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Billet de blog 9 août 2008

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Marciac, samedi 9 août 2008. J.I.M. est à mi-parcours. Bilan de la première semaine du festival de jazz.

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Déjà plusieurs jours après mon premier billet envoyé sur le site lundi. Il faut dire que si les organisateurs ont décidé l’installation d’un superbe parquet dans le chapiteau, les bornes wifi ne sont pas très répandues ici ! Aucun bar n’en offre en accès libre, l’office du tourisme propose deux postes de PC pour internet à 50 cents le quart d’heure, sans aucune possibilité de connexion en wifi avec mon portable, l’hôtel des Comtes de Pardiac ne propose son accès qu’aux clients de l’hôtel… et de plus la patronne est d’une amabilité qui tranche singulièrement avec la bonhomie et l’accueil couramment répandu dans le Gers. Reste heureusement la salle de presse aimablement ouverte pour le rédacteur de Médiapart, hélas très peu connu ici ... Edwy, il va falloir venir à la conquète du Gers, en plus on y mange délicieusement !
Une semaine d’un festival inégal, avec des surprises comme l’annulation du concert de jeudi par crainte de tempête. Première dans l’histoire de Jazz in Marciac ! Serait-ce les ravages du principe de précaution ? La quête du risque zéro que l’idéologie dominante nous inflige dans tous les domaines ? Les effets de la mini-tornade qui a dévasté le village d’Hautmont dans le Nord ? Ou encore les frayeurs du sous-préfet du Gers lors de l’évacuation du chapiteau pendant le concert d’Omar Sosa mardi soir ?
Pourtant cette évacuation s’était déroulée sans aucune panique, dans la bonne humeur même parmi les spectateurs qui s’étaient réfugiés en masse … dans les toilettes du stade ou dans l’usine désaffectée de meubles. Et le concert avait repris une heure plus tard, après que de nombreux spectateurs aient essoré T.shirt, chemises.
Tant pis pour le quartet d’Émile Parisien, ancien élève de Marciac, qui pour la première fois, obtenait la grande scène du chapiteau, pour la formation de Manu Katché et pour la prestation de Milton Nascimento avec l’Orchestre du Conservatoire National de Toulouse.
Que fut donc cette semaine ? D’abord une impression de moindre fréquentation à l'exception de quelques journées.
Et quelques déceptions musicales : Omar Sosa en premier lieu ! Serait-ce les effets d’une déconcentration provoquée par la nécessaire évacuation du fait de l’orage impressionnant qui bouscula la toile du chapiteau ? Pourtant magnifiquement accompagné par Mola Sylla, à la voix envoûtante, Childo Tomas à la basse, Léandro Saint-Hill au saxophone et à la flûte, et Julio Barreto à la batterie. Spectacle intitulé «Afreecanos », des compositions aux mélodies africaines, rythmes accrocheurs, tout empreint du mysticisme qui l’habite, et qui avait fait merveille lors de son précédent passage dans le Gers. Mardi soir, il manquait quelque chose pour enlever la foule, spectacle certes agréable mais sans plus. Tout comme Dee Dee Bridgewater, le même soir. Elle a fait déplacer les foules, le chapiteau était plein, mais elle n’a pas su profiter de cet a-priori favorable, pour soulever l’enthousiasme.
Autre déception, Herbie Hancock ! Malgré une performance exceptionnelle de son guitariste béninois, Lionel Loueke, superbe dans une interprétation toute personnelle de « La vie en rose » ! Malgré Dave Holland, contrebassiste inouï, un Chris Potter au saxophone. Par contre, Sonya Kitchell, chanteuse apparemment pas dans son meilleur jour, et Amy Keys, chanteuse de soul à la voix chaude, ne furent pas à la hauteur. L’ensemble ne brilla pas par sa cohérence, et au delà des performances individuelles de fameux chorus, une belle envolée d’Herbie Hancock, on ne trouva pas le magnifique enthousiasme de la première partie de soirée avec le Devil Quartet de Paolo Fresu.
Venons-en aux trésors !
Oui Paolo Fresu, avec Bebo Ferra à la guitare, Paolino Dalla Porta, à la contrebasse, Stefano Bagnoli à la batterie, nous avons touché l’enthousiasme collectif, voilà ce que c’est un groupe avec une âme ! Alternance de morceaux à l’énergie salutaire et de compositions planantes. Le troisième morceau débute avec un solo de batterie surprenant, suivi par un autre, dans lequel Paolo Fresu nous offre un son envoûtant comme une adresse céleste, anticipant sur la nuit des étoiles ?
Autre soirée magique, mais attendue par les fidèles de John Zorn lors de ses trois premiers passages à Marciac, le lundi de Zorn ! Là encore, on palpe, on vibre avec ce travail collectif, que ce soit avec Masada String Trio, puis l’Acoustic Masada. En première partie, nous avons goûté, gourmands, à la prestation d’Uri Caine, pianiste virtuose en solo, tout pétri de formation classique, et qui est venu marteler son piano à coups de poing, tantôt avec le tranchant de sa main gauche, tantôt avec le plat de la paume, pour finir par caresser amoureusement le clavier ! Merveille, il a rejoint la formation de John Zorn avec le somptueux Cyro Baptista, brésilien inventif comme pas deux aux percussions. En deuxième partie, Le Masada String, avec le fidèle Greg Cohen à la contrebasse, Mark Feldman au violon et un Erik Friedlander qui va arracher à son violoncelle des accents de guitare flamenco ! Pour cette partie, nous avons eu droit comme l’an dernier à la direction toute chorégraphique de Zorn, assis par terre, en tailleur, tout proche de ces trois acolytes quasiment collés autour de lui. Il faut voir en effet le Zorn, malicieux et joyeux, avec ses mouvements de doigts, ses relances, ses accompagnements des mains de la bouche ! il vit sa musique dans un bonheur qu’il sait faire partager, pour finir avec un mouvement incessant des doigts en bec de canard !!! prodigieux! Enfin le Masada Acoustic, avec Dave Douglas à la trompette, toujours parfait, Joey Baron à la batterie, et Greg Cohen. Une vraie jubilation, avec cette fois–ci beaucoup plus de mouvements mélodieux, groovy, orientalisant, mais aussi des envolées free inouïes. Le public ne s’y est pas trompé. Cette musique parle tout autant aux jeunes qui ont grimpés sur les chaises, rejoints par les sexagénaires enthousiastes. Et comme les années précédentes, la générosité de John Zorn ne s’est pas démentie : pas moins de cinq rappels pour finir aux environs de deux heures du mat’ !
Enfin, autre soirée enthousiasmante, vendredi, avec la formation de Stéfano Di Battista, quartet associant un trompettiste génial, Fabrizio Bosso, un Baptiste Trotignon à l’orgue, et un Greg Hutchinson impeccable à la batterie. Et last but not least, le septet de Winton Marsalis, qui pour sa septième venue au complet à Marciac a assuré merveilleusement bien dans le jazz au classique swing mais qui fait toujours bonheur à entendre. Wicliff Gordon, géant au trombone et dans son costard des années 40 !, Wessell Anderson au saxo alto, Victor Goines au tenor, Reginald Veal à la contrebasse, Marcus Roberts au piano, et surtout parfait avec ses vocalises, Herlin Riley à la batterie.
À n’en pas douter, une bon cru, le 2008 de Marciac.
Saül Matifou.

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