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Économiste, sociologue et HEC à la retraite (maître de conférence à l’Université Dauphine et membre du Cabinet Syndex, expert-comptable spécialisé dans le conseil aux Comités d'entreprise et aux syndicats de salariés), il s’occupe, depuis une dizaine d’années, de promouvoir l’Indépendance de la Kanaky Nouvelle-Calédonie. Il s’est mis en outre à écrire autre chose que de savants traités...

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Billet de blog 31 octobre 2025

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"Dégel or not dégel" puis "Bougival or not Bougival" dans la Constitution française ?

Les Anglais n’ont pas de constitution, les Français si ; d’où notre référence peu discrète à Shakespeare... Il faut ainsi un projet de loi constitutionnelle pour finaliser la transcription juridique de l’accord de Bougival. Le "premier pas" nécessaire, c’est fait, avec le report des provinciales ; et il était bien "nécessaire" à cet éventuel "second pas", pas gagné cependant…

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

NB : on en est maintenant au 12 novembre...

Encore un feuilleton qui commence le jour de la date du billet et qui se terminera un jour, mais quand ? Ce troisième feuilleton concernant l’avenir de l’accord de Bougival est toujours écrit au jour le jour et progressivement publié avec des ajouts, dans les mêmes conditions donc que les deux autres.

Rajoutons que l'on se plaît ici, comme d’hab’, à noter les légères différences des comptes-rendus des informations selon les médias cités, notamment les deux principaux concurrents sur le Caillou : NC 1ère et LNC (Les nouvelles calédoniennes). 

Saison 1 – Fin de la semaine se terminant le samedi 1er novembre

Un article de Public Sénat du 30 octobre nous servira de premiers mots (d’incipit[1] pour faire plus classe…) : « Après un accord en commission mixte paritaire lundi, l’Assemblée nationale et le Sénat ont définitivement adopté la proposition de loi reportant les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie. Un projet de loi constitutionnelle doit encore finaliser la transcription juridique de l’accord de Bougival conclu en juillet dernier ».

https://www.publicsenat.fr/actualites/politique/nouvelle-caledonie-le-parlement-vote-definitivement-le-report-des-elections-provinciales

Tout est déjà dit dans cet article, mais seulement implicitement ; cependant, pas un mot explicite liant la question du dégel ou non du corps électoral, d’un côté, aux élections provinciales de l’autre. Cependant, c’est discrètement évoqué un peu plus loin : « Derrière le décalage des élections, la question du gel du corps électoral ». Un esprit chagrin pourrait traduire « derrière », non pas par « après » mais par « caché derrière », mais je n’ai pas l’esprit chagrin. Cependant, si on lit bien…

« Le calendrier figurant dans l’accord de Bougival signé le 12 juillet entre l’État et les délégations indépendantistes et non-indépendantistes calédoniennes est donc définitivement validé par le Parlement. […] La mise en œuvre de cet accord doit se poursuivre par l’adoption d’un projet de loi constitutionnelle, déposé en Conseil des ministres début octobre, mais toujours pas inscrit à l’ordre du jour du Parlement. […] Actuellement seules les personnes inscrites sur les listes électorales avant la date de l’accord de Nouméa de 1998 peuvent voter aux élections provinciales. Le gel du corps électoral depuis des années a pour conséquence d’évincer de ces élections près d’un électeur sur cinq, ce qui ferait peser un risque d’inconstitutionnalité sur le prochain scrutin. Ce gel avait pour but d’éviter la mise en place d’une colonie de peuplement. Raison pour laquelle les indépendantistes craignent que cette réforme n’entraîne une marginalisation des Kanaks, peuple autochtone de Nouvelle-Calédonie, dans la répartition des sièges dans les provinces, cruciales pour la vie politique locale ».

Le risque d’inconstitutionnalité n’existe que si laccord de Bougival est ratifié : actuellement, c’est encore laccord de Nouméa qui prime ; le Conseil d’État a été très clair.

On remarquera, en outre, comment est amenée et astucieusement éludée, la « confusion actuelle » du gouvernement avec le « … mais toujours pas inscrit à l’ordre du jour du Parlement » ; cf. l’un des billets précédents : « En inscrivant le projet de loi constitutionnelle à l’agenda du Parlement dès le mois de janvier mardi matin, avant de se raviser quelques heures plus tard, le gouvernement a lui-même suscité une certaine confusion ».

Cet article de Public Sénat est un résumé objectif de la situation ; mais il ne va pas plus loin… Il nous propose cependant « Pour aller plus loin » un tas d’articles (de Public Sénat) sur la Nouvelle-Calédonie qui peut être utile au lecteur.

Tout est en revanche dit dans le titre et le sous-titre de ce billet ; précisons en insistant : pour certains (les loyalistes radicaux et l’État) le report des provinciales n’a d’intérêt que si le corps électoral des élections provinciales est au moins partiellement dégelé ; ce qui rend donc en effet « nécessaire » la ratification constitutionnelle de l’accord de Bougival. Si cette dernière tombe à l’eau, pas de dégel et on aura reculé pour mieux sauter ; autrement dit, le report des provinciales n’aura été qu’un coup d’épée dans l’eau !

Ce 31 octobre 2025 on fête Halloween sur le Caillou ; de son côté, le FLNKS appelait à la mobilisation (de 8 heures à 14 heures, devant le Haut-commissariat, à Nouméa) contre le report des provinciales (article de LNC de la veille)[2].

https://www.lnc.nc/article/grand-noumea/noumea/politique/le-flnks-appelle-a-la-mobilisation-ce-vendredi-31-octobre-contre-le-report-des-provinciales

Cette manifestation a été autorisée, contrairement à la précédente du lundi 27 octobre, « alors que la loi organique prévoyant le report des provinciales devait passer en commission mixte paritaire à Paris. Une initiative interdite par le haut-commissariat en raison du non-respect du délai de trois jours légaux entre la déclaration et la date de manifestation prévue, ce qui "ne permettait pas de prendre les mesures permettant de sécuriser les manifestants". Visiblement, le délai a, cette fois-ci, était respecté ».

Pas un mot de cette manifestation aux JT de la veille, ni sur NC 1ère, ni sur Caledonia… En revanche, Médiapart (dépêche de l’AFP) dans son article du 29 octobre au soir, annonçait la manif :

https://www.mediapart.fr/journal/fil-dactualites/291025/nouvelle-caledonie-le-parlement-acte-le-report-des-elections-avant-de-rouvrir-le-sensible-dossier

Et notre média préféré indiquait que « la loi sur le report des élections pourrait donc être une première étape vers l’adoption d’une autre loi, constitutionnelle cette fois-ci, qui permettrait de transcrire l’accord de Bougival. […] Une manifestation du FLNKS est d’ailleurs prévue vendredi à Nouméa face au haut-commissariat, en plein centre-ville, pour marquer son opposition au report des élections. Pour les opposants à la réforme institutionnelle, le report des élections est le signe que le gouvernement souhaite avancer au pas de course sur la réforme constitutionnelle ».

« Nombreux sont les parlementaires qui craignent un "passage en force " gouvernemental, susceptible d’entraîner un nouvel épisode de violences sur l’archipel comme au printemps 2024, qui ont causé la mort de 14 personnes ».

La mobilisation du FLNKS est contée le jour même ; par LNC d’abord et NC 1ère ensuite.

LNC indique, dans son titre, « Nos élus sont périmés ».

https://www.lnc.nc/article/grand-noumea/noumea/politique/nos-elus-sont-perimes-le-flnks-mobilise-contre-le-report-des-provinciales

« Si les participants sont clairsemés, les banderoles, elles, sont limpides : "Non à Bougival, oui à l’accord de Kanaky", ou encore un "Merde à Bougival, projet colonial". La musique est entrecoupée par la prise de parole des uns et des autres. […] "Ce report, c’est garder des élus qui seront autour de la table pour les prochaines discussions et qui sont illégitimes", explique Henri Juni, membre du bureau politique du FLNKS et de la Cellule de Coordination des actions de terrain (CCAT) ».

« Vers 9h30, une délégation arrive de la province Nord. Après la coutume, les manifestants prennent place le long de l’avenue Paul-Doumer. Dimitri, drapeau posé sur l’épaule, est descendu de Poindimié pour participer à la mobilisation. "L’État nous arrache notre dignité. Il réduit le peuple Kanak à une communauté. C’est donc important d’être là pour ne pas se faire marcher dessus", estime le manifestant. […] Au micro, Hervé Téin-Taouva, élu Union calédonienne à la province Nord et commissaire politique UC, harangue la foule : "Seul le peuple Kanak peut défendre sa destinée. Il faut dire à la ministre (Naïma Moutchou, ministre des Outre-mer NDLR) que là-bas, chez elle, personne ne lui dit ce qu’elle doit manger, comment elle doit s’habiller" ».

« Des mobilisations qui vont "s’intensifier". Une délégation doit être reçue par le haussariat dans la matinée. En attendant, Henri Juni le dit haut et fort dans le micro : "l’accord de Bougival est mort, il est grillé ! Dans les prochaines semaines, nous continuerons à nous mobiliser, et nous allons intensifier nos mobilisations" ».

On passe donc aujourd’hui au FLNKS, et explicitement, de la mobilisation prioritaire contre le report des provinciales à celle contre l’accord de Bougival, il est vrai vieille revendication du Front depuis son refus après la signature du « projet » d’accord.

Autre prise de parole : « "Nous avons rencontré le haussaire pour l’alerter sur ce qu’il va se passer. Il ne faut pas que des choses soient décidées sans le consentement ici au Pays, nous savons où cela va mener, et ce n’est pas bon, nous ne souhaitons pas revenir à ce qui s’est passé l’année dernière", rapporte Hervé Tein-Taouva, élu UC en province Nord, membre de la délégation. "La mobilisation commence aujourd’hui, et elle va monter en puissance" ».

L’article termine par « La mobilisation contre le report des élections provinciales a réuni entre 200 et 500 manifestants ».

