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Professeur de science politique, engagé dans la renaissance d'une gauche d'émancipation, libertaire, cosmopolitique et mélancolique

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Billet de blog 19 avril 2008

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Le sarkozysme, la xénophobie subliminale et les excréments de René Char (après un débat avec Xavier Bertrand le 14 avril 2008)

 J'ai participé, présenté comme "sociologue" et "membre du Conseil Scientifique d'ATTAC", au débat Le Monde/Sofres/Théâtre du Rond-Point du lundi 14 avril 2008 à Paris sur le thème : "Réformer la France, mission impossible ?", avec Jacques Attali (président de la Commission pour la libération de la croissance), Xavier Bertrand (ministre du travail, UMP) et François Hollande (premier secrétaire du PS).

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 J'ai participé, présenté comme "sociologue" et "membre du Conseil Scientifique d'ATTAC", au débat Le Monde/Sofres/Théâtre du Rond-Point du lundi 14 avril 2008 à Paris sur le thème : "Réformer la France, mission impossible ?", avec Jacques Attali (président de la Commission pour la libération de la croissance), Xavier Bertrand (ministre du travail, UMP) et François Hollande (premier secrétaire du PS).

Le Monde en a publié sur deux pages des extraits, reflétant assez bien la teneur générale des échanges, dans son édition datée du samedi 19 avril 2008. Dans ces traces nécessairement partielles n'apparaît pas une partie de la discussion plus adjacente par rapport à son thème principal ("la réforme").

A un moment, Xavier Bertrand s'est félicité du fait que "la majorité présidentielle" aurait réduit fortement "le vote extrémiste". J'ai réagi en indiquant que la dite "majorité présidentielle" avait plutôt recouru à un usage soft de l'ethnicisation du débat public, hérité du travail politique antérieur du Front national, pendant la campagne présidentielle comme après (batailles symboliques autour du lien "identité nationale"/"immigration" et du test ADN pour les étrangers, marketing du "chiffre" dans la chasse aux sans-papiers, etc.). C'est ce que j'appelle une "xénophobie subliminale" (voir mon article "Sur le "sarkozysme", le PS, la possibilité d'une gauche radicale et le tragi-comique - Contribution au débat post-présidentiel", 18 juin 2007).

J'en ai donné un indice en citant un extrait du livre de Yasmina Reza, L'aube le soir la nuit (Flammarion, 2007), récit littéraire de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Il s’agit d’une intervention du futur président de la République devant des partisans quelques temps avant le 1er tour :"Si on n’avait pas l’Identité nationale, on serait derrière Ségolène. (…) Si je suis à 30%, c’est qu’on a les électeurs Le Pen. Si les électeurs Le Pen me quittent, on plonge." (p.130)Pour qualifier ce type d'attitude, il m'a semblé qu'une phrase de René Char dans ses Feuillets d’Hypnos (1943-1944) était particulièrement adaptée :"Il existe une sorte d’homme toujours en avance sur ses excréments."En précisant que je ne pensais pas qu'on pouvait qualifier Nicolas Sarkozy de "raciste", mais qu'on pouvait observer chez lui un usage électoraliste d'affects racistes.Xavier Bertrand s'en est rapidement offusqué, sans argumenter, mais est rapidement revenu à son côté lisse, de balle en caoutchouc "gentille" (bien croquée par Les Guignols), déjouant les prises critiques...Dans un mouvement général de convergences entre la droite et la gauche officielles autour de thèmes néolibéraux et d'une technocratisation de la pensée, cette question de l'utilisation politicienne de connotations xénophobes demeure une différence entre ces deux "camps" de plus en plus rapprochés, nous incitant encore à voter pour la gauche sociale-libérale aux deuxièmes tours des différentes échéances électorales.

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