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Économiste, sociologue et HEC à la retraite (maître de conférence à l’Université Dauphine et membre du Cabinet Syndex, expert-comptable spécialisé dans le conseil aux Comités d'entreprise et aux syndicats de salariés), il s’occupe, depuis une dizaine d’années, de promouvoir l’Indépendance de la Kanaky Nouvelle-Calédonie. Il s’est mis en outre à écrire autre chose que de savants traités...

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Billet de blog 27 octobre 2025

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Le long feuilleton de l’Histoire du report des élections provinciales en Calédonie

Feuilleton traité comme tel dans ce "billet" ; il commence à la date indiquée (le 27 octobre 2025) et se terminera (peut-être) quand le suspense sera levé… En parallèle et dans les mêmes conditions, un autre feuilleton (peut-être moins long…) est proposé concernant une autre priorité du gouvernement de Lecornu II : la suspension (éventuelle) de la réforme des retraites de 2023

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

On propose ici l’Histoire - c’est un peu gonflé pour quelqu’un qui n’est ni historien et seulement ici journaliste amateur... - qui commence le 22 octobre 2025 ; elle est écrite au jour, mais elle apparaîtra, complétée progressivement, à la date indiquée pour ce billet. Comme d’habitude (dans nos billets sur Le Club de Médiapart) nous commenterons surtout (mais pas que) la presse du Caillou : Nouvelle-Calédonie qui deviendra un jour Kanaky Nouvelle-Calédonie indépendante, mais en association avec son ancienne Métropole. Le lecteur pourra voir la différence avec ce qu’il suit sur la presse française.

La forme du billet change un peu : les références aux articles de presse ne sont plus en général (sauf exceptions) données en notes (ce qui est fastidieux pour un texte long) mais directement dans le texte. C’est un peu lourd mais plus commode à suivre. Ce feuilleton, écrit au jour le jour dès le lendemain de notre billet précédent[1], donc sans en connaître la fin, est divisées en plusieurs Saisons que sont les semaines. Ce billet sera ainsi complété au jour le jour et modifié quand une nouvelle information importante à nos yeux apparaitra.

Sans vouloir divulgâcher la fin de ce billet (le lecteur qui suit l’actualité connaît évidemment la fin de ce suspense torride) il n’est pas sûr que ce feuilleton sera si long que ça... Rappelons que le néologisme divulgâcher, né au Québec, qui provient de la combinaison de divulguer et gâcher (révéler prématurément un élément clé d’une intrigue) est la conséquence de la volonté d’éviter d’employer l’anglicisme spoiler (du verbe to spoil, gâter) ; poilants ces Québécois... 

Saison 1 - Semaine se terminant le samedi 25 octobre

Tout a commencé par ce que personne, même pas Braun-Pivet[2] qui pourtant dénonçait le barrage de LFI par plus d’un millier d’amendements, n’évoquait (sauf erreur) : la reprise de la motion de rejet préalable (afin d’obtenir le rejet de son propre texte en séance publique) déjà astucieusement utilisée pour faire voter sans amendement la Loi Duplomb.

Le 22 octobre était publié le premier article et probablement le plus pertinent[3] sur la question (avec de nombreuses et intéressantes vidéos) :

https://lcp.fr/actualites/nouvelle-caledonie-une-motion-de-rejet-adoptee-pour-contrer-un-grand-nombre-d

« L’Assemblée nationale a rejeté, dès l’ouverture des débats ce mercredi 22 octobre, une proposition de loi de report des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie. Une motion de rejet préalable avait été déposée par le camp gouvernemental pour répondre à un "barrage" d’amendements assumé par La France insoumise, LFI. Conséquence : le texte va être directement envoyé en CMP », en Commission mixte paritaire composée de sept députés et sept sénateurs.

Bastien Lachaud (LFI) « a dénoncé l’attitude du bloc central, moquant "les grands chantres de la démocratie" : "La démocratie, c’est quand ça vous arrange, quand le résultat vous convient." L’élu, à l’origine des nombreux amendements déposés par son groupe, a critiqué "un passage en force à l’état chimiquement pur". Mais, "depuis la loi Duplomb, on connaît la chanson", a-t-il fustigé. En mai dernier, la même stratégie avait été adoptée par les partisans du texte pour contrer "l’obstruction parlementaire" des députés écologistes et insoumis ».

Croustillant (et donc à goûter après ces quelques lignes) fut l’échange entre Tjibaou et Metzdorf, adversaires tous les deux présents le 12 juillet dernier dans les Yvelines lors de la signature de l’accord de Bougival. « "On joue avec notre vie à chaque fois que des décisions sont prises ici au sein de l’Assemblée. On sait que là-bas ce projet de texte réalimente les tensions, la fébrilité, les frustrations", a déclaré le premier, appelant à "redonner la parole au peuple" et donc à ne pas décaler les élections. "Rien ne se fera les uns sur les autres. (...) S’il faut encore prendre le temps de rediscuter d’amender, de préciser les choses pour emmener un maximum de gens sur l’accord de Bougival ou sur un accord consensuel quel qu’il soit, prenons ce temps-là", a répondu Nicolas Metzdorf. Et d’ajouter : "Les non-indépendantistes, nous y sommes prêts" ».

Le 22 octobre, à l’Assemblée nationale, la question de Tjibaou  (Emmanuel, le fils de Jean-Marie, évidemment) au gouvernement et la réponse de Moutchou nous éclairaient sur l’ambiance au Palais Bourbon. Voir la vidéo suivante :

https://www.bing.com/videos/riverview/relatedvideo?q=Report+des+provinciales&mid=7AD6F0DF4CAD6180FCA77AD6F0DF4CAD6180FCA7&mcid=A5C45B25B3774C59AE4DA76E20D7F7A4&FORM=VIRE

Voir aussi la vidéo de la télé Caledonia (diffuée dans son JT du 22 octobre) de la Province Nord de l’archipel.

https://www.bing.com/videos/riverview/relatedvideo?q=Report+des+provinciales&mid=8AE9B2D929008321571F8AE9B2D929008321571F&mcid=A5C45B25B3774C59AE4DA76E20D7F7A4&FORM=VIRE

Le 23 octobre, le FLNKS mettait les points sur les i à Nouméa.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/report-des-provinciales-le-flnks-denonce-une-enieme-manoeuvre-du-gouvernement-francais

« Le renvoi en commission mixte paritaire du projet de loi visant à reporter les élections provinciales, provoqué par le camp gouvernemental pour contourner l’obstruction parlementaire de LFI, est qualifié de "déni de démocratie" par le mouvement de libération, qui prévient : "En refusant d’écouter la voix du FLNKS, l’État prend le risque d’aggraver une crise qu’il prétend pourtant vouloir résoudre." Une "énième manœuvre du gouvernement français", un "déni de démocratie" qui met en évidence une tentative de "passage en force" et le "mépris du peuple colonisé" ».

Une vidéo, très pédagogique (du Calédonien Loïc Basset-Creugnet, probablement un copain de Metzdorf…) certes orientée contre l’extrême-gauche, nous explique bien la manœuvre de la droite : le texte qui sera probablement adopté par la CMP serait en fait le texte initial proposé à l’Assemblée mais devra être voté sans aucun amendement ; on saura plus tard si le PS le votera. Voir cette vidéo sur Facebook (du moins le premier objet de la longue proposition du site…) :

https://www.facebook.com/watch/?v=1105179058073914

Selon Léa Havard (que l’on ne présente plus ici ; constitutionnaliste et professeur de droit public à l’université de Nouvelle-Calédonie) tentait de nous aider à y voir plus clair dans un article du 23 octobre en soirée à Nouméa.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/report-des-elections-provinciales-quelle-suite-pour-la-proposition-de-loi-apres-son-rejet-1635913.html

« Cette sorte de "mini-Parlement" [la CMP] est "convoquée quand il y a un désaccord sur l’adoption d’un texte entre l’Assemblée nationale et le Sénat", précise la juriste. Objectif de ce petit comité : trouver un compromis. La CMP va retravailler le texte et c’est cette nouvelle version qui sera de nouveau mise à l’approbation du Sénat et de l’Assemblée nationale, mais sans possibilité pour les deux chambres de le modifier. "L'utilisation de cette procédure va permettre d’éviter le dépôt de nouveaux amendements", souligne Léa Havard ».

L’article conclut « Le report a-t-il une chance de passer ? Le passage du texte en commission mixte paritaire ne garantit pas pour autant son adoption de manière certaine par les parlementaires. Lors du premier examen du texte au Sénat, le report des provinciales avait été voté à la majorité. Mais son vote était moins garanti à l’Assemblée nationale. Reste à voir si cette nouvelle version trouvera une majorité au Palais Bourbon ».

