Mardi soir, Arnaud Montebourg, était dans l'Hérault pour "booster" le débat sur le rapport "Rénovation du PS" dont il est responsable. C'est la section socialiste de Frontignan qui l'avait invité depuis plusieurs semaines déjà, invitant aussi tous les militants intéressés du Département à la réunion. La Fédération de l'Hérault n'a rien trouvé de mieux que d'organiser le soir même à la même heure une assemblée générale concurrente dans une commune de l'agglomération de Montpellier. Résultat: 250 militants à Frontignan, 80 à Mauguio. C'est une première leçon administrée à ceux qui croient toujours pouvoir rester dans le sillage de Frèche, pourtant exclu définitivement du parti.
Un Frèche qui continue à se lâcher et à rendre tous les jours plus difficile le redressement du socialisme démocratique dans cette région. Dimanche dans Midi Libre il déclarait entre autres: "Aubry est d'une intelligence moyenne, comme les bons élèves de l'ENA. Elle ferait un excellent Premier ministre. Président, cela demande une intelligence qu'elle n'a pas." Quant à la position du PS sur les retraites, il l'a juge "poujadiste. Moi je serais pour une retraite échelonnée de 55 à 70 ans". Et pour ce qui est des socialistes locaux qui lui sont restés fidèles (et qui ont été exclus), les choses sont on ne peut plus claires en ce qui concerne son éventuelle succession (il vient d'un subir une nouvelle opération de la hanche): "Je suis d'accord avec Navarro (ex-premier secrétaire de la Fédération de l'Hérault, sénateur, vice-president de la Région) pour désigner Bourquin (Président du Conseil Général des Pyrénées-Orientales, député et vice-président de la Région). Les Gardois et les Audois, on les dégagera. Le plus dur ce sera avec les Audois mais ils seront seuls, car d'ici là on aura fait élire Alary (Président du Conseil Général du Gard, vice-président de la Région) comme sénateur-maire de Nîmes". Il va sans dire que, dans ce contexte, le cumul des mandats "c'est secondaire ! En soi, je suis pour mais le jour où il y aura une loi". Fermez le ban et ne changeons rien au féodalisme méridional.
Dans ce contexte, il n'est pas étonnant que les militants aient préféré venir débattre avec Montebourg quoique traité de "pitre" par le même président de Région. En présence d'Hélène Mandroux, maire de Montpellier et de Pierre Bouldoire, maire de Frontignan mais aussi de plusieurs autres élus, maires ruraux et conseillers généraux, il a lancé le débat en situant la rénovation proposée dans le cadre d'une refondation de la politique et des rapports de la gauche avec les Français dans leur ensemble. Il fait le pari que les cinq familles de cette gauche qui se déchirent à chaque élection présidentielle (de la gauche anti-libérale à la gauche écologiste) peuvent désormais se retrouver. Les Primaires sont bien sûr l'instrument de ces retrouvailles et l'aggravation de la crise sociale fera que ce qui n'est pour l'instant qu'une procédure de désignation d'un candidat devienne un processus de rassemblement politique et même idéologique. Le projet est donc étroitement lié aux Primaires. Et le Parti socialiste devra peaufiner le sien à l'occasion de sa Convention extraordinaire en avril 2011. Montebourg plaide ainsi pour des mesures plus précises sur des sujets comme la mise sous tutelle des banques, la sanctuarisation des services publics, la nationalisation de certaines ressources essentielles. "C'est l'Etat-providence qu'il faut redéfinir dans une période où l'Etat tout court est attaqué par les marchés financiers". Les mesures que vont voter les adhérents ce soir, y compris celles sur une "nouvelle gouvernance du parti" ne sont donc pas de simples révisions des statuts existants comme beaucoup voudraient le croire. L'exemplarité qui est préconisée dans le domaine de la limitation du cumul des mandats (ne pas attendre une loi et l'appliquer aux socialistes dés 2012) est l'engagement dans de nouvelles pratiques de la démocratie représentative et de la responsabilité politique. Tout ceci fait système en ouvrant un nouveau cycle succédant à celui de quarante ans du congrès d'Epinay (rendant possible en 1971 la rupture avec la SFIO).
Un débat fourni a suivi, confirmant ces retrouvailles militantes avec la délibération et parfois l'imagination d'une autre gauche et d'un "avenir qui dure longtemps" comme disait joliment Althusser. Il est vrai qu'on était entre "rénovateurs", loin, très loin des tartarinades de Georges Frèche et des contorsions de ses alliés. On était aussi à la veille de l'ouverture à Frontignan du 13° Festival international du roman noir qui aborde, comme on le sait, le destin de chacun et l'histoire de tous, la mémoire intime et sa projection collective. Un vrai programme pour tous les rénovateurs.