L’article de NC 1ère - France Info présente un ton différent.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/province-sud/noumea/environ-200-personnes-mobilisees-contre-le-report-des-provinciales-a-noumea-a-l-appel-du-flnks-1638556.html

Le titre de l’article dit tout : ce ne fut pas un grand rassemblement (et je confirme ; pourquoi le cacher : je faisais partie, comme d’hab’ des deux ou trois « Blancs », les journalistes mis à part, manifestant) : on est passé d’un groupuscule vers 8 h 30 à quelques centaines en fin de matinée, rien à voir avec les nombreuses grandes manifestations pacifiques du Front et de la CCAT qui avaient précédé l’insurrection du 13 mai 2024 (avec en face, les mêmes grandes manifestations des loyalistes). La plus grande partie des présents le 31 octobre 2025 était celle de la délégation de la CCAT du Nord... Pas grand monde de Nouméa et de ses environs ; souvent la peur a été évoquée dans les prises de paroles. Mais il n’y a peut-être pas que cela : démobilisation ou même raz le bol de la radicalisation du FLNKS ?

« Une délégation d’une dizaine de membres et militants du Front a été reçue au haussariat pendant près de 2 heures. L’occasion de donner à Jacques Billant un courrier reprenant les revendications de la coalition indépendantiste. Dans cette lettre adressée notamment à la nouvelle ministre des Outre-mer Naïma Moutchou, les auteurs appellent le gouvernement à "retrouver sa neutralité, sa sincérité et son rôle d’accompagnateur du processus de décolonisation". Le FLNKS estime également demeurer "l’interlocuteur légitime et impératif de l’État". Il explique être engagé dans "un travail de resserrement et de réorganisation interne", égratignant au passage "certains élus de la plateforme électoraliste UNI, dont les motivations relèvent davantage de considérations opportunistes et électorales que de la défense du droit à l’autodétermination du peuple kanak" ».

Dans les nombreuses prises de parole (dont quelques femmes très déterminées, pour le moins) le peu de nombre de manifestants a été évoqué, indiquant que ce n’était qu’ « un début ». Curieusement, peu de prises de paroles ont été retranscrites dans l’article.

Le JT de NC 1ère du soir a correctement (mais assez brièvement) narré la mobilisation du FLNKS sans faire de gorges chaudes, dans les images, sur la faible participation, mais évoquant bien 200 personnes présentes.

Le 19h30 : Édition du vendredi 31 octobre 2025 - les replays et vidéos en streaming - Nouvelle-Calédonie la 1ère

Une fois n’est pas coutume, on peut voir (dans un charmant désordre ; plutôt un épouvantable bordel…) quelques vidéos (de mon cru) sur cette manif sur mon site Facebook ; il y a beaucoup de doublons (dont je n’arrive pas à me débarrasser...) ; voir les commentaires sous quelques vidéos, et avec des erreurs...) :

https://www.facebook.com/search/top/?q=Patrick%20Castex

Ne pas raté mon site : la photo n’est pas la mienne mais celle du regretté Éloi Machoro, assassiné il y a bien longtemps par les forces de l’ordre coloniales ; un peu le type du Che, Ernetso Che Guevara…

Revenons à des contenus plus sérieux et mieux faits... Le 31 octobre, le quotidien Le Monde contait la mobilisation et son contexte.

https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/10/31/en-nouvelle-caledonie-le-flnks-toujours-vent-debout-contre-l-accord-de-bougival_6650581_823448.html

« Commissariat de la République à Nouméa, représentation de l’État dans l’archipel. Sous le soleil de plomb de ce début d’été austral et au son de Makukuti, la chanson devenue hymne de la jeunesse kanak lors du soulèvement de 2024, le rassemblement avait un air de déjà-vu. Sauf en ce qui concerne le nombre : seules 220 personnes se sont déplacées, bien loin des dizaines de milliers de manifestants qu’avaient drainés des mois durant la mobilisation contre le dégel du corps électoral, début 2024 ».

On y apprend aussi (on l’avait déjà indiqué, mais une piqûre de rappel est toujours utile…) : « Vilipendé ces derniers mois pour avoir retiré sa signature du projet d’accord de Bougival, le mouvement indépendantiste s’est trouvé un allié inattendu en la personne de Manuel Valls. Remercié du gouvernement, à sa propre surprise, l’initiateur de l’accord conclu le 12 juillet l’a reconnu, lors d’une audition devant la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale, le 21 octobre : Bougival n’était bien qu’un projet, et l’État savait que la délégation indépendantiste n’avait pas de mandat pour signer un accord définitif ». L’article continue : « De quoi apporter de l’eau au moulin du FLNKS : "On nous a traités de girouettes, de menteurs, alors que ce qu’a dit Manuel Valls ça conforte enfin ce que nous disons depuis le début : que ce projet d’accord est un passage en force de l’État, qu’on a manipulé la délégation conduite par le député Emmanuel Tjibaou. Ça renforce la détermination de nos militants", estime Sylvain Pabouty, de la Dynamik unitaire Sud, mouvement membre du FLNKS et partisan d’une ligne radicale, qui tacle au passage les indépendantistes de l’Union nationale pour l’indépendance (UNI), signataires de Bougival : "Ça, les camarades de l’UNI, même s’ils ne sont pas d’accord avec nous, ils auraient pu le dire publiquement, au lieu de nous laisser nous faire traiter de tous les noms" ».

Médiapart proposait également le même jour un intéressant reportage de Jeanne Sterni, De la Nouvelle-Calédonie à la Kanaky, un long chemin vers l’indépendance.

https://www.mediapart.fr/journal/france/311025/si-ne-se-bat-pas-aujourd-hui-est-appeles-disparaitre-en-nouvelle-caledonie-les-independantistes-tentent-de

« Si on ne se bat pas aujourd’hui, on est appelés à disparaître » : en Nouvelle-Calédonie, les indépendantistes tentent de remobiliser ».

L’article est particulièrement clair sur le but, évident selon moi, du report des provinciales, en citant un dirigeant de la CCAT du Nord : « Derrière le report des élections provinciales, voté cette semaine par l’Assemblée et le Sénat, "c’est le dégel du corps électoral qui pointe le bout de son nez", lance Hervé Tein-Tavoua aux militant·es. Le FLNKS était contre le report de ce scrutin crucial, déjà différé à deux reprises et initialement prévu fin novembre. Si aujourd’hui le texte précise qu’il s’agit de le reporter afin de "permettre la poursuite de la discussion en vue d’un accord consensuel sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle‑Calédonie", le postulat était initialement de permettre l’ouverture du corps électoral, prévue par l’accord de Bougival ».

Sans transition, voir aussi l’invitation, le 31 octobre, de Virginie Ruffenach, dans le magazine Transparence, à RRB (Radio Rythme bleu, pas franchement de gauche ni indépendantiste, nos fidèles lecteurs le savent) par Élisabeth Nouar ; ce n’est pas inintéressant pour notre sujet.

https://www.youtube.com/watch?v=fwjcKOkIx4Q

Entre des tas de sujets abordés (dont la démission de Thierry Santa) on en retiendra seulement quelques-uns.

Ruffenach se demande à plusieurs reprises si le FLNKS (« nouvelle version ») est vraiment prêt au dialogue ; elle admet, elle aussi, comme Metzdorf, que le report des provinciales se fera avec le corps électoral gelé, ce qui est vrai, radotons encore, si l’accord de Bougival n’est pas ratifié. Cependant, bonne question de Nouar, le dégel serait possible en cas de ratification devenue cependant fragile avec le bémol de la fameuse « confusion » du gouvernement qui a repoussé son examen. La ratification, pense probablement Nouar, ce n’est pas gagnée.

Ruffenach admet que le gouvernement français de Lecornu II n’est donc en effet pas clair mais propose tout de go, ratification ou non, un référendum début 2026 en Calédonie sur Bougival ; illusoire sans ratification ! Elle en discuterait lors de la venue de Moutchou ; mais tout regrettant la non reconduction de Valls.

Enfin, elle considère (quelle lucidité !) que l’instabilité politique en France est préoccupante, avec le danger d’une motion de censure qui repousserait sans doute l’examen de Bougival aux calendes grecques en cas de dissolution de l’Assemblée nationale (mais elle ne le dit pas comme ça).

LNC du 1er novembre au matin nous donne le programme de la visite de la ministre des Outre-mer Naïma Moutchou sur le Caillou du lundi 3 au vendredi 7 novembre. https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/quel-sera-le-programme-de-la-ministre-naima-moutchou-en-nouvelle-caledonie

« Durant cette semaine, une journée entière [le mardi 4] sera consacrée aux discussions bilatérales avec les différentes forces politiques alors que les élections provinciales ont officiellement été reportées et que l’accord de Bougival reste des plus fragiles ».

Un peu plus tard, NC 1ère précise un peu : cette visite « s’annonce assez conventionnelle » ; on l’avait déjà compris.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/programme-naima-moutchou-nouvelle-ministre-des-outre-mer-en-caledonie-du-3-au-7-novembre-1638865.html

« Quand l’État rencontre un partenaire calédonien en particulier pour évoquer l’avenir institutionnel, on parle de bilatérale. Et mardi 4 novembre s’annonce une "journée de bilatérales", à la résidence du haussaire. Naïma Moutchou aura-t-elle sa première séance de travail en présentiel avec une délégation du FLNKS, après le retrait du Front du processus de Bougival et son refus de voir les provinciales reportées à l’an prochain ? Quels mouvements seront reçus et dans quel ordre ? Le programme officiel ne le précise pas. On sait que la ministre a enchaîné les visioconférences avec les groupes politiques, lundi 27 octobre (il était alors question de l’Éveil océanien, l’UNI, le FLNKS, les Loyalistes ou encore Calédonie ensemble). […] Autre séquence ministérielle habituelle, une étape dans le Nord. Mais mercredi 6 novembre, pas de passage évoqué à l’hôtel de province ».

Elle ne rencontrera donc pas le président de la Province Nord, Néaoutyine. Qui a pris cette décision : Néaoutyine ou elle ?

Terminons en beauté cette Saison 1  : l’État serait-il le roi des couacs ? Publié le samedi 1er novembre peu avant minuit, heure de Nouméa (fin d’après-midi à Paris) on apprenait (mais sans aller jusqu’à notre esprit chagrin) le report sine die de la visite de Moutchou :  

https://la1ere.franceinfo.fr/la-ministre-des-outre-mer-naima-moutchou-reporte-sa-visite-en-nouvelle-caledonie-1638985.html

« Le ministère des Outre-mer évoque les "échéances budgétaires" pour justifier le report de la visite ministérielle, sans préciser quand elle aura finalement lieu ». « S’ils évoquent "un report de quelques jours", les services de Naïma Moutchou ne précisent pas quand la ministre se rendra sur le territoire ».