Bref, on n’était guère plus avancé ? Sans doute, à mon avis, la version de la CMP (grâce à ma majorité de droite au Sénat) sera favorable au report et défavorable au FLNKS (et à ses soutiens à lAssemblée ).

On peut résumer cette première séquence par la vision du JT de NC 1ère du jeudi 23 octobre (presque la moitié du journal, et assez équilibrée politiquement ; une autre partie importante étant consacrée à la visite sur le Caillou du président du Medef, Patrick Martin) ; on y trouvera beaucoup de redites, mais aussi une interview de Léa Havard.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/programme-video/la1ere_nouvelle-caledonie_journal-de-19h30-de-nouvelle-caledonie/diffusion/7613234-edition-du-jeudi-23-octobre-2025.html

On peut également regarder le JT de Caledonia (qui vient de retrouver son format normal, avec présentateur, après des mois de JT seulement en images) de la même date (également politiquement équilibré, mais plus court avec encore près de la moitié du journal) ; encore des redites bien sûr (mais la base de la pédagogie n’est-elle pas la répétition…).

https://www.caledonia.nc/les-replays/le-jt

Pour compléter cette séquence du 23 octobre, ajoutons l’entretien à cette date de la ministre des Outre-mer Naïma Moutchou avec Outre-mer La 1ère :

https://la1ere.franceinfo.fr/video-nouvelle-caledonie-vie-chere-evolution-statutaire-ce-qu-il-faut-retenir-de-l-entretien-de-la-ministre-des-outre-mer-naima-moutchou-avec-outre-mer-la-1ere-1636078.html

Le dossier calédonien est sans doute sa priorité indique l’article : « "On peut compléter Bougival". L’un des principaux dossiers à traiter est celui de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie. Naïma Moutchou annonce qu’elle se rendra sur le Caillou pendant une semaine à partir du 1ᵉʳ novembre. L’occasion de rencontrer l’ensemble des élus et d’avancer sur l’avenir institutionnel du territoire. Pour la ministre, "Bougival a été une avancée, parce que ça a ravivé l’espoir auprès des Calédoniens". […] "Je ne veux pas faire sans le FLNKS pourvu que le FLNKS ne fasse pas sans les autres", réaffirme Naïma Moutchou. "J’entends les critiques. On peut détailler Bougival, on peut préciser Bougival, on peut venir le compléter. On peut aussi avancer sur la question économique et sociale. Il n’y a pas de grand plan encore qui ait été pensé. Je dis, faisons-le ensemble". [Je souligne, PC] Interrogée sur une potentielle renégociation du document de Bougival, elle répond : "Il y aura ce que les partis, dans le consensus, voudront bien faire". La discussion reste donc ouverte. Elle maintient néanmoins le calendrier avancé par l’ État, et notamment le report des élections provinciales… ».

Concernant le budget des Outre-mer elle affirme : « Je refuse que les Outre-mer soient les oubliés de ce budget » et « J’irai chercher ces efforts du côté de Bercy ». On lui souhaite bonne chance.

Petit scoop éventuel avec l’article de LNC du 24 octobre : Manuel Valls livre sa version de Bougival, reprenant l’audition, le mardi 21 octobre, de l’ex-ministre des Outre-mer par la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/manuel-valls-livre-sa-version-de-bougival

L’article indique : « Son intervention confirme un point souvent contesté : le texte était bien un "projet" devant être soumis à la validation des organisations du FLNKS. [Je souligne, PC] "Il y a eu un accord. Et celui qui a signé pour l’État, c’est moi", a déclaré Manuel Valls, mardi 21 octobre, devant les députés. L’ancien ministre des Outre-mer a néanmoins expliqué que la qualification de projet d’accord visait à "laisser aux délégations le temps de consulter leurs bases". Une précision qui conforte la version défendue par les dirigeants indépendantistes. Le document signé à Bougival n’était pas un simple brouillon, mais un accord conditionnel, dont l’entrée en vigueur dépendait de la validation des congrès des différentes composantes du FLNKS [Je souligne encore, PC] ».

Qui pourrait penser que Valls racontât là des mensonges, malgré son amertume affichée ? Le projet d’accord de Bougival était ainsi à proposer aux instances de chaque partie prenante : le contraire du récit officiel de l’État auquel il avait pourtant participé !

Valls va plus loin avec une autre pique contre le récit des loyalistes radicaux : « Il a précisé que c’est l’État qui a proposé ce mécanisme, afin de maintenir une forme d’exercice du droit à l’autodétermination, en l’inscrivant dans le temps plutôt qu’en le réduisant à un scrutin unique. L’ancien ministre a également rappelé, au contraire, que certaines idées souvent attribuées à l’État provenaient en réalité du camp loyaliste. L’idée d’un "État de la Nouvelle-Calédonie" doté d’une double nationalité et d’une reconnaissance internationale possible venait, selon lui, du Rassemblement et des partis loyalistes, et non du gouvernement français. [souligné par PC] Manuel Valls a également insisté sur les chantiers à venir : nom du pays, drapeau, reconnaissance du peuple kanak, composition du futur Congrès. [idem, PC] Autant de sujets symboliques qu’il juge essentiels pour "retrouver un récit commun". Constatant une "peur" persistante au sein de la population et le départ d’environ 18 000 habitants depuis le dernier recensement, il a appelé à poursuivre le dialogue "au-delà du juridique", sur le terrain de la mémoire et du politique ».

Moutchou n’a pas tenu le même discours concernant le récit officiel de l’État mais n’est pas loin de Valls, on vient de le voir, sur une nécessaire négociation avec le FLNKS.

Et Valls utilise cette idée de donner du temps au temps en s’opposant encore au report des élections provinciales : « Dans un climat marqué par les divisions autour de Bougival, il juge qu’un scrutin immédiat ne ferait que figer les fractures existantes ».

Nul doute que ces déclarations allaient faire le buzz… Cela ne semble pas le cas…

Le 25 octobre, un autre article ne présente pas la même interprétation, au moins au début de l’article, et amoindrirait ainsi l’éventuel buzz : « Concernant Bougival, l’audition de Manuel Valls ne lève en rien les ambiguïtés autour de la notion de "projet d’accord" ou "d’accord" soulevées par le FLNKS » [Je souligne, PC] ; on avait cru comprendre le contraire dans l’article précédent… et, surtout, la fin de l’article est moins péremptoire.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/devant-les-deputes-ultramarins-manuel-valls-revient-sur-les-coulisses-des-projets-de-deva-et-bougival-1636396.html

Mais on en apprend cependant de belles : l’accord de Déva à Bourail, précédant celui de Bougival, était bien un projet d’indépendance association (c’est pour cela qu’il avait fait hurler les loyalistes radicaux). Valls est à cet égard clair selon l’article : « Premier fait marquant, l’ex-ministre des Outre-mer a reconnu que le projet proposé au conclave de Déva était bien un projet d’"État associé". Un mot qu’il s’était défendu d’utiliser à l’époque pour ne pas réveiller les fantômes de la période Pisani et de sa proposition d’"indépendance-association". [Je souligne encore, PC] Ce statut, je l’ai mis sur la table. C’était un statut de souveraineté avec la France. […] Pour aller vite, c’est celui, au fond, d’État associé" ».

L’article continue et évoque la position de Macron sur le dossier : « Cette option, néanmoins, n’avait aucune chance d’aboutir, selon l’ancien ministre des Outre-mer. Ce type de projet n’aurait pas trouvé son prolongement au niveau du Sénat. Et il est de notoriété qu’[il] n’avait pas l’accord du président de la République ».

On apprend ainsi par Valls que « … le chef de l’État avait évoqué la possibilité pour les Calédoniens de se prononcer par référendum sur deux options de statut : celui d’une autonomie renforcée ou celui d’un État associé à la France. […] "Le président a évoqué une piste qui n’est pas nouvelle, qui était de dire : on essaie de prolonger, de se donner une perspective, avec la possibilité de faire voter les Calédoniens sur des projets qui sortent du choc entre le oui et le non". Une idée rapidement interprétée comme un engagement présidentiel vers l’État associé, ce que l’ancien ministre a tenu à nuancer, en évoquant un article paru dans le journal Le Monde, et qui a suscité un vif émoi chez les loyalistes. "Un grand journal du soir avait titré le lendemain que le président de la République s’engageait vers l’État associé. Ce qui n’était pas tout à fait ce qu’il avait dit." ».

L’article continue par deux faits précisant ce qu’indiquait l’article précédent ; le second point est de très loin le plus important, car il indique bien, certes de façon moins précise, le scoop de l’article qui précède.

