour les négociations, mais on peut le généraliser.
[40] Bien qu’il s’agisse d’un groupe kanak engagé pour l’indépendance et la culture du style de musique dit Kanéka. Pour en savoir plus :
https://journals.openedition.org/hommesmigrations/183?lang=es
Douteux donc, comme le vieux livre (1979, chez Plon) de Philippe de Baleine : Les Danseuses de la France, évoquant les DOM-TOM ; titre repris d’une réflexion du ministre des Finances Giscard d’Estaing à l’issue d’un Conseil des ministres : « Voilà des danseuses qui coûtent cher ».
[41] On peut consulter ses Rapports 2 et 3 :
Un scénario tendanciel à long terme, Des perspectives bien moroses :
5_dme_-_forum_economique_-_rapport_2_-_scenario_tendanciel.pdf
Un scénario de croissance forte, Pour une croissance plus forte et plus juste :
6_dme_-_forum_economique_-_rapport_3_-_reforme_du_modele_economique.pdf
C’est là que la solution est proposée. Le reste des rapports au Forum est de moindre intérêt.
[42] C’est le cas du modèle dit bismarckien (du chancelier allemand Bismarck, modèle né à la fin du XIXe siècle) où le financement des dépenses sociales est financé par les cotisations sociales et pèse donc directement sur le coût du travail pour l’employeur ; Sudrie a plutôt un faible pour le modèle dit beveridgien (du Britannique Beveridge, avec son Rapport de 1942) où la protection sociale est financée essentiellement par l’impôt ; ce qui n’est pas une charge directe pour le patronat. Sudrie reconnaît que c’est un peu plus compliqué, et la plupart des modèles sont mixtes : le modèle français est de plus en plus beveridgien, avec la CSG (Contribution social généralisée, née il y a plus de trente ans) et son équivalent calédonien, la CCS (Contribution calédonienne de solidarité) taxes assises sur la plupart des revenus, pas seulement les salaires.
[43] Bref, le report de l’âge de la retraite.
[44] Il indique qu’il a étudié le projet de réforme porté par l’Interpatronale : DME, Evaluation socio-économique du projet de réforme fiscale porté par l’Interpatronale, Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, DSF, août 2022.
[45] Sudrie ajoute une « troisième modalité pourrait s’avérer la plus pertinente. Un projet de réforme porté par l’Intersyndicale suggère ainsi de redistribuer aux salariés la totalité des cotisations salariales non perçues et d’affecter environ la moitié des cotisations patronales aux salariés les moins bien rémunérés (ceux des quartiles 1 à 3) ; l’autre moitié des cotisations sociales patronales non perçues étant conservée par les entreprises pour améliorer leur compétitivité (sous réserve que ces dernières rétrocèdent effectivement ce bénéfice à leurs clients sous forme de baisse des prix)». Ce projet serait porté par toute l’Intersyndicale ? Les sources de cet éventuel projet de l’Intersyndicale ne sont pas données ; il s’agit probablement une fake news ! Elles sera reprise (on y reviendra) par certains journalistes amis du patronat...
[46] En France, seules les CS de retraite sont plafonnées pour les hauts salaires.
[47] Graphiques où devraient apparaître des barres et non des points joints par des courbes ; mais ils sont plus lisibles ainsi.
[48] Source ISEE nc en 2021 avec estimation de l’actualisation selon l’inflation.
[49] Forum Perspectives : Quel modèle pour la Nouvelle-Calédonie" | MEDEF NC
[50] Allusion discrète au plan de réforme du RUAAM par le parti l’Éveil océanien.
