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Billet de blog 29 octobre 2010

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Marseille: la leçon de choses de Michael O'Leary

C'est entendu, les méthodes de Michael O'Leary sont aussi brutales que son langage peut être ordurier. Mais pour signifier aux autorités et à l'opinion publique françaises la décision de fermer la base de sa compagnie «low cost» à Marseille, le volcanique patron de Ryanair ne s'est pas contenté d'un communiqué publié à l'abri des murs d'un lointain siège social. Il est venu sur place.

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C'est entendu, les méthodes de Michael O'Leary sont aussi brutales que son langage peut être ordurier. Mais pour signifier aux autorités et à l'opinion publique françaises la décision de fermer la base de sa compagnie «low cost» à Marseille, le volcanique patron de Ryanair ne s'est pas contenté d'un communiqué publié à l'abri des murs d'un lointain siège social. Il est venu sur place. Au moment où les installations portuaires de la cité phocéenne sont paralysées depuis des semaines par un de ces conflits corporatistes dont la France a le secret, la démarche provocatrice de l'Irlandais a une valeur pédagogique, même si tout sera fait pour en occulter le message.

Si O'Leary décide de rayer d'un trait de plume quelque 200 emplois directs, et plusieurs centaines indirects, de fermer plus de la moitié des liaisons vers ou depuis Marseille, de priver son aéroport de dizaines de milliers de passagers chaque mois, c'est que la justice française a décidé de le poursuivre pour «travail dissimulé». Il lui est reproché en effet d'employer sous contrats de travail irlandais des personnels basés en France.
Le problème est que cette pratique est, dans ce secteur, parfaitement légale au regard du droit européen, et devrait donc l'être en France, qui a transcrit dans la législation française la directive concernée. Comme elle l'a fait d'ailleurs pour la fameuse «Bolkestein», qui eut son heure de gloire en 2005 en marge du débat sur le référendum qui devait conduire au rejet, par la majorité des votants, du projet de Traité constitutionnel européen. Simplement, conformément à l'habitude détestable qui veut que les gouvernements français prennent à Bruxelles des engagements qu'ils s'efforcent ensuite de violer sous la pression des lobbys et groupes d'intérêts nationaux, l'administration a pondu un décret d'application qui aurait pour résultat de placer Ryanair en situation d'infraction au droit du travail hexagonal.
La querelle juridique ne manquera pas d'être tranchée un jour lointain, d'ici trois à cinq ans, par la Cour de justice européenne de Luxembourg, et il y a fort à parier que la France devra rentrer dans le rang. Si les inspirateurs de la plainte contre Ryanair s'imaginaient que Michael O'Leary allait attendre patiemment d'être condamné entre temps par les tribunaux français, c'était bien mal connaître le personnage. Celui qui a supprimé les sièges inclinables (réparations trop coûteuses), encourage les passagers à prendre leur bagage en cabine (rotation des avions plus rapide) en attendant de les faire voyager debout, utilise des aéroports low cost"européenne, a annoncé qu'il prendrait sa retraite, fortune largement faite, dans deux ou trois ans, le temps pour le gouvernement irlandais de le supplier "à genoux" de sauver la compagnie nationale à la dérive Air Lingus.Vu la situation abyssale des finances publiques irlandaises, il risque de gagner son dernier pari.