Et c’est à la demande du Premier ministre ; « "Ce décalage permettra à la ministre de contribuer, aux côtés des parlementaires, à la finalisation d’une trajectoire budgétaire exigeante et équilibrée pour les Outre-mer, fidèle aux engagements du Gouvernement et adaptée aux réalités de chaque territoire", précise le ministère des Outre-mer, qui ajoute que "la Nouvelle-Calédonie, profondément marquée par les violences de mai 2024, demeure au cœur de cette mobilisation nationale" ». Moutchou arriverait-elle avec plus de sous ?

Saison 2 – Semaine se terminant le samedi 8 novembre

LNC confirmait  le couac du gouvernement nettement plus tard (le 2 novembre au petit matin à Nouméa) mais sans autres précisions.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/naima-moutchou-la-ministre-des-outre-mer-reporte-sa-visite-en-nouvelle-caledonie

Moutchou avait peut-être visé juste en reportant sa visite, car les élus du Caillou voulaient justement l’alerter sur les besoins en sous, selon cet article de NC 1ère publié à Nouméa le 2 novembre en milieu de matinée.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/les-elus-caledoniens-veulent-alerter-l-etat-sur-le-manque-de-visibilite-economique-1638937.html

« Car le prêt garanti par l’État est déjà presque épuisé et la visibilité sur 2026 s’avère quasi nulle. […] Le problème n’en demeure pas moins d’actualité : déjà fragilisée par deux années de pandémie, l’économie du territoire est en berne depuis les émeutes de 2024. Certes, l’aide financière nationale a offert un répit. Mais en contrepartie, l’État a imposé certaines dépenses, bien qu’il ne s’agisse pas de subventions de la part de Paris. Ce prêt, la Calédonie est toujours tenue de le rembourser. La grogne est donc en train de monter, boulevard Vauban ».

Cette grogne venait, par exemple, de Sonia Backès qui indiquait le 30 octobre au Congrès de la Calédonie : « En gros, ce n’est pas une dotation républicaine, ce n’est pas un cadeau, c’est de l’argent qui nous est prêté à un taux contestable, qu’on va devoir rembourser et sur lequel l’État décide de ce qu’il fait pour nous ». Pour Milakulo Tukumuliaussi, le président de l’Éveil océanien, c’en est trop : « Il y a eu la soi-disant solidarité nationale en 2024 à hauteur de 46 milliards [de francs]. Et puis finalement, ce n’est pas une solidarité, nous avons emprunté 120 milliards pour rembourser les 46 milliards. Le paradigme est passé d’argent contre réforme à : "OK, pas besoin de réforme, on vous donne l’argent, mais on vous dit exactement là où ça doit aller. Ce n'est pas de la tutelle, c’est de l'infantilisation" ». Philippe Dunoyer, membre du groupe Calédonie ensemble affirme même : « L’État envoie un projet pour fermer le cercueil sur l’aide fiscale à l’investissement en Outre-mer. C’est totalement contraire à ce qu’on s’est dit quand on s’est vu pour discuter de l’avenir institutionnel, et dans l’accord de Bougival notamment ».

L’article ne note aucune intervention des indépendantistes mais termine par : « Face à cette situation dramatique, les élus du Congrès l’ont tous dit. Ils plaideront pour la transformation du prêt en subvention auprès de la nouvelle ministre des Outre-mer ».

L’économique n’est jamais très loin de la politique…

On en savait un peu plus, en milieu d’après-midi à Nouméa du 2 novembre, sur le report de la visite de Moutchou : le projet de budget initial présenté par le gouvernement rabotait la défiscalisation française !

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/visite-reportee-de-la-ministre-des-outre-mer-la-defiscalisation-au-c-ur-des-tensions-budgetaires-1639138.html

« Visite reportée de la ministre des Outre-mer : la défiscalisation au cœur des tensions budgétaires. À la demande du Premier ministre, Naïma Moutchou reste finalement à Paris pour participer aux négociations sur le projet de loi de finances 2026, où la réforme de la défiscalisation ultramarine provoque la colère des élus. Un dossier sensible, alors que ce levier fiscal figure parmi les piliers du plan de reconstruction du territoire et qu’il est inscrit noir sur blanc dans l’accord de Bougival. […] La défiscalisation Outre-mer, [dite "la défisc", PC] qui existe depuis quarante ans, permet au contribuable métropolitain de bénéficier d’une ristourne fiscale, à condition de financer des investissements productifs dans des territoires ultramarins. Seulement voilà, le projet de loi de finances pour 2026 envisage de raboter de près d’un quart les aides fiscales, sans aucune mesure compensatoire ».

Lecornu et Moutchou auraient pu y penser avant d’annoncer le programme de la visite…

Nicolas Metzdorf était invité le dimanche 2 novembre au JT de NC 1ère; il réagissait évidemment à ces nouvelles.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/programme-video/la1ere_nouvelle-caledonie_journal-de-19h30-de-nouvelle-caledonie/diffusion/7656878-edition-du-dimanche-02-novembre-2025.html

Concernant le report de la visite de Moutchou, rien de nouveau ; Metzdorf l’évoque (c’est pour cela qu’il est rentré au Pays) mais il ne s’affole pas car le budget des Outre-mer ne sera pas, selon lui, si raboté que cela, avec un accord unanime en Commission.

La (petite) mobilisation du FLNKS de vendredi dernier fut aussi évoquée au début de son interview ; il espère que le FLNKS reviendra, et rapidement, à la table des négociations, et Bougival peut être amendé. Comme Sonia Backès, il propose un référendum même si Bougival capotait. Position douteuse, je le répète.

Enfin, il évoquait cependant la fragilité du gouvernement mais ne pense pas qu’une motion de censure arrivera cette année, il est sans doute, selon moi, optimiste.

Le 3 novembre 2025 peu après midi à Nouméa, alors que le projet de loi concernant le report des provinciales organique sera étudié à Paris ce lundi par le Conseil constitutionnel, un article résumait et précisait la prestation de Metzdorf au JT de la veille.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/pour-le-depute-metzdorf-le-report-des-provinciales-va-nous-permettre-de-voir-si-on-peut-trouver-un-chemin-avec-le-flnks-1639312.html

« Il se dit "confiant, déterminé" et "très content que les élections provinciales aient été reportées" ». Jusque-là, pas de scoop ; mais il affirme donc qu’il ne faut pas écarter, l’accord de Bougival ratifié par la constitution française ou non (mais ça, il ne le dit pas) « une consultation des Calédoniens pour savoir s’ils sont d’accord ou non » avec cet accord ». Il feignait encore d’oublier que la ratification de Bougival n’était pas gagnée… Un peu plus loin, l’article précise la pensée de Metzdorf : « Il va plus loin. "Si jamais on ne souhaite pas aller au Congrès de Versailles", réunissant députés et sénateurs, "parce que ça bouge un peu, il y a une autre option (…) : on peut organiser une consultation des Calédoniens (…) pour ou contre Bougival" ».

Peut-on, en Calédonie, proposer une telle solution ? On n’a pas encore la réponse : aucune réaction, sauf erreur, à ce jour, aux sorties de Backès et Metzdorf.

Mais il n’y a pas que l’institutionnel, il a aussi le fric…

Est-il frustré du report de la visite de Moutchou ? « Une visite qui a été reportée à une date inconnue - alors que nos députés sont rentrés exprès. Mauvais signal ? "Non, je ne crois pas , assure Nicolas Metzdorf. La défiscalisation sur les Outre-mer devait passer à l’Assemblée nationale. Il y a eu une modification du programme, dans l’étude des articles. Donc, c’est tout à fait normal que la ministre reste un peu plus à Paris. […] Cette défiscalisation a été réinstaurée par la commission des finances. Mais il va falloir maintenant valider ce choix en hémicycle". Dans ce contexte, le député pense voter en faveur du projet loi de finances, parce qu’il en est sûr, "la défiscalisation sera rétablie". Une loi de finances qui aura une répercussion sur les caisses de la Calédonie. Jeudi dernier, les élus du Congrès ont encore plaidé pour que le prêt garanti par l’État soit transformé en subvention. Mission impossible ? Non, rétorque l’invité du JT, "puisque c’est dans l’accord de Bougival. C’est essentiel parce qu’aujourd'hui, quand on nous prête 1 milliard d’euros, on rembourse 1,7 milliard, la Calédonie ne peut pas supporter ça. Donc, il est important pour nous de convaincre le gouvernement de transformer ces prêts en subventions. Mais ça, ça passera par la réalisation d’un accord politique et son aboutissement entre Calédoniens", martèle-t-il ».

Enfin : « Un entretien qui a aussi abordé une éventuelle dissolution de l’Assemblée nationale ("ça ne serait pas une bonne nouvelle pour la Calédonie"), les problèmes financiers rencontrés par l’enseignement catholique ou les stratégies politiques quant aux élections à venir ».

L’actualité du début de semaine (par exemple la journée du 4 novembre à Nouméa) était bien pauvre pour ce qui concernait le politique : on parlait surtout, singulièrement au JT de NC 1ère, des élèves sans cantine scolaire le midi (à partir de lundi, et pour combien de temps ?) de l’enseignement catholique. Seule la télé Caledonia, dans son JT du 3 novembre, évoquait (et assez longuement) l’ éventuelle rupture officielle entre l’UNI-Palika et le FLNKS maintenant bien élargi. Ne pas manquer, donc, ce JT qui résumait cette maintenant déjà vieille histoire de brouille.

https://www.caledonia.nc/les-replays/le-jt

Si ça continuait, il n’allait plus rester dans la presse locale que les rubriques des chiens écrasés, l’arrivée de 3 médecins dans le Nord, le retour sur les affaires personnelles du président de la Chambre de commerce (David Guyenne) et des « bannis » de Roh (exactions, incendies et expulsions de familles entières) à l’Île de Maré en 2020.... N’exagérons pas ! Selon un article du 4 novembre, les acteurs économiques calédoniens craignaient des conséquences négatives pour l'économie locale, alors que les taux de la défiscalisation Outre-mer risquaient de baisser de 11 points. Pas grand-chose de nouveau ; cependant quelques précisions chiffrées et techniques.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/economie-faut-il-s-inquieter-du-projet-de-reformer-la-defiscalisation-outre-mer-1639681.html

« Le projet de loi de finances déposé sur la table de la commission, c’est un rabot de onze points et une perte de 20 % environ en avantages fiscaux pour les entreprises ultramarines … ». (Un diaporama pédagogique suit l’article).