1/ « L’ancien ministre a également évoqué un moment clé du dialogue entre les camps calédoniens. À l’initiative des Loyalistes et du Rassemblement, une rencontre a été organisée avec les représentants indépendantistes, sans la présence de l’État, lors de la deuxième soirée des discussions de Bougival. "Personnellement, j’ai accepté, si ça pouvait faire avancer les choses". Lors de cet échange, les formations non-indépendantistes ont évoqué "l’idée de l’État à la Nouvelle-Calédonie, l’idée de la double nationalité et de la reconnaissance internationale", en contrepartie d’un renoncement à "l’exercice du droit à l’autodétermination" et au transfert des quatre compétences régaliennes (sécurité publique, défense, justice et monnaie). Manuel Valls a salué "l’effort conceptuel" consenti par les loyalistes, mais a reconnu que la discussion ne pouvait aboutir, faute d’accord sur la question essentielle du droit à l’autodétermination. Pour débloquer la situation, l’État a alors proposé un mécanisme de transfert progressif des compétences régaliennes, lors des discussions à Bougival. Mais pour l’UC-FLNKS, ce transfert se heurte à "des verrous infranchissables" ».

2 / « Le soir du vendredi 11 juillet à Bougival a marqué un tournant décisif dans les négociations, selon Manuel Valls. L’ancien ministre a rappelé que la délégation du FLNKS avait répété "qu’elle n’avait pas de mandat pour signer un accord" et qu’elle devait consulter son bureau politique. "Elle s’est retirée à de nombreuses reprises pour discuter sous des formes qui lui appartiennent, en visioconférence notamment", a-t-il relaté. [Peut-être avec Christian Téin, PC] Alors que les échanges achoppaient, y compris "au sein de l’État sur les questions de délégation internationale", le président de la République a demandé au Premier ministre François Bayrou de réunir plusieurs ministres à Matignon afin d’examiner le projet en cours. "Le gouvernement, à commencer par le chef du gouvernement, a donné son accord", a poursuivi Manuel Valls, soulignant qu’à la différence de Déva, l’exécutif tout entier soutenait cette fois le texte. De retour à Bougival, il a donc "demandé la signature sur le projet" aux partenaires calédoniens, malgré "les difficultés qui se posaient aux FLNKS", à savoir l’absence de mandat pour signer un accord et l’absence de feu vert de son bureau politique. […] Au cours de la nuit du vendredi 11 au samedi 12 juillet, l’État a rencontré la délégation FLNKS à deux reprises. "J'ai beaucoup insisté pour qu’(elle) puisse signer". La solution pour sortir de l’impasse est alors venue "d'un représentant de l’Uni", confirme Manuel Valls. Si l’ancien ministre ne cite pas son nom, d’autres participants avaient déjà évoqué le rôle joué par Adolphe Digoué dans cette séquence. Or, la solution proposée par cet élu de l’Uni était la suivante : " tout le monde signe le projet d’accord, qui permette à chacun, ensuite, de s’expliquer sur place, en Nouvelle-Calédonie, pour convaincre les mandants ou les bases". Manuel Valls reconnaît lui-même que cela "a été une subtilité, et c’est sur ces bases-là que la délégation du FLNKS, présidée par Emmanuel Tjibaou, a signé" ».

Cette « subtilité » n’en n’est donc pas une : il s’agissait bien d’ « projet d’accord » et non d’un « accord » !

La délégation FLNKS ayant rapidement désavoué « l’accord historique », l’article termine : « Manuel Valls s’est dit ensuite surpris par la levée de boucliers suscitée par cette signature dans une partie du camp indépendantiste, en Nouvelle-Calédonie. "Pour ma part, je craignais plus à ce moment-là des réactions côté Loyaliste et côté Rassemblement, plus que du côté indépendantiste. Mais j’ai très vite compris que la délégation du FLNKS allait se retrouver face aussi à de véritables difficultés. Je parle très franchement, ils ont été désavoués très vite, avant même de monter dans l’avion. [Je souligne toujours, PC] C’est un fait. Ils n’ont pas eu le temps d’une explication, même s’ils ont cherché. Voilà, il n’y a pas deux versions de l’histoire" ».

En creux, la version du FLNKS selon Tjibaou serait donc la bonne selon Valls...

Et ce n’est pas fini,  indique l’article, avec un autre scoop. « Présent à cette audition, Emmanuel Tjibaou a pourtant offert une lecture différence des événements de Bougival. Le député indépendantiste a regretté un enchaînement précipité dans les dernières heures des discussions. "Ce que je déplore, c’est que le jeudi [10 octobre], on a fait une bilatérale [avec l’État]. Le vendredi matin, on a fait la plénière. […] Le soir, on nous a dit : il faut signer, sinon les Centaures débarquent". L’élu calédonien fait référence aux Centaures de la gendarmerie, ces véhicules blindés ultra-modernes déployés en Nouvelle-Calédonie après les émeutes du 13 mai. Selon lui, la délégation du FLNKS avait clairement indiqué ne pas disposer de mandat pour signer et avait demandé à inscrire dans le texte "la notion de projet d’accord et la notion de provisoire". Emmanuel Tjibaou affirme que l’État avait alors promis un retour devant les structures politiques locales et une ratification officielle, ultérieurement, à Nouméa ou à Koné. "Pourquoi on n’a pas fait la suite de ce qui était convenu ?", a-t-il interrogé, tout en défendant sa bonne foi. Je n’ai pas renié ma parole. […] C’est un projet d’accord. Une version qui met en lumière le sentiment d’inachevé du côté indépendantiste, malgré la publication de l’accord au Journal officiel ».

En outre, l’article du quotidien Le Monde du 24 octobre apportait quelques précisions à l’éviction de Valls.

https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/10/24/manuel-valls-les-dessous-de-son-eviction-au-ministere-des-outre-mer_6649153_823448.html

Le quotidien laissait entendre qu’ « Écarté à la dernière minute du gouvernement Lecornu II, le 12 octobre, Manuel Valls s’épanche largement, depuis, sur les ressorts de sa non-reconduction. Le chef de l’État ne semble pas étranger à son départ, malgré l’urgence sur le dossier néo-calédonien », rappelant dans une interview au vitriol dans Le Point, que son éviction était due à « un mélange de mesquinerie et de cynisme »[4]. Le Monde enfonce ainsi le clou le 24 octobre : « Rien ne laissait présager, il est vrai, cette mise à l’écart. Une semaine avant la formation du premier gouvernement Lecornu, Emmanuel Macron l’appelle pour lui annoncer qu’il sera renommé, et pour lui assurer qu’il croit à l’accord de Bougival. Manuel Valls est effectivement reconduit le 5 octobre dans l’éphémère gouvernement Lecornu I. Une semaine plus tard, quelques heures avant l’annonce de son deuxième gouvernement, un Sébastien Lecornu "doucereux" prévient Manuel Valls qu’il n’en fera pas partie, et qu’il le regrette. Le Normand, qui disait dans la presse régionale le 13 septembre vouloir des "ministres forts", souhaite désormais écarter les poids lourds et favoriser le "renouvellement". Bruno Retailleau ayant tiré sa révérence, les trois autres ministres d’État, Elisabeth Borne, Gérald Darmanin et Manuel Valls, doivent, eux aussi, céder leur place, explique le premier ministre. Sauf qu’à la dernière minute, Gérald Darmanin restera. Tout comme Rachida Dati ».

On peut comprendre les « regrets » de Valls.

Enfin, pour clore cette semaine sur le sujet[5], la CCAT (la Cellule de coordination des actions de terrain, pour ceux qui l’auraient oublié) reprend ses manifestations, pacifiques celles-là, selon deux articles du 25 octobre.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/mobilisation-de-la-ccat-contre-un-report-des-provinciales-1636672.html

Et.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/grand-noumea/noumea/vallee-du-tir/politique/societe/bougival-c-est-un-recul-a-la-vallee-du-tir-la-ccat-tente-de-remobiliser-ses-militants

Saison 2 - Semaine se terminant le samedi 1er novembre

Le lundi 27 octobre en tout début d’après-midi (à Nouméa où je viens d’atterrir) un article mentionne : « "Ce qu’on dit, c’est qu’il faut arrêter cette mascarade". Dominique Fochi était l’invité politique du dimanche, à l’aube d’une nouvelle semaine politiquement cruciale pour la Calédonie : le report éventuel des provinciales doit passer devant la fameuse commission mixte paritaire du Parlement dans la nuit de lundi à mardi, heure de Nouméa ». Fochi rappelle la position du FLNKS au report des provinciales.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/le-mouvement-independantiste-ne-peut-pas-porter-deux-voix-differentes-estime-dominique-fochi-pour-le-flnks-1637128.html

« "La méthode, déclare-t-il, est la même que celle qui a été employée l’année dernière, avec le projet de loi constitutionnelle fait sans consensus, sans l’approbation des différents groupes politiques, ce qui a mené à l’insurrection […] La paix dans ce pays doit se construire avec tout le monde. Là, on a l’impression qu’une partie des partis politiques, en tout cas le FLNKS, est mise de côté". Un argument développé dans le communiqué qu’il a signé jeudi dernier, après l’épisode du rejet à l'Assemblée nationale : "Reporter de six mois […], c’est enfoncer le pays dans une situation de blocage, avec le risque que les tensions sociales et politiques s’enflamment de nouveau comme en 2024". Selon l’invité du JT, "ce ne sont pas des menaces, c’est un appel au bon sens. Les [mêmes] causes produisent les mêmes effets. […] "Nous, on privilégie la discussion. C’est pour ça qu’à l’heure actuelle, on n’est pas encore arrivé à la rupture", assure-t-il ensuite. "On va attendre ce qui va se passer cette semaine" - notamment la commission mixte paritaire - et on verra pour la suite". Il signale que le FLNKS prévoit "un bureau politique élargi vendredi prochain, on va statuer sur la suite de la reprise du dialogue, ou pas" ».

