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Billet de blog 4 juillet 2010

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De la démocratie en socialisme

Le PS a donc tenu sa convention sur sa rénovation ce samedi à Paris. C'est l'aboutissement d'un exercice devenu assez rare dans les partis, de délibération militante effective mais aussi d'un très long travail d'élaboration et de rapprochement des opinions.

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Le PS a donc tenu sa convention sur sa rénovation ce samedi à Paris. C'est l'aboutissement d'un exercice devenu assez rare dans les partis, de délibération militante effective mais aussi d'un très long travail d'élaboration et de rapprochement des opinions.

Les principaux éléments du texte soumis au vote étaient l'organisation des Primaires pour les présidentielles, la mise en place d'un régime de non cumul des mandats, la définition d'une nouvelle organisation des congrès, l'amélioration des règles favorisant la parité et la diversité, l'installation d'un état de droit dans le parti.

C'est dans cet ordre décroissant que le texte adopté par le Conseil national le 8 juin a fait l'objet de 365 amendements (présentés sur un tableau de 70 pages) dûment examinés et votés par les Fédérations. 55 se sont livrées à cet exercice et ceux de 23 d'entre elles ont été retenus. C'est une commission dite des résolutions qui les a examiné vendredi soir à la veille de la Convention. Cette commission réunissait les responsables de la direction du parti, toutes les sensibilités ainsi que les représentants des Fédérations les plus propositionnelles. Elle n'a pas retenu les amendements qui sortaient par trop du cadre initial (par exemple sur la 6° République) tracé par le référendum militant du 1° octobre 2009. Par contre elle a débattu de ceux qui soulevaient de vrais problèmes d'interprétation ou d'application de la rénovation. Ce fut ainsi le cas sur les Primaires au sujet desquelles Paul Quilès avait largement exprimé ses désaccords (ici même ce jeudi). Il les a exposé encore une fois devant la commission où il était présent. Celle-ci a finalement décidé d'intégrer un élément important de sa proposition: le mandat donné "à la direction nationale du PS pour prendre les contacts nécessaires avec nos partenaires, dans le but d'élaborer une plate-forme commune et d'engager des discussions afin d'évaluer la possibilité d'une candidature de rassemblement désignée par les Primaires".

Le débat a néanmoins repris le lendemain à la Convention sur ce point comme sur les autres en tenant compte de l'intégration des amendements. Ainsi Paul Quliès et Marie-Noelle Lieneman décidèrent-ils de voter le texte final alors qu'ils avaient voté contre lors du Conseil national un mois plus tôt.

C'est donc un exercice complexe mais qui devrait forcer la considération que ce travail délibératif aboutissant à à une véritable synthèse.

Mais celle-ci n'aurait sans doute pas été possible sans la longue patience et la totale détermination d'Arnaud Montebourg qui, en tant que secrétaire national à la rénovation a ouvert ce chantier depuis mars 2009. Ce fut d'abord une commission de ce secrétariat qui a instruit, avec le concours de la Fondation Terra Nova et la participation des différents courants du PS le dossier des Primaires. C'est peu de dire qu'elles soulevaient à l'origine plus de réticences et même d'hostilités que d'accords. Néanmoins un rapport de synthèse a pu être remis à Martine Aubry en mai 2009. Et la Première secrétaire a ratifié avec quelque solennité la totalité des éléments de ce rapport lors de l'Université d'été de La Rochelle à la fin du mois d'Août. Puis ce fut le référendum du 1° octobre auquel participèrent 90.000 militants qui donnèrent alors un mandat impératif au Bureau National du parti pour mettre en oeuvre les réponses aux onze questions qu'ont leur avait posées et auxquelles ils avaient répondu avec une moyenne de 70% de votes favorables. Une commission de cette instance a alors été mise en place sous l'autorité d'Arnaud Montebourg; les représentants de toutes les sensibilités sans exception y participèrent assidûment à raison d'une réunion hebdomadaire (soit au total une soixantaine d'heures de réunion). Des délégués du PRG et du MRC s'y sont joint un temps. C'est là que se sont réellement affrontés puis rapprochés les points de vue. La règle de la discrétion, soit d'une discipline collective pour ne pas médiatiser les divergences avant qu'elles ne soient arbitrées, a été une condition majeure de la réussite du travail collectif. Car c'est bien à une élaboration commune qu'a abouti cette démarche. Sur bien des points Arnaud Montebourg a amendé son projet initial, en particulier sur les Primaires. C'est ainsi que le Bureau national a pu ratifier à la quasi-unanimité le texte final le 1° juin. Et que la voie d'un large soutien chez les militants a été ouverte. Ils ont été moins nombreux à voter le 24 juin (57.000) mais plus nombreux à ratifier le texte (77%). On a dit ici, au gré des débats fédéraux, comment cette révolution apparaissait comme de velours: comme si l'avènement de réformes tant attendues démobilisait ses plus ardents partisans.

Car c'est un combat d'une décennie qui a franchi un pallier avec cette Convention; celui lancé par Arnaud Montebourg dés 2001 en faveur d'une 6° République et d'une refondation du socialisme. L'idée était (et reste) que la question démocratique fait intégralement partie de la question sociale; et que réforme de la République et réforme du Parti socialiste sont étroitement liées. Durant cette décennie, cette idée fut moquée, refoulée, trahie dans des congrès et élections présidentielles. L'obstination politique de Montebourg fut la condition majeure du succès d'aujourd'hui. Mais le régime de démocratie interne du PS fut aussi un atout capital dans cette bataille. Le résumé donné ici en est la scrupuleuse illustration. L'ensemble est de nature à convaincre que les convictions personnelles d'un encore jeune dirigeant peuvent devenir force collective et que les partis de gauche, s'ils savent se transformer, sont des outils incontournables pour changer la société. Tocqueville le disait déjà: "Dans les démocraties, chaque génération est un peuple nouveau."

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