Le 5 novembre, peu après minuit, on apprenait que les députés ultramarins contre-attaquaient à lAssemblée nationale contre le budget des Outre-mer en chute libre.

https://la1ere.franceinfo.fr/budget-des-outre-mer-en-chute-libre-les-deputes-ultramarins-contre-attaquent-1639786.html

« La bataille du budget de l’État se poursuit à l’Assemblée nationale. À Paris, les députés ont examiné en commission des affaires économiques et des lois le budget 2026 pour les Outre-mer, ce lundi 3 novembre. Un budget qui prévoit une forte baisse des crédits dans un contexte où certains territoires, comme Mayotte ou la Nouvelle-Calédonie, appellent à un soutien financier de l’État ».

« Dire en effet que les annonces de coup de rabot ont fait bondir tous les élus ultramarins est un euphémisme. Les chiffres donnent aux députés ultramarins le vertige avec, par exemple, 350 millions d’euros en moins concernant les exonérations de charge sociale ou la suppression de 400 millions d’euros sur les dispositifs de défiscalisation pour les entreprises qui investissent Outre-mer. C’est tout simplement du jamais vu depuis 2020. "La mission Outre-mer est totalement irresponsable parce qu’elle va plonger nos territoires dans de plus grandes difficultés encore et ce que nous constatons, c’est que la promesse républicaine malheureusement s’éloigne pour nous", affirme Philippe Naillet, député de La Réunion (groupe Socialistes et apparentés) ».

Le volet sur les dépenses des Outre-mer ne sera débattu en séance publique que le 18 novembre.

Volet justice : le 5 novembre encore, le ministre de la Justice Gérald Darmanin annonçait la hausse des moyens pour l’Outre-mer.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/justice/justice-darmanin-annonce-des-moyens-supplementaires-en-outre-mer

Le même jour, volet soutien international : le Groupe Fer de lance mélanésien (GFLM) soutenait le FLNKS mais ne disait pas s’opposer à l’accord de Bougival.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/politique-le-groupe-fer-de-lance-solidaire-du-flnks-s-exprime-sur-l-accord-de-bougival-1640110.html

Basé à Port-Vila, au Vanuatu, le GFLM notait que « l’accord de Bougival, bien que négocié en juillet 2025, n’a pas encore été pleinement approuvé en raison de divergences entre les principaux acteurs, et que des consultations internes sont toujours en cours » ; il appelle à un « dialogue sincère » pour « parvenir à un accord reflétant l’aspiration de toutes les parties ».

Le 5 novembre toujours, presque à minuit à Nouméa, on apprenait la reprogrammation de la visite de la ministre des Outre-mer.

https://la1ere.franceinfo.fr/naima-moutchou-reprogramme-son-deplacement-en-nouvelle-caledonie-du-10-au-14-novembre-1640194.html

À part ce détail, cet article n’était pas inintéressant : il rappelait cependant qu’elle estimait, on le sait, qu’ « on peut détailler Bougival, on peut préciser Bougival, on peut venir le compléter » ; mais, surtout, il se référait à un entretien accordé à Outre-mer La 1ère, jeudi 23 octobre que nous avions zappé, où elle était vive, très vive ! On apprenait ainsi à la connaître un peu mieux dans cette demi-heure d’entretien (ce n’est pas un perdreau – femelle ; perdreau ne possède pas de féminin… – de l’année) et on en apprenait un peu plus que ce qui avait été déjà présenté plus haut.

https://la1ere.franceinfo.fr/video-nouvelle-caledonie-vie-chere-evolution-statutaire-ce-qu-il-faut-retenir-de-l-entretien-de-la-ministre-des-outre-mer-naima-moutchou-avec-outre-mer-la-1ere-1636078.html

Moutchou répétait en outre plusieurs fois « qu’il n’y a pas de tabou » concernant l’autonomie des territoires d’outre-mer.

Le 5 novembre encore (article de LNC en fin d’après-midi à Nouméa) Naïa Wateou faisait son entrée au gouvernement du Caillou, en remplacement de Thierry Santa ; mais pas au même poste : Christopher Gygès devenait en charge du budget.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/gouvernement-christopher-gyges-desormais-en-charge-du-budget

« Après le départ de Thierry Santa du gouvernement, ses attributions ont été réaffectées, ce mercredi 5 novembre. Sa successeure, Naïa Wateou, conserve la fonction publique et le handicap. Elle sera également en charge du travail et de l’emploi, jusqu'à présent gérés par Christopher Gygès, qui lui-même récupère le budget et les finances. Un nouveau secteur fait également son apparition : la structuration de l’économie sociale et solidaire. […] la représentante ayant porté une proposition de loi de pays au Congrès visant à encadrer l'ESS. "Il y a eu une volonté de sa part de pouvoir porter politiquement ce sujet, qui faisait avant partie de l’économie", déclare le porte-parole du gouvernement ».

Un autre article de NC1ère, le « concurrent » de LNC (article pourtant modifié le 6 novembre 2025, à Nouméa, en début de matinée) n’indiquait pas la création du nouveau portefeuille de l’ESS.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/province-sud/naia-wateou-entre-au-gouvernement-de-la-nouvelle-caledonie-mais-laisse-le-budget-a-christopher-gyges-1640071.html

« Naïa Wateou entre au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, mais laisse le budget à Christopher Gygès. [ …] La nouvelle membre du gouvernement sera donc en charge, comme son prédécesseur "d’animer les secteurs du travail, de l'emploi, de la fonction publique et du handicap". Elle assurera aussi "le suivi des questions liées à l’autonomie et à l’inclusion des personnes en situation de handicap et de dépendance". Naïa Wateou récupère également le secteur de l’audiovisuel, qui était jusqu’ici attribué à Isabelle Champmoreau. Elle sera enfin en charge "du suivi de la structuration de l’économie sociale et solidaire" ».

Résumons ce dernier aspect de la politique du gouvernement local, et allons un peu plus loin.

Le portefeuille de cette seconde femme au gouvernement actuel du Caillou fut ainsi réduit, mais lui fut donc transféré celui du travail et de l’Économie Sociale et Solidaire (l’ESS) ; elle avait d’ailleurs participé (et était intervenue) à la conférence (ça ne nous rajeunit pas...) tenue le 21 novembre 2023 (lors de la Semaine de l’ESS sur le Caillou) au Congrès de la Nouvelle-Calédonie, Vers quels modèles d’économie sociale, solidaire et résiliente pour la NC ?

On pouvait ainsi voir ce long (et un peu rébarbatif) moment grâce à Caledonia qui l’avait filmé.

https://www.bing.com/videos/riverview/relatedvideo?q=conf%c3%a9rence+sur+l%27%c3%a9conimie+sociale+et+solidaire+Congr%c3%a8s+de+la+Nouvelle-cal%c3%a9donie&mid=D3932882AA2AE7964CD1D3932882AA2AE7964CD1&mcid=3640ED9376284B82A8B517C62F264156&FORM=VIRE

Votre serviteur y avait mis un gros grain de sel (après 2 h et des poussières de la vidéo) par quelques remarques acerbes et une question… Je considérai en effet, et considère toujours, que l’ESS (certes attirante pour ceux qui rêvent de changement) est en fait un miroir aux alouettes qui reste en outre très marginal dans les économies capitalistes ; la conférence de 2023 m’avait bien énervée, car cela sentait parfaitement une tentative de récupération par la droite du Caillou quand Naïa Wateou, intervenant on ne savait trop pourquoi, développait ses vertus (celles de l’ESS...). La mise en avant aujourd’hui de ce gadget n’est pas un hasard au moment où se développe la politique économique de rigueur.

Le 6 novembre, toujours un peu d’économie ; mais avec le titre suivant ; on se croirait en Métropole.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/economie/politique/le-gouvernement-veut-adopter-le-budget-2026-avant-la-fin-de-l-annee

« … la ligne directrice est déjà établie : être exemplaire en matière de dépenses publiques et relance de l’économie. Mais boucler le budget ne pourra se faire sans une aide de l’État », aide, on le sait, subordonnée aux réformes que ce dernier exige, réformes très libérales et de rigueur (politique économique dite de l’Offre) en contradiction, selon beaucoup, avec la relance de l’économie (peut-être plus efficace avec la politique économique dite de la Demande).

Un premier exemple : lors de la réunion, le 5 novembre, du gouvernement du Caillou, l’aide au logement allait être rabotée. Le titre de l’article du 6 novembre le disait autrement… 

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/social/reforme-de-l-aide-au-logement-la-volonte-est-que-le-dispositif-puisse-perdurer

« Les conditions d’attribution seront plus rigoureuses, les sanctions renforcées et sa gouvernance revue. Le projet de loi du pays adopté par le gouvernement mercredi 5 novembre doit maintenant passer au Congrès ». La vraie économie sociale et solidaire attendra !

Je me suis réveillé de bonne heure le 7 novembre, la presse locale commença encore, très tôt le matin, par celle des chiens écrasés (trafic de cannabis démantelé, harcèlement scolaire, changement de présidence, à la Confédération des petites et moyennes entreprises, exposition d’art contemporain océanien au Centre culturel Tjibaou, le duo de musiciens Kaori à Namur (capitale de la Wallonie, en Belgique)… Comme au JT de NC 1ère de la veille ; enfin presque : le budget du Caillou fut évoqué (entre les moutons et les chiens) avec le manque de sous et la nécessaire aide de l’État. Comme au JT de Caledonia (Forum de l’eau, cantines à l’ADDEC, etc.).

J’avais ainsi appris, avant que la presse locale ne se réveille, par La Croix, avec l’AFP, peu avant 19 h 30 heure de Paris (peu avant 5 h 30 à Nouméa) que le Conseil constitutionnel avait validé le 6 novembre le report des élections provinciales, stipulant néanmoins que ce devra être le dernier.

https://www.la-croix.com/politique/nouvelle-caledonie-le-conseil-constitutionnel-valide-un-dernier-report-des-elections-provinciales-20251106#:~:text=Le%20Conseil%20constitutionnel%20a%20valid%C3%A9%20jeudi%206%20novembre,que%20ce%20troisi%C3%A8me%20report%20devra%20%C3%AAtre%20le%20dernier.

