De ces grands et chaleureux rassemblements dans toute la France, l'exécutif, ne semble pour l'instant n'avoir retenu qu'une seule revendication : nous voulons plus de sécurité. Déjà, un grand débat s'installe dans la classe politique et dans la presse, sur l'opportunité de mettre en place un Patriot-act à la française. Une semaine après l'horreur, le premier ministre va jeter en pâture à une population impatiente, les premières mesures sensées nous rassurer, sans se demander si l'arsenal sécuritaire existant n'est pas suffisant avec les lois nouvellement votées et une utilisation plus rationnelle des moyens actuels. A nos frontières on procédera peut-être au renforcement des contrôles des humains mais les devises transiteront sans entrave (et sans taxe, Hollande nous en préserve!). Ces dramatiques événements viennent d'ailleurs à point nommé pour reléguer au second plan d'autres problèmes essentiels : après la sublime ferveur, l'austérité continue, le chômage va progresser, la réclusion de populations dans des banlieues qu'on aimerait oublier ne sera pas enrayée faute de moyens financiers que l'on préfère consacrer à la « relance par l'offre », et dans l'éducation les profs seront encore démunis devant des situations de clivage religieux ou ethniques qu'ils n'arrivent plus à contrôler. L'une des solutions ne serait-elle pas déjà à trouver dans une possible redistribution des richesses ? Dans la classe politique ce questionnement n'aura pas lieu, satisfaction des marchés oblige, l'émotion n'atteint pas la grande finance, pompe à fric hyper-rationnelle mais par essence dénuée de cerveau compassionnel. La Grèce affamées soumise à un indécent chantage, qui espérait notre soutien en sera sans doute en partie privée par nos préoccupations sécuritaires. A l'occasion des élections en Grèce, il sera par ailleurs intéressant de comparer les niveaux de mobilisation, indicateur précieux des réels soucis de nos concitoyens. Mais il ne faut pas s'y tromper, les choix économiques faits par notre Président rendront illusoires toutes les promesses qui ne seront pas strictement dans un champ technique purement sécuritaire.
Les réactions à ces dramatiques événements ne procèdent que d'une vision purement occidentale. J'aurais apprécié que notre regard collectif s'élève au delà de nos frontières non pas pour se cantonner au registre des condamnations mais parce que les solutions à trouver, ne se limitant pas au seul périmètre européen, sont d'ordre planétaire. Cette bunkerisation de l'occident n'est pas de bonne augure. Je ne peux m'empêcher de comparer avec ces lotissement de richissimes américains entourés de hauts murs, protégés par des vigiles armés, qui vivraient en parfaite autarcie s'il ne fallait se procurer hors de leurs « frontières », dans des territoires moins favorisés, les nourritures indispensables à leur survie. Dans d'autres contrées du monde, éloignées de nos regards et de nos préoccupations quotidiennes, des massacres récurrents ne provoquent qu'une pitié éphémère, le syndrome « 11 septembre » est strictement réservé au monde occidental. Cette myope auto-compassion sera fort mal perçue par tous ceux qui, dans le monde souffrent de misère endémique ou de soumission à des puissances religieuses ou politiques et qui souhaiteraient peut-être que le souffle des Lumières qui semble lentement se réduire chez nous à une petite bise, les atteigne avant de s'évanouir, asphyxiée par une finance égoïste que nous sommes bien en peine de contenir. Pour éviter la grande fracture ne serait-il pas temps d'imaginer une redistribution des richesses à l'échelle planétaire ? Cette belle utopie, a-t-elle une chance de devenir un jour réalité ?