Pas des menaces, mais presque ; et cela peut en effet être un rappel au bon sens... Ce qui est sûr (pour ceux qui ne lauraient pas compris) cest que le report des provinciales en 2026 se ferait avec un corps électoral élargi, à condition bien sûr que l’accord de Bougival soit ratifié avant, alors que, dans les semaines qui viennent, elles le serait avec un corps non encore dégelé, évidemment moins favorables, arithmétiquement, aux partisans de la Calédonie française. Le reste des arguments de part et dautre a peu dimportance...

Le FLNKS tenta d’ailleurs de convaincre le Palika et l’UNI en tentant de se rapprocher d’eux, et annonçait la venue de Moutchou ce week-end, en précisant : « Le projet d’accord de Bougival a été formellement rejeté. Donc nous, on est prêt à discuter, mais en dehors de Bougival. [Je souligne encore, PC] […] L’accord de Bougival, c’est niet, tout simplement parce que c’est un accord dans la France. On n’a pas passé deux accords, 37 années, à préparer notre pays à exercer les compétences et à pouvoir devenir indépendant, pour aboutir encore à un statut à l’intérieur de la République ».

Si l’on comprend bien, il n’était donc plus question d’amender l’accord de Bougival ; et c’était donc nouveau. C’est le principal aspect de l’accord de Bougival qui était ici remis en cause, ce qui n’était pas nouveau pour le FLNKS (un statut à l’intérieur de la République, statut qui peut évoluer cependant avec toutes les compétence régaliennes, mais toujours au sein de la République, et avec les nombreux « verrous » souvent mentionnés) ; ce qui était nouveau, c’était le refus de discuter de l’accord de Bougival lui-même ! Rappelons qu’il n’y a pas si longtemps (voir plus haut) Tjibaou affirmait « Rien ne se fera les uns sur les autres. (...) S’il faut encore prendre le temps de rediscuter d’amender, de préciser les choses pour emmener un maximum de gens sur l’accord de Bougival ou sur un accord consensuel quel qu’il soit, prenons ce temps-là ».

Tjibaou avait-il évolué depuis une semaine ? Où des désaccord au sein du Front, avec Téin et Fochi contre Tjibaou, existaient-ils encore, ce qui est probable ?

Sans doute pour arranger les choses, on apprenait dans un article de LNC le 27 octobre, que le haut-commissariat avait interdit le rassemblement du FLNKS prévu ce lundi.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/le-haut-commissariat-interdit-le-rassemblement-du-flnks-prevu-ce-lundi

« Le mouvement de libération prévoyait une mobilisation devant le haut-commissariat, à Nouméa, pour contester le projet de report des élections provinciales. Les services de l’État ont estimé que la déclaration de manifestation, formulée samedi, était trop tardive pour permettre de déployer les mesures de sécurité nécessaires ». […] Le FLNKS a rapidement réagi à cette interdiction de manifester. "Pendant que le destin du peuple kanak se joue à 22 000 km d’ici, dans les mains de 14 parlementaires français sans aucune connaissance de la décolonisation, le représentant de la France en Kanaky nous réduit au silence", regrette le mouvement de libération. La justification du haut-commissariat concernant un délai trop court ne passe pas auprès des représentants indépendantistes. "Le haut-commissaire dispose de milliers de forces de l’ordre dont on se demande à quoi elles sont occupées réellement chaque jour. Organiser la sécurité d’un rassemblement pacifique ne devrait pas être un problème… s’il le voulait vraiment." ».

Les autorités coloniales ne changeront donc sans doute jamais, en répétant à lenvi les même erreurs (pour ne pas parler de fautes...)

Le 27 octobre, était présenté un intéressant débat (d’environ ¾ d’heure) organisé par la Revue des deux Mondes (plutôt positionnée à droite de l’échiquier politique) intitulé Quel avenir institutionnel pour la Nouvelle-Calédonie ? Parlons-en avec C. Wéry, P. Roger, I. Merle.

https://www.france24.com/fr/%C3%A9missions/parlons-en-les-invit%C3%A9s/20251027-quel-avenir-institutionnel-pour-la-nouvelle-cal%C3%A9donie-parlons-en-avec-c-w%C3%A9ry-p-roger-i-merle

Les lecteurs peu accros à nos billets en apprendront sans doute beaucoup sur l’Histoire récente du Caillou ; ceux qui nous suivent régulièrement comprendront (quoique…) les positions politiques de chaque invité, dont l’indépendantiste Isabelle Merle qui soutient le FLNKS.

Sans transition et sans surprise, la CMP « s’accorde sur un texte de compromis » reportant les élections provinciales à début 2026, selon l’article publié le 27 octobre.

https://la1ere.franceinfo.fr/report-des-elections-provinciales-en-nouvelle-caledonie-la-commission-mixte-paritaire-s-accorde-sur-un-texte-de-compromis-1637299.html

Le texte (où la référence à l’accord de Bougival a été retirée du nom de la proposition de loi par les membres de la CMP) sera soumis au vote des députés mardi 28 et à celui des sénateurs mercredi 29 octobre ; « Si les parlementaires valident le texte, il devra encore être examiné par le Conseil constitutionnel, qui se prononcera à partir du 2 novembre ». Le vote pour le report ne fait aucun doute au Sénat, c’est moins sûr à l’Assemblée car aux voix de la gauche (hors PS) s’ajouteront probablement celles du RN que le député (Renaissance) de Nouvelle-Calédonie Nicolas Metzdorf a du mal à comprendre : « On a du mal à suivre la position du RN sur la Nouvelle-Calédonie. J’ai l’impression [que le sujet] arrive à un moment où le RN est dans une forme d’opposition frontale avec les textes issus du bloc central élargi aux LR et au Parti socialiste ».

L’article, publié par LNC le même jour, n’en dit pas plus.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/semaine-decisive-pour-la-proposition-de-loi-sur-le-report-des-elections-provinciales

L’article de LNC-AFP du 28 octobre sur le même sujet apporte une précision : la suppression de la référence à l’accord de Bougival vise un « apaisement » envers le FLNKS.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/france/politique/accord-deputes-senateurs-pour-reporter-les-elections-provinciales

« Dans un geste d’apaisement, lundi, les parlementaires de la CMP ont retiré la mention de l’accord de Bougival du texte de loi. Le report des élections provinciales est désormais justifié pour "permettre la poursuite de la discussion, en vue d’un accord consensuel sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie", selon la rédaction retenue, consultée par l’AFP. "Il y a cette volonté de donner du temps au temps […] C’est un message politique que le texte veut envoyer au FLNKS", a expliqué à l’AFP le député LR Philippe Gosselin.

On apprenait aussi que les conclusions de la CMP seront examinées à l’Assemblée nationale mardi 28 octobre et au Sénat mercredi soir.

Les réactions sont différentes quant à la mouture de la CMP, selon l’article, toujours du 28 octobre.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/elections-provinciales-detail-essentiel-ou-pas-un-grand-changement-le-regard-des-politiques-caledoniens-sur-le-compromis-trouve-au-parlement-1637485.html

Changement de nom il y a donc : « Selon cet intitulé, le texte vise désormais "à reporter le renouvellement général des membres du Congrès et des assemblées de province […] afin de permettre la poursuite de la discussion en vue d’un accord consensuel sur l’avenir institutionnel". Et non plus "la poursuite de la discussion sur l'accord du 12 juillet et sa mise en œuvre".

Selon Metzdorf, il ne s’agit que d’un détail, en fait sans importance ; « On continuera sur les bases de Bougival ». En revanche, pour Tjibaou, « Le changement d’intitulé "est un détail essentiel", "une autre séquence s’ouvre" ; ce n’est pas faux car le FLNKS venait de refuser (voir plus haut) toute négociation dans le cadre de l’accord de Bougival !

