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Billet de blog 5 mars 2023

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Le 7 mars, Macron I.L.H.H.O.Q

Le 7 mars, par-delà la réforme des retraites, il s’agit de faire passer un peu d’effroi dans la tête de ceux qui achètent nos vies et notre art en les mutilant de leur sève.

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C’est simple et évident comme un point sur un i - aussi directe qu’une œuvre de Jean-Pierre Raynaud ! Il fut un temps où le monde de l’art s’engageait au côté du peuple et des travailleurs; de Delacroix à Hugo, de Courbet à Picasso, en passant par la quasi totalité des avant-gardes, jusqu’au cinéma d’un Doillon rêvant de l’An 01 dans les braises de la révolte de mai.

Illustration 1
Affiche de L'An 01 de Jacques Doillon, 1973
Illustration 2
Dans l’Atelier populaire en 1968. (Photo Philippe Vermes. Coll. Ecole Nationale des Beaux-arts de Paris)

Aujourd’hui le dispositif de l’art dit « contemporain » contraint les artistes à une forme de soumission apolitique pour mieux conformer leurs projets aux sujets hautement recommandés dans les circuits des expositions en vogue, avec leurs sélections dignes d’un Procès de Kafka, leurs juges et leurs commissariats au jargon boursouflé, et leurs sempiternelles thématiques liées à l’identité, aux problèmes climatiques, et la guerre en Ukraine, etc. - sans voir que ces questions restent inséparables des injustices sociales et des modes d’exploitation qui traversent plus violemment que jamais le monde capitaliste.

Illustration 3
Affiche de Mai 68 Ateliers des Beaux-Arts

On peut toujours rêver d’un artiste qui exposerait chez Perrotin, Vallois ou même dans l’antre de ces nouveaux temples privés que sont les dites fondations Cartier, Pinault Vuitton & Cie, une œuvre témoignant d’une grève ouvrière dans la France de 2023, un combat syndical ( à l’instar d’un Godard détestant le populisme et œuvrant pourtant au plus près des travailleurs ) ou des luttes actuelles pour la défense des retraites.

Illustration 4
Tout va bien (1972) de Jean-Luc Godard et Jean-Pierre Gorin

Cela susciterait, sans doute, bien plus d’inconvenance que les cris d'orfraie provoqués naguère par un Plug anal Place Vendôme, un coup de tête de Zidane fut-il érigé en stèle ou les subtilités d’une simple banane façon Cattelan si prodigue en gloses à Art Basel !

Illustration 5
The Comedian de Maurizio Cattelan, sur le stand de la galerie Perrotin à Art Basel Miami en 2019 ©Jessica Klingelfuss

On peut toujours espérer que les artistes retrouvent un lien vivant avec les colères et les luttes populaires en cours, et renoncent un temps à se conformer aux injonctions de productivité, en sacrifiant leur art sur l’autel du nouvel académisme contemporain aux normes entrepreneuriales.

Le 7 mars, bien au-delà de la réforme des retraites, il s’agit, sans doute, de faire passer avec jubilation, un peu d’effroi et une parcelle de doute dans la tête de ceux qui achètent si facilement nos vies et notre art en les mutilant de leur sève.

https://youtu.be/nCYufIhn2JE

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