[51]Le premier article de DNC (Dossier Forum Perspectives, Encourageant... maintenant, au travail) n’est donc qu’évocateur, en tournant autour du pot ; voir :
Forum Perspectives : Quel modèle pour la Nouvelle-Calédonie" | MEDEF NC
Voir en particulier l’article de Demain en Nouvelle-Calédonie, DNC :
Encourageant… maintenant, au travail – DNC.NC
Comment, en effet, tourner astucieusement autour du pot : « La tenue du forum, sur le principe, fait l’unanimité. … "Un éclairage plus que nécessaire, ajoute Jean-Marc Burette, secrétaire général de l’Usoenc, afin que tout le monde ait le même niveau d'informations." …. "Un tableau morose", renchérit Mélanie Atapo, première vice-présidente de l’USTKE. "Le modèle est obsolète, considère Jean-Marc Burette. Il faut le repenser." … Ce qui est sûr, c’est que la Nouvelle-Calédonie est trop "dépendante de l’argent extérieur". Principalement des transferts de la Métropole. "Il faut qu’on soit autonome financièrement et penser autrement que par le nickel", pose Mélanie Atapo. … Pour redémarrer l’économie, Olivier Sudrie propose de diminuer les cotisations sociales afin de baisser le coût du travail, rendre une capacité d’investissement aux entreprises et faire repartir l’activité. "Redonner du pouvoir d’achat par le salaire", une piste intéressante pour Jean-Marc Burette et Mélanie Atapo. Ce n’est qu’après que la pression fiscale pourra être augmentée. ... Concernant les autres mesures, il est encore trop tôt pour se prononcer, juge Jean-Marc Burette. "Il faut rentrer plus en profondeur dans les propositions." Mélanie Atapo, elle, déclare que l’USTKE " n’est pas contre revoir l’indexation", également proposée. Rendre le territoire attractif permettrait de "redémarrer l’économie et faire venir des investisseurs", poursuit Jean-Marc Burette. Le gouvernement annonce l’instauration d’un groupe de travail. Organisations patronales et syndicats assurent vouloir y participer ».
Le second article de DNC (Demain en Nouvelle-Calédonie) du 15 juin 2023 signé de la même journaliste (A.-C. P. ) et où apparaît Sudrie le doigt pointé vers le haut, met le points sur les i :
Économie : éviter le scénario catastrophe – DNC.NC
Il indique en effet : « Parallèlement, l’augmentation de la contribution calédonienne de solidarité (CCS) viendrait soutenir le financement des comptes sociaux. Visiblement, il n’y a pas beaucoup d’alternatives. Le Medef, la CCI, l’Usoenc et l’USTKE partagent, pour l’essentiel, ce diagnostic. Concernant les mesures proposées, le gouvernement va devoir lever quelques réticences et montrer sa capacité à mener le dossier jusqu’au bout ».
Et de présenter (on va y revenir) « Laurent Chatenay, conseiller économie au cabinet d’Adolphe Digoué, a planché pendant près de deux ans sur la définition d’un nouveau modèle, qui prévoit, entre autres, de redonner du pouvoir d’achat aux ménages les plus modestes et aux classes moyennes en baissant les cotisations sociales ».
[52] Voir l’article :
Le plan Sudrie ne passe pas – DNC.NC
[53] « Les études de M. Sudrie sont à chaque fois très orientées, lance Christophe Coulson (UT CFE-CGC). Pour nous, elles ne reflètent pas la réalité des choses ». Il est vrai que ce syndicat possède maintenant une branche non-cadres et est devenu la première organisation syndicale représentative du Caillou pour les salariés.
[54] Par la bouche de Joao d’Almeida (Fédé) qui ajoute : « Olivier Sudrie est payé par le gouvernement depuis 2011, mais il travaille pour le patronat, en vrai ».
[55] Selon Tony Dupré.
[56] Voir :
« Il y a urgence à relancer l’économie » – DNC.NC
[58] C’est le titre d’un article des Nouvelles Calédoniennes (qui renaît de ses cendres, mais en édition numérique gratuite seulement) :
[59]Voir l’article de Julien Mazzoni dans Nouvelle-Caléonie la 1ère du 16 octobre 2023 : Décryptage : Ruamm, une réforme nécessaire mais qui divise