« Ce report entend "tenir compte de la poursuite des discussions (…) pour parvenir à la conclusion d’un accord qui soit consensuel sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie », relève le Conseil constitutionnel dans un communiqué ».

Voir ce communiqué.

Peu après 7 h à Nouméa LNC (toujours grâce à l’AFP) l’annonçait dans les mêmes termes. NC 1ère avait attendu le milieu de l’après-midi, mais en publiant le communiqué complet du Conseil et des réactions de politiques locaux, dont celui du FLNKS.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/report-des-elections-provinciales-apres-l-ultime-validation-du-conseil-constitutionnel-les-reactions-1640857.html

Les indépendantistes radicaux avaient réagi vivement : « Le FLNKS, qui militait pour le maintien, réagit dans un communiqué publié ce vendredi 7. "Par cette décision, et notamment son caractère exceptionnel et transitoire, le Conseil des sages contrevient à ses propres principes", signe Dominique Fochi, secrétaire général de l’Union calédonienne, le parti qui anime en ce moment le bureau politique du Front. "La séquence politique ouverte par la décision du Conseil constitutionnel ferme la porte à une révision constitutionnelle qui ne serait envisageable qu’à la condition qu’un consensus soit acté" ».

Le Front se disait néanmoins « "ouvert au dialogue", "les discussions à venir doivent conduire à l’aboutissement de l’Accord de Nouméa, dans sa vocation première : mener Kanaky sur la voie de la décolonisation et de la souveraineté". Un communiqué qui précède l’arrivée de Naïma Moutchou. Le FLNKS s’y "déclare prêt à rencontrer la ministre des Outre-mer afin d’élaborer conjointement une entente-cadre garantissant une méthode de discussion et de négociation claire, équitable et respectueuse" ». Évidemment, conformément à ses positions, il n’est fait référence qu’à l’accord de Nouméa et non à celui de Bougival ! Et à Kanaky et non à la Kanaky Nouvelle-Calédonie !

Metzdorf fut en revanche ravi : « … pas de surprise à cette validation du Conseil constitutionnel. "Ce que je note d’intéressant dans son avis, c’est qu’il dit qu’il faut, pour la prochaine fois, trouver un accord qui puisse permettre l’ouverture du corps électoral" ». Ce n’est pas faux, le Conseil écrit en effet dans son communiqué : « Il résulte des travaux préparatoires de la loi organique déférée qu’en reportant de nouveau le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, le législateur organique a entendu tenir compte de la poursuite des discussions entre les partenaires politiques de l’accord de Nouméa pour parvenir à la conclusion d’un accord qui soit consensuel sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, incluant une modification des règles de composition du corps électoral spécial [Je souligne, PC] qui aurait vocation à s’appliquer à ces élections. Ce faisant, il a poursuivi un but d’intérêt général ».

Mais quand Metzdorf affirme que « Le Conseil constitutionnel se prononce, pour les prochaines élections, en faveur de l’ouverture du corps électoral, on prend bonne note » (ajoutant dans le commentaire audio donné par l’article que « c’est la première fois que le Conseil le dit ») il exprime au mieux une contre-vérité partielle ! Le Conseil n’a pas du tout dit ça : il s’est simplement contenté (employant le conditionnel ; voir les quelques lignes plus haut) que le législateur a souhaité un éventuel futur accord consensuel avec en effet dégel partiel du corps électoral. Rien de plus. Pourquoi une contre-vérité partielle ? Metzdorf est un malin et n’a pas tort : il a bien compris que le report des provinciales proposé par l’État devait permettre, en donnant du temp au temps, de tenter de faire passer l’accord de Bougival avant ces élections pour en effet permettre ce dégel. Tout notre billet est fondé sur ce qui est sans doute plus qu’une simple hypothèse.

L’article termine par la réaction du centriste Philippe Gomès de Calédonie ensemble : « Une ultime chance donnée aux Calédoniens de concevoir un consensus, c’est-à-dire un avenir de paix, de prospérité, de développement et de respect dans notre pays. Si on ne la saisit pas, la Nouvelle-Calédonie connaîtra une tiers-mondisation : insécurité, instabilité et pauvreté ». Gomès se garde bien de parler du dégel du corps électoral.

LNC, toujours le 7 novembre, mais en milieu d’après-midi, répétait les choses, cependant un peu autrement, peut-être avec plus de précisions concernant la position du Front.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/visite-de-naima-moutchou-le-flnks-demande-un-dialogue-sincere-et-une-methode-juste

« Alors que Naïma Moutchou est attendue lundi 10 novembre en Nouvelle-Calédonie, le bureau politique du FLNKS déclare, dans un communiqué, être "ouvert au dialogue", et se dit "prêt" à rencontrer la ministre des Outre-mer, afin "d’élaborer conjointement une entente-cadre garantissant une méthode de discussion et de négociation claire, équitable et respectueuse". Le Front souhaite que les propos tenus par Naïma Moutchou dans une interview de notre partenaire Outremers360, "Je ne souhaite pas faire sans le FLNKS", se traduisent dans les faits, afin de marquer "une rupture avec les pratiques du passé". "Seul un dialogue sincère, fondé sur le respect mutuel et une méthode juste, permettra de construire un avenir partagé et apaisé". […] Le mouvement de libération nationale réaffirme que la méthode employée par l’État, celle de vouloir maintenir le calendrier de Bougival avec un troisième report des provinciales, validé par le Conseil constitutionnel, n’est pas la bonne solution. Le FLNKS a pris position pour le maintien du scrutin afin de s’opposer à la mise en œuvre de ce calendrier et "légitimer une nouvelle classe politique par le suffrage populaire". De plus, le Front estime que l’ouverture de cette séquence politique "ferme la porte à une révision constitutionnelle qui ne serait envisageable qu’à la condition qu’un consensus soit acté". La seule issue possible des discussions à venir étant, poursuit le FLNKS, "l’aboutissement de l’accord de Nouméa", dont la vocation est de "mener Kanaky sur la voie de la décolonisation et de la souveraineté. Kanaky ne se négocie pas. Elle doit se libérer". [Je souligne, PC] Le Front réaffirme donc que l’accord de Nouméa demeure le socle du processus de décolonisation et que le gel du corps électoral ne contrevient pas à la Constitution, comme l’a jugé le Conseil constitutionnel en septembre. Mais aussi que "le droit inaliénable du peuple kanak à disposer de lui-même doit être pleinement respecté, conformément aux principes du droit international", et que "l'objectif final reste l’accession de Kanaky à la pleine souveraineté et à l’indépendance dans la paix, la dignité et la construction du destin commun voulu par nos anciens". Le bureau politique "exige" également des réponses concernant la situation des prisonniers politiques, avec la mise en œuvre de mesures de rapatriement et de réinsertion, ainsi que sur l’urgence sociale. "Les inégalités structurelles et les injustices qui perdurent sont les conséquences directes du système colonial. Il ne peut y avoir de paix durable sans justice, ni de stabilité sans décolonisation" ».

Toujours le 7 novembre, vers 10 h 30 à Nouméa, NC 1ère contait encore le manque de sous pour le budget 2026 et les réticences de l’État à mettre au pot.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/projet-de-loi-de-finance-2026-la-nouvelle-caledonie-au-regime-sec-1640512.html

Résumons l’article : « Le territoire, qui a déjà emprunté 120 milliards de francs pour faire face à la crise sans précédent engendrée par les destructions de 2024, a besoin d’au moins 50 milliards de francs supplémentaires pour construire son budget 2026. Mais les signaux venus de Paris ne sont pas positifs ».

D’autant plus que LNC nous apprenait à la même heure, une nouvelle venue de Métropole.

https://www.lnc.nc/article/france/politique/si-le-budget-est-rejete-il-y-aura-dissolution-avertit-sebastien-lecornu

« Le Premier ministre s’est adressé aux sénateurs, mercredi 5 novembre, et les a avertis qu’une censure du budget vaudrait dissolution, ont indiqué jeudi à l’AFP plusieurs participants à une réunion à la chambre haute ».

En clair, Lecornu appellait le Sénat, très à droite, à la « responsabilité » ; en encore plus clair, « "S’il y a censure sur le budget, alors il y aura démission et donc dissolution", a notamment prévenu Sébastien Lecornu, selon son entourage, confirmant des propos rapportés par plusieurs participants à cette réunion, l’un d’eux évoquant la "gravité" avec laquelle il s’est exprimé. "Je ne serai pas le Premier ministre qui fera une passation de pouvoir avec Jordan Bardella" ». Pour ceux qui n’auraient pas encore compris le message, « "Il a confirmé qu’il ne voulait pas non plus de la loi spéciale", un scénario possible si le budget est rejeté, a insisté un président de groupe qui estime de son côté que le Premier ministre avait voulu "créer un courant de dialogue" avec le Sénat. Cette visite de courtoisie à l’invitation du président du Sénat Gérard Larcher intervient alors que des tensions règnent entre l’exécutif et la majorité sénatoriale, une alliance droite-centristes, qui se plaint depuis plusieurs semaines du manque de transparence du gouvernement, de son absence de "cap" sur le budget et des concessions faites au Parti socialiste. "Il a dit son attachement au bicamérisme, rapporte un participant. Comme il n’y a pas d’Insoumis et de RN autour de la table au Sénat, il a insisté sur le fait qu’on était tous des républicains et des démocrates et qu’on n’était pas là pour détruire" ».

Bref, pas très bon pour accélérer la constitutionnalisation de l’accord de Bougival en cas de dissolution…

Un article de la presse de Métropole (Actu.fr du 6 du même mois, avec l’AFP) disait les choses un peu plus sèchement : « Le Sénat incité à voter le budget, "sinon"… […] "Je ne veux pas de 49.3, je ne veux pas d’ordonnances". Il a confirmé qu’il ne voulait pas non plus de la loi spéciale… ».

https://actu.fr/politique/demission-et-dissolution-la-menace-de-sebastien-lecornu-face-a-un-risque-de-censure-au-senat_63403672.html

Le 7 novembre en soirée on apprenait que Christian Téin et cinq autres responsables (Dimitri Tein-Qenegei, Guillaume Vama, Brenda Wanabo-Ipeze, Yewa Waetheane et Steeve Unë) de la CCAT avaient tenu un meeting, jeudi soir 6, à la Bourse du travail à Paris. (vendredi 7 à Nouméa). « Ils ont témoigné sur leur détention et évoqué la situation politique en Nouvelle-Calédonie ».

