... avec l'espoir enfin d'y trouver cet esprit de reconquête d'une démocratie généreuse actuellement sapée par un autoritarisme politique et financier sans précédent, aspiration d'une jeunesse qui semble avoir déserté ces colonnes.
Résonances toutes personnelles qui ne trouveront probablement aucun écho dans les instances de Mediapart, texte inutile sans doute, mais qu'importe, la gratuité ne coûte rien !
Mediapart est un journal qui a grandi trop vite, grisé par ses succès de jeunesse quand la qualité des enquêtes doublée du choix original du participatif avait attiré de nombreux lecteurs de tous ages et de toutes conditions qui trouvaient enfin dans cette publication un espace d'expression libre et peu censurée.
Mais au fil du temps et de l'accroissement du nombre de ses abonnés, il n'a pas su se distinguer des autres publications papier hebdomadaires, n'attirant plus en majorité qu'un lectorat de classe, retraités, cadres supérieurs et professions libérales. Nombre d'entre eux, tout en se disant de gauche accepte comme une heureuse fatalité ce libéralisme financier qui leur garantit la pérennité d'une situation sociale privilégiée. Mediapart a vieilli, ridé sous les traits d'une caste qui a ignoré les aspirations d'une population de plus en plus défavorisée et d'une jeunesse déboussolée.
Car les investigations, les analyses et les critiques ne suffisent plus. Dans un monde en mutation vers d'inquiétants horizons de dérives droitières, de xénophobie généralisée, de ségrégation anti-pauvre, de privatisations tous azimuts et de casse sociale, le citoyen moyen, apte par lui même à constater la dégradation de ses propres conditions de vie, et la déshumanisation de la société, est en quête de propositions concrètes, d'idées constructives, de mouvements structurés susceptible de proposer un horizon moins désespérant. Il devient dérisoire de dire que tout val mal si on n'avance pas l'ombre d'un remède, on aimerait voir souffler dans ces pages un petit zéphir de révolte.
Mediapart n'a pas compris cela. Il est devenu un journal triste et déprimant et on peut comprendre que s'en détourne une jeunesse en quête d'idéal ou même d'une simple aspiration à une vie sans galère. Pour sortir de cette ornière, faudra-t-il prendre parti ? Mediapart devra-t-il devenir un journal plus engagé ? Question difficile que la nouvelle rédaction devra pourtant trancher, sauf à perdurer dans une perpétuelle condamnation sans doute indispensable mais aussi très improductive et donc assez rebutante. Il n'est pas question ici de se faire le soutien affiché d'un parti politique ou d'un mouvement, mais peut-être de faire une place plus large aux personnes et associations, et elles sont de plus en plus nombreuses, qui sont concrètement engagées sur les terrains de lutte contre cette politique inique qui détruit consciencieusement tous les acquis sociaux d'après guerre.
Même s'il s'en défend, Mediapart a raté sa campagne présidentielle. Son hostilité à l'égard de la FI était un peu trop visible, son positionnement pro-Hamon aurait pu être assumé sans hypocrisie, sa révérence au futur président a été franchement une erreur. Son lectorat a souffert de tout cela. Mais il faut tourner la page, le débat qui a récemment rugi sur le fil de l'article d'Antoine Perraud La République censitaire du chef Emmanuel Macron est devenu dérisoire et obsolète. La ligne éditoriale actuelle, légitimement critique de la politique d'un président-monarque tout puissant ne pourra être éternellement vilipendée par certains sous le prétexte qu'elle a été mal anticipée. Même si le mea-culpa journalistique relève du miracle nous devons admettre qu'en bons professionnels, les journalistes de MDP semblent avoir pris conscience des insuccès de l'année écoulée. Mais c'est un pari !
Reste à savoir maintenant si la nouvelle direction éditoriale qui devra prioritairement définir ses objectifs, saura prendre en compte ces nouveaux impératifs. Sur la seule contrainte d'objectivité, je reste dubitatif. Il en existe tant chez les journalistes, de ces réflexes quasi pavloviens qui font la part moche aux formations, partis et chefs de file qui ont été tellement dénigrés par les mêmes ces dernières années, que leur sera un arrache-coeur de leur reconnaître quelque vertu. Pardonnez-moi si cela ressemble trop à un procès d'intention ... nous verrons bien.
Il est un autre sujet d'inquiétude pour les quelques centaines de blogueurs mais sans doute aussi pour une part importante de lecteurs qui en apprécie la diversité : il semble à nombre d'entre nous que le club soit voué, non à disparaître totalement, mais à ne devenir qu'une caution minimaliste à l'engagement participatif de ce journal. Dans sa présentation de la nouvelle tête rédactionnelle de Mediapart et des obligations qui s'imposeront à ce journal, François Bonnet n'a pas dit un mot sur l'avenir d'un club qui périclite. La nouvelle mouture de 2015 a été un exemple frappant de décadence du progrès. A-t-elle été intentionnelle ? Les problèmes qui se multiplient depuis ne sont pas résolus, le dialogue avec de fantomatiques responsables est inexistant et les participants qui avaient tenté d'aider à leur résolution se sont résignés à la détérioration progressive de cet espace de dialogue. Dans le but d'afficher une image d'objectivité et de sérieux, Mediapart est devenu un journal austère qui a manifestement décidé de sacrifier le club sur l'autel de la respectabilité. La culture, la fantaisie et l'humour cultivés par quelques blogueurs ne doivent surtout pas émerger des bas-fonds du club. Seuls les journalistes et quelques blogueurs accrédités peuvent figurer en Une. Mediapart se prive ainsi de nombreux auteurs de talent, même hors norme éditoriale, qui apporteraient un souffle de vie et de diversité à un journal un peu trop rigide.
Mediapart, financé par l'immense majorité des lecteurs qui n'ont jamais écrit une ligne dans l'espace du club, est bien sûr tenté d'ignorer ceux qui s'y sont investis par simple désir de communiquer ou par ce besoin irrépressible de s'exprimer dans un pays où la démocratie confisquée confine de plus en plus à ne devenir qu'un dépose-bulletin conditionné par la propagande de la sphère financière et politicienne. Ce serait une fatale erreur de céder à ce penchant, un signe de mépris pour l'idée même de démocratie participative. MDP, s'il veut vraiment rester un média à part doit impérativement améliorer puis préserver la qualité de son participatif.
Attendre et espérer.