Dans une interview qu’il accorde au Parisien, le ministre de l’Education nationale procède avec une argumentation décidément de plus en plus usuelle dans le discours politique : la justification des choix par des éléments de réalité largement manipulés, déformés, exagérés…
Les fermetures de classe
« Il ne peut pas y avoir de classes à trois élèves. »
Une telle affirmation insinue que les fermetures ne seront faites que dans des écoles où elles s’imposent par l’évidence des effectifs. Or la réalité des situations où des fermetures vont être faites est loin de cela ! Dans beaucoup d’écoles, elles entraîneront des classes très chargées, bien au-delà de la moyenne nationale. La réalité de notre école, ce n’est pas que nous risquerions d’y maintenir des classes avec 3 élèves ! … la réalité de notre école, c’est que parmi les pays européens, la France continue à avoir un nombre d’élèves par classe largement supérieur à celui des autres pays… et cela n’a pas changé malgré les dédoublements voulus par Blanquer.
La chute démographique que nous connaissons actuellement aurait pu être l’occasion d’améliorer sensiblement la situation et de permettre à la France d’avoir des effectifs de classe se rapprochant de la moyenne européenne. C’est le choix inverse qui est fait… avec tout ce qu'il représente en termes de diminution du temps de cours pour les élèves et d'impossibilité de formation permanente pour les enseignants (pas de remplaçant ... pas de départ en stage...)
Le remplacement
« On perd chaque année, 15 millions d’heures non remplacées à cause d’absences de courte durée. »
Le ministre parle du second degré … où il propose que les enseignants d’une autre discipline puisse remplacer leur collègue absent. Mais son chiffre est mensonger. La Cour des comptes a chiffré le nombre d’heures d’absence de courte durée non remplacées : 2 millions. Ces 2 millions d’heures suffisent à constituer un problème dont il faut rappeler qu’il est étroitement lié avec les suppressions de postes. La pire période pour le remplacement a été celle qui a suivi les mesures de suppression voulues par Sarkozy.
« Pour que cela marche, il faudrait qu’un quart des professeurs accepte »
C’est sous-entendre que la résolution du problème reposera sur le volontarisme enseignant. C’est oublier que dans la plupart des cas cela sera impossible pour des questions organisationnelles. Sans compter que faire cours au pied levé sur un sujet non préparé n’est pas la meilleure garantie qualitative.
Quand au fait de se débarrasser d'un tour de main du remplacement des congés long en disant que "la situation est moins aiguë"... elle témoigne du mépris dans lequel sont tenus les collégiens et lycéens qui parfois pendant une longue période sont privés d'une discipline et les élèves des écoles primaires concernés par des absences non remplacées de plusieurs semaines consécutives!
Bel exemple d'instrumentalisation de la réalité : gonfler les absences de courte durée en multipliant par 7fois et demi le chiffre parce que cette question sert la propagande qui veut transformer la revalorisation en attribution d'heures supplémentaires mais ignorer les absences de longue durées comme une quantité négligeable...