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/a-paris-les-leaders-de-la-ccat-se-retrouvent-pour-la-premiere-fois-depuis-leur-liberation-1640845.html

« Depuis leur interpellation sur le Caillou, le 19 juin 2024, c’est la première fois qu’ils se retrouvent réunis. "C’est 500 jours sans voir notre famille, nos amis. On nous a coupés complètement de nos droits et de notre liberté" résume Guillaume Vama, l’un des membres de la CCCAT transférés en prison dans l’Hexagone, lors des émeutes de 2024. "On a été déporté, à plus de 17 000 km de chez nous, à travers un périple très dur personnellement pour chacun de nous. Puisque c’est quelque chose qui a été inédit et bien préparé", relate Steeve Unë, militant de la CCAT. […] Ils peuvent désormais rentrer sur le Caillou. Mais le problème qui se pose, selon eux, est d’ordre administratif. Leurs passeports d’urgence, créés pour leur transfert vers l’Hexagone, sont désormais périmés. "On a fait de nouvelles demandes de passeports. Moi, ça fait sept semaines que j’ai déposé la demande, ainsi que d’autres camarades", témoigne Dimitri Tein-Qeinegei. Pour ce leader de la CCAT, l’État fait "traîner les choses" ».

Selon certains de mes amis loyalistes, ce serait eux qui ne seraient pas pressés de rentrer, pour faire de l’agitation et de la propagande en Métropole… Ce n’est peut-être pas faux, l’article notant : « Les leaders de la CCAT sont toujours mis en examen, dans le cadre de l’enquête sur les émeutes. Ils ont annoncé organiser bientôt d’autres actions militantes dans l’Hexagone ».

Le FLNKS et la CCAT, rejetant l’accord de Bougival (rappelons-le) tenteraient un rapprochement avec le Palika (Parti de libération kanak, pour ceux qui l’auraient oublié) en proposant l’unité contre Paris « … quelques jours avant l’arrivée de la ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou, à Nouméa. "C’est eux qui ont fait le choix d’emmener le pays dans le mur", s’étrangle Christian Téin. Le président du FLNKS rejette la faute sur Paris. "Ce sont les deux chambres - le Sénat et l’Assemblée nationale - qui, à chaque fois, ont fait le malheur de notre peuple". Pour les prochaines négociations sur l’avenir institutionnel du pays, la CCAT espère un rapprochement avec le Palika, qui est favorable à l’accord de Bougival. "On est tous sur le même objectif de faire accéder le pays à son indépendance. Les modalités sont différentes suivant les aspirations politiques. Le FLNKS fera tout son possible pour dégager une unité", assure Yewa Waetheane ».

Ça tombait bien : le 8 novembre, tôt le matin sur le Caillou, on apprenait que le Palika, réuni en congrès (le 50e) à Bourail dès le 7 octobre, devait préciser sa position vis-à-vis du FLNKS. Sortira-t-il ou pas, officiellement, du Front où il est déjà, de fait, sorti ? Le sujet principal est, on le sait, l’attitude face (FLNKS) ou avec (Palika) l’accord de Bougival.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/reuni-en-congres-le-palika-doit-preciser-sa-position-vis-a-vis-du-flnks-1640854.html

« "Il faudra qu’on décide si la situation du parti au sein du Front reste pertinente au regard des objectifs que ce cinquantième congrès va nous fixer", confirme Judickaël Selefen, l’un des porte-paroles du Palika. "Cette appréciation devra se faire au regard des perspectives que, nous, nous souhaitons donner à l'accord politique". […] Ce congrès devrait donc aboutir à une réponse au courrier de Christian Téin, le président du FLNKS. Il y a deux semaines, il avait pressé le parti de clarifier sa position. Fin 2024, le Palika s’était mis en retrait du fonctionnement du Front ».

On attendait donc la réponse du Palika.

Parenthèse désagréable (mais il faut de tout pour faire un monde) la Dépêche.nc (déjà rencontrée ici, pas franchement « de gauche » ni indépendantiste) ne faisait toujours pas dans la dentelle : par exemple dans son article du 8 novembre qui affirme tout de go que le média d’État NC 1ère est un média indépendantiste !

https://ladepeche.nc/2025/11/08/negrophobie-detat-carton-rouge-pour-nc-la-1ere/

« … NC La 1ère a publié sur son site internet une série de podcasts de propagande intitulée "Le lynchage", "Négrophobie d’État" et "Le parcours des combattants" ».

Je peine à évoquer les références à : « une Pravda du Pacifique » ; « Une caisse de résonance de la CCAT » ; « À force de tendre le micro aux mêmes, de diaboliser l’État et de relayer les discours victimaires, NC La 1ère n’est plus un média d’information : c’est un instrument idéologique » ; un média qui « touche trois milliards d’argent public ». Et la Dépêche.nc de demander la calédonisation de ce média, et même sa privatisation.

On en sait un peu plus sur les délires de La Dépêche.nc. Il s’agit en fait d’émissions radiophoniques ; et non pas de la seule NC 1ère mais du pôle Outre-mer de France Télévisions concernant la justice en général et pas seulement le Caillou : « Tout est affaires. Chaque jour, les 200 tribunaux de France traitent d’affaires courantes, complexes, exceptionnelles, graves, insolites… Ce podcast du pôle Outre-mer de France Télévisions propose de vous plonger dans une histoire de justice au plus près de ceux qui la vivent et de ceux qui la font. À chaque épisode le récit au présent d’une affaire en cours ». Seul le dernier épisode concerne la Calédonie, avec Christian Téin (Épisode 3 : Le parcours des combattants).

https://la1ere.franceinfo.fr/podcast-le-parcours-des-combattants-une-annee-de-bataille-judiciaire-pour-sortir-christian-tein-militant-kanak-de-prison-1639858.html

« "Tout est affaires" a suivi les avocats du leader indépendantiste, soupçonné d’avoir orchestré des émeutes en Nouvelle-Calédonie et incarcéré dans l’Hexagone en juin 2024. Entre les interrogatoires de l’instruction et les audiences pour réclamer sa libération, récit d’un dossier sensible et riche en rebondissements ».

On peut ainsi écouter les fameux trois épisodes ; on est très loin des délires évoqués...

https://la1ere.franceinfo.fr/programme-audio/tout-est-affaires-4fe838cb-c46f-413a-bb4a-ae8dec2074a8/

Le 8 novembre encore, on connaissait le nouveau programme de la visite de Moutchou ; pas de bouleversement, sauf les dates, la seule journée de bilatérales avec les différentes forces politiques se tenant le mardi 11 novembre, après les commorations d’usage place Bir-Hakeim à Nouméa.

D’abord par NC 1ère en début de matinée.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/le-programme-de-naima-moutchou-ministre-des-outre-mer-en-nouvelle-caledonie-du-10-au-14-novembre-1641109.html

« Dans un entretien publié vendredi dans le quotidien Ouest France, la ministre a expliqué que "c’est essentiel de pouvoir échanger avec chaque représentant politique". Elle a indiqué vendredi avoir invité tous les représentants politiques calédoniens, dont le FLNKS, à la table des négociations pour évoquer la crise institutionnelle sur l’archipel français. Les bilatérales, prévues mardi, ne précisent pas les groupes politiques qui seront présents ».

Puis par LNC, mis à jour peu avant midi, et encore une fois plus précis.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/le-programme-de-naima-moutchou-en-deplacement-en-nouvelle-caledonie-du-10-au-14-novembre

« Mais les attentes concernent surtout la situation financière du pays ». Néanmoins, le FLNKS se disant ouvert aux discussions (mais sans référence à Bougival ; voir plus haut) et la ministre peut-être également plus ouverte (voir aussi plus haut ; et l’article le répète) on pouvait donc espérer une éventuelle avancée des discussions. On peut encore rêver…

Saison 2 – Semaine du 9 au 16 novembre : semaine de Moutchou, mais aussi du Palika

Cette semaine est particulière ; elle commence par le pont du 11 novembre et singulièrement par deux incertitudes que l’on doit évoquer, et surtout, longuement, la seconde.

La première est la décision du Palika qui a terminé dimanche son congrès, concernant son retrait officiel ou non du FLNKS (déjà coupé en deux, on le sait). Aucune information tôt ce lundi matin 10 novembre : rien dans la presse ; rien sur la page Facebook du parti.

https://www.facebook.com/journal.kanak

Pour ceux qui n’auraient pas jeter un œil sur la page de ce mouvement, rappelons son logo qui ne correspond plus vraiment à son ancien ADN…

Illustration 1

Mais on devrait connaître cette position, au moins avant les discussions en bilatérales avec Moutchou.

La seconde incertitude est plus grave.

Avec son post du 2 novembre sur sa page Facebook, Manuel Valls modifiait largement, selon moi, ses propos tenus lors de son audition devant la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale, le 21 octobre et, plus généralement, ce que nous en rapportions.

https://www.facebook.com/100044466188291/posts/1399922238166636/

Voici ce post , du moins sa substantifique moelle.

« Les propos rapportés par plusieurs médias et les déclarations du FLNKS ne reflètent ni le déroulé du conclave de Bougival, ni la réalité du processus de construction du texte. L’accord du 12 juillet 2025 n’a pas été imposé, encore moins découvert au dernier moment. [Je souligne, PC] Il a été élaboré collectivement, au fil de plus d’une semaine de travail dense où chaque partenaire — y compris la délégation du FLNKS — a eu accès à toutes les versions successives du texte. À l’issue de ces discussions, la délégation du FLNKS a signé un engagement clair : présenter et défendre le texte en l’état de l’accord  [Je souligne encore, PC] sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, intitulé Le pari de la confiance. Cet engagement, assumé par tous les signataires, traduisait la volonté de porter ensemble un compromis fondé sur des concessions réciproques. Chacun savait qu’il fallait convaincre les siens ».

Tout le reste de ce nouveau texte de Valls contredit donc, semble-t-il, ce que je pensais être sa position quand il avouait qu’il s’agissait bien d’un projet d’accord et non d’un accord. J’indiquais en effet dans mon billet du 27 octobre 2025 (Le long feuilleton de l’Histoire du report des élections provinciales en Calédonie)…

https://blogs.mediapart.fr/patrick-castex/blog/271025/le-long-feuilleton-de-l-histoire-du-report-des-elections-provinciales-en-caledonie

… ce qui est partiellement reproduit ci-après ; c’est bien long mais nécessaire : j’avais peut-être rapporté des carabistouilles de la presse du Caillou, et ça me turlupinait. Et faire attention aux citations dans les citations des textes qui suivent !

