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Billet de blog 15 mars 2011

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Médias et classes populaires : sortir des préjugés

Une enquête sociologique de réception des médias mettant en cause certains préjugés élitistes et misérabilistes traînant dans les milieux critiques : Médias et classes populaires par Vincent Goulet...

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Une enquête sociologique de réception des médias mettant en cause certains préjugés élitistes et misérabilistes traînant dans les milieux critiques : Médias et classes populaires par Vincent Goulet...

Médias et classes populaires. Les usages ordinaires des informations

Par Vincent Goulet

Paris, INA Éditions, 2010, 340 pages, 20 euros

Enseignant-chercheur à l'Université de Nancy 2, Vincent Goulet bouscule opportunément certaines visions manichéennes des médias en vogue dans les milieux critiques comme dans les couches moyennes du salariat : une vision misérabiliste et méprisante de publics populaires supposés complètement « aliénés » et « abrutis » par « la propagande dominante ». Pour Goulet, s'adossant largement à la sociologie critique de Pierre Bourdieu, on ne peut se contenter d'envisager le contenu des messages médiatiques sans prendre en compte la variété des filtres du côté de leurs récepteurs, dotés d'expériences sociales spécifiques (de classe, de genre, etc.).

Pour ce faire, il se nourrit principalement d'une enquête menée entre 2005 et 2008 dans un quartier HLM de la banlieue bordelaise dans lequel il a vécu. Une originalité de cette démarche parmi les études de réception, qui ont beaucoup exploré les séries télévisées, consiste à prendre pour objet les informations et leurs usages populaires dans la vie quotidienne. Ce qui le conduit à mettre en cause, preuves empiriques à l'appui, « le présupposé selon lequel les médias ont une plus grande influence sur les personnes les moins pourvues culturellement ». Loin de nier l'existence de rapports de classe sur le plan culturel, il rompt toutefois avec les caricatures élitistes des milieux populaires, en notant les ambivalences des réalités observables pratiquement : tout à la fois « un sentiment de dépossession culturelle » et « une certaine dose d'inventivité, de fantaisie ».

Ses observations débouchent sur des pistes quant à de possibles médias « populaires et engagés » : « prendre plus au sérieux les faits divers, le sport,, les potins pour ce qu'ils recèlent d'une forme de conscience politique pour les articuler de façon plus souple avec les discours programmatiques et le jeu politique ». Stimulant !

* Paru dans Tout est à nous ! (hebdomadaire du NPA), n°91, 24 février 2011

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