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Professeur Emérite à l'Université de Montpellier. Doyen honoraire de la Faculté de Droit. Président de la Convention pour la 6° République (C6R).

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Billet de blog 10 avril 2016

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Des nouvelles du bunker

Ce samedi 9 avril se tenait un Conseil National du Parti Socialiste. Il était annoncé comme déterminant pour l'avenir de la Primaire à gauche. Il s'est conclu par la vote à l'unanimité d'une motion fixant les conditions de participation des socialistes. Cette unanimité ne reflète pas le débat qui s'est déroulé l'apres-midi à huis clos et laisse perplexe sur la suite.

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A huis clos et au troisième sous-sol de l'Assemblee Nationale où il a fallu plus d'une heure pour que tous les membres du CN puissent y entrer (le MJS est resté à la porte comme les journalistes). Cette allure de bunker ou d'abri anti-atomique allait bien avec la tonalité des débats qui ont précédé le vote unanime de la motion.

Rien ne laissait présager cette issue. Les ténors de la direction usèrent d'un ton à la fois condescendant et autoritaire pour exposer leur ligne qui consistait à douter des conditions en cours de négociation avec les partenaires de gauche. Des conditions que la gauche du parti (la motion B: "A Gauche pour gagner") avait précisé tout au long de la semaine (elle est représentée à la coordination de la Primaire) et le matin même au cours d'une assemblée de la soixantaine de ses représentants au CN. Ces conditions étaient les suivantes, résumées par Christian Paul dés l'ouverture du débat:

- Concevoir une étape pour un débat citoyen dans tous les Departements, qui se concluerait par une Charte adressée aux candidats de la Primaire invités  à  y reconnaître l'expression d'une parole citoyenne. Pour la direction, Christophe Borgel dit que cette proposition était "incohérente" car on ne pouvait imaginer quelque texte que ce soit qui s'impose aux candidats.

-Convenir d'un calendrier pour le scrutin, n'allant pas au-delà de la premier quinzaine de décembre. Ce point était déjà acquis ; il avait fait l'objet de la principale avancée de deux mois de négociations dans la coordination de la Primaire.

- S'engager dans le traitement des questions d'organisation et donc de la mobilisation des militants socialistes dés maintenant. L'expérience de 2011 enseigne  qu'il faut du temps pour régler les questions matérielles garantissant la tenue d'un scrutin loyal et sincère. C'est une condition de la réussite de la Primaire et de la participation massive des citoyens ainsi mis en confiance. Juin sera donc déjà trop tard pour franchir cette étape. Or Jean-Christophe Camabadelis a bien précisé qu'il faudrait « attendre Juin pour définir les formes de participation ».

- S'accorder sur le principe du rassemblement des candidats autour du vainqueur de la Primaire. C'est le problème non dit de la participation de François Hollande. Mais l'accord est facile sur ce point au PS tant la gauche de celui-ci pense qu'il s'expose ainsi à être battu alors que la direction croit que c'est le meilleur moyen pour Hollande de se  re-légitimer un tant soit peu.

- Accepter la pluralité des candidatures socialistes dans cette Primaire ouverte. C'était le principal point d'achoppement. Durant toute la semaine aussi bien Bruno Le Roux que Jean Christophe Cambadelis (sur Rfi-Libération le 6 avril) avaient déclaré qu'ils ne voulaient « qu'un seul candidat du PS pour la Primaire ». C'est sur ce point que le recul fut total et rapide au terme de ce CN après une plutot brêve suspension de séance. Il permit le vote unanime proclamé peu après.

Ce recul de la direction du PS interroge, tellement le Premier secrétaire avait multiplié les considérations négatives dans son intervention concluant les débats : «C'est une erreur politique d'avoir mis la question des Primaires à l'agenda médiatique». «La dispersion de la gauche, sans parler de la candidature de Melenchon, rend très difficile la tenue de primaires. Je vais privilégier des rencontres bilatérales avec le PC et les Verts pour régler la question du ralliement des candidats au vainqueur». Puis un début de concession curieusement formulée : «La Primaire n'est pas un problème de statuts mais un problème politique. Faisons l'accord sur une motion et tout le monde sera content (...) Donnez-moi le nom du candidat de la motion B, cela facilitera la synthèse».

La seule question non résolue de la direction du PS c'est la candidature de François Hollande et son acceptation éventuelle d'un zeste de Primaire le plus tard possible. D'ici là, la voie royale sera celle de "L'Alliance Populaire" dont la première grande manifestation nationale devrait se tenir la veille du premier tour de la Primaire si les dates arrêtées pour l'instant resistent au temps. Ce dernier gadget reste particulierment indéfini  encore à ce jour et n'a fait l'objet d'aucun développement lors de ce CN. Peu importe, il est la vraie doxa de Solférino d'autant plus "hors sol" que rien n'est dit sur le développement des mobilisations en cours. Pas un seul mot n'a été consacré durant toute cette après-midi aux manifestations ou au mouvement des "Nuit Debout" qui gagnent la France entière. Le Parti Socialiste s'engage dans un processus de bunkérisation qui aggravera la crise qui le mine.

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