Une porte avait donc été ouverte, et sans doute plus largement qu’il n’y paraissait, n’en déplaise à Metzdorf qui n’a peut-être pas tout compris (ou feint de ne pas comprendre…) ; cependant Tjibaou persiste : « Mais s’il devait y avoir des élections provinciales, dans la mesure où on n’arrive pas à trouver un accord politique, [elles] se tiendraient sur la base du corps électoral actuel, celui légitimé par le Conseil constitutionnel. Pour le reste, pas de pronostic, "je ne suis pas dans la tête des stratégies au sein de l’Assemblée". Au-delà, il y a la visite de Naïma Moutchou, en Calédonie ce week-end. "Les attendus sont clairs pour nous, c’est la poursuite des discussions institutionnelles, conformément à ce qu’elle a pu tenir comme discours et ce qu’avait pu également tenir son prédécesseur. On est toujours sur la phase de négociation" ».

Poursuite des discussions institutionnelles, mais en oubliant donc Bougival...

Même repoussé à 2026, le corps électoral ne serait donc ainsi pas dégelé alors que l’accord de Bougival prévoyait explicitement le contraire ? Ce n’est qu’une hypothèse, à suivre comme le lait sur le feu ; mais alors la nouvelle mouture proposée par la CMP ne serait plus un détail, même essentiel, mais une première victoire du FLNKS et une cuisante défaite pour les loyalistes radicaux ! Car, au risque de radoter, la question du dégel est bien essentielle pour les deux parties prenantes ! Cependant, attention : l’accord de Bougival sera peut-être ratifié et constitutionnalisé avant les élections provinciales ! Tout l'enjeu est là !

D’ailleurs, petit scoop à la même date : il semblerait que Paul Néaoutyine (du Palika) presque disparu des radars, soit de retour et s’opposerait à l’accord de Bougival, mais l’incertitude demeurerait selon l’article suivant.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/province-nord/paul-neaoutyine-contre-bougival-les-interpretations-divergent-1636978.html

« Seul le principal intéressé pourra définitivement résoudre cet imbroglio » écrit l’article. Jean-Pierre Djaïwé (signataire de Bougival et qui défend l’accord bec et ongles) déclare qu’il « faut replacer l’intervention du président de la province Nord dans son contexte. À savoir, une réponse à une question de Wilfried Weiss qui suggère d’améliorer les protocoles de soins dans la province. […] mais il n’a pas dit qu’il était contre l’accord de Bougival ». Daniel Goa, l’ancien président de l’Union Calédonienne, également conseiller à la Province Nord, pense le contraire : « Je pense qu’il a voulu ramener plutôt l’Uni, le Palika et l’UPM, à revenir au FLNKS. Parce qu’aujourd'hui on arrive dans une période importante et comme il dit, quand il dit qu’il est signataire d’un accord de Nouméa, c’est un accord de décolonisation. Et pour lui, selon mon interprétation, l’accord de Bougival, ça n’est pas un ».

Mon petit doigt m’a dit (il se trompe cependant de temps en temps... ; mais là j’en suis à peu près sûr, quoique...) que Néaoutyine a bien déclaré qu’il était opposé à l’accord de Bougival.

Ouf ! Enfin, Néaoutyine semble se réveiller ! Mais va-t-il donner des coups de pied dans la petite fourmilière égarée qu’est devenu le Palika (se serait le moment) ou s’endormir de nouveau ? Je continue de m’étonner du tournant pris par le Palika et son allié dans l’UNI et à me demander quelle est la raison de se tournant.

À l’autre bord politique, la feuille très loyaliste radicale, La dépêche.nc, prévenait, le 28 octobre, la ministre des Outre-mer dans son article titré Face au FLNKS, Naïma Moutchou va découvrir le vrai visage du « dialogue ».

https://ladepeche.nc/2025/10/28/face-au-flnks-naima-moutchou-va-decouvrir-le-vrai-visage-du-dialogue/

Et l’article n’y allait pas avec le dos de la cuiller (extraits) : « Ils veulent parler, mais pas avec la France. Naïma Moutchou arrive à Nouméa dans un climat faussement apaisé. […] Car le FLNKS a fermé la porte du débat institutionnel, tout en laissant entrouverte celle du discours. Son secrétaire général, Dominique Fochi, l’a redit au JT : le mouvement est : prêt à discuter, mais pas dans le cadre de Bougival. […] Cette ligne rouge rend le dialogue presque impossible. Naïma Moutchou ne rencontrera donc pas un interlocuteur politique, mais un adversaire tactique qui teste l’État et observe jusqu’où il peut céder. […] Cette stratégie du chantage démocratique vise à replacer le FLNKS au centre du jeu après des mois d’isolement politique et moral ».

La conclusion de l’articles est d’une clarté de cristal : « L’État ne doit plus se laisser piéger. Naïma Moutchou a répété qu’elle ne "fera pas sans le FLNKS". Mais le danger est justement là : faire éternellement avec un partenaire qui ne veut rien signer. Le Front utilise la rhétorique du "dialogue" comme un outil de blocage, pour repousser les élections, empêcher la révision constitutionnelle, et maintenir la Nouvelle-Calédonie dans un entre-deux politique délétère. Ce que la ministre doit comprendre, c’est que la main tendue de Paris n’est plus un symbole, c’est une faiblesse exploitée. Le courage politique consiste aujourd’hui à avancer sans céder au chantage, à faire respecter la loi, le calendrier et la parole donnée à la majorité silencieuse des Calédoniens. Car l’histoire a prouvé une chose : chaque recul de l’État ouvre la voie à la violence ».

Moi qui pensais que c’était le contraire, que la violence était le résultat de l’entêtement de l’État !

Enfin, nouvelle fort importante, c’était plié à l’Assemblée nationale le mardi soir 28 octobre 2025 (fuseau horaire de Métropole ; levé du soleil en Calédonie le 29 octobre ou je viens de le goûter) : le report des provinciales a été voté à une majorité confortable. C’est un article du quotidien Le Monde (avec l’AFP) qui, le premier, me l’avait appris (article publié là-bas peu après 19 h).

https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/10/28/nouvelle-caledonie-l-assemblee-approuve-le-report-des-elections-avant-un-vote-final-au-senat-mercredi_6649982_823448.html

Curieusement, pas un mot au même moment sur, par exemple, la télé et la radio de France Info (notamment au JT de 19 H) qui discute cependant des inégalités de revenu de patrimoine… suit un débat sur l’IA. Autrement dit, l’une des deux principales priorités du gouvernement Lecornu II, n’en n’est pas une pour les médias populaires Cependant une dépêche a été envoyée très tôt de Nouméa (à 5 h 46) signée La 1ère. France Info.

https://la1ere.franceinfo.fr/avenir-institutionnel-de-la-nouvelle-caledonie-les-deputes-votent-pour-le-report-des-elections-provinciales-1637779.html

« La proposition de loi, écrit Le Monde, a été adoptée par 279 voix contre 247, avec le soutien du camp gouvernemental et du Parti socialiste. Le reste de la gauche et le Rassemblement national ont voté contre ». J’insiste sur le vote du PS… Une autre pierre noire qui sera notée dans l’Histoire – c’est un peu pompeux, mais j’assume – quoi qu’il arrive…

On ne savait toujours pas, à cette heure, si le vote aux provinciales de 2026 se ferait avec corps électoral dégelé ou non (j’assume aussi ce radotage dans ce billet ...). Tout dépendra du vote ultérieur du Parlement concernant l’accord de Bougival : « Il entend surtout élargir le corps électoral spécifique à ces élections, une question sensible en Nouvelle-Calédonie. Actuellement, seuls certains habitants peuvent voter, notamment ceux qui étaient établis sur le territoire avant 1998 et leurs descendants, ce qui ulcère le camp loyaliste. La mise en œuvre de l’accord passerait par l’adoption d’un projet de loi constitutionnelle ».

On avait appris la même nouvelle sur le Caillou (à 5 h 06 modifié à 5 h 46) le 29 octobre 2025.

https://la1ere.franceinfo.fr/avenir-institutionnel-de-la-nouvelle-caledonie-les-deputes-votent-pour-le-report-des-elections-provinciales-1637779.html

On en savait ainsi un peu plus : « Pour faire voter le report, le camp gouvernemental a reçu le soutien du Parti socialiste. "Dans mon groupe il y avait des voix dissonantes, la mienne est dissonante", a néanmoins commenté, en sortant de l’hémicycle, la députée de la Martinique Béatrice Bellay. […] Nicolas Metzdorf, député non-indépendantiste, espère que le report des provinciales de quelques mois permettra la reprise du dialogue autour de la nouvelle ministre des Outre-mer, qui se rendra en Nouvelle-Calédonie dans les tous prochains jours ».

