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Billet de blog 1 juin 2024

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À Moussey, face-à-face entre mémoire et oubli

Dans le cimetière de Moussey (Vosges), en haut le monument funéraire d’une famille d’industriels, dont un notable collaborationniste, en bas les modestes tombes des militaires britanniques parachutés pour appuyer les maquis. Depuis les usines ont fermé, et l’extrême-droite domine électoralement.

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Moussey, petite commune de l’est vosgien, traversée par le Rabodeau. Derrière l’église, son cimetière. En haut, séparé des tombes ordinaires par quelques marches et une mince terrasse, le monument en grès des Vosges de la famille Laederich, dynastie industrielle alsacienne installée dans les Vosges suite à l’annexion de l’Alsace-Lorraine en 1871.

Illustration 1
En haut du cimetière, le monument de la famille Laederich © Philippe Wannesson

Parmi elle, Georges Laederich (1898 – 1969). Pendant la seconde guerre mondiale, dans la suite de son engagement d’avant-guerre, il adhère au régime pétainiste, devient membre du Conseil national (assemblée consultative), s’implique dans les cercles patronaux liés au régime, finance la presse collaborationniste. En 1946, il est condamné à deux ans de prison pour son engagement dans la collaboration.

Illustration 2
Sur le monument, la plaque de Georges Laederich © Philippe Wannesson

En bas du cimetière, une ligne de tombes de soldats britanniques.

Illustration 3
En bas, les tombes des soldats britanniques © Philippe Wannesson

Au bout de la vallée, à l’est, la ligne de crête fait la frontière avec l’Alsace annexée. Sur le versant alsacien, dans la vallée de la Bruche, des habitant.es se font passeurs et passeuses, accueillent des personnes qui fuient l’Allemagne nazie, familles juives, déserteurs, prisonniers évadés, et les aident à franchir la frontière. Dans la vallée du Rabodeau, on les cache, les mairies fabriquent de faux papiers d’identité, des cartes de rationnement, on aide les gens à fuir plus loin.

En 1944, suite au débarquement, les alliés appellent à la constitution de maquis pour les aider à passer les cols des Vosges. Des armes son parachutées, ainsi qu’un détachement du Special Air Service.

Mais les allés doivent arrêter leur offensive pour reconstituer leurs chaînes logistiques, ce qui laisse le temps à l’armée allemande d’écraser les maquis et de déporter un millier de personnes parmi la population. Parmi elles, presque sept cents sont mortes fusillées ou dans les camps. Et trente-neuf militaires du SAS ont été exécutés. Ce sont les tombes de certains d’entre qui sont en bas du cimetière de Moussey.

Illustration 4
Parmi eux, un mort inconnu © Philippe Wannesson

Les familles d’industriels du textile se sont épanouies et succédées dans la vallée du Rabodeau, De Sellière, Laederich, Boussac. Puis ont investi ailleurs, et les usines ont fermé. Au second tour de la présidentielle de 2022, la candidate d’extrême-droite a fait dans la vallée du Rabodeau 62 % à Moussey, 69 % à La Petite Raon, 65 % à Senones, 67 % à Moyenmoutier…

Pour ce qui a trait à la Seconde Guerre mondiale, on peut se reporter au site Résistance et Déportation dans la vallée du Rabodeau :

http://www.resistance-deportation.org/

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