Il se vit aujourd’hui un moment inédit au Liban. Le pays tout entier dénonce la corruption des élites politiques dans un joyeuse unanimité. À Beyrouth les jeunes campent sur la place des martyrs depuis deux semaines. Tous les soirs une mer de drapeaux libanais danse sur les chants de Fairouz.
Il est cependant tout un peuple ignoré de ce mouvement Dans les camps palestiniens de Chatila et Borj El Barajneh, on en est réduit à espérer. Plutôt que de camps, il serait plus juste de parler de ghettos. À Chatila survivent 25000 personnes entassées sur 1km2. Faute d’espace, les étages s’empilent les uns sur les autres. Le jour filtre à peine dans le dédale des ruelles encombrées d’ordures, où il faut se baisser pour éviter de toucher le fouillis de fils électriques. Ceux là sont privés de tout, mais avant tout de droits. Il faut savoir que le Liban ne reconnaît pas le statut de réfugié et n’a pas signé la convention de Genève sur ce sujet. De multiples emplois, comme les professions libérales leur sont interdits et ils doivent se cantonner aux travaux du bâtiment ou de saisonniers dans l’agriculture. Il en est de même du droit d’entreprendre. Nombreux sont les jeunes qui, bien que diplômés, ne trouvent pas d’emploi. En cas de maladie, la couverture médicale n’existe que pour les soins primaires. Pour le reste, seules les ONG leurs viennent en aide. Depuis le retrait américain, L’UNWRA, leur fil de survie, est menacée de faillite.
Ce peuple pourtant fait preuve d’une extraordinaire volonté de vivre. Les femmes s’activent sans compter pour éduquer les enfants à la liberté, à l’affirmation de soi, à la culture de leur peuple. Les jeunes s’engagent bénévolement pour remettre en état les réseaux d’eau et d’électricité, pour protéger les sources, ou prévenir la toxicomanie qui menace. Les camps s’organisent pour faire de la prévention en santé, du soutien psychologique et juridique, des micro-crédits, des formations de toutes sortes, en utilisant des méthodes pédagogiques novatrices. Ils ont accueilli, depuis 2011, les réfugiés palestiniens fuyant la Syrie en guerre. ls ont besoin de notre solidarité.