Même information sur LNC avec l’AFP deux heures plus tard, mais avec quelques précisions importantes concernant l’avenir de l’accord de Bougival et la question du corps électoral.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/l-assemblee-approuve-le-report-des-provinciales-vote-final-au-senat-mercredi

« Mais les opposants au texte reprochent au gouvernement de paver ainsi la voie à un accord pour une difficile réforme institutionnelle de l’archipel, meurtri par de graves violences au printemps 2024. […] L’accord, signé en juillet à Bougival entre l’État et les délégations indépendantistes et non-indépendantistes calédoniennes, prévoit notamment la création d’un "État de la Nouvelle-Calédonie" ou la reconnaissance d’une nationalité calédonienne. Il entend surtout élargir le corps électoral. [Je souligne, PC] Sa mise en œuvre passerait par l’adoption d’un projet de loi constitutionnelle ».

Autre précision importante qui répond en partie à nos multiples interrogations dans ce billet : « Le report des élections "n’est ni une réforme constitutionnelle, ni le dégel du corps électoral" mais un moyen de "se donner le temps de trouver un accord", a lancé mardi dans l’hémicycle Arthur Delaporte (PS). Le gouvernement a toutefois suscité la confusion jusque chez ses soutiens mardi matin, en inscrivant la réforme constitutionnelle au calendrier du Parlement dès janvier. Et ce alors que les parlementaires avaient retiré la veille toute référence à Bougival dans le texte sur le report des élections, pour tenter de calmer les esprits »."Confiance rompue". "On statue sur quoi ?", a lancé le député indépendantiste Emmanuel Tjibaou, demandant au gouvernement de clarifier ses intentions. "La confiance est rompue", a lancé Mathilde Panot, cheffe du groupe LFI, accusant le gouvernement de vouloir "imposer" Bougival ».

Cerise sur le gâteau : « Dès mardi après-midi, Laurent Panifous, ministre des Relations avec le Parlement, a reconnu que le calendrier "a pu susciter l’inquiétude", et annoncé le retrait du texte constitutionnel "de l’ordre du jour prévisionnel". […] Le ministre a aussi estimé que l’accord devait être "précisé et, le cas échéant, si l’ensemble des forces politiques signataires s’accordent, complété" ».

Bref, on peut penser que le corps électoral ne sera pas dégelé malgré le report des provinciales : il faudrait que la constitution française soit modifiée, conformément au processus prévu à Bougival ; et ce n’est donc pas gagné ! Mais qui sait... (Je radote encore...).

Un article du Dauphiné libéré (publié en Métropole à peu près en même temps que le précédent) donnait les mêmes précisions et en posant explicitement la question (mais sans y répondre…) : « Quel corps électoral ? ».

https://www.ledauphine.com/politique/2025/10/28/l-assemblee-approuve-le-report-des-elections-provinciales-premier-pas-vers-une-reforme-institutionnelle

Nice matin évoquait (et très tôt) les mêmes précisions.

https://www.nicematin.com/societe/nouvelle-caledonie-le-report-des-elections-provinciales-valide-par-les-deputes-vers-une-reforme-institutionnelle-controversee-10654397

Et l’Histoire allait peut-être aussi s’accélérer sur le Caillou : peu après la triste nouvelle (selon moi) précédente, un (court) article, publié le 29 octobre 2025 à 7 h 13 à Nouméa, évoquait (mais sans aucun nouvel argument, sauf des rumeurs) la possibilité d’une motion de censure contre le gouvernement local.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/une-semaine-apres-l-ultimatum-de-son-president-le-groupe-uc-flnks-et-nationalistes-va-t-il-faire-chuter-le-gouvernement-de-la-nouvelle-caledonie-1637614.html

« Y aura-t-il une motion de censure du groupe UC-FLNKS et Nationalistes au Congrès pour faire démissionner Alcide Ponga du gouvernement ? Une semaine après l’ultimatum de Pierre-Chanel Tutugoro, sans effet sur l’exécutif, la question se pose. Selon nos informations presque tous les groupes au Congrès ont été approchés par le groupe UC-FLNKS et Nationalistes, ce lundi, tous étaient encore suspendus aux décisions autour de la Commission mixte paritaire à Paris ».

Mais une majorité serait difficile à atteindre et, rappelons-le (une fois notre erreur corrigée dans l’un de nos billet précédent...) il n’est pas possible de faire tomber un gouvernement par la démission collective d’un groupe de ce dernier s’il n’a pas encore duré 18 mois !

À Nouméa, toujours le 29 octobre, les réactions au report des provinciales furent rapides ; et peu surprenantes, avec même celle de Bastien Lachaud, député LFI. D’abord, en début de matinée, l’analyse de LNC.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/etape-importante-vote-honteux-message-clair-les-reactions-politiques-a-l-adoption-du-report-des-provinciales-a-l-assemblee

Pour Virginie Ruffenach, présidente du groupe Rassemblement, « La menace éternelle de la violence ne l’emporte pas » ; elle « s’est, en revanche, montrée très critique envers le Rassemblement national, qui a voté contre le report, et qui fait selon elle "le jeu de l’extrême gauche" ».

Emmanuel Tjibaou, député FLNKS présente des arguments plus solides : « "Ce qui a été acté à l’Assemblée, c’était que le report se faisait sur la base des éléments qui ont été statués en commission paritaire mixte, et dans lequel le lien avec l’accord de Bougival a été supprimé" […] Par conséquent, "il n’y a plus de motif légitime de reporter, puisqu’il n’y a plus la mention de Bougival" ».

Tjibaou oubliait encore cependant que si la loi constitutionnelle ratifiant l'accord de Bougival arrivait à son terme avant les élections provinciales reportées en 2026, le dégel partiel du corps électoral aurait sans doute bien lieu, sauf si l’accord de Bougival était, au moins à cet égard, profondément remanié. Rien n'est simple dans le dossier calédonien...

Pour Nicolas Metzdorf, député Loyaliste, « L’Assemblée envoie un message clair de soutien envers les forces politiques locales qui ont assumé leur engagement pris à Bougival ». Mais, lui aussi s’en prend (très vivement) au RN qui « a voté pour que des élections se tiennent sans 42 000 Français de Nouvelle-Calédonie », avouant, sans le dire explicitement, que le dégel du corps électoral n’aura pas lieu !

Bastien Lachaud, s’en est pris surtout au PS, mais pas seulement : « "35 voix d’écart ! C’est grâce au PS et ses garanties illusoires que la Macronie peut reporter les élections provinciales en Kanaky-Nouvelle-Calédonie", a fustigé le député, évoquant un "vote honteux" qui "vient piétiner le droit du peuple à voter et à choisir librement de son avenir". Il s’en est également pris au gouvernement français, ce report étant, selon lui, "une trahison du dialogue, un déni démocratique, un nouveau pas dans la logique coloniale". Bastien Lachaud a annoncé que son groupe allait saisir le Conseil constitutionnel ».

Puis, un peu plus tard et modifié en début d’après-midi, celle d’Outre-mer la 1ère - France Info, avec les mêmes personnes plus un PS ; et avec quelques précisions.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/incomprehension-ou-satisfaction-les-deputes-caledoniens-divises-apres-la-validation-du-report-des-elections-provinciales-par-l-assemblee-nationale-1637839.html

Nicolas Metzdorf admet que le vote « s’annonçait serré mais "finalement on a atterri avec un peu plus de marge que prévu mais pas trop quand même". En revanche, "le Rassemblement national est quant à lui totalement à côté de ses pompes sur la Nouvelle-Calédonie. Il a voté pour que des élections se tiennent en Calédonie avec un corps électoral gelé  [je souligne, PC : c’est plus explicite que dans l’article précédent], c’est-à-dire en excluant plus de 40 000 personnes". Le député calédonien ne cache pas son agacement envers le RN. "Je veux que les Calédoniens le retiennent parce qu’aujourd’hui, si on a dû se battre et faire des concessions à la gauche pour que ce texte passe, c’est parce que le RN s’y est opposé. Aujourd’hui, il n’est plus le défenseur de la Nouvelle-Calédonie française" ».

Pessimisme curieux de Metzdorf qui pense ainsi impossible la ratification de l’accord de Bougival avant le report des élections provinciales.

L’article retient une autre sortie de Tjibaou qui estime que « tous les artifices juridiques sont de sortie pour faire valoir une position qui serait de contraindre le FLNKS à entrer dans Bougival de force. D’autant plus que le projet d’accord n’a aucune valeur légale. On est vraiment sur une autre planète. Aujourd’hui on ne peut pas avoir confiance dans un État qui ment, sur quelles bases on va aller discuter ? Je suis un peu révolté de ce qui se passe et de cette parole dont tout le monde se targue aujourd’hui, celle du destin commun ».

