le Conseil constitutionnel a validé l’essentiel de la loi, en particulier le report de l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans. (lien vers sa décision : https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2023/2023849DC.htm )
On relève toutefois quelques réserves dans la décision. Tout d’abord, le point 27 relatif aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire et du droit d’amendement note que « les règlements des assemblées parlementaires n’ayant pas en eux-mêmes valeur constitutionnelle, la seule méconnaissance des dispositions réglementaires invoquées ne saurait avoir pour effet de rendre la procédure législative contraire à la Constitution. »
Ensuite, le point 65 qui concerne les documents joints au projet de loi précise que « la circonstance que certains ministres auraient délivré, lors de leurs interventions à l’Assemblée nationale et dans les médias, des estimations initialement erronées sur le montant des pensions de retraite qui seront versées à certaines catégories d’assurés, est sans incidence sur la procédure d’adoption de la loi déférée dès lors que ces estimations ont pu être débattues. »
En clair, le gouvernement et sa minorité parlementaire ont toute latitude pour piétiner les règlements des assemblées. Quant aux ministres, ils peuvent mentir comme des arracheurs de dents. Tout cela, sans que le Conseil constitutionnel ne s’émeuve le moins du monde.
Doit-on être surpris de la décision de celui-ci ? pas du tout si l’on considère la composition de cette institution, ses « sages » n’étant que l’émanation du pouvoir en place. Quant à leur mission dans laquelle ils s’investissent avec un empressement indiscutable et un zèle indéniable, elle consiste à défendre les intérêts du capital et à piétiner les droits de la grande majorité de la population.
Souvenons-nous, dans les années 2000, les banques ont fait souscrire aux collectivités locales et aux hôpitaux publics des emprunts toxiques spéculatifs générateurs de surcoûts faramineux pour ces emprunteurs. Lorsque les collectivités ont attaqué les banques en justice et ont obtenu gain de cause, le gouvernement de l’époque (celui de Hollande…) s’est empressé de faire voter une loi de validation rétroactive de ces emprunts toxiques que les tribunaux jugeaient pourtant non conformes en condamnant les banques. Si le Conseil constitutionnel a annulé une première mouture du projet de loi en décembre 2013 après avoir été saisi par des parlementaires (voir mon papier à ce sujet : http://www.cadtm.org/Une-premiere-victoire ), il s’est bien gardé de relever les motifs d’inconstitutionnalité qui auraient définitivement mis un terme à ce projet de loi qui est revenu par la fenêtre et a été voté quasiment en des termes identiques que le précédent (voir mon article de l’époque : https://blogs.mediapart.fr/patrick-saurin/blog/280514/la-forfaiture-du-senat-ou-la-honte-de-la-republique). En effet, pour être considéré valable, une loi de validation rétroactive doit obéir à « un impérieux motif d’intérêt général ». Or, en considérant que l’intérêt des banques équivalait à l’intérêt général, le gouvernement, l’Assemblée nationale, le Sénat et le Conseil constitutionnel ont commis à l’époque une grave forfaiture.
Moralité de ces histoires : la constitution actuelle et ses institutions ne sont pas des outils appropriés à l’exigence de justice et aux luttes sociales des travailleuses et des travailleurs. Leurs vrais outils, ce sont la grève, les occupations, les blocages, la désobéissance, en un mot tout ce qui est à même de renverser le capital et son monde.
Alors, rendez-vous nombreuses et nombreux dans les actions à venir contre l’infâme loi retraite de la macronie.