Philippe PLANE

Abonné·e de Mediapart

10 Billets

0 Édition

Billet de blog 7 avril 2020

Philippe PLANE

Abonné·e de Mediapart

Coronavirus et transition

Devant le danger, le monde est prêt à arrêter ce qui paraissait intangible la veille : l’économie de marché, la croissance inconditionnelle, la consommation sans limite, le pouvoir des monopoles, pour y substituer d'autres valeurs : la solidarité, la bienveillance, l'attention aux plus démunis. Cela prouve qu'un autre monde est non seulement possible, mais plus que jamais nécessaire.

Philippe PLANE

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le coronavirus nous oblige à changer, il rend impossible la poursuite des erreurs d’avant. Notre liberté est aujourd’hui de penser la transition, à ne pas répéter les erreurs qui nous ont conduit à la catastrophe, à choisir un autre chemin.

La crise actuelle est si considérable qu'elle permet et permettra de définir un "avant" et un "après". Le monde d'après ne pourra pas être le même que celui d'avant. Je voudrais d'abord revenir sur les notions de "transition" et de "catastrophe", deux paradigmes du changement global.

Une catastrophe est un événement subi (tsunami, tremblement de terre, éruption volcanique etc.). La transition, telle qu'elle est souvent imaginée, est un changement pensé, voulu, voire coordonné, par une société humaine. On a ainsi beaucoup parlé, à propos des dernières élections, de "villes en transition", pour exprimer notre souhait d'organiser une transition écologique et sociale vers un développement durable.

La réalité est entre les deux, ou participe aux deux phénomènes.

Tout d'abord, tant dans le domaine physique que biologique, et même socio-historiques, les changements ne sont pas progressifs : ils se produisent sur un mode brutal, critique (sur un mode de crise comme les changements d'ère géologique, les mutations, les révolutions...), mais ces crises sont lentement préparées par des phénomènes inapparents, souterrains. Dans le cas de la crise actuelle (la pandémie), on peut avancer : la mondialisation et l'augmentation des échanges internationaux, la densification de l'habitat (méga-urbanisation), et la destruction des écosystèmes (on peut ainsi montrer que l'infection humaine au coronavirus est liée à la déforestation).

Tous ces phénomènes sont "souterrains" bien qu'ils soient connus de tous, au sens où leurs conséquences ne sautent pas aux yeux. Ils aboutissent à des événements catastrophiques (Fukushima), éventuellement critiques (guerres...). Il s'agit pourtant d'actions humaines : ce sont les hommes qui voyagent et transportent des marchandises d'un bout à l'autre du monde, construisent les villes et affament les populations rurales, rasent les forêts primaires pour planter des palmiers à huile, construisent des centrales nucléaires, etc. C'est chacun d'entre nous qui devient dépendant des commodités urbaines, consomme des produits de l'agro-industrie, consomme de l’énergie... (ce n'est pas là un reproche !)

Par toutes ces actions, les individus et les sociétés humaines se transforment, de telle manière que le retour en arrière n'est plus possible. L'homme, comme disait Sartre, est "le produit de son produit". Nous ne pouvons plus (re)devenir les chasseurs cueilleurs que nous avons été, dont les sociétés étaient caractérisées pas la stabilité et la durabilité (des centaines de milliers d'années).

Les transformations des société humaines, depuis nos origines, n'a pas été pensée, planifiée, voulue, bien que nous en soyons les auteurs. Les tentatives d'infléchir volontairement le cours de l'histoire apparaissent aujourd'hui comme appartenant à l'histoire elle-même : ce sont les guerres, les dictatures, les idéologies aux conséquences elles aussi catastrophiques.

La crise actuelle est une condition d'un changement des sociétés humaines et donc aussi des comportements. Pouvons-nous penser ces changements ? Sommes-nous condamnés à les subir ? Pouvons-nous modifier nos comportements ? Ce serait un nouveau chapitre de notre réflexion commune.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.