Autre commentaire également de Bastien Lachaud qui depuis le départ s’oppose fermement au report du texte : « C’est un immense gâchis. Je pense que c’est la première fois dans l’histoire de la République qu’un texte sur la Kanaky Nouvelle-Calédonie est adopté avec une si faible majorité. On voit bien que nous sommes très loin de l’esprit du consensus. Il y a une volonté de passer en force de la Macronie, du parti socialiste contre l’intérêt de la Kanaky Nouvelle-Calédonie. Il n’y aura pas d’accord avec ce report des élections. Je crains le pire et j’espère que le gouvernement n’ira pas plus loin dans le passage en force ».

Enfin, réaction du député PS Arthur Delaporte : « Aujourd’hui ce n’est ni le dégel [Je souligne encore, PC], ni un passage en force d’une réforme constitutionnelle, c’est simplement laisser du temps pour reprendre les négociations et pour ça, le gouvernement a une responsabilité. Nous avons toujours été les garants du consensus, et nous continuerons à l’être demain ». Aujourd’hui ce n’est pas le dégel, mais demain, peut-être que si... 

En outre, la visite de Moutchou à partir du 1er novembre « ne fait pas l’unanimité » ; en particulier les mots de Tjibaou sont très durs : « J’ai appris qu’elle voulait venir dans ma tribu, à Tiendanite mais pour faire quoi ? Pour mentir à qui ? ».

On retiendra surtout (ou alors, je n’ai rien compris…) que le vote repoussé des provinciales pourrait se faire avec le corps électoral actuel : gelé. Saufs si... (voir plus haut nos radotages).

En milieu de soirée du 29 octobre à Nouméa, le retour au bercail de l’UNI dans le FLNKS (où il se trouve encore en théorie) était mal parti.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/on-peut-tres-bien-aussi-mener-un-travail-en-parallele-la-reponse-du-palika-a-l-ultimatum-d-unite-du-flnks-de-christian-tein-1637917.html

Mais cela a-t-il une grande importance ?

En fin de soirée sur le Caillou, une sorte de remake de l’article du début de l’après-midi mais « modifié à 21 h 39 ». L’écrit est le même, mais il est ici accompagné d’une vidéo : « Plus de réactions dans ce sujet de Natacha Lassauce-Cognard ».

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/incomprehension-ou-satisfaction-les-deputes-caledoniens-divises-apres-la-validation-du-report-des-elections-provinciales-par-l-assemblee-nationale-1637839.html

On y voit : le résultat du vote (535 votants mais seulement 526 suffrages exprimés, avec quelques récalcitrants dans chaque camp selon la carte de l’hémicycle) ; une interview de Tjibaou (qui râle) ; celle de Metzdorf qui précise, et s’en félicite, que des députés d’Éric Ciotti et de Marion Maréchal ont voté (contrairement à ceux du RN) pour le report ; Djaïwé (les yeux baissés) Ruffenach et Gomès ; exit Lachaud.

Le petit scoop est quand même le vote pour le report de quelques récalcitrants de l’extrême-droite.

On peut finir cette séquence du jour par un bilan de cette folle journée du 29 octobre en Calédonie, avec un article de ce jour (en fin d’après-midi ; à Nouméa bien sûr) qui se veut de synthèse et de perspective.

https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/apres-le-report-des-provinciales-quelle-suite-pour-la-reforme-constitutionnelle-et-bougival

« En approuvant le report des élections provinciales, l’Assemblée nationale a mis fin à une semaine de bataille parlementaire. Une "étape essentielle", se sont félicités les défenseurs de la proposition de loi organique, avant même le vote des sénateurs, qui devraient l’adopter sans difficulté ce mercredi 29 octobre. Mais tous en sont conscients : le plus dur reste à venir. Le dossier calédonien va entrer dans un nouveau parcours du combattant législatif. Il s’agit désormais d’inscrire l’accord de Bougival dans la Constitution française, malgré l’opposition du FLNKS et de ses soutiens nationaux. […] Mais, depuis la déclaration du nouveau Premier ministre, les lignes ont bougé et l’accord de Bougival, dont s’est retiré le FLNKS en août, semble plus fragile que jamais. [Je souligne encore, PC] Preuve en est, sa mention a disparu de la nouvelle version du texte sur le report des provinciales, rédigée en commission mixte paritaire. Les députés ont ainsi adopté, mardi, une proposition de loi visant à reporter le renouvellement des élus non pas pour mettre en œuvre l’accord signé le 12 juillet, mais afin de "permettre la poursuite de la discussion en vue d’un accord consensuel sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie". Une façon d’ouvrir la porte à un éventuel retour du FLNKS dans la discussion, alors qu’il a confirmé ne plus vouloir entendre parler de Bougival ».

On pouvait comprendre, selon cet article, que le PS était à l’origine du changement de nom : « Ce retrait de la mention de Bougival était, avant tout, une condition du Parti socialiste, qui consentait à repousser les élections à juin 2026, mais pas pour soutenir un accord dont s’est retiré le principal mouvement indépendantiste. "Les socialistes ne soutiendront pas de réforme constitutionnelle qui se ferait sans consensus", avait affirmé le député PS Arthur Delaporte, après le vote de la commission mixte paritaire ».

Plus important, pour certains observateurs, « cette disparition signifie bien plus qu’un simple appel du pied [de l’État, PC] au mouvement de libération ». Il s’agit surtout de Laurent Chatenay, un Calédonien ancien conseiller du gouvernement de l’indépendantiste Louis Mapou, mais qui soutenait la politique néo-libérale du fameux conseiller des multiples gouvernements (dont celui de Mapou…) : Olivier Sudrie ; voir sur cet important sujet nos vieux billets. Chatenay aurait bien changé : maintenant de gauche, anti-libéral et farouche indépendantiste... « "Le report ne prépare plus Bougival : il l’enterre", analyse Laurent Chatenay, dans une publication sur les réseaux sociaux. Pour l’ancien conseiller du gouvernement Mapou, ce "glissement sémantique" pourrait indiquer que les dispositions de Bougival ne seront pas inscrites dans la Constitution, ce qui ferait perdre "tout support juridique" au compromis. Si tel était le cas, "les élections de juin 2026 se tiendront avec le corps électoral gelé", observe Laurent Chatenay ».

Insistons sur le point suivant : « La réforme retirée de l’agenda du Parlement. Faut-il imaginer, par conséquent, que les formations politiques calédoniennes reprennent les discussions de zéro, sans même s’appuyer sur l’accord du 12 juillet ? L’État martèle, depuis son rejet par le Front, que ce document doit rester l’unique cadre de discussions. Les autres signataires veulent, eux aussi, conserver les acquis de Bougival, fruit de huit mois de négociations. "Les points de divergences sont connus, affirme Calédonie ensemble. Ils concernent principalement la place du peuple et de l’identité kanak, les conditions de dégel du corps électoral, et les modalités d’exercice du droit à l’autodétermination". Reste à voir si l’ouverture de ces sujets à la négociation pourra faire revenir le FLNKS autour de la table. Si ce n’est pas le cas, la réforme constitutionnelle telle que prévue par l’accord de Bougival devrait suivre son cours. Mardi, le gouvernement français l’a inscrite au calendrier du Parlement dès janvier. Avant de rétropédaler, quelques heures plus tard, conscient d’avoir "suscité l’inquiétude" de ceux qui, à l’image du PS, plaident pour un assouplissement du calendrier. Le texte a été retiré de l’ordre du jour prévisionnel ».

Le PS ferait ainsi, au moins un peu, la pluie et le beau temps sur ce dossier ; comme sur celui de la suspension des retraites et de la justice fiscale et sociale...

Enfin, pour clore (provisoirement) cette séquence, on peut regarder (avec tendresse ou rudesse, c’est selon) l’intervention (10 minutes) à l’Assemblée nationale de Tjibaou avant le vote de mardi soir.

https://www.facebook.com/watch?v=1959904191524119

Le 30 octobre, Le Figaro (avec l’AFP) annonce que le report des provinciales du Caillou a été largement voté au Sénat le mercredi 29.

https://www.lefigaro.fr/flash-actu/nouvelle-caledonie-le-parlement-acte-le-report-des-elections-provinciales-20251029?msockid=32b27833dc5c62a92e636e19dd5463a0

« Ce vote arrive in extremis : seule une promulgation du texte dans les tout prochains jours permettra de reporter au 28 juin 2026 "au plus tard" ce scrutin provincial qui devait initialement se tenir en novembre. La ministre des Outre-mer Naïma Moutchou a salué ce vote. "C’est une étape pour donner du temps, du sens et une direction claire au dialogue qui est engagé en Nouvelle-Calédonie l’adoption d’une autre loi, constitutionnelle cette fois-ci, qui permettrait de transcrire l’accord de Bougival, a-t-elle indiqué. Car derrière ces questions d’agenda se joue surtout le sort du fragile accord de Bougival sur l’avenir institutionnel de l’archipel, signé en juillet ».

Moutchou a tout compris.

