Bien d'accord avec Paul Quilès et deux de ses arguments: la prochaine présidentielle ne sera pas facile même si la démonstration de la corruption de ce régime a pu se faire; en aucun cas les sondages prédictifs ne sauraient constituer un guide pour la construction d'une alternative. Mais justement, et parce que l'agenda du PS veut que nous en débattions ce samedi, les Primaires apparaissent comme une garantie contre les craintes énoncées. Tout au long de mes pérégrinations dans les sections socialistes au cours de ces dernières semaines (celle de Réalmont fut particulièrement intéressante), j'ai pu vérifier combien était opportune la procédure que nous allons inventer. Et ce pour trois raisons au moins:
La première c'est la mobilisation citoyenne que les Primaires peuvent susciter surtout dans le contexte de la dégradation de l'esprit public et de la mobilisation sociale pour les retraites. Ce droit nouveau donné à tous les électeurs de pouvoir intervenir dés juin 2011 en amont des stratégies d'Etat-major des partis, des instrumentalisations de la scène médiatique et sondagière est un atout pour la gauche. L'élection présidentielle a été faite contre elle et elle n'a qu'exceptionnellement surmonté ses divisions dans cette épreuve. Alors, que ses partis aujourd'hui soient silencieux sur leur participation, rien de moins étonnant; bien que des voix se soient élevées tant à Europe Ecologie qu'au Parti Communiste pour suggérer de l'envisager.
Et c'est là une deuxième raison d'espérer. Oui la logique des Primaires entraîne celle de la parlementarisation du régime. On sait trop combien les deux scrutins sont hélas soudés l'un à l'autre, la Présidentielle tenant les législatives. La démocratisation de la première aura un effet forcé sur les secondes. L'engagement des partis de gauche dans les Primaires ouvrira la possibilité d'une discussion au grand jour sur la répartition des circonscriptions pour maximiser les chances de la gauche dans les Législatives. C'est le socle d'un contrat de législature, point de passage vers une 6° République.
Enfin, le troisième intérêt des Primaires c'est de permettre une repolitisation de la société en fonction de ses attentes et de ses comportements en temps réel.
Evidemment que le projet est indissociable de la consultation ouverte et populaire qui le nourrira et l'enrichira. Peut-on se satisfaire des pratiques anciennes qui voyait le PS et ses alliés écrire des programmes de gouvernement auquel le candidat substituait ensuite le sien. Désormais la participation de millions de personnes au choix des candidats se fera sur le fond d'un débat d'idées que ceux-ci devront assumer publiquement à ce stade. C'est une pratique qui peut permettre de faire émerger des sujets (tel la 6° République) qui pouvaient rester jusqu'ici refoulé par le mode fermé d'investiture que nous connaissions.
C'est donc bien un nouveau parti socialiste qui est à l'horizon des Primaires. Les liens qu'ils tissera avec les citoyens dans cette étape seront pérennes si ses militants savent parler à tous les Français, réanimer le goût pour la délibération, organiser l'action des sympathisants les plus incertains. Un des problèmes structurels des élections d'aujourd'hui c'est le poids de l'abstention, de l'électorat flottant, de la décision aléatoire et de la désorientation. Les partis qui sauront faire confiance à tous leurs électeurs potentiels mais trop souvent perdus, prendront une longueur électorale d'avance.
Mais ce ne seront plus en effet ces partis "éclairés" ou "d'avant-garde" où quelques milliers d'adhérents décidaient unilatéralement du bon programme et du bon candidat pour les millions de citoyens. A prendre ou à laisser, même si ces partis ont une sociologie, un âge moyen et un genre en total décalage avec la société. Celle-ci a déjà beaucoup changé. Il est vital que les traditions de la gauche organisée se transforment dans une vaste rénovation, ici comme en Europe. C'est ce qu'encourageront les Primaires comme toutes les mesures qui les accompagnent.