D’abord, « Petit scoop éventuel avec l’article de LNC du 24 octobre : Manuel Valls livre sa version de Bougival, reprenant l’audition, le mardi 21 octobre, de l’ex-ministre des Outre-mer par la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale. […] L’article indique : "Son intervention confirme un point souvent contesté : le texte était bien un projet’ devant être soumis à la validation des organisations du FLNKS. [Je souligne, PC] ‘Il y a eu un accord. Et celui qui a signé pour l’État, c’est moi’, a déclaré Manuel Valls, mardi 21 octobre, devant les députés. L’ancien ministre des Outre-mer a néanmoins expliqué que la qualification de projet d’accord [Je souligne encore] visait à ‘laisser aux délégations le temps de consulter leurs bases’. Une précision qui conforte la version défendue par les dirigeants indépendantistes. Le document signé à Bougival n’était pas un simple brouillon, mais un accord conditionnel, dont l’entrée en vigueur dépendait de la validation des congrès des différentes composantes du FLNKS [Je souligne toujours, PC]. Qui pourrait penser que Valls racontât là des mensonges, malgré son amertume affichée ? Le projet d’accord de Bougival était ainsi à proposer aux instances de chaque partie prenante : le contraire du récit officiel de l’État auquel il avait pourtant participé !

Je viens de rajouter le gras sur la dernière phrase : il n’était pas dans le précédent billet.

Ensuite, plus loin dans le billet, au sujet d’un autre article sur le même sujet, je me cite encore, toujours en référence à l’article en question, article cependant hésitant et plein de contradictions.

« "Concernant Bougival, l’audition de Manuel Valls ne lève en rien les ambiguïtés autour de la notion de ‘projet d’accord’ ou d’‘accord’ soulevées par le FLNKS" [Indiquait donc l’article, je souligne, PC] ; on avait cru comprendre le contraire dans l’article précédent… et, surtout, la fin de l’article est moins péremptoire. […] "Le soir du vendredi 11 juillet à Bougival a marqué un tournant décisif dans les négociations, selon Manuel Valls. L’ancien ministre a rappelé que la délégation du FLNKS avait répété ‘qu’elle n’avait pas de mandat pour signer un accord’ et qu’elle devait consulter son bureau politique. ‘Elle s’est retirée à de nombreuses reprises pour discuter sous des formes qui lui appartiennent, en visioconférence notamment’, a-t-il relaté. [Peut-être avec Christian Téin, PC] Alors que les échanges achoppaient, y compris ‘au sein de l’État sur les questions de délégation internationale’, le président de la République a demandé au Premier ministre François Bayrou de réunir plusieurs ministres à Matignon afin d’examiner le projet en cours. ‘Le gouvernement, à commencer par le chef du gouvernement, a donné son accord’, a poursuivi Manuel Valls, soulignant qu’à la différence de Déva, l’exécutif tout entier soutenait cette fois le texte. De retour à Bougival, il a donc ‘demandé la signature sur le projet’ aux partenaires calédoniens, malgré ‘les difficultés qui se posaient aux FLNKS’, à savoir l’absence de mandat pour signer un accord et l’absence de feu vert de son bureau politique. […] Au cours de la nuit du vendredi 11 au samedi 12 juillet, l’État a rencontré la délégation FLNKS à deux reprises. ‘J’ai beaucoup insisté pour qu’(elle) puisse signer’. La solution pour sortir de l’impasse est alors venue ‘d'un représentant de l’Uni’, confirme Manuel Valls. Si l’ancien ministre ne cite pas son nom, d’autres participants avaient déjà évoqué le rôle joué par Adolphe Digoué dans cette séquence. Or, la solution proposée par cet élu de l’Uni était la suivante : ‘tout le monde signe le projet d’accord, qui permette à chacun, ensuite, de s’expliquer sur place, en Nouvelle-Calédonie, pour convaincre les mandants ou les bases’. Manuel Valls reconnaît lui-même que cela ‘a été une subtilité, et c’est sur ces bases-là que la délégation du FLNKS, présidée par Emmanuel Tjibaou, a signé’". Cette "subtilité" n’en n’est donc pas une : il s’agissait bien d’un "projet d’accord" et non d’un "accord" ». 

Insistons. « L’accord du 12 juillet 2025 n’a pas été imposé » écrivait Valls le 2 novembre : il ne disait pas le contraire le 21 octobre, mais seulement, « … l’État a rencontré la délégation FLNKS à deux reprises. "J’ai beaucoup insisté pour qu’(elle) puisse signer" ». Subtilités

De deux choses l’une : ou je m’étais fait avoir par ce que rapportaient les deux articles du Caillou, ou Valls changeait de version comme de chemise. J’ose une hypothèse : ce n’était peut-être pas par hasard que l’ex-ministre des Outre-mer changeât encore une fois sa version des faits, quelques jours avant la visite de Moutchou sur le Caillou. Tactique astucieuse mais dangereuse et compromettant peut-être un ciel de possibles négociations sereines qui s’éclaircissait entre Moutchou et le FLNKS : ce dernier pourrait peut-être s’insurger contre la dernière version des faits par Valls. 

Je pense avoir le fin mot, ou presque, de l’histoire grâce à ce qui suit ; c’est encore bien long mais fondamental, malgré le presque. Peut être qu’un jour les vrais historiens raconteront l’Histoire, en dénichant peut-être des textos placés secret défense !

On peut maintenant voir et entendre l’entretien de plus de 2 heures, entretien riche et passionnant (qui nous en apprend d’ailleurs, on va le voir, un peu plus) ; mais il faudra se farcir les nombreuses pubs, répétitives et casse-bonbons (pour rester poli)... Car c’est publié par Dailymotion, et je suis, le10 novembre) sur le Caillou : publicités locales donc (et d’ailleurs de qualité).

Valls avait hésité, il le contait tout au début, à accepter cet entretien, car il n’était plus ministre, mais allez ! Gonflé le Valls, cependant !

https://www.dailymotion.com/video/x9sh6a6

Résumons ces deux heures.

Davy Rimane (député de la deuxième circonscription de la Guyane depuis le 22 juin 2022) lui posait la question (piège) vers 20 minute de l’entretien : accord ou projet d’accord ? Valls répondait d’abord par un long moment sur l’échec de l’accord de Déva (selon Valls, Macron n’était pas d’accord : les loyalistes avaient donc raison — j’en doutais : je me suis donc trompé) ; puis hésitations de Valls sur accord ou projet d’accord où il finit bien par parler de projet d’accord, répété deux fois (à moins que je sois très malentendant). Il continuait en notant que les signataires du FLNKS furent tout de suite désavoués, « avant de monter dans l’avion » ; mais, disait-il, « il n’y a pas deux versions de l’histoire » : c’est donc celle qu’il a exposé le 21 octobre… Et il poursuivait en proposant des avancées (1/ sur le nom du Pays, 2 / sur la reconnaissance du peuple kanak, 3/ sur la composition du Congrès de Calédonie, 4/ sur la question du transfert des compétences). Bref, Valls était prêt à revoir le contenu du projet d’accord de Bougival et à négocier avec le FLNKS.

Intervention rude d’un député LFI, Aurélien Taché (il avait bien sûr compris que le report des provinciales n’avait pour seul but, mais inavoué, que le dégel du corps électoral). Puis remerciements et félicitations de Metzdorf à Valls ; il rappelait que les indépendantistes l’avaient prévenu que les loyalistes allaient avoir du mal à convaincre leur base. Enfin, Tjibaou donnait sa version des faits (que l’on connaît) : un projet d’accord. On laisse de côté toutes les autres interventions.

Valls développait aussi, dans cet entretien, la peur, et de tous les côtés ; il développait également le danger supposé de submersion des Kanak par de nouveaux arrivants Européens, danger supposé mais sans grande signification selon lui (démographie kanak, et surtout les nombreux départs d’Européens). Il notait également les divisions actuelles du FLNKS et persistait à refuser le report des provinciales, avec, selon lui, dégel ou sans dégel du corps électoral. Je rappelle ici, comme Aurélien Taché, que ce n’est pas évident. D’ailleurs l’entretien se termine, et ce n’est sans doute pas un hasard, sur cette question ; Valls répétant que ce n’est pas la question fondamentale.

Selon cet entretien, tout n’est donc pas noir ou blanc, mais cependant plus proche, à mon humble avis, des interprétations de Valls selon lesquelles il s’agirait bien d’un projet d’accord de Bougival. Il indiquait d’ailleurs aussi, entre la poire et le fromage, que les ambiguïtés sont souvent utiles dans un accord ; ambiguïtés ou subtilités ?

...

Après ce long, très long préalable à cette Saison 2, ouvrons la vraiment avec l’arrivée à Nouméa de la ministre des Outre-mer.

Naïma Moutchou venait en effet, comme annoncé (mais après un report d'une semaine) d’arriver sur le Caillou ce lundi 10 novembre ; elle s’était rendue au Sénat coutumier (article de LNC en milieu  de martinée). Et, astucieusement, elle avait  fait la coutume comme une marocaine.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/direct-au-senat-coutumier-naima-moutchou-prend-un-temps-ou-on-ecoute-avant-de-repondre

« Je vous salue avec beaucoup de respect et de reconnaissance. […] Nous avons des points communs importants. Je suis d’une autre terre, ma famille est originaire du Maroc, une terre de chaleur, de traditions et de coutumes. Je suis venue avec du thé à la menthe, c'est plus qu’une boisson, c’est ce qu’on partage autour de la natte, une boisson d’accueil, un temps de partage et un geste d’amitié. Un temps où on écoute avant de répondre, c’est dans cet état d’esprit que je suis venue, c’est ma méthode ».

Elle avait un peu plus tôt commencé sa visite par la traditionnelle cérémonie d’honneurs militaires sur la place Bir-Hakeim (Puits du sage en français, l’a-t-elle traduit ?). Pour la politique, on verra plus tard ; elle devrait rencontrer ce mardi une délégation du FLNKS.