Sans l’adoption de la loi, constitutionnelle cette fois-ci, qui permettrait de transcrire l’accord de Bougival, pas de dégel du corps électoral ; « C’est en partie [Je dirais surtout plutôt qu’en partie, PC] au nom de ce "dégel" que les partisans du texte prônent le report des élections provinciales ». Le FLNKS ne s’y trompe pas en organisant une manifestation vendredi 31 octobre à Nouméa face au haut-commissariat ; « Pour les opposants à la réforme institutionnelle, le report des élections est le signe que le gouvernement souhaite avancer au pas de course sur la réforme constitutionnelle ».

L’article rappelle (voir plus haut) cependant : « En inscrivant le projet de loi constitutionnelle à l’agenda du Parlement dès le mois de janvier mardi matin, avant de se raviser quelques heures plus tard, le gouvernement a lui-même suscité une certaine confusion ».

Le reste de l’article n’apporte rien de nouveau.

La presse du Caillou indique aussi, le 30 octobre en début de matinée, la large victoire « sans surprises » du report au Sénat.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/le-senat-confirme-le-report-des-elections-provinciales-1638175.html

Ce que n’indiquait pas l’article du Figaro, c’est que « Manuel Valls s’est immédiatement félicité du vote du Sénat sur sa page Facebook, en faveur d’un texte "soutenu par une majorité des partenaires, indépendantistes et non indépendantistes et, j’en suis convaincu, de la population". Mais l’ancien ministre d’État des Outre-mer va plus loin que sa remplaçante : il « estime que le processus mis en œuvre à Bougival doit être ajusté : "Il faut être capable d’avancer sur une reconnaissance affirmée de l’identité kanak, la fin du processus de décolonisation, l’éclairage de l’exercice du droit à l’autodétermination à travers le transfert possible des compétences régaliennes, ou encore les symboles de la Nouvelle-Calédonie" ».

Conclusion

Pas si long que ça, ce feuilleton, à peine deux Saisons ! Il est vrai que nous espérions, en tant que soutien de la position du FLNKS, qu’un miracle pouvait se produire… C’est donc plié, au moins sur le report des provinciales qui était le seul sujet de ce billet.

La seule inconnue qui reste est celle de l’avenir de l’accord de Bougival et surtout, son corolaire : Dégel or not dégel ?  Je ne suis pas sûr d’avoir tout compris à cet égard en rédigeant ce billet : Tjibaou feint de penser que le dégel ne pourra pas avoir lieu, même avec provinciales repoussées (c’est de bonne guerre : le report était selon lui inutile) ; que Metzdorf pense de même est plus curieux… Seule Moutchou a tout compris ; la confusion du gouvernement qui a reporté l’agenda de l’examen de la ratification de Bougival sème pourtant le doute.

Et en avant pour de nouvelles aventures : l’accord de Bougival, un peu, beaucoup ou passionnément corrigé, sera-t-il ratifié avant les provinciales ?

Notes

[1] Voir notre billet précédent du 20 octobre 2025,

Valls n’est (malheureusement ?) plus ministre des Outre-mer… | Le Club

[2] Elle n’a pas été nommée à la tête du gouvernement : je me suis lourdement trompé deux fois (ça m’arrive de temp en temps. Macron n’a sans doute pas été convaincu par mes arguments…). Voir les deux billets ; le premier du 5 septembre 2025 :

https://blogs.mediapart.fr/patrick-castex/blog/050925/l-accord-de-bougival-tombe-l-eau-si-bayrou-tombe-or-il-va-sans-doute-tomber

Le second du 9 octobre 2025 :

https://blogs.mediapart.fr/patrick-castex/blog/091025/braun-pivet-matignon-le-10-octobre-2025-pourquoi-pas-mon-petit-doigt-insiste

[3] Voir aussi, à la même date :

https://la1ere.franceinfo.fr/avenir-de-la-nouvelle-caledonie-est-ce-que-bougival-doit-etre-detaille-precise-je-demande-a-ce-que-nous-aillions-le-debat-propose-naima-moutchou-1629953.html

« Devant l’Assemblée nationale, mercredi 22 octobre, la ministre des Outre-mer a appelé les députés à voter la proposition de loi visant à reporter les élections provinciales calédoniennes. Dans le même temps, elle souhaite rouvrir le débat sur la portée de l’accord de Bougival, rejeté par le FLNKS . […] Cela étant dit, Naïma Moutchou souhaite poursuivre les discussions institutionnelles, en incluant tous les acteurs, y compris le FLNKS. "La signature de l’accord de Bougival a ravivé un espoir auprès de la population calédonienne. C’est vrai que tout le monde n’est pas à la table des discussions aujourd’hui (...). Le gouvernement souhaite ramener le FLNKS. J’ai dit que je ne souhaitais pas faire sans le FLNKS, pourvu que le FLNKS ne fasse pas sans les autres partis" , a-t-elle déclaré. Plaidant la voie du consensus pour permettre au Caillou de sortir de la crise économique et politique, elle laisse la porte ouverte au débat sur le compromis du 12 juillet dernier. "Est-ce que Bougival doit être détaillé ? Est-ce que Bougival doit être précisé ? Je ne demande qu’à ce que nous aillions le débat" [Je souligne, PC], a-t-elle indiqué à Emmanuel Tjibaou. "Je continue de penser qu’un chemin est possible, mais ce chemin n’est possible que dans le consensus" ».

Emmanuel Tjibaou (Gauche démocrate et républicaine, GDR) a pris la parole après Moutchou : « "Votre prédécesseur [Manuel Valls, NDLR] nous avait notifié lors de la signature qu’il [l’accord] serait ratifié à Nouméa avec le président de la République et le Premier ministre", a-t-il rappelé à la nouvelle locataire du ministère des Outre-mer. Sous conditions que les structures des partis aient validé le compromis signé entre l'État, les indépendantistes et les non-indépendantistes, a-t-il souligné. Ce que n’a pas fait le FLNKS. Le mouvement indépendantiste calédonien "demande la poursuite des discussions institutionnelles comme convenu avec votre prédécesseur", a martelé le député, rappelant sa position sur le report des provinciales : "Il faut appliquer la loi, il faut tenir les élections. Il n’y a plus d’état d'urgence, les routes sont ouvertes" ».

[4] Cet article du Point du 21 octobre nous avait échappé :

https://www.lepoint.fr/politique/exclusif-manuel-valls-le-macronisme-a-ete-la-negation-du-politique-21-10-2025-2601468_20.php

De même que sa reprise par la presse de Métropole, dont RTL, le 22 du même mois : « "Je n’ai pas compris la décision d’Emmanuel Macron" : évincé du gouvernement, Manuel Valls dénonce un "mélange de cynisme et de mesquinerie". Dans un entretien au "Point", l’ancien ministre des Outres-mer reproche à Emmanuel Macron et Sébastien Lecornu leur choix de ne pas l’avoir reconduit au sein de l’équipe gouvernementale ».

https://www.rtl.fr/actu/politique/je-n-ai-pas-compris-la-decision-d-emmanuel-macron-evince-du-gouvernement-manuel-valls-denonce-un-melange-de-cynisme-et-de-mesquinerie-7900556617

[5] C’est un peu hors sujet, mais cependant important : les rapports entre la Nouvelle-Calédonie et la Métropole sont de plus en plus étroits à certains égards.

Patrice Faure, ancien haut-commissaire en Nouvelle-Calédonie de 2021 à 2023 et actuellement directeur de cabinet d’Emmanuel Macron à l’Élysée, est nommé préfet de police de Paris (il connaît la maison, car il fut directeur de la police générale à la préfecture de Paris en 2016) en remplaçant Laurent Nuñez devenu ministre de l’Intérieur.

Voir l’article de Rédaction Outre-mer La 1ère, AFP, publié le 22 octobre 2025 :

Patrice Faure, ancien haut-commissaire en Nouvelle-Calédonie et préfet de Guyane, est nommé préfet de police de Paris

« Pour le dernier scrutin (du 12 décembre 2021), Patrice Faure se félicite du maintien du vote, alors que les Kanaks avaient décidé de le boycotter. Les mois suivants, Gérald Darmanin le charge de piloter les groupes de travail entre les indépendantistes et non-indépendantistes sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. À son retour de Nouméa, il est chargé de mission auprès du secrétaire général du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer, avant d’être nommé début 2024 directeur du cabinet d’Emmanuel Macron en remplacement de Patrick Strzoda ».

En outre, rappelons (voir le billet précédent) que Laurent Prévost, haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie de 2019 à 2021 avait été nommé, le 18 octobre, directeur de cabinet de la nouvelle ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou.

https://la1ere.franceinfo.fr/nouvellecaledonie/retour-en-terrain-connu-pour-laurent-prevost-nomme-directeur-de-cabinet-de-la-ministre-des-outre-mer-1634438.html

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