Manuels Valls craint que les Primaires "se transforment en un grand apéro géant" si les "trois principaux présidentiables (Aubry, DSK, Royal)" ne s'affrontent pas publiquement préférant un accord en amont. La première parade contre ce risque c'est qu'il n'y ait pas de congrès du PS préalable à la consultation. La deuxième c'est l'engouement populaire qu'elle peut susciter. Sur ce point, un sondage CSA /LCP Assemblée Nationale des 2 et 3 juin apporte un éclairage très intéressant.
43% des 865 personnes interrogées inscrites sur les listes électorales disent avoir envie de participer aux Primaires dans les conditions fixées par le rapport Montebourg (payer 1€ et signer une déclaration d'adhésion aux valeurs de la gauche). Cela veut dire que 15 millions d'électeurs pourraient aller voter ce qui serait un record absolu dans les pays connaissant cette procédure. Mais le profil sociologique de cet électorat est encore plus intéressant: ce sont les femmes (45%) plus que les hommes, les jeunes de moins de 30 ans (52% et 62% des étudiants) plus que leurs aînés (plus on est âgé moins on a envie de participer), les ouvriers (50%) et les employés (48%) plus que toutes les autres catégories sociales, les non ou peu diplômés (46%) plus que les bacs plus 2 et au-delà qui sont les plus nombreux à penser qu'ils iront "certainement ou probablement voter". Le caractère populaire des Primaires semblent donc acquis tant par le nombre que par la sociologie de l'électorat. C'est une première pierre apporté par cette innovation à la construction d'un nouveau rapport à la politique pour une masse de Français.
Mais les indications politiques que donne le sondage n'en sont pas moins intéressantes. 62% des électeurs de gauche ont l'intention de participer ; dont 71% de sympathisants socialistes mais aussi et surtout 51% des électeurs proches de l'extrême-gauche et 50% proches des Verts et Europe Ecologie. Voilà qui peut donner du grain à moudre à ceux qui, dans les formations de gauche autres que le PS, estiment qu'il y a matière à débat de fond: si les Primaires deviennent un scrutin de sélection véritable des candidats vu l'engouement qu'elles susciteraient, ne vaut-il pas mieux y voir les courants de toute la gauche s'y confronter plutôt que de se contenter d'un accès aux médias et d'un score moyen ou pire au premier tour de la Présidentielle ? En outre une telle participation pourrait déboucher sur la prospective de la représentation parlementaire de chaque sensibilité, arbitrée par les électeurs sympathisants de gauche. Les législatives étant soudées (hélas) aux présidentielles, il est légitime qu'une gauche désireuse de signer un contrat de législature dans le cadre d'une République rénovée traite au grand jour de la question du nombre de députés devant la représenter. C'est une sorte de proportionnalisation du scrutin présidentiel qui va jusqu'à triompher de la loi majoritaire aux législatives.
Si cela se faisait il est évident que les Primaires ne sauraient être de ratification, quelle que soit la force du "pacte" qu'auraient passé les "grands" candidats socialistes à l'élection. Il faut donc donc pousser cet avantage: les Primaires sont un remarquable instrument d'ouverture à la société et de rassemblement si tout la gauche s'en empare. Elles sont en outre le seul outil efficace pour gagner gagner contre Sarkozy. Donc ce sera au printemps 2012, à la fois "grand apéro géant" et démocratie pour tout le monde !