Un peu plus tard, vers midi à Nouméa, NC 1ère annonçait également la bonne nouvelle, mais avec des images et quelques précisions politiques de la part du Sénat coutumier.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/en-images-la-ministre-des-outre-mer-naima-moutchou-entame-une-visite-decisive-en-nouvelle-caledonie-1641634.html

« Baptême du feu pour la nouvelle ministre des Outre-mer. Nommée rue Oudinot il y a un mois, en remplacement de Manuel Valls, Naïma Moutchou devait initialement se rendre en Nouvelle-Calédonie le 3 novembre. Mais son déplacement avait été reporté à la demande du Premier ministre en raison du calendrier parlementaire autour de l’épineuse question du budget 2026. Cette visite se concrétise finalement ce 10 novembre pour une durée de cinq jours. […] La nouvelle ministre des Outre-mer semble déjà vouloir marquer son empreinte en offrant une coutume très personnalisée : une boîte de thé à la menthe, la boisson d'accueil que l'on partage sur la natte au Maghreb. Une manière de jeter des ponts entre la culture kanak et celle de ses ancêtres marocains ».

« Ludovic Boula, le président du Sénat coutumier, a rappelé que le 25ème Congrès du Pays Kanak demandait à l’État "d’aller au-delà de Bougival et de maintenir l’irréversibilité du processus de décolonisation". Le jeune président de l'institution a insisté sur l’importance d’obtenir l’adhésion de tous sur la question de l'avenir institutionnel du pays. "Un accord sans consensus et sans véritable projet de société n’apporterait aucune stabilité à court et long terme" ». Ce n’est pas anodin.

Notons que plus tard, LNC, également vers midi, puis en milieu d’après midi (souvent LNC varie...) rajoutait des images et des précisions politiques, absentes (sauf erreur) de sa première mouture (que l’on ne retrouve plus sur la Toile) ; c’est donc la seconde version amendée que l’on peut maintenant consulter plus haut !

Quant à ce fameux accord politique, il est « encore possible » selon Vaïmua Muliava, le vice-président du parti qui se dit centriste de la communauté wallisienne-futunienne, L’Éveil océanien, selon un article du 10 novembre donnant son interview de la veille sur le JT de NC 1ère.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/pour-vaimua-muliava-de-l-eveil-oceanien-un-consensus-politique-est-encore-possible-1641652.html

Mais son centrisme, comme celui de son parti, n’est pas d’une extrême clarté (c’est, selon moi, un extrême-centre oscillant) avec plusieurs scenarios : « Un amendement de l’accord de Bougival ; une reprise de la proposition de Déva ou encore un avenant à l’Accord de Nouméa dans l’esprit du cadre posé par Emmanuel Macron lors du sommet de la Nouvelle-Calédonie. Cette option du chef de l’État, que l’Éveil océanien avait proposée, n’a pas été reprise dans l’accord de Bougival. "Mais peut-être que la solution, c’est d’avoir un consensus pour acter un désaccord", avance-t-il, face à un risque d’enrayement du processus de Bougival ». L’élu rappelle néanmoins le positionnement de l’Éveil océanien. "C’est un partenariat programmé avec la France. Décider maintenant par référendum, puis nous donner trente ans pour bâtir ce partenariat sur tous les chapitres" ».

Vous avez dit clarté ? À part le rejet implicite d’une pleine souveraineté (alors que le parti flirtait il n’y a pas si longtemps avec l’indépendance-association) ; et les indépendantistes vont être ravis d’attendre trente ans !

Enfin, ce lundi, Moutchou aura rencontré pas mal de monde après la matinée : les élus. À noter (énième remake du jour de LNC) mais rien de bien nouveau : on a surtout parlé de sous et de réforme économique locale.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/direct-visite-de-naima-moutchou-il-faut-redonner-du-travail-aux-caledoniens

Pas de point presse de la ministre.

On peut regarder les JT du jour de Caledonia (avec aussi le cricket) puis de NC 1ère (avec entretiens en soirée avec les acteurs économiques).

https://www.caledonia.nc/les-replays/le-jt

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/programme-video/la1ere_nouvelle-caledonie_journal-de-19h30-de-nouvelle-caledonie/

On pourra les regarder tous les jours (sauf le week-end pour Caledonia) grâce à ces deux liens ; sauf scoop, on ne les mentionnera pas.

On pensait en savoir plus le mardi soir du 11 novembre ; que nenni ! D’après NC 1ère (vers 16 h 30) Moutchou avait rencontré les deux mouvements indépendantistes : rien de bien nouveau : le FLNKS restera droit dans ses bottes et ne changera pas de cap ; une toute petite avancé du Palika qui ne dit toujours rien de ce qui est sorti de son congrès ; l’article ne mentionnait même pas ce silence pesant.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/naima-moutchou-en-caledonie-les-independantistes-demandent-le-retour-des-prisonniers-politiques-et-l-amelioration-du-texte-de-bougival-1642021.html

Concernant Bougival, un minuscule éventuel petit pas du Palika vers le FLNKS : « Nos militants ont dit qu’il y avait certainement des améliorations à faire. Nous l’avons dit à la ministre, qui a répondu "oui", livre Jean-Pierre Djaïwé,… […] Il y a un certain nombre de sujets sur lesquels il va falloir revenir, sans toucher à l’équilibre général du texte. Il faudra le faire tous ensemble. Au chapitre des modifications qui peuvent être apportées, il est notamment question du dispositif concernant les compétences régaliennes ».

LNC écrivait en gros la même chose dans plusieurs articles du jour, mais avec interviews des acteurs et parlait en outre des deux groupes loyalistes radicaux. Rien de nouveau non plus : sauf Virginie Ruffenach se disant réticente à la proposition de Djaïwé.

Et ça râlait un peu dans les milieux économiques. C’était mis en lumière, par exemple, par le JT du soir de NC 1ère, surtout du côté des patrons (car Moutchou n’a donné aucune assurance de financement de l’État) ; ce JT n’a pas donné la parole aux syndicats de salariés. Ce JT nous apprenait par ailleurs que Calédonie ensemble avait été reçu en début de soirée et que l’Éveil océanien était encore en entretien avec la ministre.

En début de soirée, NC 1ère confirmait.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/naima-moutchou-en-caledonie-une-rencontre-decevante-pour-le-monde-economique-1642066.html

« La rencontre de la ministre des Outre-mer avec les acteurs du monde économique, lundi soir, a déçu la majorité des participants : syndicats comme organisations patronales. Le manque de clarté de l’État et l’absence d’annonce sur l’accompagnement de la relance font craindre une année 2026 encore très difficile. […] … à tel point que la déception a été ressentie par tous les partenaires ».

Mais là aussi, la parole ne fut pas donnée aux représentants syndicaux, étant également simplement « … joints par téléphone, la précarité s'installe et le message fort attendu de la ministre ne vient pas. Ils sont unanimes pour appeler de tous leurs vœux le déclenchement de grands travaux pour amorcer une relance ».

Bonne transition : j’avais zappé cet article de LNC en début de matinée (je ne me souvenais plus qu’Alain Descombels était le patron du petit RN local…) ; ce dernier insiste sur l’économique et la carence totale de l’État à cet égard.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/alain-descombels-notre-programme-sera-porte-par-une-liste-citoyenne

Cette intervention du 10 novembre n’est pas anodine ; le RN (qui à l’Assemblée nationale a voté contre le report des élections provinciales) ne comptait que pour très peu dans la politicaillerie du Caillou : les loyalistes radicaux, qu’ils soient l’équivalent des LR ou des macronistes, jouaient parfaitement son rôle ! Mais les temps changent : « On voit deux choses, note le patron du RN local, depuis que Marine Le Pen est venue, c’est que quand vous avez trois députés, comme en 2017, et que vous en avez 140 comme aujourd’hui, ça change la donne ». Tout est dit.

« Le Rassemblement national en Nouvelle-Calédonie annonce présenter une "liste citoyenne" aux prochaines provinciales. [… avec] un programme "acté par Marine Le Pen", essentiellement tourné vers l’économie, estimant que "la situation est plus que dramatique" et "qu’aucun parti politique ne fait de propositions concrètes" […] C’est quoi le projet de Calédonie Ensemble, celui de l’Éveil océanien, de Sonia Backès ? Qu’est-ce que vous proposez pour garantir aux Calédoniens que ça va redémarrer ? Nous, nous avons des solutions, mais il faut que l’État s’engage, et pour l’instant, il ne semble pas beaucoup s’engager sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie ».

Et le RN local d’emprunter une position presque « de gauche » (comme laffirme Zemmour ; voir notre billet parallèle sur la suspension de la réforme des retraites, etc. …) : « Sur l’ensemble des ménages calédoniens qui travaillent, 5 % gagnent plus d’un million de francs par mois contre 40 % qui sont en dessous du seuil de pauvreté. Ça veut dire qu’il y a un déséquilibre et qu’il va s’agrandir. La situation est tellement dramatique, que si on n’avance pas avec des choses concrètes, on va au carton. La tension sociale est forte ».

On arrête là, car ce billet devient trop long pour passer sur Le Club de Médiapart ; on continue bien sûr par un nouveau billet !

Notes

[1] « Longtemps, sur le Caillou, je me suis couché de bonne heure, mais réveillé à l’aube, comme tout le monde », premiers mots d’un futur nouvel écrit, Du côté de chez des jeunes Kanak en bourgeon au soleil sur leur terre. Ce sera sans doute plus relou et moins connu que du côté de chez Proust ; surtout quand on mélange Du côté de chez Swann (1913) et À l’ombre des jeunes filles en fleurs (1919). Entre le premier et le deuxième, il y eu La Grande guerre ; le deuxième obtint le prix Goncourt contre Les Croix de bois de Roland Dorgelès. Ce qui nous rapproche plus de notre sujet…

[2] Le même jour (mais c’est presque hors sujet, quoique...) Thierry Santa, du parti Les Républicains, tire sa révérence (il l’avait annoncée auparavant) du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et quitte la vie politique.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/thierry-santa-demissionne-officiellement-du-gouvernement-de-la-nouvelle-caledonie-et-quitte-la-vie-politique-1638514.html

« C’est une décision personnelle, mûrie depuis un moment, explique-t-il. […] Pour lui, le mois de novembre devait être "l'échéance depuis le début", puisque c’est à cette date que devaient initialement se dérouler les élections provinciales ».

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