Comment expliquer l'éclosion de la religiosité aux USA qui s'étend au monde entier sans éviter les bureaux des présidents George Bush et Nicolas Sarkozy ni l'intrusion du pasteur de Barack Obama dans le débat électoral américain actuel. Un débat où le candidat Obama perd soudain l' air franc auquel le public s'était habitué. Les débuts de la république américaine ont été observé de près par les européens.
John Dickinson, avocat de Pennsylvanie et délégué à la convention constitutionnelle expliquait en 1768 que le mélange de la religion et de la politique ne pouvait être que source de troubles. Toute l'histoire témoigne du sang que ce mélange avait fait couler. En fait, les fondateurs de la république ont eu à coeur de veiller à ce que l'état soit préservé de la corruption de la religion autant que la religion le soit de la corruption de l'état, sans rien clarifier de plus.
Alexis de Tocqueville observait au début deu 19è siècle que la chrétienté exerçait plus de pouvoir sur les âmes en Amérique que nulle part ailleurs. Il parlait d'un ascendant paisible qu'il approuvait et attribuait à la séparation complète entre l'église et l'état. Selon lui, le religion florissait aux Etats-unis parce que le gouvernement ne s'en occupait pas. Aujourd'hui, de nombreux américains aimeraient que la religion reprennent l'ascendant sur l'état et les discours et attitudes de Georges Bush laissent songeurs: ils sont en train d'y arriver. On est loin d'un George Washington qui fit de la liberté de conscience un droit immuable du citoyen. Garry Wills, dans son livre, Head and Heart: american christianities paru chez Penguin books, nous raconte tout cela.

Il rappelle fort opportunément que les fondateurs de la république n'étaient pas des chrétiens évangéliques et que la prépondérance de leurs textes en fait clairement des partisans du pluralisme et de la tolérance. Mais il souligne aussi l'évolution et la facilité avec laquelle, aujourd'hui, on parle "chrétien" tout en agissant "corportate", l'aisance avec laquelle on affiche les valeurs chrétiennes tout en cachant ses perversions sexuelles et autres.
La chrétienté se porte-t-elle comme un masque ? Ce masque qui au début de la république Vénitienne, permettait toutes les libertés d'action d'expression pour finir par tuer la république et imposer la dictature. Un masque et un dogme qui facilitent la gouvernance en lui donnant des airs de bonne gouvernance, bien sûr.
Le "Bill of rights" des Américains et les droits de l’homme ne sont pas une oeuvre chrétienne mais bien le fruit des lumières et de la raison...récupérés, ensuite, par l'église qui n'en est pas devenue plus tolérante pour autant. Le combat des partisans de la raison et de la liberté de pensée pour la séparation église-état ne les empêche-t-il pas de voir la peur se répandre dans le monde ? Pas la peur du cléricalisme. Pas la peur du dogme. Non, la peur de vivre qui touche les gens qui manquent de confiance en eux. Une peur qui affecte tous les acteurs de la société et incite les gens à chercher des repères et donc souvent, des dogmes. Je crois que cette peur fait plus de ravages à l’humanité que le terrorisme aux nom de ces mêmes dogmes.
Que voit-on et que fait-on de cette peur masquée ? Nous ne la yoyons que trop peu. Individuellement, nous la refoulons. Pourtant, elle ne se voile pas la peur: elle est au journal télévisé et il n’y a pas de série télévisée qui ne mise dessus pour faire de l’audience (series policières ou hospitalières: le danger de mort et de criminalité est au coeur des scénarios). Et si ces refoulements étaient autant de masques ? C’est à coup de refoulement que nous quittons nos pulsions bestiales pour nous humaniser, semble-t-il. Le développement de l’humanité passerait-il par une mascarade ? En latin, le mot masque se traduisait par Persona et la parenté de ce mot avec Personnalité n’est sans doute pas fortuite. Cela étant, de cette quête d’humanité à la “comédie humaine”, il n’y a qu’un pas dont les masques ne sont pas absents non plus. Le même pas que de Persona à Personnage et Personnage politique, par exemple.
Comment développer une société qui permette l'épanouissement de la “persona-lité” sans tomber dans la comédie humaine de la pensée unique et des faux semblants, ces placebos sociaux qui rassurent un peuple peureux, peu heureux ? Heureusement, il y a Mediapart. Merci pour cet espace de liberté, de tolérance et d'échange qui tissera, je l'espère, une toile rassurante et non sécuritaire. Mais il y a du travail. Savez-vous qu'un mouvement laïc ne peut plus pendre la parole au parlement européen s'il n'est accompagné d'un mouvement confessionnel ? Inquiètant, non ? Et vu les positions du Président Sarkozy sur la laïcité et l'église, je doute que sa présidence permette de corriger cela.
Rassurez-moi.